Le textile au fil des femmes / Contenu de l'exposition

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Le textile au fil des femmes... Mouscron, histoires de textiliennes

Nousavonsdonnélaparoleauxfemmes,ouvrières,mères ou filles de travailleuses du secteur A travers des témoignages,documentsetphotos,unvoyagedansletemps etaucoeurd’uninestimablepatrimoinecommunCecin’a paspourvolontéderetracerl’Histoiretextileavecungrand HMaissimplementderaconterDEShistoiresDefemmes, quiontacceptédeparler,toutsimplement,deleurvie L’intégralitédestextesprovientderencontresoudetables rondesorganiséesdurantleprintempsetl’été2022 Ces panneauxproposentdesextraitsdesinterviews,maistous lescompterendus(complets)peuventêtreconsultéssurle sitetextileaufildesfemmesbe,ouenscannantleQRcodeci dessous CertainspanneauxdisposentdeleurpropreQRcode, n'hésitezpasàjeterunoeil!

Mouscron,villetextile Del’âged’orauxgrandsdrames sociaux,lesecteurtextilefaitpartieintégrantedel’histoire deMouscron L’histoiretextileetouvrière,c’estlevrai patrimoine de notre région, sa richesse Des familles entièresontvécuaurythmedesmachinesdel’industrie textileetdelaconfection

Letextileaufildesfemmes... Mouscron,histoiresdetextiliennes vieArchivesSourcesInterviews,UneexpositionproposéeparPACMouscronetLaMaisonduTourismedeMouscronrédactionetconception:AurélieVandecasteele,avecMarieWindelsetManonCosaertphoto:FGTB-TextileMouscron/Collectionsprivées/FGTBFédérale–SyndicatsMagazine/Cartafana(DVD10ansdeCartafana-2006)/ArchivesduMuséedeFolkloreFrontalière(MUSEF)/Livre"EtablissementsMotte&Cie"/AMSAB/Archivesnationalesdumondedutravail textileaufildesfemmes.be Continusàretordre,Motte.Phototiréedel'ouvrage"EtablissementsMotte&Cie,1907-1957.PhotoEquinetTourcoing. Êtredéléguéedansletextile, c’étaitunelutteauquotidien J’étaistellementfâchéeÇam’a renduepluscombative,même dansmaviedetouslesjours Le16juillet1958,mamèrem’a réveilléeà4hpourquej’aille travaillerJ’avais14ans TémoignagedeMmeDemets TémoignagedeJosianeDecante

Ilyavaitbeaucoupd’histoiresde familleSurtoutchezMotteOn engageaitlefils,lepetitfilsd’un ouvrier Ontravaillaitlàde générationengénération TémoignagedeMmeDemets

Pour aller un peu plus loin dans le passé, nous avons eu la chance de bénéficier d'archives diverses, et de photos d'époques, ici numérisées. Images de Mouscron, dans les usines ou les ateliers au début du vingtième siècle, documents anciens En voici un aperçu

Mouscron, histoires de textiliennes Tracesdenotrepassécommun

Tricoteuses au travail dans un atelier (rue de Roubaix 44) à Mouscron. Au fond, Léontine Vanoosthuyse accompagnée des filles Julienne, Marie et Renée. Il s'agit de l'atelier de la famille Léo Deconinck, tisserand à domicile. 1929. (Archives du MUSEF, Musée de Folklore vie Frontalière, Mouscron.)

Deuximagesdel'usineSix,actuel"Tremplin".(ArchivesCartafana)

Un cours de couture pour jeunes filles, organisé à Mouscron par la maison Singer, 1927. (Archives Cartafana) Une dentellière au travail, Mouscron, 1918. (Archives Cartafana) L'Union Cotonnière, rue Cotonnière à Mouscron.(Archives Cartafana)

La plupart des témoignages recueillis au cours de cette recherche concernent des expériences vécues entre les années 1950 et 1990

Le textile au fil des femmes...

Toutesfrontalières!

Unatelierdeconfection au19èsiècle,ruedeTournai

Une belle histoire de femmes, de courage et de travail acharné.

EnarrivantàSaintLiévin,enFrance, jemesuisfaitremonterlesbretelles! Jetravaillais«tropvite»J’avais gardélacadencedechezMotte

TémoignagedeJosianeDecante

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Le superbe document présenté ci dessus nous vient de Mme Delphine Delmeire Il s 'agit du plus ancien cliché collecté pour ce projet La photo a vieilli, mais l'histoire est belle Nous sommes à Mouscron, plus précisément dans la rue de Tournai. Le cliché est pris autour de 1890, en face de l’actuel restaurant « La Cloche » (qui d’ailleurs existait déjà!). Mme Delmeire nous raconte l’histoire de cette photo. "Mon arrièrearrière-grand-mère tenait un atelier de couture à cet endroit à la fin du 19e siècle. Sur la photo apparaissent mon arrière-arrièrearrière grand-mère Sophie Beghin, sa fille Louise D’Haene, propriétaire de l’atelier, mon arrière grand-mère Valentine D’Haene, fille de Louise (la jeune fille sur la photo) ainsi que certaines ouvrières." L’atelier monté par Louise D’Haene comptera une trentaine d’ouvrières, un fait remarquable à l’époque. Plus remarquable encore: "C’est un fait notable dont je suis très fière : Louise était fille-mère et a réussi à monter cet atelier !"

Le textile au fil des femmes...

Louiseétaitfillemèreeta réussiàmontercetatelier!

Au fil des rencontres, beaucoup de dames nous ont parlé de leur expérience en France, à Roubaix, Wattrelos... Ci-dessus, un permis de passer la frontière pour aller travailler à la filature Requillart, à Tourcoing, début 1940. Ci-dessous, une carte de frontalier, délivrée en 1929 à une dame domiciliée à Herseaux, travaillant comme "journalière de peignage" en France. (Archives du MUSEF, Musée de Folklore vie Frontalière, Mouscron.)

Mouscron, histoires de textiliennes Filature de la Redoute, Roubaix. "La sortie du personnel" - vers 1925. Source: Archives nationales du monde du travail (ANMT), document numérisé, auteur : Ephraïm éditeur à Tourcoing.

En Belgique, des enfants ont travaillé dans l’industrie jusqu’en 1914, année d’application de la loi sur l’école obligatoire jusqu’à 14 Ensuite,ans. comme on le verra au fil de ces témoignages, de nombreux jeunes commençaient le travail à 14 ans. Il faut attendre 1983 pour que l'école devienne obligatoire jusqu'à 18 ans.

Sur cette photo prise chez Motte en 1912, on peut constater la présence de très jeunes fillles, notamment au premier rang. (Photo de la retorderie, archives du MUSEF, Musée de Folklore vie Frontalière, Mouscron.)

Ci-dessus, un permis de travail délivré en 1903 par la Ville de Tourcoing, pour une jeune fille mouscronnoise, à la demande de sa mère. Lireplus!

Une nécessité économique pour de nombreux foyers, à l’heure où les revenus étaient maigres et la sécurité sociale pas encore organisée… Une aubaine pour les entreprises, puisque les salaires des femmes et des enfants étaient inférieurs à ceux des hommes…

Mouscron, histoires de textiliennes

Ci-contre, un livret résumant la loi sur le travail des femmes et des enfants (après 1914). (Archives du MUSEF, Musée de Folklore vie Mouscron.)Frontalière,

Le document présenté ici (ci dessus) nous a été confié par l’asbl Cartafana Cette photo a été prise au sein de l’usine Masurel, située alors rue de la Passerelle Fabrique de tapis, elle a été érigée en 1904, et a été active jusqu’à la fin des années 60. Ces clichés remontent au début du vingtième siècle, comme le laissent deviner les tenues portées et… l’âge des ouvriers ! On constate en effet la présence de très jeunes filles, à l’avant-plan, et on peut le deviner à l’arrière, de jeunes garçons.

Lesfemmes...etlesenfants

Le textile au fil des femmes...

Ilyavaituneéquipedefoot féminine"MoulinagesMotte"Je jouais!Maisj’aidûarrêtercarle docteuraditquej’attrapaisdetrop grosmollets

Beaucoupde pères,demères,maisaussidejeunesgensontfaitlamêmechose Témoignagesdedeuxdecesjeunesfillesdel'époque

"On nous demandait si on allait bien à la messe " "Je suis née en 1951. J’ai commencé chez Motte à l’âge de 14 ans. Je me souviens précisément. Ce matin-là, j’ai mangé une poire." C’est Mme Demets, de Mouscron, qui nous parle de son expérience. En terminant sa poire, la jeune demoiselle devenait bâcleuse. Puis, comme chacune de ces jeunes travailleuses, elle se formait pendant une année ou deux, avant de passer sur une machine. "J’ai fait tous les postes. Je savais faire tous les métiers, à tour de rôle."

Un peu d'histoire... "J’ai commencé à 14 ans aux Moulinages Motte, à Mouscron, en 1968. Toutes mes copines allaient travailler… Mon père avait alors dit : "Si tu vas travailler, tu pourras sortir". Sinon, je devais rester à la maison avec ma mère. Donc j’ai décidé de travailler. Mes parents sont allés rencontrer le directeur des Moulinages Motte, pour voir s’il y avait des places. J’étais engagée le premier juillet, à ma sortie d’école. J’ai commencé comme bâcleuse, puis je suis entrée à la retorderie. Ma soeur m’a rejointe par la suite. On partait travailler en bus, au départ de la place du Tuquet, avec les bus Cossement. On commençait à 13h, l’après-midi, et on pouvait dîner à l’entreprise avant de commencer."

"J’aipurentrerchezMotte parcequej’étaiscatholique"

"Ce qu’il faut savoir, c’est que ma soeur et moi, on a pu rentrer chez Motte parce qu’on était catholiques. C’était très religieux, très encadré. Un exemple : dans notre secteur, il n’y avait que des femmes. Les hommes travaillaient pendant la nuit, juste après nous. Il arrivait donc que les équipes se croisent lors des changements. Mais attention, si une fille était surprise à parler à un homme, elle était appelée le lendemain au bureau pendant la pause, et remise au pas ! C’était typique de chez Motte. On filait droit. On ne pouvait pas aller à plusieurs aux toilettes, par exemple. Et le contenu de nos sacs était surveillé. Les garçons n’étaient pas autant tenus à l’oeil. On avait coutume de dire que s’il y avait un coq dans la basse-cour, c’était aux poules de courir plus vite pour ne pas se faire attraper !"

Le textile au fil des femmes... Mouscron, histoires de textiliennes EtablissementsMotte.Lestroisphotosprésentéesicisonttiréesdel'ouvrage"EtablissementsMotte&Cie,1907-1957.PhotoEquinetTourcoing.

"Les chefs étaient de grands chrétiens ; on nous demandait si on allait bien à la messe ! Je faisais la route avec des voisines, à vélo. Les contre-dames surveillaient avec qui on arrivait, à qui on parlait. Elles nous faisaient éventuellement des reproches. J’ai dû marcher droit !" Lireplus! Rencontre avec Chantal Dumortier, qui a travaillé aux Moulinages Motte dès 1968, à 14 ans, et ce pendant 10 ans. Un parcours qu’elle raconte avec beaucoup de plaisir et d’anecdotes.

C’esten1907quel’entrepriseMotteestfondéeàMouscron MotteC’estlaplusgrosseusine,laplusconnue,unsymbolede l’èretextileenCitédesHurlusDequelque200ouvriersvers 1913,cesontplusde2000personnesquipassentlesportesde chezMottechaquejour,danslesannées60."Monpère,il travaillaitchezMouMotte",nousdisaitYvette

Vous trouverez ici des documents d'époque : une fiche de salaire (annuel!), une carte d'assurée et un extrait de compte de pension. Rappel: tous les montants sont en francs belges!

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LesdocumentsprésentésiciproviennentdeMmeYvetteDeGryse (enmédaillon),quinousamalheureusementquittéspendantla réalisationdecetterecherche,auprintemps2022

Ce témoignage en rejoint de nombreux autres. Les dames que nous avons rencontrées ont, pour beaucoup d’entre elles, travaillé très tôt Pour un salaire souvent bas, puisqu’il était acquis que les femmes, et plus encore les jeunes, gagnaient moins que les hommes. Rappel historique: dès 1830, le Code civil indique que les femmes ont le même statut qu’un mineur d’âge. C’est-à-dire qu’elles n’ont pas le droit de travailler, toucher leur salaire, épargner, réaliser des transactions financières sans la permission de leur mari. On appelle ça la puissance maritale. Il faudra attendre 1958 pour que la notion disparaisse du Code civil. Chez les jeunes travailleurs et travailleuses, l’affaire est également entendue : dans bien des cas, le salaire touché va rejoindre le pot commun familial, sans discussion. C’est ce qu’explique Chantal Dumortier, qui a rejoint les Moulinages Motte à 14 ans. « Le travail, c’était la liberté ! C’était un jeu pour nous. Un moyen de sortir de chez nous. Tout était géré par nos parents. C’était comme ça à l’époque. On travaillait la semaine, donc on pouvait un peu sortir le samedi. On recevait notre paie, mais on n’ouvrait pas l’enveloppe ! Elle partait directement à nos parents, et éventuellement on recevait notre "dimanche" si on avait bien travaillé durant la semaine. Pas si on avait été malade ! Car si on ne pouvait pas travailler, on ne pouvait pas sortir non plus ! La première paie que j'ai eue "pour moi", c'était après mon mariage seulement. » Pour Josiane, citée ci-contre, Motte, ce n’est pas la joie. Le rythme, l’ambiance, sont compliquées. « Il n’y avait pas une très bonne entente entre la jeune génération et les plus anciens de l’usine. On n’avait pas le droit de parler, on n’avait pas de pause… » Jocelyne Juvené, travaillait également chez Motte, aux bobinoirs, de 1976 à 1982. "Chez Motte il fallait beaucoup travailler. On n’avait pas de réfectoire, on mangeait sur un petit banc et une caisse en carton. On avait ‘du bourre’ sur la tête, sous notre tablier, jusque dans notre nombril ! C’était chaud, ça collait. Et c’était lourd, ces bobines… Je me souviens de mon premier été, il faisait tellement chaud, les gens tombaient malades sur leur machine."

"Le 16 juillet 1958, ma mère m ’ a réveillée à 4h pour que j’aille travailler J’avais 14 ans " Josiane Decante est née le 16 juillet 1944 Comme pour beaucoup d’autres jeunes, la cloche sonne la fin de l’école à ses 14 ans Nous sommes en 1958 « Il fallait ramener de l’argent » Josiane travaille chez Motte à Mouscron Pendant 8 ans, elle a enfourché son vélo tous les matins Pour faire de cinq à une "Je me souviens de ma première paie J’étais fière de donner l’enveloppe à ma mère "

Née en 1931, elle admettait en riant "n'avoir pas beaucoup travaillé dans sa vie". Après un apprentissage chez la couturière mouscronnoise Marie-Louise Hanotte(-Vandecasteele) au Tuquet, elle a rejoint l'atelier de confection Gaeremynck, localisé rue du Sapin-Vert à Mouscron, où elle a travaillé pendant 9 ans, dans les années 50. Son métier? Coudre des ourlets de mouchoirs. Elle s'arrête lors de la venue au monde de sa fille. Yvette deviendra alors femme au foyer.

Donnerl'enveloppeàsamère

Pour d’autres, tenir le rythme, c’est un objectif, un défi. "Je contrôlais 60 kilos de fil par heure. On était à la production, ça devait aller vite!", indique Raymonde Roussel (photo ci-dessous), qui a travaillé à La Herseautoise de 1950 à 1988. "Parfois on était chronométrées… On avait de beaux salaires, il faut bien le dire. Je faisais des heures supplémentaires, pour aider sur d’autres métiers. Il y avait vraiment du boulot." Vous lirez par ailleurs la suite du témoignage de Raymonde!

"Dubourre"jusqu'aunombril!

Leplusbeaufildelarégion!

"Depuis mes 12 ans, je voyais mes copines un peu plus âgées aller travailler.

L’art qui rend noble Après 16 ans de carrière chez Tiberghien, Edith quitte. En cause: de mauvaises relations de travail, une contredame "difficile", du harcèlement. C’est à ce moment là que le théâtre entre dans sa vie. "J’ai fait du théâtre pendant 25 ans. C’est un exutoire. Jouer un rôle, ça permet de s’évader. Mais aussi d’être reconnue par les gens, de les faire rire. C’est une satisfaction ; ça donne une importance qu’on ne pensait pas avoir." Au rythme de trois répétitions par semaine, jusqu’à minuit, Edit conjugue sa passion et son métier d’ouvrière textile. "Je commençais à 5h, tous les jours!"

Le textile

RaymondeRousselàLaHerseautoise

Le début n’est pourtant pas rose. "Quand je suis rentrée à La Herseautoise, je n’aimais pas du tout! Mais je n’osais pas le dire… J’étais sur une machine de retorderie, avec une vieille femme… Heureusement, une contredame m’a remarquée, elle a vu que j’avais l’oeil, et j’ai eu une bonne place." Raymonde devient alors "contrôleuse", ou "visiteuse" de fil. Ce qui signifie qu’elle doit observer l’intégralité des bobines de fil produites, en vérifier la qualité, déceler les éventuelles différences de couleur… "C’était du fil pour faire des costumes d’hommes, de très grandes marques. Il ne fallait pas que soudainement il y ait un gris légèrement différent dans le lot." Raymonde nous a d’ailleurs préparé quelques bobines, pour nous montrer deux gris différents. "Vous voyez, celui-ci n’est pas bon." Raymonde adorait – et adore encore – ce métier. "Nous étions deux dans une salle, à faire ça. J’ai passé 39 ans avec la même femme, Andréa. J’allais travailler le coeur joyeux, tellement je m’entendais bien avec elle. Notre fil était connu comme étant le plus beau fil de la région. D’autres gens, qui travaillaient ailleurs, me disaient que leur fil n’était jamais aussi fin qu’à La Herseautoise."

Noussommesconviésdansunejoliemaison,àDottignies.Yvit RaymondeRoussel,86ansElleatoutpréparéUnalbumphoto, d’anciennes bobines de fil, un article de presse sur La Herseautoise Car c ’est de cela que nous allons discuter aujourd’hui:des39annéespasséesauseindel’usine,aujourd’hui devenuel’ICET

"Il y a 34 ans que je suis pensionnée! J’ai eu ma prépension à 52 ans, en 1988!" Raymonde a décidé seule d’arrêter l’école à 14 ans, et d’aller à l’usine.

Raymonde y a aussi rencontré son époux, Claude, aujourd’hui décédé. "Il montait les nouvelles machines. Quand une machine sortait sur le marché, il pouvait partir un mois en Allemagne, en Suisse, pour en apprendre le Raymondefonctionnement."sourit. "C’est toute une histoire, hein, notre vie Mais quand on aime bien son travail, ça fait beaucoup…" Lireplus!

Jouerunrôle,çapermetdes’évader Maisaussid’êtrereconnueparlesgens, defairerireC’estunesatisfaction;ça donneuneimportancequ’onnepensait pasavoir Lireplus! 42 ans de carrière dans le textile Edith Tanghe connait son sujet Nous l’avons rencontrée en son domicile mouscronnois "J’ai commencé en 1973 chez Tiberghien, j’avais 14 ans " Un choix qui ne répondait pas forcément aux aspirations de la jeune Edith. "J’avais une famille qui ne poussait pas aux études, alors j’ai travaillé jeune. J’étais d’abord bâcleuse, en retorderie." Après quelques années, Edith Tangue passe sur machine: le continu à retordre. "Assez vite, en fait. Je comprenais vite le travail.!"

fil des femmes... Mouscron, histoires de textiliennes L'usineetlethéâtre UtexbelEdithTanghechezTiberghienaujourd'hui(photosM.Cosaert)

Elles me disaient ‘Faut venir avec nous, Raymonde!’, et je n’ai plus rien voulu savoir. J’ai appris à coudre, à couper, faire des patrons, à Herseaux, pendant un an. Et je suis allée travailler. Mon père était complètement contre. Ma famille avait d’assez bons revenus… Mais moi je n’en savais rien, et de toute façon, j’avais mis cette idée dans ma tête."

Le syndicalisme qui donne de la voix Après un bref passage chez Moulin Vernier à Luingne, et deux ans chez Coverfil, Edith revient chez Tiberghien. Entretemps, l’entreprise est devenue « Utexbel ». "C’est là que je suis devenue déléguée syndicale, et secouriste. J’aurais pu être déléguée bien avant. Je n’avais pas peur des chefs, et je ne supportais pas les injustices. C’est un métier où on en voit beaucoup.. " Edith a 56 ans à la fin de sa carrière. Dans sa maison du Tuquet, Edith poursuit son récit. Depuis sa prépension, elle n’a pas une minute à elle. Elle crée des vêtements, des jouets, en tricot, en crochet. Des animaux en laine pour les enfants. Le repos, ce sera pour plus tard. au

Letémoignagequisuitestlepremierquiaitétérécoltédansle cadredecetterechercheL’undespluspercutants,aussi«Mme Demets»n’apassouhaitéqu’onl’appelleparsonprénomPas parsnobisme,loindelàPardiscrétionParcequeceprénomest associéàtouteslesluttessyndicalesquiontaccompagnéledéclin dutextileàMouscron

Au fil de cette carrière mouvementée, Annie a passé le cap, et est devenue déléguée syndicale.

J’aivécutouteslesfaillites, touteslesreprisesJenesaispas lescompter Manifestationspourl'emploitextile.ArchivesFGTB-Textile.

"Je suis rentrée sur les listes en 1978. J’y suis restée jusqu’en 2007, à la fin de ma carrière", indique celle qui, après la fermeture définitive de Motte, se consacrera dès 2005 à la cellule de reconversion, Artlaine "Beaucoup de femmes ont retrouvé du boulot grâce à ça. On travaillait tous ensemble. FGTB, Forem… Pour mon départ à la pension, les personnes au chômage se sont cotisées, j’ai eu un dîner, un cadeau… Je pense qu’on était bien aimés de tout de monde."

Unecarrière,plusieursfaillites

Je me souviens, quand j’ai dû rendre le matériel. Ma petite fille avait quatre ans. Il fallait nettoyer les machines avant de partir. En le faisant, je pleurais.

Lacrise,etdesluttes

Annie Demets (qui n'est pas liée à la personne citée ci-contre) est née le 12 mai 1957. Elle est « l’enfant du milieu », dans une famille qui en compte cinq. L’école, les uniformes, c’était trop cher. « J’ai commencé à travailler à 14 ans. Il fallait ramener de l’argent pour payer l’école des plus petits. » 1971. Annie commence comme émailleuse chez SPES jusqu’en 1980. Annie a connu la crise textile, et a subi ses conséquences à plusieurs reprises. « J’ai travaillé dans beaucoup d’entreprises, et plusieurs ont fait faillite pendant que j’y étais… » Annie a travaillé à la filature de l’Espierres, en tant que pelottoneuse. Ensuite, chez Dubus Textile comme remailleuse. Chez Canni Confex comme piqueuse. La dernière partie de sa carrière, elle la passe chez Limited Edition où elle crée des échantillons à envoyer à l’étranger.

Etparticulièrementceluid’undeses fleurons:Motte Aujourd’hui,MmeDemetsaprisunpeude recul Lechoctextile,ellel’avécudepleinfouet,etellel’a combattuavecferveur.

VincianeDelqueux,quiaconnulafermeturedeTiberghien

"Être déléguée… C’est un combat, tout le temps. Ça rend plus dure, plus déterminée, même dans la vie de tous les jours. J’étais tellement fâchée…. J’ai toujours lutté. Celui ou celle qui fait ça avec passion doit lutter aussi pour expliquer ce qu’il fait, et pourquoi. On se fait des amis et des ennemis. Je n’ai rien à dire du syndicat, on avait le feu vert, toujours. On avait un permanent syndical magnifique, et c’était Patrice (D’Hoop, NDLR). On pouvait l’appeler à 5h du matin si on avait un problème. Il y avait des comités textiles où toutes les générations se côtoyaient. Les connaissances étaient transmises. C’est comme ça que j’ai appris."

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Lireplus! Le textile au fil des femmes... Mouscron, histoires de textiliennes Manifestationpourl'emploitextile.ArchivesFGTB-Textile. En1982,Motte&CiefaitfailliteetestrepriseparEuromotte(Verbeke).Ici,destravailleusesàlasortiedutribunaldeTournai,lorsdelareprise,avecFilipVerbeke.ArchivesFGTB-Textile. "Lesannées80ontannoncéle déclindutextiledanslarégion" SurlestoitsdechezMotte,pendantl'occupationdel'usine,en1981.ArchivespersonnellesdeRose-MarieMessien.

Patrice D'Hoop Le nom est sorti plusieurs fois au fil des rencontres avec les travailleuses. Et pour cause. Patrice a marqué les esprits, par son action, sa présence. De 1965 à 2007, il a oeuvré au sein de la centrale du textile à la FGTB de Mouscron. Il était l'un des hommes forts du secteur Patrice nous a quittés en 2013. Quelques années auparavant, il nous accordait un long entretien. Celui-ci fut publié dans "Le Courrier", le 26 septembre 2007. Il revenait alors sur la période où tout a changé pour le secteur textile. Extraits "Jechoisis.suis entré au syndicat le 2 janvier 1965. On vivait l'époque des trente glorieuses. Tout marchait. Et les technologies nouvelles commençaient à faire leur apparition.J'ai connu les bonnes années. La région était mono industrielle ou presque." Les années passent, l'âge d'or aussi. Patrice en voit arriver la fin. "C'était l'époque de la restructuration de la Herseautoise. On a vécu pas mal de fermetures, dont la bonneterie SPES, qui occupait à l'époque une centaine de femmes. Avec cela, les premières vagues de licenciements... Les années 80 ont annoncé le déclin du textile dans la région."

L'usine Motte occupée Un souvenir particulier, celui de l’occupation de Motte. "C’est la période où j’ai eu ma première voiture… Une Mini, en 1981. Je m’en souviens bien puisque j’ai acheté cette voiture car Patrice n’était plus jamais là! Il était toujours à l’usine! On était parfois à cinq dedans, pour aller au piquet."

"Je rejoignais toutes les réunions, souvent avec mon chien. Je connaissais la plupart des délégués. J’allais en manifestation à Bruxelles, aussi. J’ai bien connu l’équipe Coverfil, des ouvrières de chez Motte, de la Filature de Lesl’Espierre."dossiers

s

"ChezMotte,cen'étaitpastoujourslajoie J'aiconnula périodeoùilsontcommencéàlicencier Puisj'aiété licenciéemoi même,en1982 Jesuisalléemanifesterà Bruxelles Onabienétéreprésentésparnosdélégués DontSergeViaene C'étaitunbon" JocelyneJuvené,anciennedechezMotte

les plus complexes? "Celui de la Filature de l’Espierre. En 1995. Ils avaient fait le maximum pour sauver cette entreprise, en vain. Patrice a fait une dépression suite à cet événement. Mais la pire année, c’était l’an 2000. On a vécu des fermetures en cascade. Sept, si ma mémoire est bonne. Dont Louis De Poortere et toutes les filiales."

"J’allaisauxpiquets

La crise textile a été marquée par de très nombreuses et très dures grèves; par des manifestations à Mouscron ; par l’occupation de l’usine Motte pendant plusieurs semaines au début des années 80 ; par un front commun syndical très soudé Rencontre avec une épouse de syndicaliste : Rose Marie Messien

Neuf ans après le décès de Patrice D'Hoop, celle qui était de tous les combats à ses côtés nous raconte cette époque. "Nous nous sommes mariés en 1975. C’est simple, quand il y avait grève, j’allais aux piquets. J’ai parfois pris congé – je travaillais à la Mutuelle – pour pouvoir aller en manifestation." s p e r s o n n e e d e R o s e M a r e M e s s e n

Le textile au fil des femmes... Mouscron, histoires de textiliennes

A r c h v e

"Quandj’étaisdéléguée,lesdeuxsyndicatsétaient trèssolidaires!Jesoutenaismacollèguequivenait del'autresyndicat!" AnnieDemets,anciennedéléguéechezSPES

"QuandnousavonsperdulecontrataveclaSuède pourlasous traitance,en1981,çaaétéle licenciementpournoustoutes" NicoleCroquison,anciennedel'atelierdeconfectionNordvex

jearrivaitfilaturemauvais.Onaeudetrèsbonsmoments,etaussidetrèsIlyaeudesaccidentsdetravailaussi…Enonportetoujoursuncouteau,unstanley.Ilqu’onsecoupe,parfoisfort.C’estpourcelaquesuisdevenuesecouriste.(Edith)Voussavez,c’étaitledébutdelamodernité,ontravaillait,maisiln’yavaitpasspécialementd’attentionportéeauconfortdupersonnel…(Annie)

« Le début de la modernité »

Lesmauxdutravail

Edith avait 56 ans à la fin de sa carrière. Les soucis de santé la rattrapent, liés de près à son métier. Mal de dos, problème au tendon d’achille… La douleur ne permet pas de continuer.

Des métiers à risque

EtablissementsMotte&Cie,préparationdefilature.ArchivesCartafana.Photod'illustration.

Annie Verbeke est mouscronnoise, et travaillait dans la confection, à Tourcoing, dans les années 50 et début 60. Malheureusement, elle n’a pas pu poursuivre sa carrière, car une blessure "au côté" l’a invalidée assez "J’airapidement.travaillé quelques années chez Flament, jusqu’en 1962. Il fallait toujours être penchée sur la machine, dans une position inconfortable.

J’ai été embauchée par téléphone. Le directeur ne savait pas à quoi je ressemblais. La première vois qu’il m’a vue, il m’a trouvée trop petite pour les machines et ne voulait pas me garder. Mais j’ai persévéré et fait mes preuves ! (Christelle Tamsyn, 44 ans de carrière, principalement Tiberghien/Utexbel)chez

C’était bien quand il n’y avait pas de souci… Mais en cas de panne, de casse, il fallait absolument rattraper le temps perdu ! Vous savez, c’était le début de la modernité, on travaillait, mais il n’y avait pas spécialement d’attention portée au confort du personnel…"

« Là on se dit ‘mince, je ne suis plus capable’. C’est très difficile d’accepter qu’on ne sait plus le faire. Mais il le fallait: j’ai pris ma prépension. »

Le textile au fil des femmes...

EtablissementsSPES,salled'assemblageduprêtàporter.ArchivesCartafana.Photod'illustration.

Pas encore "formée", déjà un lourd métier Vous avez pu lire par ailleurs le témoignage d'Edith Tanghe. Aujourd'hui encore, des douleurs chroniques rythment la vie de cette jeune retraitée. "J’ai des problèmes de hanche aujourd’hui, une scoliose… Quand j'ai commencé à travailler, j’étais petite, pas "formée" physiquement, mais je faisais déjà un métier lourd. Avec toutes les conséquences que ça peut avoir sur la santé… »

Aufildecesrencontresautourdestravailleusesdutextileetdela confection,ladouleurphysiqueliéeàcesmétiers,lourdset/ou répétitifsrevienttrèsfréquemmentDetrèsnombreusesfemmes mentionnentnepasavoirpuallerjusqu'auboutdeleurcarrière, enraison,notamment,decequel'onappellelestroubles musculosquelettiques

Mouscron, histoires de textiliennes

L’époque d’Annie est florissante. Dans les années 60, de très nombreux travailleurs arrivaient à pied, en bus, de diverses régions.

L'industrie textile au sens large présentait, et présente toujours, des risques pour la santé conséquents. Même si les moyens de prévention et de protection sont plus efficaces aujourd'hui qu'il y a quelques décennies.

"Il y avait vraiment beaucoup de gens qui travaillaient là. Nous étions dans de grandes salles… Il n’y avait pas beaucoup d’échanges entre nous, on ne se parlait pas. Pourtant, je ne ressors pas avec de mauvais souvenirs… A part cette blessure, bien entendu, qui m’a empêchée de continuer…."

J’habitais Mouscron, et comme beaucoup, j’allais chaque jour à Tourcoing à pied. Plus tard, j’ai eu un vélo ! Il fallait travailler très vite, de plus en plus vite. Notre travail était chronométré, et on était payées à la production.

Parmi ces risques, les TMS ou troubles musculo squelettiques, ces douleurs liées à des gestes lourds ou répétitfs. Mais également des blessures, coupures liées à l'usage des machines et Enfin,équipements.tantlaprésence de poussières, de matières fibreuses ou encore de substances chimiques peut causer des complications pulmonaires, des allergies, voire des cancers.

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"Je devrais tout raconter, tu peux écrire un livre On en a eu des misères mais aussi des fous rires ! On était une équipe très soudée C’était un secteur solidaire, bienveillant Nous n’étions pratiquement que des femmes Bien sûr, avec des caractères différents Mais j’en côtoie encore certaines, on va parfois manger ensemble " Ces mots nous viennent d'une ancienne de chez Motte. Si toutes les travailleuses que nous avons rencontrées n'ont certes pas le même vécu, pas la même expérience, nombreuses sont celles qui regardent leur passé textile avec une heureuse nostalgie. Annie Demets (Limited Edition) ne dit pas autre chose. "Les femmes étaient très solidaires entre elles. On prenait du plaisir à travailler ensemble et à s’entraider. Quand j'ai pris ma pension, mes collègues féminines m'ont offert un voyage à Pise!

La passion, on la ressent dans le phrasé, le geste de Vinciane. En parlant, elle mime le travail sur le continu à filer. Elle nous explique: la fragilité du fil, l’intégration du lycra, le risque de casse. Tous les souvenirs sont intacts. "On était bien payées, c’est sûr. En plus, on avait un bon petit groupe de collègues, on s’entendait super bien. On s’entraidait. Quand l’une avait fait du bon boulot, elle allait aider les autres. C’était une bonne époque."

Etsesjoies!

Vinciane Delqueux relate son expérience chez Tiberghien : "J’étais au continu à filer. J’adorais mon métier, même si c’était dur. Il fallait surveiller tout le temps car le fil est fin, ça casse… Il faut avoir les bobines à l’oeil. C’est un travail difficile. Parfois on ne mangeait pas, on ne prenait pas de pause ! J’avais une peur bleue que le fil casse."

"On rigolait bien" Nathalie Delqueux, la soeur de Vinciane, a quant à elle travaillé dans la confection, chez Javanne-Agiva. "Il ne reste plus beaucoup d’ateliers de confection locaux, mais celui-là existe toujours. Il s’agit d’une entreprise très familiale, ça a toujours été le cas. Cet esprit familial se ressentait beaucoup dans le travail ! Même les patrons n’étaient pas distants, il y avait des fêtes, des remises de médaille, etc. On rigolait bien entre nous! On allait se parler à plusieurs aux toilettes, c’était un peu notre endroit de convivialité."

Mouscron, histoires de textiliennes

"Je suis arrivée chez Tiberghien en 1983. Puis j’ai continué chez Utexbel, au même endroit, après la reprise. 39 ans dans la filature ! J’adore mon travail, malgré que ce soit assez dur à certains moments. J’ai créé des liens avec quelques collègues. Des amitiés de 40 ans, on a partagé des moments inoubliables, familiaux…" (Barbara Himpe, Travailleuse chez Utexbel - Photo M.Cosaert.)

Le textile au fil des femmes...

Unautreregard,etunetransmissiondesavoir

Un rôle social Mais Nicole rebondit vite. Elle fera brièvement des démonstrations de fromages dans des grandes surfaces, avant de lancer une nouvelle chaîne de confection. Mais cette fois, dans un contexte très différent. "Je suis entrée au Trait d’Union en 1981. Là, c’est autre chose. Je travaille avec des personnes handicapées, des femmes. Beaucoup de jeunes filles aussi. J’ai dû leur apprendre le métier individuellement. Elles ne savaient pas piquer à la machine! Et il s’agissait de machines industrielles, pas de petites machines à coudre! Mais elles étaient motivées." La sauce prend. Nicole et son équipe créent des t-shirts, des sweat-shirts… Elles travaillent en sous-traitance pour l’entreprise Texim. "Il fallait avoir beaucoup de patience. C’est vrai que je devais souvent réexpliquer les mêmes choses, mais ces filles étaient de très bonnes personnes. Certaines vivaient dans des foyers, n’avaient pas eu la vie facile. L’une d’elles m’a dit ‘Nicole, tu es comme notre maman’. Il y avait un rôle beaucoup plus social que dans mon poste précédent."

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de textiliennes

En 1994, à 60 ans, Nicole Croquison prend sa pension. Sans aucun regret, et avec beaucoup de bons souvenirs. Elle en parle avec émotion. "Je le referais. Rien ne m’a déplu. Les métiers étaient différents, mais ça me plaisait de travailler."

C’est la douceur qui caractérise Nicole Croquison. Douceur dans la voix, dans les gestes. Elle marche lentement, à cause d’une chute récente, mais son esprit est vif. Elle nous reçoit dans son appartement, rue de Courtrai à Mouscron, pour nous parler de sa carrière. Née à Mouscron en 1934, de parents français, elle est à l’école au Tuquet dans les années 40. Sa passion, c’est la couture. "J’ai étudié la coupe et la couture jusqu’à 15 ans, puis je suis allée chez une couturière pour apprendre le métier. J’ai été couturière à mon compte, de mes 18 à 22 ans." Nicole crée de tout, jusqu’aux robes de mariées. Indépendante, elle tiendra même une boutique de vêtements "Imperméables, cuir et daim", précise-t-elle – dans la Petite rue. Son parcours prend une tournure différente dans les années 70. "J’ai répondu à une annonce. On cherchait une contredame, dans le cadre de la création de l’usine Nordvex, rue du Plavitout. C’est situé là où se trouvent aujourd’hui les ateliers communaux. Nordvex travaillait en sous-traitance pour Volvo, en Suède. Il y avait deux secteurs: celui de la mécanique, et celui de la confection de housses pour l’intérieur des voitures, le recouvrement des sièges. C’était ma première expérience dans une usine, et ça m’a beaucoup Nicoleplu." doit se former à ce nouveau métier, en vue de mettre sur pied la chaîne de confection. "Je suis même allée en Suède, chez Volvo, pour m’initier à ce travail. Deux fois par an, nous allions également à l’usine de Gand, en présence de la direction suédoise, pour nous former aux nouveaux modèles, aux éventuelles modifications. C’est dans cette période que j’ai appris à me débrouiller en néerlandais, en anglais… J’avais des parents français, donc le néerlandais, ce n’était pas parlé à la maison! Mais j’ai trouvé ça intéressant!"

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Mouscron, histoires

L’équipe Nordvex est constituée d’une vingtaine de femmes, l’ambiance est bonne. "On s’entendait bien! Mais on n’avait pas beaucoup de temps pour discuter! Chacune était à sa machine, on travaillait." Malheureusement, l’aventure Nordvex s’achève en mai 1981… Les commandes s'arrêtent, Volvo stoppe la sous-traitance, et c'est le licenciement. fils.ensemble1978:lescollèguesdechezNordvexrendentvisiteàNicole(enàcarreaux)etsafille,pourlanaissancedesonpremierpetit-

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Le textile au fil des femmes / Contenu de l'exposition by aure.cool - Issuu