JF Octave / dessin / Le cimetière de chaussettes
©JF Octave. 1994. Raj, une version raccourcie de Rajah
Jonatan Myhre Jorgensen // d’après une photo de ©Lucas Chanoine
240127 - 240204 - “UN JOUR NOUS NOUS TRANSFORMERONS TOUS EN ÉVÉNEMENTS”
M. me parle de son AVC, M. me parle de son cancer de la prostate*,
M. me parle de son opération au dos,
M. me parle de football,
M. me parle du Basquiat qu’A.D. essaie de revendre, mais elle n’a pas le certificat, M. me parle de nous revoir, puis s’en va le long des couloirs du Palace en boitant, Ian Curtis est loin,
...*tous les cancers qui prolifèrent parmi mes amis, c’est terrifiant, “UNE VILLE SE VEND COMME UN PRODUIT”, déclare fièrement le Bourgmestre de Mons qui lance un évènement de plus, et Mons qui essaie juste d’imiter Bruxelles, qui imite Paris qui imite toutes les villes qui s’imitent, et puis toutes ces expos qui ne sont plus que des événements-comm’ parmi d’autres,
L’ÉVÉNEMENTIEL
, c’est ce qui tuera les villes, et même plus que les villes, ça tuera carrément nos VI(LL)ES?, un jour nous nous transformerons tous en événements,
...The Age Of Content par La Horde, à Charleroi, et un public enthousiaste, mais moi pas trop du tout, ni J.D. d’ailleurs, et je m’endors un peu avec cette scène où une (fausse) voiture se promène sur le plateau, et les danseurs font l’amour avec l’auto et c’est interminable, définitivement chiant, à part quand Jonathan Myhre Jorgensen apparaît, et là, quand il surgit, je reprends subitement goût à la vie, ah la coupe de cheveux absolument parfaite de Jonatan Myhre Jorgensen, quand il apparaît, ah la raie du cul scandaleusement visible de Jonatan Myhre Jorgensen, quand il danse, la provocation incarnée, tandis que j’adore Kim Noble et son improbable “Lullaby for scavengers”, émouvant, choquant, tendre, rigolo, absurde, provocant: un mec qui parle à sa fille, qui est un asticot (réel, sur scène), qui joue avec son écureuil empaillé, qui tourne une dernière vidéo juste avant la mort de son père, qui parle du suicide des renards, tue sa fille-l’asticot en la laissant tomber de la scène, etc, etc, cinq *****étoiles dans mon souvenir,
555 morceaux musicaux de ma vie, je lis dans mon carnet 14/01 (en 2014 donc), j’aurais plutôt dû en sélectionner 666, c’était plus diabolique,
LE TEMPS EST L’ULTIME ÉLÉGANCE o, j’écris à Sébastien Ministru, sauf qu’en 1989 j’écrivais LA MORT EST L’ULTIME ÉLÉGANCE o, biffer la mention inutile,
Ou bien un petit hommage à Lucia Bose, quand elle danse le
, sublime dans Chronique d’un amour, le premier Antonioni, réalisé en 1950, et déjà ces espaces, ces perspectives, ces fuites, que je revois sur Fr3 au Cinéma de Minuit, ah le générique du Cinéma de Minuit, qui est toujours là, et qui existe depuis 1976,
[D772]
CHA
CHA CHA
“Jen’écrispas,jem’obstine”
écrivait Edmond Jabès, que je m’approprie ce jour-là, // “LE MENTIR-VRAI” j’ai aussi recopié quelque part dans ce carnet. Sans référence. Après vérification, c’est une expression d’Aragon. Utilisée par Agnès Varda quelque part,
Ou bien cette citation, que j’adore, de Derek Jarman: “ALL MEN ARE HOMOSEXUAL, SOME TURN STRAIGHT. IT MUST BE VERY ODD TO BE A STRAIGHT MAN BECAUSE YOUR SEXUALITY IS HOPELESSLY DEFENSIVE.”, “TOUS LES HOMMES SONT HOMOSEXUELS, CERTAINS TOURNENT HÉTÉROS. IL DOIT ÊTRE TRÈS ÉTRANGE D’ÊTRE UN HOMME HÉTÉRO PARCE QUE VOTRE SEXUALITÉ EST DÉSESPÉRÉMENT DÉFENSIVE.”,
BOÏNGBOÏNG, font les tracteurs avec leurs gros klaxons alors qu’ils remontent ma rue, DRILINGDRILING, font les vélos des Bobos qui dépassent les tracteurs qui manifestent, POUÊTPOUÊT, font les autos des navetteurs qui s’énervent, bloqués derrière,
TU ME LIKES, ALORS JE TE LIKE, ALORS IL SE LIKE, ALORS NOUS NOUS LIKONS, C’EST LÀ NOTRE DESTINÉE, (j’écris en 2014 et il y a Facebook qui fête ses 20 ans, et c’est comme une éternité),
“By the way, what’s your Fax number?” me demandait Rajah, le petit streetboy de Bombay devenu cadre supérieur chez Tata Telecom, au moment de me quitter à l’aéroport en 1994, l’année précédente il dormait dans la rue, et plus tard je rencontrerais Raj, une version raccourcie de Rajah,
Daniel Fano était à Kaboul, à Nassau, en Californie, à Macao, en Amazonie, à Bangkok, sauf que Daniel Fano n’allait jamais nulle part, et un voyage à Rochefort qu’il me racontait, ressemblait à une expédition dans la forêt vierge,
Daniel Fano qui n’arrêtait pas de faire mourir tout le monde dans ses livres, et finalement, il fut hélas le premier à mourir,
“Comme disait Chantal Goya, il vaut mieux être un HAS-BEEN qu’un HAS-NEVER-BEEN” (D.F.),