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Tendance LA LENTE DÉMOCRATISATION DU VIAGER EN SUISSE
Jusqu’ici méconnu et mal perçu, l’outil de vente/achat en viager fait une percée dans le secteur de l’immobilier romand. Le fruit d’une longue croisade menée par la poignée d’acteurs de ce micromarché.

LDD
Sabrina Reynier, fondatrice de Immo-vie-agee
Ils ont osé relever le défi et cela paie enfin. Peu nombreux en Suisse romande, ils ne sont que quatre spécialistes à avoir cru en l’outil méconnu et surtout mal perçu qu’est le viager: Immo-vieagee, Bien en viager, le pionnier Savinter et le dernier en date Salmon immobilier.
Fréquent chez nos voisins, notamment en France, ce mode d’achat et de vente a pourtant déjà fait ses preuves. Basé sur un acte notarié spécifique (viager occupé), il permet au propriétaire vendeur de continuer à habiter dans son logement jusqu’à son décès et à l’acheteur de le récupérer dans la foulée en ayant payé un prix inférieur à celui du marché.
De multiples freins à dépasser Un pari gagnant-gagnant sur le papier. Malheureusement, le risque de voir la personne devenir centenaire, le manque d’information, de partenaires ou encore la difficulté à se financer, freinait jusquelà les plus hésitants. «C’est certain que si l’acheteur n’a pas les fonds, il est plus compliqué de financer un viager qu’un bien classique mais nous sommes justeMalgré tout, à force de travail, le procédé se démocratise peu à peu. Les quatre acteurs du marché l’affirment, la demande est désormais au rendez-vous. Le contexte y est propice, comme l’indique Christophe Andrié de chez Bien en viager: «La population est vieillissante, les retraites diminuent, le prix des biens s’envole, nous sommes en période de crise et les gens ont besoin de ce type de procédé.» Si bien, que l’entreprise genevoise observe une belle évolution depuis cinq ans, +20% de ventes par année. Il faut dire que tout comme ses limites, les avantages du viager sont pléthores. En permettant aux vendeurs de profiter à la fois de leur logement et d’un capital financier de leur vivant, il séduit tout autant les acheteurs qui accèdent plus facilement à la propriété et bénéficient d’atouts fiscaux indéniables. Il faut relever que cette formule du viager peut valoir la peine pour divers types de biens. «Je viens de conclure une vente d’un terrain agricole mais on peut passer du petit appartement à la propriété les pieds dans le lac», précise Sabrina Rey-
ment là pour accompagner», témoigne Christophe Andrié, expert chez Bien en viager. Et en effet, «bien que les banques s’engagent davantage aujourd’hui», selon la fondatrice de Immo-vie-agee, Sabrina Reynier, nombreuses sont celles à refuser le financement car «elles veulent une garantie prioritaire. Or, dans le viager, le droit d’habitation du vendeur prévaut tant qu’il est vivant. En cas de défaut de paiement de l’acheteur, cela complexifie les choses», poursuit-elle.
De la demande mais pas d’offre A cela s’ajoutent les questions d’héritage, souvent taboues en Suisse. «Si les héritiers ne veulent pas entrer en matière car ils pensent être lésés, le droit d’habitation étant valorisé à un certain montant, cela peut provoquer parfois quelques conflits familiaux. C’est un sujet sensible et généraliser le viager passera également par le consentement éclairé de toutes les parties», souligne Dominic Salmon, fondateur de Salmon immobilier, qui se confronte à ce type d’opposition depuis quelques mois. >>

Les acheteurs qui accèdent plus facilement à la propriété et bénéficient d’atouts fiscaux indéniables. LDD
nier d’Immo-vie-agee. Pour cette juriste qui s’est lancée dans cette spécialité il y a neuf ans, pas de doute, les choses ont changé et cet outil est de plus en plus accepté. «Aujourd’hui je suis à deux ventes par mois en moyenne alors qu’au début je tournais plutôt à six annuelles. L’état d’esprit a changé car on souhaite davantage faire un placement, se construire un patrimoine», déclare-t-elle. Même son de cloche du côté de chez Savinter qui a fêté ses vingt ans dans le viager. «Nous étions les premiers à lancer cela, il n’y avait rien à l’époque alors que sur ces cinq dernières années seulement nous comptabilisons pas moins de 165 transactions, constate Michel Jacques Petit, président de Savinter. Ce qui est fou c’est qu’autrefois la demande était faible mais nous avions des biens sur le marché et qu’à présent c’est l’inverse, l’offre se fait rare et la clientèle demandeuse afflue.» Une évolution positive qui s’explique, certes, par un bouche-à-oreille et une réputation sans faille dans le temps, mais également par un intérêt marqué chez les partenaires en bout de chaîne. «Les jeunes notaires en particulier sont conscients de cette opportunité et de plus en plus de cabinets s’informent sur le viager en Suisse romande», assure le président de Savinter.
Le premier signe d’un engouement? Preuve que le sujet suscite la curiosité des uns et des autres, un quatrième acteur dans ce domaine s’est ajouté l’an dernier aux trois préétablis, Salmon immobilier, convaincu lui aussi de l’avenir du viager en terres romandes. «J’ai mené une étude de marché cet été sur 4000 propriétaires vaudois et genevois de plus de 75 ans et bien que beaucoup ne sachent toujours pas ce qu’est le viager, j’ai reçu des échos très positifs sur cet échantillon», confirme Dominic Salmon. Un début encourageant qui conforte l’entrepreneur dans son choix de carrière. D’autant plus qu’il ne compte pas s’arrêter aux particuliers mais cible aussi les institutionnels: «Les choses évoluent rapidement, nous allons voir le cadre légal s’adapter et il y a fort à parier que les institutionnels auront de plus en plus recourt à des achats en viager et nous aideront à déployer cet outil.» Une chose est sûre, le viager gagne du terrain mais les acteurs du domaine parlent toutefois «d’un engouement modéré». Christophe Andrié s’explique: «Nous n’allons pas pour autant devenir exponentiels. Soyons réalistes, cela reste un marché limité aux personnes âgées, propriétaires, qui ont besoin d’argent, en Suisse romande.» Quant aux nouveaux intermédiaires qui pourraient s’y essayer, là encore, les spécialistes relativisent. «Les régies immobilières se lancent aussi, mais le viager ne consiste pas seulement à mettre en relation un vendeur avec un acheteur. Les deux parties seront liées à vie, c’est une responsabilité et un travail particulièrement complexe», ajoute Sabrina Reynier. Rigueur pour le suivi des dossiers, compétences multiples (fiscalité, comptabilité) et entourage de qualité (banques, notaires), le viager est donc bel et bien un métier exigeant et émergent mais qui risque encore de faire parler de lui un bon moment. Julie Müller
Michel Jacques Petit, président de Savinter.
«Les héritiers peuvent se sentir lésés. Le viager passera par le consentement éclairé de toutes les parties»
Dominic Salmon, fondateur de Salmon immobilier.
«Soyons réalistes, cela reste un marché limité»
Christophe Andrié, expert chez Bien en viager.

Partenariat
LE GROUPE SCHMIDT S’ASSOCIE À LUNAJETS
La démarche est originale: outre son service de yachting, le promoteur immobilier valaisan propose désormais des services d’affrètement de jets privés depuis Verbier.

De gauche à droite: Cédric Suchy, Sanel Hajdar, Grégoire Schmidt et Nathalie Schmidt. LDD
Alors qu’il est en train de transmettre la direction opérationnelle à ses collaborateurs Sanel Hajdar et Cédric Suchy pour partir faire le tour du monde avec sa femme et sa fille de 5 ans, Grégoire Schmidt apporte une nouvelle pierre à son édifice. En effet, le groupe Schmidt vient d’annoncer qu’il s’associait à la PME genevoise LunaJets pour proposer des services d’affrètement de jets privés à Verbier. Fondé en 2005 par Grégoire Schmidt, le groupe éponyme a réalisé à ce jour une quinzaine de promotions immobilières, essentiellement des constructions résidentielles, y compris la résidence privée Artdeville à Martigny où se situe son siège principal. «Mais cela devient toujours plus compliqué de trouver de nouveaux terrains bien situés», observe le président du conseil. Grégoire Schmidt a revendu également l’an dernier ses parts de la fiduciaire
Avec la pandémie, les gens fortunés préfèrent privatiser leurs déplacements en avion

L’agence Schmidt à Verbier. Looka
Bonvin au groupe Fiducial, mais continue néanmoins de collaborer. Ses activités de gérance et d’administration de PPE ont été cédées pour leur part à Domicim voici déjà quelques années. Le groupe Schmidt continue le développement de ses activités de courtage, d’expertise et de promotion. Il compte même augmenter sa présence au-delà de la zone allant de Sierre à Montreux, notamment du côté de Lausanne. Surtout, il apprécie les partenariats gagnant-gagnant entre les entrepreneurs. Que ce soit avec François Pugliese (le propriétaire du fabricant de matelas Elite) ou avec Bernard Gallay en ce qui concerne les activités de yachting. «Depuis gamin, nous naviguions sur le lac, avant de nous acheter un premier yacht, puis d’aller sur la mer et d’en louer également. Or, en Suisse, en dehors de Fert pour la location, il n’y avait aucun acteur présent pour la vente, rappelle Grégoire Schmidt. Le processus est assez similaire à celui de l’immobilier. Désormais, lorsqu’un client veut se domicilier à Verbier, par exemple, nous pouvons non seulement lui trouver un chalet, mais se charger aussi de la gestion de son yacht et, depuis peu, s’occuper de lui mettre un jet à disposition.»
Nombreux liens En étant très bien implanté en Valais, le groupe Schmidt a réussi à tisser des liens avec de nombreux propriétaires qui sont susceptibles d’utiliser des yachts, des jets, des chefs à domicile ou encore d’acquérir des œuvres d’art. Après une année 2020 compliquée du fait du Covid, la demande de la clientèle dépasse toutes les attentes. Les gens fortunés ont préféré privatiser leurs déplacements en avion et éviter certaines concentrations de foule en utilisant des yachts pour leurs vacances. Grâce à ce partenariat avec LunaJets, premier fournisseur européen indépendant de solutions d’avions privés (affrètement, achat et vente), le groupe Schmidt se réjouit des synergies. Serge Guertchakoff
En bref
Date de fondation du groupe Schmidt 2015 Nombre de collaboratrices/teurs 15 Sites d’implantation Bureaux à Martigny et Verbier. Actif dans tout le Valais et sur la riviera vaudoise.