
5 minute read
Commerce
Philippe Roux
«LE SKI EST LE MOTEUR ÉCONOMIQUE DU VALAIS»
A presque 70 ans, Philippe Roux a touché les sommets du ski alpin et côtoyé des célébrités telles que le tennisman Björn Borg ou le roi de Suède, avant de se lancer avec succès dans le rallye. Une vie marquée par la passion et le goût du risque.
Le jour de Noël, une foule de clients tourbillonne sur les trois étages de la boutique de Philippe Roux située sur la place Centrale de Verbier. Tout en haut des escaliers, un petit espace plus calme accueille son bureau ainsi que celui de son fils, où l’on peut s’asseoir pour discuter de la vie de l’un des Verbiérains les plus populaires.
Sur son fauteuil, Philippe Roux s’amuse à raconter quelques moments forts de sa vie: «Un jour, j’ai été appelé par le roi de Suède Charles XVI Gustave, qui souhaitait aller faire de la poudreuse avec moi. Une autre fois, j’ai appris à skier au champion de tennis Björn Borg.» Une vie dédiée au ski, mais pas seulement. lorsque j’avais 3 ans. A cette époque, au début des années 1950, Verbier venait d’inaugurer la télécabine de Médran et le téléski des Ruinettes, se souvient-il. Mon esprit de compétition était tellement fort qu’à 10 ans je participais déjà à mes premières courses.» Le talent de Philippe Roux apparaît dès son plus jeune âge, mais c’est sa ténacité qui fera la différence. «Au début, mon frère semblait plus doué que moi pour le ski, mais grâce à ma force de volonté, j’ai pu m’améliorer et rejoindre à 15 ans l’équipe valaisanne junior.» Pourtant, le rêve de devenir un skieur professionnel est brisé par des nécessités pratiques. «Malgré mon insistance à poursuivre le ski, mon père voulait que je fasse un apprentissage. J’ai donc commencé à 16 ans en tant qu’instal-
«J’ai suggéré à mon père que l’on achète un magasin. Sa réponse était claire: «Mais Philippe, on n’a pas de sous!»
Dans son magasin de la place Centrale de Verbier qu’il a pu acquérir au début des années 1970. LDD

lateur en chauffage et sanitaires. J’ai continué à skier et à m’entraîner avec persévérance, jusqu’au jour où il n’était plus possible de ménager travail et sport. A ce moment-là, mon père décida que mon avenir était dans le ski, ce qui m’a permis de rejoindre l’équipe suisse en Coupe du monde à 19 ans.» Philippe Roux est propulsé au sommet de sa discipline. Il décroche notamment une 4e place aux Jeux Olympiques d’Innsbruck en 1976, devient deux fois champion suisse et obtient sept podiums de Coupe du monde durant sa carrière. «Je gagnais ma vie grâce au sport, mais j’avais également envie de me lancer dans le commerce, racontet-il. Je voulais quelque chose à moi: j’ai donc suggéré à mon père que l’on achète un magasin qui était à remettre
sur la place Centrale. Sa réponse était claire: «Mais Philippe, on n’a pas de sous!» Mon obstination m’a poussé à chercher de l’aide auprès de mes sponsors, grâce auxquels j’ai pu acquérir, à seulement 21 ans, le magasin que je continue de gérer aujourd’hui.»
Un changement radical Laissant son frère s’occuper du magasin, Philippe Roux continue de se consacrer au ski durant plusieurs saisons. Mais à 27 ans, lorsqu’il se trouve au plus haut niveau, il décide d’abandonner la glisse pour son autre passion: les voitures. «Je suis un vrai fanatique des quatre roues. Mon ami Jackie Stewart (trois fois champion du monde de Formule 1) m’avait trouvé une place dans une équipe de Formule Ford (aujourd’hui Formule 4) >>

Il rejoint l’équipe de Suisse en Coupe du monde à l’âge de 19 ans. LDD

Philippe Roux décroche la 4e place de la descente olympique d’Innsbruck en 1976. LDD
en Angleterre. Je suis donc parti de zéro avec ce nouveau défi. J’avais par ailleurs déjà un contrat signé pour passer en Formule 3 l’année suivante.» Malheureusement, un grave accident met un terme à son expérience anglaise. Il passe six semaines bloqué dans un lit d’hôpital en Angleterre et subit d’autres opérations en Suisse. Mais l’envie de faire de la course automobile était trop forte pour l’arrêter. «Mon épouse m’a dit que si je voulais continuer à courir, ma voiture devrait au moins avoir un toit. C’est comme cela qu’est née l’idée de faire du rallye!» Là aussi le démarrage a lieu avec le championnat suisse. «Nous sommes arrivés deuxièmes en 1988 et avons participé plusieurs fois au Rallye automobile de Monte-Carlo, une des étapes de la Coupe du monde, où notre meilleur classement a été la 15e position. En 2021, à 68 ans, j’ai participé pour la neuvième fois au Monte-Carlo, arrivant 46e.»
Retour au commerce Dès les années 1990, son occupation principale redevient le commerce. «Même si je ne faisais pas du rallye au niveau professionnel, cela me prenait beaucoup de temps, dit-il. Durant toutes ces années, j’ai eu la chance de travailler


Victime d’un grave accident en Formule Ford en Angleterre.
LDD

Le rallye, l’autre passion de l’ancien champion de ski. LDD
avec d’excellents collaborateurs, qui ont continué à faire marcher magnifiquement les affaires.» Si on lui demande pourquoi il n’a pas ouvert d’autres magasins, la réponse est nette: «J’aurais pu en ouvrir dix, mais je préfère rester concentré sur une seule boutique et l’améliorer de manière continue. Aujourd’hui nous avons des outils performants pour la préparation des skis, qui nous rendent très compétitifs.» A la retraite depuis quatre ans, Philippe Roux continue de travailler dans son magasin, mais avec des tâches principalement administratives. «Mon fils a repris la gestion de l’activité. Parfois, des clients demandent que ce soit moi qui les conseille, mais je veux laisser la place aux jeunes.» Selon Philippe Roux, la glisse demeure l’un des atouts principaux du canton. «Le ski est le moteur économique du Valais, il soutient par exemple des secteurs comme la viticulture ou la restauration. Nous avons beaucoup de chance, notamment dans les 4 Vallées par rapport aux autres domaines skiables, car nous avons pratiquement toujours de la neige et un magnifique ensoleillement!» De quoi faire marcher de nombreuses activités pendant les années à venir. Antonio Rosati