Pléiades #17

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1001 Nuits #17

samedi 28 juillet L’oreille, le rail et la grenouille… Belval 13140 Miramas

16h Promenade miramaséenne du Domaine de Cabasse au Château de Belval en passant par le Mas de Guérin.

17h Jonction pédestre entre le Domaine de Cabasse et le Château de Belval

Coucher du soleil

21h05

Pléiades

dès 18h Guinguette avec buvette, restauration légère, salon de lecture dans le parc du Château de Belval

de 18h à 20h Découverte des lieux avec des jeux d’écoute

20h Cinéma pour les oreilles (séance d’écoute en transat)

21h05 Rassemblement pour le coucher du soleil


1001 nuits Qu’est ce que le projet 1001 nuits ? 1001 NUITS c’est une collecte de récits et une série de rendez-vous artistiques pour passer ensemble du jour à la nuit. Le principe est d’inviter habitants de proximité et voisins métropolitains à découvrir ensemble un endroit du territoire de manière originale, au travers de rencontres et d’histoires qui entrent en résonnance avec les paysages.

Quand ? Du 17 février au 2 septembre 2018.

Où ? Dans des lieux insolites autour du sentier GR2013.

Qui ? 1001 NUITS est un projet proposé par le Bureau des guides du GR2013, coproduit par MP2018 avec le soutien de la Banque Populaire Méditerranée, en partenariat avec Bouches-duRhône Tourisme et le Comité Départemental de Randonnée Pédestre des Bouches-du-Rhône. 1001 NUITS #17 s’inscrit dans la manifestation Tous les chemins mènent à Miramas.

Illustrations © Benoît Guillaume Graphisme © Lindsay & Bourgeix


P L É i A D E S . Groupe de sept étoiles qui constitue un petit amas très groupé dans la constellation du Taureau et bien visible les nuits d’hiver. Par glissement, groupe de sept poètes français du 16ème siècles. Dérivé : une pléïade, une grande quantité.


« Mais voilà le jour, sire, dit Scheherazade ; s’il n’eût pas sitôt paru, je suis persuadée que votre majesté auroit pris beaucoup de plaisir à entendre ce que je lui aurois raconté. » À ces mots, elle se tut, et le sultan se leva rempli de tous ces événemens inouis, qui lui inspirèrent une forte envie et une extrême impatience d’apprendre le reste de cette histoire. Cinquantième nuit, les Mille et une nuits

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« A travers ce que tu entends, laisse-toi aller à la dérive, sur un radeau instable, livré aux glissements d’espace et de temps, au pluriel des présences, à la multiplicité des points d’écoute. » René Farabet, Bref éloge du coup de tonnerre et du bruit d’ailes

« Je suis ici, et il n’y a rien à dire. Si parmi vous il y en a qui veulent arriver quelque part, qu’ils partent à tout moment. Ce dont nous avons besoin, c’est du silence ; mais ce dont le silence a besoin, c’est que je continue de parler. » John Cage, Silence, Conférence sur rien

« Les sons sont pareils aux étoiles le soir. On pense que c’est un chaos mais quand on commence à l’étudier, on s’aperçoit qu’il s’agit d’une composition fantastique qui est cohérente, avec ses constellations, ses planètes. » Karleinhz Stockhausen

« Être à l’écoute, c’est être en même temps au dehors et au dedans, être ouvert du dehors et du dedans, de l’un à l’autre donc et de l’un en l’autre. » Jean-Luc Nancy, À l’écoute

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Carte de Cassini, 18ème siècle.

Miramare (1214), Miromari (1230), Miromaris... Etymologie possible : mirare-mar, voir la mer. Le nom s’appliquait d’abord au village actuel de Miramas le Vieux, perché sur un mamelon d’où l’on découvre une vue magnifique sur l’Etang de Berre. Miramas actuel n’était qu’une ferme isolée au milieu d’une prairie et portant le nom de Paty. Jacques Lemaire

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Vue aĂŠrienne contemporaine de Miramas, Google.

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DON À DIEU Miramas était certainement depuis longtemps déjà un oppidum, lorsque parut la bulle de Léon VIII en 964, parlant du « castrum de Miramas » appartenant à la maison de Baux. Du Xe au XIIIe siècle, la maison des Baux et l’abbaye de Montmajour se disputent férocement la propriété de Miramas. Miramas fut donné à bail aux moines de Montmajour. L’abbaye Saint-Pierre de Montmajour constitue un ensemble patrimonial majeur parmi les monuments les plus visités du sud-est de la France. Située à quatre kilomètres au nord-est de la ville d’Arles, cette ancienne abbaye bénédictine symbolise par sa position géographique entre le plateau de la Crau et la chaîne des Alpilles, la « porte de la vallée des Baux ». L’abbaye de Montmajour est ancrée à la pointe Est d’un îlot rocheux culminant à plus de 40 mètres de hauteur, dominant les anciennes plaines marécageuses aujourd’hui en partie asséchées et bonifiées. Elle est ceinturée de toutes parts de canaux ou « roubines » qui lui ont donné son titre touristique de Mont Saint-Michel provençal.

GRÉGOIRE Joseph Les Chroniques de Miramas, 1967

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“D’azur, à une clef d’or, posée en pal, le peneton entouré de sept besans d’argent, trois à dextre et quatre à senestre, et l’anneau en losange adextré de la lettre M, aussi d’argent “

Blason de la Ville de Miramas. L’azur rappelle la Provence. La lettre M (lettre parlante) est mise pour Miramas (Miramaris au Moyen-Age). La clé indique que la cité est fortifiée et son appartenance à l’abbaye de Montmajour. Les besans indiquent la participation du seigneur de Miromaris aux Croisades et sont un signe de prospérité.

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MYTHOLOGIES La côte que nous venons de décrire nous offre quelque chose de plus merveilleux encore si l’on peut dire. Il s’agit d’une plaine située entre Massalia et les Bouches du Rhône à une distance de 100 stades de la mer, et dont le diamètre (elle est de forme circulaire) a également 100 stades. Son aspect lui a fait donner le nom de Champ des Cailloux : elle est couverte, en effet, de cailloux gros comme le poing, sous lesquels poussent de l’agrostis, en assez grande quantité pour nourrir de nombreux troupeaux.

Strabon, 1 er siècle avant JC

Aristote assure que des tremblements de terre [...] firent surgir d’abord ces cailloux puis que, peu à peu, ils ont roulé et se sont accumulés dans les creux. Posidonius dit qu’à cet endroit un lac se serait pétrifié en pleine tempête et transformé en une multitude de cailloux [...]. Tous les deux ont raison, malgré cela leurs discours ne sont guère vraisemblables. Il faut bien que quelqu’un ait, à un moment, déposé ces cailloux car ils n’ont pu se retrouver tout seuls couchés ainsi, sans que personne ne les ait rassemblés.

Pierre Quiqueran de Beaujeu, 1551

En Provence, l’eau a toujours fait l’objet d’une attention particulière face à la sécheresse méditerranéenne, à l’irrégularité des sources et à leur faible débit. Les hommes ont été contraints de transformer le milieu afin d’accroître les productions agricoles. La plaine de la Crau est un bon exemple de ces transformations. Située à quelques mètres au-dessus du niveau de la mer, elle couvre 31 000 hectares d’un triangle situé entre le massif des Alpilles et la Camargue. Au Villafranchien et encore au Quaternaire moyen, la Durance rejoignait directement la mer par la trouée de Lamanon : dotée sans doute d’un débit et d’une capacité de transport plus forts qu’aujourd’hui, elle a répandu les masses énormes de galets qui constituent la Crau. Les eaux, en se retirant, ont abandonné ces cailloux qu’elles y avaient longtemps accumulés et qu’elles avaient arrondis en les roulant. Le climat y est typiquement méditerranéen, avec des températures douces l’hiver et très chaudes l’été, et une très faible pluviométrie. Vouée au pastoralisme extensif depuis l’Antiquité, comme en témoignent les traces de bergeries, cette plaine a connu d’importants changements au XVIe siècle avec la construction des canaux. Progressivement, les hommes ont aménagé un nouveau paysage agricole, qui s’est orienté au cours des siècles vers une agriculture intensive et spéculative. Mais les cultures irriguées ont des effets induits sur la flore, la faune et plus largement l’occupation humaine de la plaine de la Crau.

Marylène Soma-Bonfillon, 2010 L’irrigation en Provence : des aménagements et des pratiques au coeur des transformations économiques, environnementales et sociales, Annales du Midi


« Au temps de l’Antiquité grecque où les Héros combattaient féroces brigands, Géants et autres créatures merveilleuses, le valeureux Héraklès accomplit ses 12 Travaux tout autour de la Méditerranée. Au cours de son avant-dernier voyage vers le jardin des Hespérides, il devra une nouvelle fois surmonter une dangereuse épreuve dont l’issue donnera naissance à la plaine de La Crau. » Extrait du film d’animation « Herakles, aux origines de la Crau », Conservatoire d’espaces naturels Provence-AlpesCôte d’Azur

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FORMES PASTORALES Le pastoralisme a façonné le paysage des coussouls, cette steppe méditerranéenne avec ses spécificités végétales adaptées aux conditions climatiques méditerranéennes. Les troupeaux venaient hiverner dans cette vaste plaine caillouteuse où pousse une herbe savoureuse et nourrissante. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, les troupeaux restaient en plein air pendant l’hiver. Cette tradition méditerranéenne rend les laines plus belles, la chair des moutons plus succulente et préserve le bétail de nombreuses maladies. Les parcs pouvaient contenir un millier de bêtes. L’élevage du mouton en Crau est plus que bimillénaire et sans rupture, ni dans ses pratiques ni dans ses produits.

Marylène Soma-Bonfillon L’irrigation en Provence : des aménagements et des pratiques au coeur des transformations économiques, environnementales et sociales, Annales du Midi, 2010

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Animaglyphe, théâtre du Centaure, 2013

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Nel lui avait narré à grands traits la vie de son père, berger toute son enfance et son adolescence, comme avant lui son père Maurice. Maurice le grand père de Nel avait eu deux fils, Joseph et Antoine. Il les avaient tous deux voulus être bergers, ne leur avait pas laissé le choix, n’avait même pas songé qu’un choix fut possible, s’était contenté d’obéir à l’évidence, à savoir que la famille possédait un troupeau et que ce troupeau rapportait, que lui-même serait un jour trop vieux pour l’entretenir, qu’il était donc urgent que ses deux fils se préparent à veiller à sa place sur les brebis familiales, et pour cela s’habituent dès maintenant à les faire agneler, à les mener paître, à les conduire en juin jusqu’aux alpages, à les garder là-haut pendant les mois d’estive, à les protéger des épidémies, des prédateurs, des mauvaises chutes. Sylvain Prudhomme, Légende, 2016

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Le Roi des bergers Le Château de Belval, ancienne bastide fortifiée du XVIIe siècle, fut transformé en bâtiment agricole au XIXe siècle. Il est le symbole du patrimoine vernaculaire caractérisant notre région. Cette bastide, autrefois fortifiée (portail de 1630), fut rachetée par un riche avocat, Amphoux, dont l’un des héritiers est anobli en 1765. Le domaine a constitué un foyer de recherche agricole jusqu’à la fin du XIXe siècle. Situé dans une petite vallée verdoyante, Belval ou Belle Vallée, a toujours été consacré à l’agriculture et à l’élevage. Les premiers éléments connus sur la propriété figurent dans le registre cadastral de 1707. Cependant certains architectes datent la partie la plus ancienne du château, comportant un très beau porche sculpté, de 1630. La bastide, les terres, vergers et vignes, près du Pont-de-Rhaud sont entourés de murailles. Quelques années plus tard, François Amphoux, riche bourgeois de Saint-Chamas et avocat à la cour, rachète le domaine. Une chapelle, un four, un pigeonnier, une écurie et une “fromagière” sont venus s’ajouter au bâtiment et aux terres plantées d’amandiers et de quelques noyers. L’exploitation va devenir encore plus prospère lorsque son propriétaire y introduit des troupeaux de moutons mérinos. François Amphoux est alors l’artisan le plus audacieux de la transhumance dans la plaine de La Crau. Il prend l’initiative de regrouper les troupeaux pour les conduire dans les alpages. En 1765, il est anobli et devient comte de Belleval. Il développe l’économie locale en améliorant les laines mérinos et conseille aux habitants de Miramas de se grouper pour stocker la laine et la vendre au moment le plus avantageux.

Site de la municipalité de Miramas

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LE DÉSERT ET L’INGÉNIEUR Œuvre maîtresse de l’ingénieur Adam de Craponne, le canal qui porte toujours son nom est le plus ancien et le plus imposant par ses dimensions et son débit, et a ouvert la voie à des aménagements hydrauliques en Provence. En 1554, Adam de Craponne obtint du roi Henri II l’autorisation de dériver l’eau de la Durance pour construire un canal jusqu’à Salon-de-Crau. La réussite technique de ce premier grand canal repose sur la dérivation de l’eau de la rivière et sur les ouvrages d’art qui maîtrisent les débits et les dotations d’eau. Des barrages mobiles, composés de pieux en bois en forme de chevalets, de fascines et de gabions, furent construits dans le lit de la rivière afin de diriger l’eau sur la rive gauche. Un chenal conduisait l’eau vers une martellière, construction appuyée sur un éperon rocheux, composée de vannes ou portes permettant de régler le débit du canal. Le canal prend sa source à la hauteur de La Roque d’Anthéron sur la Durance, il coule au pied de la chaîne de la Trévaresse jusqu’au col de Lamanon où ses eaux se divisent en deux grandes branches, l’une vers l’étang de Berre en passant par Salon-de-Provence et l’autre vers l’Ouest en direction de la plaine de la Crau. En 1559, le canal entra en fonction : ce fut une aubaine pour l’agriculture, qui put compter sur des quantités d’eau régulières et plus importantes que celles fournies par les rivières locales car l’été les débits sont très faibles. Afin de financer et gérer son canal, Adam de Craponne confia ses droits d’eau à plusieurs usagers du canal qui formèrent ensemble, en 1571, une organisation de gestion de l’eau : l’Œuvre Générale de Craponne.

Marylène Soma-Bonfillon L’irrigation en Provence : des aménagements et des pratiques au coeur des transformations économiques, environnementales et sociales, Annales du Midi, 2010

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Carte des canaux de Craponne

[...] le 28 octobre 1567, les consuls de la communauté de Miramas passent avec l’ingénieur le contrat pour la prolongation de son canal dans notre terroir communal pour son grand bénéfice. Pratiquement ruiné, à cause des sommes nécessaires à l’entretien de l’ouvrage, Craponne est obligé de céder la gestion du canal à ses créanciers regroupés dans une association qui existe toujours, l’Œuvre Générale de Craponne. Il meurt empoisonné à Nantes le 20 décembre 1576 probablement par des ingénieurs rivaux, jaloux de son travail. Laura Cialdella, La Provence, 6 août 2017

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l’or vert de Provence L’irrigation a des effets induits sur le sol et le sous-sol. Nous retiendrons ici l’impact du limon et de l’infiltration des eaux d’arrosage. Sous l’action de l’irrigation gravitaire, la plaine de la Crau, caillouteuse et inculte à l’origine, est devenue une plaine riche. Un sol fertile s’est construit grâce à l’arrosage. Si plusieurs centaines d’hectares ont été mises en culture et sont devenues des terres riches, c’est donc grâce à l’eau et à l’impact du limon qui rend le sol moins aéré mais plus riche, surtout s’il est amendé. Des études récentes ont confirmé l’impact de l’irrigation sur les nappes phréatiques. Le principe de l’irrigation gravitaire repose sur un écoulement de l’eau submergeant les parcelles, en suivant la pente du terrain. En conséquence, arroser c’est savoir maîtriser l’eau dans son cheminement afin d’en apporter la quantité nécessaire aux cultures. Des sondages systématiques sur la nappe de la Crau ont montré qu’une proportion de 70% de l’eau provient bien de l’irrigation gravitaire. Durant la période estivale d’arrosage, de juin à septembre, les nappes sont les plus hautes. En conséquence, de nombreuses villes peuvent s’alimenter, comme Salon, Istres, Miramas, Saint-Martin-de-Crau.

Marylène Soma-Bonfillon L’irrigation en Provence : des aménagements et des pratiques au coeur des transformations économiques, environnementales et sociales, Annales du Midi, 2010

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C’est l’une des rares denrées non alimentaires (pour l’homme) à bénéficier d’une appellation d’origine contrôlée (AOC). Produit dans la plaine de Crau, entre les Alpilles et la Camargue, le foin de Crau est un fourrage de qualité supérieure. Particulièrement riche en minéraux, il est très prisé des éleveurs et notamment des entraîneurs de chevaux de course et de sport. « Nos parcelles qui produisent le foin AOC sont irriguées avec l’eau de la Durance qui arrive par un réseau de canaux. Il s’agit d’une irrigation gravitaire : on obstrue le canal qui jouxte la parcelle et celui-ci déborde. Durant quelques heures, l’eau submerge la terre et l’opération est répétée tous les 8 à 10 jours en saison de pousse. » Didier Tronc, directeur du comité du foin de Crau

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10 octobre 1837 - Prise de la ville de Constantine (Algérie) 1er mai 1842 - Le projet de loi sur les chemins de fer est adopté par la chambre des Pairs. Première étude pour le passage du chemin de fer par Miramas 11 juin 1842 - Loi instituant la charte des chemins de fer création d’un réseau d’envergure nationale soumis à un système d’exploitation mixte : l’acquisition des terrains, les terrassements et les ouvrages d’art sont à la charge de l’Etat, les travaux de superstructures (voies, bàtiments et équipements), fourniture du matériel roulant et l’exploitation des lignes sont à la charge des compagnies privées. 1843 - Début des travaux de la ligne Avignon-Marseille 25 avril 1845 - Le maire Castagne souligne « l’intérêt du site de Miramas pour l’établissement d’un débarcadère » dans le registre des délibérations communales. A partir de ce jour, Miramas allait changer de visage et de destin. La topographie du quartier du Moutonnet, situé à peine à un kilomètre du village, ne permettant pas l’implantation du « débarcadère » (gare). C’est finalement au quartier du Paty qu’allait être édifiée la station dite de « Constantine » et ainsi naître la nouvelle cité. D’où vient Constantine? 1/ le premier chef de gare aurait été hébergé dans la ferme la plus proche, celle du domaine du Paty, appartenant à Constance Amé. 2/ pour la commémoration de la prise de la ville de Constantine en Algérie. 18 octobre 1847 - Inauguration du tronçon Rognonas-Constantine-Rognac de la ligne AvignonMarseille. 8 janvier 1848 - Inauguration de la ligne Arles-Marseille, livraison tronçon Miramas-Marseille


LA VILLE GARE Créée ex-nihilo, la cité de Constantine a poussé sur les terres de Miramas, aux portes de la Crau, dans un terroir où le paisible village veillait sur les nombreuses fermes et bastides. L’installation du chemin de fer : une première phase de développement Le noyau urbain s’établit autour du débarcadère, à la jonction des chemins menant à Istres, Saint-Chamas, Arles et Salon, sur l’emplacement de la Place Centrale, devenue place Jean Jaurès. Le développement, totalement conditionné par le chemin de fer, suivit tout d’abord le tracé du rail. En 1821, le haut village regroupait 816 habitants et 173 personnes étaient dispersées dans les fermes de la commune. En 1849, la nouvelle cité ne regroupait que quelques baraquements où logaient une quarantaine d’ouvriers et une quinzaine d’employés du chemin de fer mais en 1850, deux ans seulement après l’inauguration de la ligne Arles-Marseille, le village n’avait plus que 150 habitants tandis que Constantine en comptait le double. L’arrivée d’ouvriers itinérants, employés à la pose du rail, provoqua tout d’abord une augmentation de la population de Miramas-Village ; mais l’ouverture de la gare les détourna vers Constantine, rejoints par quelques ouvriers agricoles du village au chômage. Constantine devint vite un hameau et se développa au rythme de l’extension du réseau ferroviaire. Réalisée par un architecte américain, la ville s’étendit selon un quadrillage orthogonal de rues droites et larges (cette ossature, encore présente aujourd’hui, est nettement visible sur une carte, lorsqu’on regarde le centre ancien). Dès 1857, la Cie P.L.M. aménagea une maison caserne pour loger une partie des agents et en 1860, Miramas-Gare avait l’aspect d’une petite agglomération sans forme.

Séverine Justin Miramas à travers temps

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1857 : Création de la compagnie P.L.M. (Paris-Lyon à la Méditerranée) 1880 : Début des travaux de la ligne M.P.B. (Miramas à Port-de-Bouc) 1904 : La P.L.M. sollicite une concession pour réaliser la ligne Miramas-l’Estaque La P.L.M. rachète la compagnie M.P.B. afin de récupérer sa ligne 1916 : Début de la construction des cités P.L.M

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La bataille du rail Constantine pris le nom de Miramas-gare en 1857 et enfin celui de Miramas en 1904. Après le bureau de vote accordé à Miramas-Gare, un bureau provisoire ou annexe de la Mairie y est installé. De ce fait une grave question est posée : le transfert du chef-lieu communal et des archives dans la ville neuve. C’est le Maire Marius Sauvaire qui a la redoutable mission de mener à bien cette mission. En début 1893, il obtient l’ouverture d’un bureau de poste. Puis au moyen des transports plus ou moins clandestins, les registres de l’Etat-Civil, des délibérations, des dossiers et des archives sont transférés. Se situe là une des pages les plus épiques de la vie de la Commune. De véritables émeutes accompagnent ces changements. Plusieurs fois, le secrétaire de Mairie est reçu à coups de cailloux, de fourches, et devant l’hostilité des habitants doit regagner la ville. Mais le destin poursuit son chemin. Le 26 avril 1894, par décret du journal officiel Miramas-Gare devient chef-lieu communal 1ère section, tandis que l’antique village perd son importance et devient 2ème section, gardant de ce fait deux élus spéciaux au Conseil Municipal. Théoriquement, tout aurait dû rentrer dans l’ordre. Il n’en fut rien, les esprits survoltés crient à l’injustice, à la frustration alors qu’il s’agissait dès lors des lois de l’évolution. En 1894 de nouvelles scènes de violence ont lieu à l’occasion du transfert définitif. Mais le temps a passé... Les irréductibles ont vieilli, disparu, et la vie normale a repris ses droits.

association Centremploi miramas Ébauche d’une chronologie

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Fragment d’une chronologie 1850-1890 : Migrants français arrivés de Haute-Loire, Cévennes, Ardèche, Gard et Lozère, suite à la création puis à l’extension de la PLM (Paris-Lyon-Marseille) 1870-1914 : Afflux des italiens (90% originaires du Piémont) lié aux chemins de fer. 1914-1918 : Première vague d’espagnols (provenant principalement de Barcelone, Aragon et Valence), venus pour travailler essentiellement à la Poudrerie et sur les chemins de fer. 1939 : 2ème vague de migrants espagnols suite à la Retirada après la défaite des républicains lors de la guerre d’Espagne. Création en 39 des GTE Groupement des Travailleurs Étrangers mais deviendra plus tard CTE (Camp de Travail des Étrangers, gens communistes et anarchistes) 1940 : Indochinois. Les asiatiques travailleurs déportés. 1962 : Arrivée des Pieds-Noirs, Harkis suite à l’indépendance de l’Algérie. 1970 : Arrivée de lorrains, vosgiens, marocains, algériens pour occuper des emplois sur le pôle de Fos-sur-Mer.

association Centremploi miramas Les grandes vagues migratoires à Miramas

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« Mon premier souvenir à Miramas remonte assez loin dans le passé. Comme tout souvenir ancien, il pourrait être flou, mais ce n’est pas le cas, car mon souvenir s’appuie sur des perceptions sensorielles. Retrouver ces sensations me permet de faire émerger le passé. Nous sommes en avril, pendant les vacances de Pâques, mon mari qui vient d’être affecté à l’usine du CEA, nous emmène ma fille âgée de 3 ans et moi, visiter cette ville qui doit devenir la nôtre. Nous avons imaginé ce lieu de vie future qui évoque pour nous la Provence avec ses oliviers, sa garrigue, son thym, son romarin et toujours le ciel bleu, le soleil ardent et les plages de sable doré. Toujours l’été !!! Aussi c’est le coeur léger, plein d’espoir, que nous prenons la route, enthousiastes. Hélas ! La réalité est bien différente. Je découvre Miramas avec mes sens. C’est pour moi un choc physique, brutal, j’ai une sensation de froid intense, anormal, de rudesse, d’agressivité, de menace. Je ressens un sentiment d’impuissance, d’hostilité. Pourquoi tous ces sentiments négatifs qui semblent dresser un mur infranchissable entre cette ville et moi ? La faute à quoi ? La faute à qui ? Au mistral. Un mistral fou, impitoyable qui me gèle jusqu’à la moelle des os, qui arrache les portières de ma 2 CV, qui fait claquer les volets, qui soulève la poussière, qui pique les yeux, qui rougit le nez, qui fait voler les papiers comme des confettis, qui m’empêche d’avancer et qui fait pleurer ma petite fille de peur. Je cours tout le monde court sans regarder devant. C’est lui le responsable de mon désarroi. Quel va être mon avenir ? Vais-je pouvoir vivre dans cette ville ? Vais-je enfin m’habituer ici ? Ces questions me tourmentent et m’angoissent. Et puis !!! Trois jours plus tard… Le calme plat, plus de vent, est-ce possible ? Un ciel bleu magnifique. Je cours à l’extérieur et tout me paraît beaucoup plus beau : les maisons semblent plus gaies, les gens plus accueillants, la ville tout entière est transformée ; paisible, alanguie. Les gens s’arrêtent pour parler, musardent. On ne dirait plus la même ville. Alors ! Pourquoi pas ! Ce ne sera peut-être pas si mal après tout de vivre ici ? Je vis à Miramas depuis 51 ans et le mistral est toujours là. » Suzy Au début, dans le quartier, il n’y avait que des lorrains. Il y avait une ambiance. Des fêtes… Cela commençait à la Sainte Catherine, puis la fête des musiciens, puis la Sainte Barbe, la Saint Nicolas, Noël (oh là là l’ambiance à Noël), puis jusqu’à la Saint Patrick… Les lorrains, on nous appelait les « pointus », c’est à dire les allemands (ceux qui avaient des casques pointus)… Cela se voyait ceux qui venaient de Lorraine, ils étaient en tee-shirts, en manches courtes. Ici, le soleil, le climat… C’était une grande différence. Alain Je ne sais pas encore que Miramas s’est appelée « CONSTANTINE », ma ville natale en Algérie. Un signe du destin ? Guy Site internet Mémoires de Miramas, Nuits métis

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En haut : École Jean Moulin, classe de CP, 1978-1979. En bas : atelier MÊmoires de Miramas

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Je viens de ces rails qui ont conduit ma famille jusqu’ici… Je viens d’ailleurs, d’un endroit de vignes, de coteaux, de soleil brûlant qui dore les grains. Je viens de cet endroit d’où coule un vin suave, sucré comme le miel que l’on nomme muscat. Je viens de là, de cette terre catalane où mes ancêtres ont vécu depuis au moins 400 ans. Je viens des collines de chênes lièges, chênes à bouchon, de cette frontière tracée par Louis XIV qui a divisé le peuple catalan. Je viens d’ici, mais pas par hasard, mes racines sont ancrées dans cette terre ; de cet endroit sauvage où la main de l’homme cultivait, récoltait, transformait ce que la terre, l’eau et le soleil donnaient. Je viens de ce Sud, extrême Sud de la France, où un jour, j’ai remonté la courbe de la Méditerranée, pour me retrouver toujours dans le Sud, similaire à mon pays natal avec le même drapeau « sang et or ». Ce drapeau rouge et jaune, flotte maintenant au bord d’un étang : l’Etang de Berre. Je viens de ce pays d’oliviers, de thym, de romarins, de lavandes. Toutes ses senteurs imprègnent mon univers. Senteurs du Sud, à jamais liées à ma vie. Je viens de ces rails qui ont conduit ma famille jusqu’ici à Miramas. Le charbon, la vapeur, le diesel puis l’électricité, la roue des trains a tourné, les énergies ont changé. Je viens de cette cité ouvrière du PLM où les rues portent les noms de ceux qui ont oeuvré pour ce chemin de fer : Talabot, Noblemaire, président Dassier, président Dumont... Je viens de cette rue, du 12, rue Hubert Giraud, de ces bâtisses où six familles partageaient leur quotidien. Je viens de ces bâtiments, tous les mêmes, où les enfants ne devaient pas faire de bruit dans les escaliers car il y avait toujours le papa de l’un ou de l’autre qui dormait car ils avaient travaillé la nuit. Je viens de ces rues en équerre, de ce grand damier, de cette famille d’adoption : la famille cheminote. Jocelyne Site internet Mémoires de Miramas, Nuits métis

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Quand la ville dort Quoi qu’il en soit, dès le départ, deux problèmes essentiels sont posés de manière presque simultanée. Où et comment loger ses futurs salariés ? Comment et à quelles communes attribuer la manne financière fournie par les nouvelles entreprises de la ZIP (Zone Industrialo Portuaire), manne conséquente qui se montera en 1986 à 386 300 000 Frs. Par comparaison, cette année, la taxe professionnelle perçue par la commune de Miramas se monte à 10 570 000 chiffre arrondi. 11 août 1972 : création de l’agglomération nouvelle, regroupant les communes de Miramas, Istres, et la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer. La ville de Fos-sur-Mer en est explicitement disjointe, et ne rejoint l’agglomération nouvelle que plus tard. Très vite, on s’accorde sur un schéma directeur qui tend à spécialiser les communes en fonction du degré de qualification des salariés. Fos obtient le privilège de ne pas construire de grands ensembles, sous prétexte de sa proximité avec les entreprises considérées source de pollution et d’accidents industriels. En fait, Fos se spécialise au départ dans la construction de lotissements résidentiels destinés à accueillir les cadres et ingénieurs travaillant sur le site. Istres, qui doit devenir la future commune rayonnante du secteur et supplanter Martigues à ce niveau, –ce qui s’avérera juste puisque la ville est devenue villesous-préfecture–, sera destinée à accueillir en priorité une population de cadres intermédiaires et de couches moyennes, issues aussi bien du secteur privé que du secteur public, car il ne faut pas oublier que l’industrialisation génère des emplois induits autres que des emplois industriels (enseignants, postiers, etc.) Miramas quant à elle sera la destination prioritaire des ouvriers de production, au même titre que Port-de-Bouc... Notons que 50% à 60% des actifs de la population active du cru travaillent dans une autre commune que Miramas qui est vécue alors comme une ville « dortoir ». Pour palier à cette situation de ville « dortoir », les municipalités en place qui se succèdent se lancent dans des constructions de « prestige » destinées à marquer la ville de manière différente. Elles sont aidées en cela par une forte augmentation des ressources financières communales.

Jean Domenichino, historien Conférence à la médiathèque de miramas, 8 novembre 2016

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Maille 2 Miramas, 1977, 697 logements locatifs sociaux, par André Levèvre, architecte, labellisé Patrimoine XXième

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L’âme de notre ville réside dans un paradoxe, le pittoresque d’un village médiéval, perché sur un éperon rocheux dominant l’étang de Berre et, campée sur la plaine de la Crau, le modernisme d’une ville « cheminote », agrandie pour répondre aux besoins économiques. Des gens d’ailleurs, captés (ravis) par le charme de la Provence, ont su s’intégrer avec les gens d’ici, fiers de leurs cultures et traditions. Soleil, alternant avec mistral, pinèdes et garrigues, pierres et cistes, rails et béton, offrent aux Provençaux, natifs de Miramas et aux « Estrangers » de grandes bouffées d’oxygène et le plaisir de grandes balades. Si notre ville était un jeu, elle serait un puzzle avec des pièces très colorées… Où les joueurs de diverses origines, du Nord au Sud et même de l’autre côté de la Méditerranée, s’assembleraient en fondu enchaîné… Miramas est une ville dynamique aux multiples visages où chacun peut admirer le reflet de son âme dans les eaux du lac St Suspy. Viviane Site internet Mémoires de Miramas, Nuits métis

Jean-François Marc, Portrait Plan, Miramas, Musée nomade du quotidien, 2017

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lecture à l’oreille Le voyageur de la lune en atterrissant sur ce satellite trouve une boîte mystérieuse : à l’ouverture de la boite, je trouvai dedans un je ne sais quoi presque semblable à nos horloges, plein de je ne sais quels petits ressorts et de machines imperceptibles. C’est un livre à la vérité mais c’est un livre miraculeux qui n’a ni feuillets ni caractères ; enfin, c’est un livre où pour apprendre les yeux sont inutiles ; on n’a besoin que des oreilles. Quand quelqu’un souhaite lire, il bande avec grande quantité de toutes sortes de petits nerfs cette machine, puis il tourne l’aiguille sur le chapitre qu’il désire écouter, et au même temps il en sort comme de la bouche d’un homme, ou d’un instrument de musique, tous les sons distincts et différents qui servent, entre les grands lunaires, à l’expression du langage.

Savinien de Cyrano de Bergerac Les Etats et Empires de la Lune, 1657

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1001 nuits Qu’est ce que le projet 1001 nuits ? 1001 Nuits c’est une collecte de récits et une série de rendez-vous artistiques pour passer ensemble du jour à la nuit. Le principe est d’inviter habitants de proximité et voisins métropolitains à découvrir ensemble un endroit du territoire de manière originale, au travers de rencontres et d’histoires qui entrent en résonnance avec les paysages.

Quand ? Du 17 février au 2 septembre 2018.

Où ? Dans des lieux insolites autour du sentier GR2013.

Qui ? 1001 Nuits est un projet proposé par le Bureau des Guides du GR2013, coproduit par MP2018 avec le soutien de la Banque Populaire Méditerranée, en partenariat avec Bouches-duRhône Tourisme et le Comité Départemental de Randonnée Pédestre des Bouches-du-Rhône. 1001 NUITS #1 a été réalisée En coproduction avec la Friche la Belle de Mai.

www.gr2013.fr


PLÉiADES.

Groupe de sept étoiles qui constitue un petit amas très groupé dans la constellation du Taureau et bien visible les nuits d’hiver. Par glissement, groupe de sept poètes français du 16ème siècle. Dérivé : une pléiade, une grande quantité.

« Si vous voulez bien vous approcher un peu plus. La voix porte mal avec le vent. Mais cela fait longtemps qu’il parle aux hommes… nous ferons avec lui ce soir. » Chacun y va d’un petit pas. Nous voilà bien serrés les uns contre les autres, pléiade de curieux du ciel que le ciel attire. — Ballades sous les étoiles, François Barruel


L’oreille, le rail et la grenouille…

Prochaines NUITS

Où Radio Grenouille installe son jardin d’écoute aux abords d’un château oublié.

Coucher du soleil à 20h25 Far Ouest Où la réalisatrice Anne Alix glisse le long d’une ligne de côte industrielle jusqu’à trouver le paradis [ Ciné plein air ] — Le samedi 25 août, Calanque de Ponteau (Martigues)

Un château, le parc d’un château. Il fait chaud et pourtant tout est vert en cette fin de mois de juillet. Des grands arbres et au loin des cris d’oiseaux. Nous écoutons… Tiens, un chant de reinette ! Nos yeux se ferment quand arrive le son du train. La voix d’un cheminot s’élève.. Le vent de la Crau bruisse soudain, l’intimité des voix s’y mêle. La chaleur devient douce, les sons nous bercent et nous accompagnent jusqu’à la nuit. Radio Grenouille est à la fois une radio locale active de la vie culturelle marseillaise depuis plus de 25 ans, et une exploratrice de l’écoute et de la production sonore. Entre paysages sonores, récits de vie, pièces musicales, archives ou témoignages, elle propose aujourd’hui une séance d’écoute rebaptisé Cinéma pour les oreilles dans ce cadre naturel méconnu du château de Belval, et inspiré par les histoires et les paysages de Miramas. Et pour s’échauffer les oreilles, La grenouille nous fait partager ses jeux d’écoute pour petits et grands.

1001 Nuits #18

1001 NUITS #19 Coucher du soleil à 20h12 LETTRES À MARSEILLE / Clôture Où l’on se retrouve pour rassembler nos histoires, écouter des légendes du hip hop et contempler le plus beau coucher de soleil de l’année 2018… — Le dimanche 2 septembre, Foresta (Marseille)

www.gr2013.fr


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