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la tribune de marrakech

novembre 2015

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souks, marchés & MÉTIERS de rue

Ces hauts lieux du commerce et du tourisme, coeurs battants de la ville, sont de véritables labyrinthes d’échoppes et d’ateliers artisanaux, organisés par quartiers et par métiers, regroupant plus de 2.600 artisans pour une vingtaine de corporations. Les allées centrales qui traversent les souks sont réservées aux échoppes de ventes, alimentées à l’origine par les artisans qui travaillent dans les ruelles adjacentes. Notre sélection de lieux immanquables pour flâner, s’imprégner d’images bigarrées et d’odeurs épicées, marchander tout et surtout n’importe quoi, rencontrer des personnages attachants, et repartir tout rempli d’émotions... Le moins cher des marchés de fruits et légumes du centre de la médina. Tous les produits de saison vendus à même le sol sur la placette et le long de la rue Azbetz, à des prix imbattables. Et aussi, poissonniers et boucheries avec pignon sur rue. Ouvert 7/7, 9h30-16h - Angle rues Sidi Ishak et Azbezt

Marché couvert du Mellah

Le plus “chic” des marchés intra-muros. Des roses, du poisson frais, de l’excellente viande, des volailles beldi, et même de la salade roquette… Le meilleur des produits locaux, et aussi, quelques “exotismes” importés. Vous pourrez commander les warka, feuilles de pâte extra fines, cuites sur une plaque bombée utilisée pour la préparation d’une pastilla. Et profitez du spectacle ! Ouvert 7/7, dès 9h. Coupure 14h-15h30 pour certains étals. Avenue Hoummane El Fetouaki

Souk el Khémis

Vendeurs au sol d’un bric-à-brac improbable, boutiques de brocante, designers, artisans ferronniers, menuisiers, marché aux légumes, une kyrielle de snacks de rue… On trouve de tout dans cet immense marché aux puces, aussi vaste qu’un quartier, où se tenait anciennement un souk de dromadaires et de bétail. Ouvert 7/7 - Bab el Khémis

Kissaria Moulay Moustapha

À quelques mètres de sa grande sœur Jemaa el Fna, la place de Bab Fteuh accueille la kissaria Moulay Mustapha, dédiée aux fruits secs (dattes, pruneaux, abricots), aux noix, aux amandes, au miel… Avec la rue de la Koutoubia, c’est l’un des endroits de la médina où l’on confectionne les plateaux de douceurs pour les offrandes de mariage. Ouvert 7/7, 9h30-21h ou plus selon les boutiques - Bab Fteuh

Place des Épices

Moins célèbre que sa voisine, Jemaa El Fna, cette place a un charme fou et son rôle est légendaire. Depuis des siècles, la Rhaba Kedima -ou “place ancienne”- assure sa fonction de centre névralgique dans le quotidien marrakchi. Lieu de commerce depuis le XIIe siècle, elle faisait alors office de marché aux grains, proche du marché aux esclaves. Sur cette place triangulaire aux mille couleurs, où campent tout le jour durant des vendeurs en tout genre, rien ne s’arrête jamais, à l’ombre des parasols bariolés qui poussent partout comme des fleurs. En son centre, des paniers d’osier, des bonnets et chapeaux s’étalent sur des rangées précaires et colorées, que côtoient les vendeuses de henné ou de khôl, d’écorce de noyer pour les dents, et de poudre de coquelicot pour colorer lèvres et joues. Sur sa circonférence, des boutiques d’herboristeries regorgeant d’épices, de plantes médicinales, d’encens, d’animaux étranges, d’élixirs aux pouvoirs discutables, font face à des boutiques de tapis étalant leurs

Khadoj, la reine du henné

motifs chamarrés au soleil. Les cafés et restaurants prennent le relais des négoces pour prolonger l’animation des lieux. De fait, du matin au soir, cette place alerte et vivante est toujours dans une bouillonnante activité. Les étales débordent, les touristes chinent, les vendeurs s’agitent, les habitués vont droit à leurs emplettes. Une véritable immersion dans le tourbillon perpétuel marrakchi.

les métiers de rue

La médina regorge de petits métiers ancestraux et indispensables, parfois menacés de disparition par la modernisation tous azimuts qui guette ce quartier plein de charme. Le carossa, un incontournable de la médina, transporte absolument tout dans sa petite charrette roulante, qu’il charge de valises en direction des riads, mais aussi de couvertures, de laine de mouton et de mille autres choses, qu’il convoie jusqu’à destination. Le barbier rase et coiffe ces messieurs dans sa micro boutique donnant sur la rue, avec tout l’attirail pour leur tailler une barbe parfaite. Le rémouleur aiguise les couteaux sur sa meule, dans un tintamarre familier. Le cordonnier donne à vos chaussures une seconde jeunesse, grâce à son atelier ambulant. Le conteur, réceptacle vivant de la transmission orale du Maroc, raconte récits poétiques, histoires d’amour et contes pour enfants ; rendez-vous place Jemaa el Fna pour l’écouter.

L’écrivain public, ancêtre du journaliste, rédige pour qui ne peut le faire, courriers administratifs et missives de tout type. Le cireur de chaussures redonne du brillant à nos souliers, tandis que le chanteur de rue, seul ou en groupe, nous ravit de son répertoire de musiques traditionnelles antiques. Pour faire plaisir à sa belle, offrons-lui les services de la dessinatrice de henné, ou bien un bouquet de roses auprès du jardinier ambulant, qui transbahute sa cargaison de plantes et de fleurs dans son caisson roulant. Si un petit creux se fait sentir, pas de panique, les vendeurs de fruits, de légumes ou de jus ne sont pas loin. On croise aussi le vendeur de cigarettes au détail ; ainsi que les vendeurs ambulants de café ou d’eau, l’égoutier qui débouche les canalisations, la prédicatrice prête à vous sortir ses mystifications, et même le vendeur d’encens et de plantes à brûler, auquel on fait appel pour remercier Dieu ou conjurer les djinns. Le seul petit métier qu’il nous convient de voir s’éteindre, c’est celui d’arracheur de dents ; la modernité et ses règles d’hygiène sont cette fois les bienvenues !

La figure de la place des épices, Khadoj, la plus ancienne vendeuse de henné du coin. La mémoire des lieux, c’est elle. Indétrônable, elle occupe son territoire de 5m2 de pied ferme. Il faut la voir, assise en tailleur à même le sol, au milieu des passoires et balances, écrasant énergiquement une montagne de henné frais d’un mouvement puissant et mille fois répété, du haut de ses 80 ans… Elle raconte que cela fait 60 ans qu’elle travaille ici. Son mari est mort il y a 7 ans, elle continue leur œuvre commune. Infatigable, elle broie inlassablement son henné de Ouarzazate, tous les jours sauf le vendredi. Elle et ses 2 employées réduisent en poudre 14 kg de feuilles de henné par jour. Les hammams du quartier se fournissent chez elle, car “quand on veut du henné sur la place, on vient chez moi”. Ainsi, celle qui vient des montagnes de Benguérir est devenue, au fil du temps, une vraie marrakchia, qui aime sa place passionnément : “l’ambiance ici est extraordinaire. Cette place est la plus merveilleuse de la ville, on y trouve tout. Tous les produits naturels, et même des poulets, des dindes et des lapins, juste derrière !”, dit-elle en riant, tandis qu’autour d’elle se pressent respectueusement les clients, inconditionnels de son style comme de sa compétence.

Rubrique réalisée par Anastasia Chelini et Raphaëlle Vinon

Marché Azbezt


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