Jeux nocturnes - extrait

La haine est à un battement de cœur de l’amour.

La belle Iris Johnson est une jeune femme dotée d’un pouvoir de destruction inimaginable. Dans son enfance, elle a été victime d’expériences traumatisantes et elle est bien décidée à se venger de ceux qui l’ont fait souffrir… Mais son passé la rattrape, car un assassin fantôme rôde et l’a prise pour cible. Gator Fontenot a subi les mêmes épreuves qu’elle. Il est donc tout désigné pour la protéger et l’aider à contrôler ses dons.

Rapidement, la passion les anime. Mais deux personnes hantées par de terribles trahisons peuvent-elles céder si facilement à l’amour ? « Un brillant mélange de thriller surnaturel et de romance. » Publishers Weekly

Christine Feehan est l’auteure de bit-lit la plus vendue aux États-Unis.

Action / Sexy Dans la même série :

Inédit Traduit de l’anglais (États-Unis) par Olivia Bazin Photographie de couverture : © Alina Solovyova-Vincent / iStockphoto Illustration de couverture : Anne-Claire Payet ISBN : 978-2-8112-0576-8

9 782811 205768

bit-lit

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Christine Feehan confesse écrire depuis toujours. Plus jeune, elle forçait ses dix sœurs à lire tout ce qu’elle créait.

Désormais, ce sont ses filles qui relisent ses manuscrits ! Elle vit dans la belle région montagneuse de Lake County, en Californie, avec son mari et ses onze enfants. Elle adore la randonnée, le camping, le rafting et la vie en plein air. Elle fait des arts martiaux depuis plusieurs années et a même été professeur de self-defense.

Christine Feehan

Jeux nocturnes GhostWalkers – 3 Traduit de l’anglais (États-Unis) par Olivia Bazin

Milady

Milady est un label des éditions Bragelonne

Suivi d’un extrait de : Night Game Copyright © 2005 by Christine Feehan Suivi d’un extrait de : Conspiracy Game Copyright © 2006 by Christine Feehan Tous droits réservés, y compris celui de reproduire tout ou partie de l’œuvre.

Cet ouvrage a été publié avec l’accord de The Berkley Publishing Group, une maison d’édition de Penguin Group (U.S.A.) Inc. © Bragelonne 2011, pour la présente traduction ISBN : 978-2-8112-0576-8 Bragelonne – Milady 60-62, rue d’Hauteville – 75010 Paris E-mail : info@milady.fr Site Internet : www.milady.f

À une de mes amies les plus chères, Cheryl Lynn Wilson, car Gator a son nom tatoué sur une certaine partie de son anatomie et il y est très clairement indiqué « propriété de ».

Remerciements Je tiens à remercier plusieurs personnes. Tout d’abord, Jennifer Lasseter et Brian Feehan pour l’aide qu’ils m’ont fournie sur de nombreux aspects du livre. Un grand merci à Wilson et Rose Maeux pour leur aide concernant la langue cajun. Et, en particulier, à Paula et Mike Hardin qui ont tant de fois eu la gentillesse de dénicher des livres et des informations et sont même allés à deux reprises dans le bayou pour moi. Merci à Damon Weed du Friendly City Tattoo Shop pour avoir donné vie aux armoiries de mes GhostWalkers.

Les symboles des GhostWalkers

symbolise ombre

symbolise protection contre les forces du mal

symbolise la lettre grecque psi, utilisée en para­­psychologie pour définir la perception extrasensorielle ou les autres talents psychiques symbolise les qualités du chevalier : loyauté, générosité, courage et honneur symbolise les chevaliers de l’ombre qui luttent contre les forces du mal grâce à leurs pouvoirs psychiques, à leur courage et à leur honneur

Chapitre premier

R

aoul Fontenot, dit « Gator », était en train de fourrer sa chemise dans son sac lorsqu’un coup à la porte l’interrompit. Les hommes de son unité paranormale des Forces spéciales n’étaient pas aussi polis, et avaient tendance à faire simplement irruption dans la pièce, quelle que soit l’heure, de jour comme de nuit. Depuis le temps qu’il les connaissait, pas un seul n’avait pris la peine de frapper avant d’entrer, encore moins d’un coup aussi timide.

Un jean délavé coincé sous le menton, il tenta tant bien que mal d’ouvrir et fut surpris de découvrir la dernière personne qu’il s’attendait à voir, le professeur Lily WhitneyMiller. L’unité de Raoul, les GhostWalkers, devait la vie à cette femme. Elle les avait délivrés de leurs cages de laboratoire et avait empêché qu’ils soient assassinés. Elle était la propriétaire du manoir de quatre-vingts pièces où lui et ses hommes résidaient souvent, mais elle ne s’aventurait jamais dans leurs quartiers. Elle préférait s’adresser à eux en tant qu’unité, dans le cadre plus solennel des salles de conférence.

— Lily ! Quelle surprise ! s’écria-t-il en jetant un coup d’œil au désordre de sa chambre. J’ai manqué une réunion ?

Elle secoua la tête. Elle semblait calme, posée, réservée, fidèle à elle-même. Mais sa posture révélait qu’elle était tendue. Quelque chose n’allait pas. Pire, elle évitait son 11

regard, alors qu’elle avait l’habitude de regarder les gens droit dans les yeux.

— Gator, il faut que je te parle en privé.

Raoul était entraîné à déceler la moindre nuance dans les voix, et il remarqua dans celle de Lily une hésitation qu’il n’avait jamais entendue auparavant. Il regarda derrière elle, s’attendant à apercevoir son mari, le capitaine Ryland Miller.

Il haussa les sourcils, surpris de constater qu’elle était seule.

— Où est Rye ?

Le père de Lily, le professeur Peter Whitney, avait convaincu les hommes, qui appartenaient tous à différentes sections des Forces spéciales, de se porter volontaires pour faire améliorer leurs capacités psychiques. Le médecin les avait privés de leurs filtres naturels, ce qui les avait laissés extrêmement vulnérables à l’assaut des émotions, des bruits et des pensées de l’univers qui les entourait. C’était Lily qui les avait aidés à se construire des boucliers pour mieux vivre dans le monde réel quand ils n’avaient pas leur stabilisateur. Durant tous ces mois, Gator ne l’avait jamais vue sans Ryland. Il savait que Lily se sentait coupable des agissements de son père et mal à l’aise en leur présence, mais elle était une victime au même titre qu’eux, et ne s’était même pas portée volontaire.

Il s’effaça à contrecœur pour la laisser entrer dans sa chambre.

— Désolé pour le capharnaüm, ’tite sœur * , dit-il en laissant la porte grande ouverte. Lily avança au milieu de la pièce, puis resta en face de lui tout en se tordant les mains.

— Je vois que tu étais sur le point de partir, lui dit-elle. * Les mots en français dans le texte original sont suivis d’un astérisque à la première occurence. (NdT )

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— J’ai dit à grand-mère * que je viendrais aussi vite que possible.

— On n’a toujours pas retrouvé ton amie ? C’est terrible.

— Oui, Ian a accepté de venir avec moi pour m’aider à la chercher. Je ne sais pas si nous pourrons être d’une grande utilité, mais nous ferons notre possible.

— Tu penses sincèrement que cette fille n’a pas fugué ?

C’est pourtant ce que croit la police.

Lily avait fait appel à ses contacts pour obtenir toutes les informations dont Gator avait besoin.

— J’ai personnellement lu tous les rapports la concernant, poursuivit-elle. Joy Chasson, vingt-deux ans, jolie fille, chanteuse dans des boîtes de blues locales.

La police pense qu’elle voulait quitter la Louisiane et qu’elle est partie. Peut-être avec un autre homme.

Gator secoua la tête.

— Je connais cette famille, Lily. Et grand-mère aussi.

Je ne crois pas une seconde à l’hypothèse de la fugue.

Il y a deux ans, une autre femme a disparu. Dans une paroisse différente, aucun lien à première vue, et la police a également cru qu’elle était partie de son plein gré.

— Mais pas toi ?

— Non. Je pense qu’il y a bien un rapport entre elles.

Leur voix. Elles chantaient toutes les deux. L’une dans des boîtes, l’autre à l’église et au théâtre, mais je crois que le lien est là.

Lily fronça les sourcils.

— Si vous avez besoin de quoi que ce soit, nous pourrons vous aider d’ici. Appelez-nous, et nous mettrons tous nos moyens à votre disposition.

Elle évitait toujours son regard, et se tordait les mains si fort que ses articulations avaient blanchi. Gator attendit en 13

silence, la forçant à reprendre la parole. Il ignorait ce qu’elle avait à dire, mais il se doutait qu’il n’allait pas l’apprécier.

Lily se racla la gorge et lui dit : — Puisque tu vas dans le bayou, est-ce que cela te dérangerait de garder un œil sur une des filles qui ont subi les expériences de mon père, Iris Johnson, que l’on surnommait « Flamme » ? J’ai calculé sur l’ordinateur la probabilité qu’elle se trouve dans cette région en ce moment, et elle est très élevée. C’est sans doute une des rares occasions que nous aurons de la localiser.

— Le bayou est vaste, Lily. Ça m’étonnerait que je tombe sur elle par hasard. Pourquoi penses-tu qu’elle pourrait faire une apparition ?

— Ce n’est peut-être pas si grand que ça, pas si tu écumes les boîtes de nuit à la recherche d’indices concernant la disparition de Joy. Curieusement, Flamme chante, elle aussi. Elle travaille dans les clubs des villes qu’elle traverse.

— Et pourquoi serait-elle à La Nouvelle-Orléans ?

— L’incendie du sanatorium a été très médiatisé, et je crois que cela va l’inciter à revenir dans sa ville natale.

Je pense qu’elle cherche les autres cobayes de mon père, tout comme nous.

Gator prit le temps d’étudier le visage de Lily en réfléchissant à sa réponse. Surtout, il se rejouait en mémoire le son de sa voix, les infimes vibrations que lui seul pouvait percevoir. Celles-ci lui indiquaient que Lily était nerveuse et ne lui avait communiqué qu’une partie des informations, ou alors qu’elle avait menti. Pourtant elle n’avait aucune raison de lui cacher la vérité.

— Qu’est-ce qui te fait penser qu’elle cherche les autres filles ?

Après un bref silence, Lily expira lentement.

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— Mon père a créé un logiciel informatique et y a entré des données concernant ses traits de caractère et ses schémas de pensées. Le programme a calculé qu’il y avait quatre-vingt-trois pour cent de chances qu’elle se lance à la poursuite des filles. Quand j’ai ajouté l’article de journal dans le logiciel, il m’a également signalé qu’elle soupçonnerait très certainement Dahlia et le fonds d’investissement créé par mon père, le Whitney Trust, d’être impliqués dans l’incendie.

— J’ai lu plusieurs rapports, reconnut Gator.

Ils parlaient en effet des victimes, et la police a l’air certaine qu’il s’agissait d’un meurtre, peut-être de tueurs à gage, donc oui, Iris Johnson ira sans doute chercher de plus amples informations.

— J’en suis certaine.

— Et cette Iris, c’est laquelle ?

Raoul connaissait déjà la réponse. Longtemps avant de mener ses expériences sur des hommes adultes, le professeur Whitney avait acheté des filles à des orphelinats situés à l’étranger et s’était livré à des expériences sur elles pour développer leurs facultés psychiques. Quand la situation avait mal tourné, il les avait toutes abandonnées à l’exception de Lily, qu’il avait gardée et élevée comme sa fille. Enfant, Iris était une petite rousse au regard mutin affublée d’un ego de la taille du Texas. Les infirmières l’avaient surnommée « Flamme », et dès qu’elle avait appris que Whitney le leur avait interdit, elle avait adopté ce sobriquet pour le faire enrager. Elle avait quatre ans à l’époque.

Raoul avait accordé beaucoup plus d’attention aux photos de cette petite fille qu’à celles des autres.

Elle possé­dait quelques capacités dont les autres ignoraient 15

tout ; lui, en revanche, les distinguait bien, car il les maîtrisait aussi. Même gamine, elle avait été assez futée – ou furieuse – pour dissimuler ses talents à Whitney.

Son surnom lui allait bien : Flamme, une petite allumette qui pouvait s’enflammer et s’avérer diablement destructrice dans certaines circonstances. Whitney n’avait pas eu conscience de sa chance.

— Iris est celle qui a les cheveux d’un roux sombre, répondit Lily, presque auburn, et l’ouïe très fine. Elle est capable de manipuler les sons de façon extraordinaire.

— Et c’est une stabilisatrice.

Ce qui signifiait qu’elle n’était pas aussi vulnérable que certaines autres filles. Elle pouvait se mêler au monde sans bouclier.

— Je crois bien que oui, dit Lily en hochant la tête.

Je sais que la chercher reviendrait à vouloir trouver une aiguille dans une botte de foin, mais on ne sait jamais.

Elle doit avoir entre vingt-deux et vingt-cinq ans maintenant. Mon père consignait tout méticuleusement, et pourtant il n’a pas pris la peine de noter nos dates de naissance, ce que je ne comprends vraiment pas. J’ai fait une simulation sur l’ordinateur. Voici ce à quoi elle devrait ressembler aujourd’hui.

Elle lui tendit la photo.

Le cœur de Gator manqua un battement avant de repartir à tout rompre. Flamme était belle. Sa beauté n’était pas seulement frappante ; elle était exquise, au-delà de celle de toutes les femmes qu’il avait jamais vues. Même sur la photographie, sa peau semblait si douce qu’il se surprit à lui effleurer le visage du pouce. Il garda l’expression détendue, charmante et insouciante qu’il arborait d’habitude.

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— Tu sais, Lily, les chances que je la trouve sont presque nulles.

Lily acquiesça et détourna les yeux. Ce n’était pas la vraie raison pour laquelle elle était venue le voir. Gator attendit.

Elle se balança d’un pied sur l’autre mais resta muette.

— Crache le morceau, Lily. Je n’ai jamais aimé les devinettes. Dis-moi ce que tu as à me dire.

Elle le contourna et sortit la tête pour regarder dans le couloir puis referma soigneusement la porte.

— C’est confidentiel, dit-elle.

— Tu sais que je fais partie d’une unité. Je ne cache rien à Ryland ni à mes hommes, pas si ça les regarde ou si ça concerne nos activités.

— Justement, Gator, j’ignore si cela les concerne.

J’ai découvert des informations que je suis en train de vérifier. Comprends bien que ces expériences ont duré plus de vingt ans. Il y a des dizaines d’ordinateurs, de disquettes, de disques durs et de sauvegardes sur lesquels je ne me suis même pas encore penchée, sans parler des notes manuscrites. J’ai commencé par les filles parce que nous voulions les retrouver, mais la plupart des observations de mon père sont soit manuscrites, soit archivées sur de vieux disques. Il a presque tout référencé avec des nombres, et je suis obligée de comprendre à quoi ils se rapportent avant de pouvoir avancer dans mes recherches. Ça prend beaucoup de temps, et ce n’est pas facile.

Le comportement de Lily semblait très inhabituel : elle ne se cherchait jamais d’excuses. Avait-elle découvert la vérité à son sujet ? Il avait si souvent regardé la vidéo de Flamme, alias Iris, que cela avait pu éveiller la curiosité de Lily. Peut-être l’avait-elle vu mettre sur pause et observer l’image, celle qui montrait les murs qui s’écartaient et se 17

rapprochaient légèrement. Celle où l’on voyait le sol bouger imperceptiblement, au moment où la petite Flamme rivait son regard sur le médecin. L’enfant détestait le professeur Whitney et arrivait difficilement à se contrôler.

— Qu’as-tu découvert, Lily ?

— Je crois que mon père a aussi procédé à des manipu­ lations génétiques sur les filles, ainsi que sur certains d’entre vous.

Elle prononça ces derniers mots avec hâte, et le regarda cette fois dans les yeux, comme pour lire sa réaction.

Il compta silencieusement jusqu’à dix avant de parler.

— Pourquoi t’imagines-tu cela ?

— Les nombres de références sont suivis de deux lettres que je ne comprenais pas. M.G. J’ai envisagé un million de possibilités jusqu’à ce que je découvre un petit meuble caché dans le laboratoire, fermé par une serrure à code. Il contenait plusieurs carnets concernant Iris.

Elle a subi une modification génétique, ça ne fait aucun doute. Et ces initiales se trouvaient partout dans les papiers qui la concernaient, et je les ai vues sur plusieurs autres documents. Dans la plupart des dossiers, en fait. Je crois que M.G. signale une manipulation génétique.

— Les filles. Tu parles des « filles », plutôt que de dire « nous ». Tu ne t’inclues pas.

Lily secoua la tête.

— Je n’ai lu la mention nulle part dans mon dossier.

Crois-moi, j’ai bien cherché.

— Et pourquoi, à ton avis ? demanda Gator d’une voix monocorde, égale, ultracalme.

— Il utilisait des virus pour que le traitement pénètre dans les cellules…

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Sa voix trahit son hésitation un bref instant, mais elle poursuivit, la tête haute : — Je crois qu’il ne voulait pas prendre de risques avec moi, et il pouvait se servir de moi comme d’un patient témoin.

— Qu’y avait-il dans le dossier, que je devrais savoir ?

— Flamme avait un cancer. Les symptômes étaient presque identiques à ceux de la leucémie. Des ecchymoses, un état de fatigue, des saignements anormaux, des douleurs dans les os et les articulations. Elle les avait tous. Il a réussi à la faire entrer en rémission, mais…

Lily marqua une pause, puis reprit en secouant la tête d’un air atterré : — Mais il n’a pas arrêté. Il a continué à modifier ses cellules… Oui, il a continué à pratiquer ses expériences sur elle. Lorsqu’on inocule un virus pour atteindre les cellules, l’organisme produit des anticorps pour le combattre. À la deuxième ou troisième fois, le virus en question devient inutile.

— Alors il en a fabriqué un autre.

— Plusieurs autres. Il cherchait clairement à parfaire sa technique. Je crois que les filles et moi-même étions ses premiers essais…

— Rien de plus que des cobayes, tu veux dire, rétorqua Gator d’un ton amer en l’interrompant, les poings serrés.

Vous n’aviez aucune valeur pour personne. Et il ne l’aimait pas, c’est ça ? Elle lui posait beaucoup de problèmes parce qu’elle était terriblement têtue, tout comme Dahlia, qui a grandi dans un sanatorium au lieu d’une vraie maison.

— C’est vrai, Gator, mais heureusement, bien qu’elle ait subi des modifications, Dahlia n’a jamais eu le cancer.

Je n’ai trouvé aucune allusion au cancer non plus dans 19

aucun des dossiers des autres filles sur qui il a pratiqué des expériences. (Elle pressa ses sourcils du bout des doigts.)

Je n’ai pas lu tout le dossier de Flamme en détail, mais j’ai vu que le cancer avait récidivé plusieurs fois, et mon père a ajusté le virus chaque fois et poursuivi les injections après chaque rémission. Il a poussé très loin les modifications.

— Et tu penses que c’est aussi mon cas.

Elle se mordit la lèvre, mais hocha de nouveau la tête.

— Ai-je raison, Gator ? Peux-tu courir plus vite, sauter plus haut ? Aucun de vous ne m’en a jamais parlé, pas même Ryland.

Il évita de lui répondre directement.

— Tu essaies de me dire que les personnes susceptibles d’avoir été génétiquement modifiées courent le risque d’avoir le cancer ?

— Je n’en sais rien, dit-elle avec sincérité. Je pense qu’il travaillait à un moyen d’éviter que les injections stimulent les mauvaises cellules. Je crois qu’il a utilisé Flamme pour perfectionner sa technique de façon à s’assurer que toi et les autres ayez moins de problèmes.

— Un vrai salopard, pas vrai ? dit Gator en fourrant son jean dans son sac d’un geste rapide et violent. Il l’a utilisée comme un foutu rat de laboratoire.

— C’est bien pire, Gator. Je prie pour m’être trompée.

J’arrive à peine à concevoir que l’homme que je considérais comme mon père ait pu être un tel monstre, mais je ne crois pas qu’il ait voulu soigner Flamme. À mon avis, il savait qu’elle tomberait malade et s’est dit que les parents adoptifs de la jeune fille la ramèneraient à lui.

— Mais ils ne l’ont pas fait.

— Pas que je sache. Mais il y a une forte probabilité que le cancer réapparaisse. Un traitement régulier contre 20

la leucémie pourrait l’aider, mais ne la soignerait pas.

Le cancer est provoqué par un type de cellules particulier.

— Et il le savait bien.

Lily hocha la tête à contrecœur.

— Ça ne fait aucun doute. La première fois qu’il a essayé de faire reculer la maladie, il a utilisé un virus pour introduire de l’ADN dans son système, ce qui a forcé les cellules cancéreuses à s’autodétruire en produisant une protéine mortelle pour elle-même. Ensuite, il a réussi à forcer les cellules cancéreuses à produire une protéine qui s’est identifiée auprès de son système immunitaire et qui, par conséquent, s’est mise à attaquer de manière ciblée et à détruire le cancer. C’était une méthode géniale, très en avance sur son temps, ajouta Lily avec une note d’admiration qu’elle ne parvint pas à dissimuler.

Gator fut envahi par un sentiment de fureur, horrible et dangereux. Un démon féroce qui déclencha en lui une réaction agressive. Il tourna le dos à Lily et prit une profonde inspiration. Il remarqua que les murs s’écartaient et se contractaient presque imperceptiblement.

— S’il était tellement génial et capable de vaincre le cancer, Lily, pourquoi n’a-t-il pas fait part de ses découvertes au reste du monde ? Pourquoi a-t-il caché les notes de ses recherches dans un laboratoire secret ?

— Tous les hôpitaux, les universités ou les établissements privés impliqués dans des expériences sur des humains comme le Whitney Trust sont obligés d’avoir un comité de protection des personnes pour s’assurer que les recherches respectent les réglementations du ministère de la Santé concernant le traitement des sujets humains. Et toute expérience nécessitant l’insertion de gènes doit être préalablement approuvée par un comité d’éthique.

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Il se tourna pour la regarder dans les yeux.

— Alors amener des orphelines indésirables aux ÉtatsUnis, les acheter presque, et les utiliser comme cobayes humains pour des expériences de modification génétique, de manipulation psychique et des recherches sur le cancer n’entre pas dans le cadre des régulations ? Il aurait été considéré comme le monstre qu’il était et on l’aurait mis en prison. Il a torturé cette fille ! Et maintenant elle est là quelque part, pas vrai, Lily ? Elle est en liberté et tu veux la retrouver parce que nous savons tous les deux qu’elle est très, très dangereuse et qu’elle a une sacrée dent contre le Whitney Trust, je me trompe ?

— Je veux la retrouver parce qu’elle a besoin d’aide et qu’elle est l’une des nôtres, rectifia Lily, la tête haute.

Incapable de soutenir le regard fixe de Gator elle baissa les yeux sur ses mains.

— Vas-y, parle, Lily.

— Il a aussi découvert un moyen de stimuler la croissance des tumeurs par thérapie génique, puis il a réussi à faire en sorte que les cellules cancéreuses bloquent leur apport en sang jusqu’à ce que la tumeur se résorbe et meure.

Ce type de recherches est inestimable.

— Sur elle ? Sur Flamme ? Il a fait exprès de lui donner le cancer ? C’était un sacré enfoiré, on est d’accord ?

Un monstre pitoyable qui devait s’éclater à torturer les enfants. Quel âge avait-elle quand il lui a infligé ça ?

Pourquoi est-ce que tu ne nous as rien dit ?

— Tu ne m’aides pas beaucoup en parlant comme ça, Gator. C’est arrivé il y a longtemps. C’est maintenant que je découvre tout cela sur mon père. Mon propre père.

Un homme que j’aimais et que je respectais. Je ne peux pas m’empêcher de constater son génie. Et, oui, c’était 22

monstrueux de mener des expériences pareilles sur des enfants, sur n’importe quel être humain, mais il l’a bel et bien fait, et cela ne change rien au fait qu’il était capable de miracles en médecine. Il était à des années-lumière de tous les autres chercheurs dans ce domaine. Je veux la retrouver, Gator, parce qu’elle a besoin de nous. Et de soins médicaux.

Son corps est une bombe à retardement et finira par la menacer tôt ou tard. Il faut qu’elle revienne et qu’elle me laisse l’aider.

À suivre...