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artificielle s’invite dans vaudoises, lentement

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CHIFFRES

CHIFFRES

Il n’est plus une journée sans que la question de l’intelligence artificielle (IA) et des entreprises ne soit abordée dans les médias ou dans les entreprises elles-mêmes. Il est frappant que l’IA occupe à ce point le devant de la scène, alors même qu’elle existe depuis des décennies.

Texte Frédéric Bonjour // Photos Shutterstock

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Depuis les années 2000, l’IA connaît un réel essor grâce à l’augmentation de la puissance de calcul des ordinateurs, à la disponibilité de grandes quantités de données (big data) et aux progrès des techniques d’apprentissage automatique, notamment l’apprentissage profond (deep learning). A certaines occasions, l’IA a frappé l’imagination du grand public. Par exemple, en 2011, le programme Watson d’IBM a battu les meilleurs joueurs du jeu télévisé Jeopardy. En 2016, le programme AlphaGo de Google DeepMind a vaincu le champion du monde de go, un jeu de stratégie considéré comme plus complexe que les échecs. En 2022, on assiste à une véritable révolution consistant à mettre l’IA à la portée de tous au travers du programme GPT-3 d’OpenAI (arbre masquant en fait une forêt gigantesque d’autres applications), qui a impressionné par sa capacité à générer du texte cohérent et pertinent à partir d’une simple requête. Il compterait, en avril 2023, jusqu’à deux cent millions d’utilisateurs, moins de six mois après son lancement.

Alors que, selon une étude récente du cabinet McKinsey, l’IA pourrait contribuer à hauteur de 13’000 milliards de dollars au produit intérieur brut mondial d’ici 2030, qu’en est-il réellement dans la vie quotidienne des entreprises de notre canton?

La Fédération patronale vaudoise a réalisé une enquête auprès d’un échantillon de ses membres, avec comme premier constat que seules deux cents entreprises ont répondu, soit moins de la moitié du nombre de réponses habituelles. Cela traduit un premier fait: l’IA n’est pas encore un sujet qui concerne une majorité des entreprises. Cela s’explique aussi parce que, parmi les entreprises qui ont répondu, près de 70% emploient jusqu’à cinq collaborateurs. Comme on pouvait s’y attendre, la réalité des chiffres n’annonce pas encore l’Eldorado que nous font espérer les grandes études mondiales. Tout cela est bien normal si on considère que les entreprises vivent dans la réalité de leur marché et que ce dernier n’est souvent pas encore totalement digitalisé.

Réglementer (intelligement) plutôt qu’interdire

L’IA et les systèmes tels que chatGPT posent bien évidement des questions juridiques et éthiques qui interpellent nos sociétés. Avec le blocage de chatGPT décidé en mars 2023 par l’Italie et les propos alarmistes de certains politiciens, y compris en Suisse, on doit très certainement convenir qu’un cadre législatif est nécessaire; il est en tous les cas préférable à l’interdiction pure et simple de telles technologies. En Europe, la Commission européenne a présenté une proposition de règlement sur l’intelligence artificielle, qui vise à établir un cadre juridique uniforme pour l’IA dans l’UE. Elle appelle à promouvoir une IA sûre et respectueuse des droits fondamentaux.

En Suisse, le 13 avril 2022, le Conseil fédéral a pris connaissance du rapport intitulé Intelligence artificielle et réglementation internationale. Ce rapport décrit plusieurs mesures qui permettraient à la Suisse de jouer un rôle actif dans la conception du cadre réglementaire international sur l’intelligence artificielle et ainsi de contribuer à une réglementation appropriée. En matière de législation sur les drones ainsi que sur l’émission de tokens (actions sous forme de jetons numériques), notre pays a su faire preuve de pragmatisme avec un cadre légal salué par les professionnels comme parfaitement adapté et laissant place au développement des activités économiques. Espérons qu’il en ira de même avec l’IA.

DOSSIER

Dans quelle mesure votre entreprise utilise-t-elle l’IA?

Pas du tout Expérimenté mais sans plus De manière limitée

L’IA fait partie de notre quotidien

L’IA est notre modèle d’affaires

On peut se réjouir que plus de 50% des entreprises travaillent déjà avec de l’IA dans tout ou partie des machines ou logiciels qu’elles utilisent. Le sondage indique clairement que ce pourcentage relativement élevé tient essentiellement aux activités de services et de conseils, mais l’artisanat et l’industrie ne sont pas en reste. On constate en revanche que cette utilisation relève davantage de l’opportunité que d’une véritable stratégie pour l’écrasante majorité, même si près de 60% des entreprises se disent suffisamment mûres pour investir à moyen terme dans l’IA

Une

Sur l’échantillon de deux cents sociétés, seules trente-cinq utilisent l’IA de façon significative dans leurs activités. Comme elles sont essentiellement concentrées dans le secteur des services et du conseil, il n’est pas surpre- nant que la grande majorité soit active dans le marketing et les services clients, deux domaines qui se prêtent bien à l’analyse de comportements et à la production de contenu ou à la traduction de textes.

Domaines d’utilisation de l‘IA Vente

Gestion de la qualité Prévisions et planification Service clientèle

Marketing et publicité Logistique et chaîne d’approvisionnement Fabrication et production

Sans surprise non plus, l’enquête révèle que les entreprises qui ont recours de façon importante à l’IA dans leur quotidien en attendent surtout des gains de productivité et une aide à la décision. Ce sont des réflexes très sains si, de surcroît, ils sont orientés vers la satisfaction du client et l’amélioration de la qualité. Dans une période de manque chronique de personnel de tous les niveaux de formation et dans tous les secteurs, il est sans doute normal que les entreprises attendent de l’IA qu’elle les aide à poursuivre leur croissance autrement qu’avec l’augmentation constante des effectifs, dans tous les domaines où cela sera possible.

Bénéfices attendus

Prise de décision plus rapide et plus précise

Amélioration de la satisfaction client

Augmentation de la productivité

Amélioration de la qualité des produits

Réduction des coûts de production

Défis rencontrés lors de la mise en place de l’IA

Sécurité des données

Intégrer l’IA dans les processus existants

Manque de données pour former les modèles d’IA

Trouver les compétences nécessaires

Coût élevé de mise en place de l’IA

Identifier des cas d’utilisation de l’IA

Finalement, si l’IA représente une réelle chance pour développer les activités des entreprises, elle est aussi une source de préoccupations. Non pas tant du point de vue philosophique, cette question relevant aussi bien de convictions personnelles que d’un débat de société, mais sous un angle pratique. La sécurité des données et l’identification des endroits dans lesquels l’introduction de l’IA aurait un sens d’un point de vue économique sont deux interrogations parmi les plus partagées par les entrepreneurs.

En conclusion, notre enquête sur un échantillon d’entreprises vaudoises démontre que notre tissu économique n’est ni en retard ni en avance sur une quelconque planification en matière d’IA, ce qui est naturel lorsque l’on sait à quel point les planifications sont au pire dangereuses et au mieux inefficaces en matière d’économie. Nos entreprises sont conscientes des enjeux et des possibilités et, comme souvent, font preuve d’un réel pragmatisme en la matière.

Katia Pezuela

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