Fig. 1. Détail, Saint Roch, pierre, xvie siècle, Préty (Saône-et-Loire), église paroissiale.
traits menus et juvéniles du saint. Toutefois, sur l’œuvre étudiée, le canon plus trapu de la monture de Martin rappel davantage
celui du cheval du groupe contemporain de l’église de Scey-sur-Saône-et-Saint-Albin 3. Mais au-delà de ces rapprochements formels, les disparités stylistiques demeurent. Il faut se tourner vers le célèbre saint Roch de Préty pour trouver un équivalent dans le traitement si particulier de la chevelure de notre saint, en longues mèches scandées de larges boucles souples superposées (fig. 1) 4. Pour autant, de par l’expressivité inouïe qui se dégage du visage du mendiant et de la musculature puissante de son torse dénudé, notre sculpture apparaît comme une œuvre tout à fait singulière dans le paysage de l’art bourguignon du xvie siècle. Sous les traits ingrats de ce nécessiteux, le sculpteur semble ici donner vie à une allégorie de la misère dont la laideur contraste de manière frappante avec la beauté juvénile du saint. Cette image illustre la dualité des concepts du Beau et du Laid dans la tradition médiévale, synonymes du Bien et du Mal, et rend ici manifeste au travers de cette représentation de la Charité de saint Martin l’ascendant et l’influence qu’est capable de prendre le Divin sur ses contrefaçons.
3. Anonyme, La Charité de saint Martin, pierre, xvie siècle, Scey-sur-Saône-et-Saint-Albin (Haute-Saône), église Saint-Martin. 4. Anonyme, Saint Roch, pierre, xvie siècle, Préty (Saône-et-Loire), église paroissiale.
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