Notre Amitié n° 140, juin 2014

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NOTRE AMITIÉ ANAAJ

Anciens des Auberges de Jeunesse

É T É 2014 N° 140

juin 2014


sommaire Joli mois de mai Mouloud Féraoun Le Fils du Pauvre Les ajistes algériens Méditerranée Sudel Les aubergines de Sudel V’la l’bon vent Les Bernard et l’Anaaj Les ateliers Nos amies disparues Souvenir du Xe Rassemblement

A.  Souche A.Souche Mouloud Féraoun A. et R.  Sedes G.Brenier G.Bop A. et R.  Sedes J.Bernerd C.Bernard S.Lehmann

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La nuit est limpide,

L’étang est sans ride,

Dans le ciel splendide

Luit le croissant d’or !

en couverture (Photo André Souche)

Les côtes tourmentées de Bee-Île-en-Mer


Joli mois de mai ! Mai 2014 ! Voilà un mois de printemps doublement évocateur D’abord, pour l’ensemble du mouvement ajiste, c’est le Xe Rassemblement National, celui dont on disait qu’il ne serait plus possible ! Quatre-vingts anaajistes étaient cependant encore bien vivants à SEMUR en AUXOIS. Du samedi 17 mai jusqu’au mardi 20, et même jusqu’au samedi 24 pour ceux qui avaient pu continuer, que de souvenirs, jour après jour, en si peu de temps ! D’abord la revoyure : trois ans déjà depuis le neuvième à Paris ! Nous avons tous un peu changé, un peu vieilli, – faut-il le dire ? Mais nous sommes restés les mêmes, avec nos valeurs, avec nos convictions, et aussi notre façon de faire la fête, lorsque nous nous rencontrons. C’est un peu ce que nous avons dû répondre aux journalistes de France 2 venues s’informer sur les AJ (ou sur l’ajisme ?). Qu’en feront-elles à la Télé ? Notre Rassemblement, c’était bien sûr, la découverte de Semur en Auxois. Une belle ville médiévale, aux pavés cahotants. Aux dernières munip, le maire Front National a été éjecté. Nos plaisirs savent aussi se trouver par là. A la Grande Forge de Buffon, nous avons trouvé un bel exemple de rationalisme et d’harmonie cher au Siècle des Lumières. L’abbaye de Fontenay nous a fait découvrir un chef-d’œuvre d’architecture cistercienne. Les Grottes (modestes) d’Arcy sur Cure ont déçu quelques copains. Le Château et les jardins de Bussy-Rabutin, sous un beau soleil, ont passionné les photographes. La croisière sur le canal de Bourgogne, où les paysages se limitaient à la voute en tunnel, m’a semblé être un peu une arnarque. La colline de Vézelay et sa basilique, chef-d’œuvre de l’art roman bourguignon, étaient vraiment la surprise du 22 mai. Flavigny, un très beau village, et le site d’Alésia (où Vercingétorix dut s’agenouiller), pour notre dernier jour de découverte.

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Notre Rassemblement, c’est aussi nos veillées. Celle du samedi soir, celle de la revoyure, fut une réussite. Les journalistes, sans doute intriguées par nos chants, l’ont particulièrement filmée. Mais c’est la soirée médiévale qui fut un triomphe ! Nous avons tous su trouver les astuces et les trouvailles pour persuader tout le monde que nous étions au moyen-âge. Notre « moyen-âge » à nous ! Nos travestis seront, je l’espère, bien représentés dans le film que je compte faire avant l’automne. Enfin, le folklore bourguignon fut magnifiquement représenté par le spectacle des Sansonnets. Il se termina spontanément par un final ajiste et bourguignon qui restera dans nos mémoires et dans celles de nos amis de Semur. Voila ! Ce dixième Rassemblement a vécu. Qui peut dire qu’il n’y aura pas un onzième ? C’est le moment de dire un grand merci aux anaajistes d’Île de France, et surtout à Annick qui en a pris la très grande part. Ils ont su préparer ces retrouvailles de la meilleure manière. Un grand merci aussi au personnel de VVF pour l’accueil et l’anima-tion.

Ce mois de Mai 2014 c’était aussi, jour pour jour, le SOIXANTIèME anniversaire de l’inauguration de l’AJ de la Hacquinière. Pour ceux qui restent de l’équipe, ici à Semur ou dans leurs villes de retraite, c’était un grand jour ! Jean BERNARD et Martine CHALVIN auraient dû être là, parmi nous ! Vaincus par le cancer en février et avril, l’un au travers des souffrances, l’autre si brutalement. Nous pensions beaucoup à eux. 4

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Mouloud Féraoun Dans NOTRE AMITIE du mois de mars, lors de mon « au revoir» à notre ami Jean Bernard, j’évoquais le souvenir du montage-lecture du Fils du Pauvre que nous avions réalisé, Jean et moi, lors de la venue de l’écrivain Emmanuel Roblès à l’AJ-Relais culturel de la Hacquinière. La sœur de Jean me rappelait récemment qu’elle et son mari Lulu étaient les « chefs » du grand colo pour cette visite importante. Voici donc l’occasion de parler de Mouloud Féraoun et de son roman autobiographique Le Fils du Pauvre. Assassiné par l’OAS à 4 jours du cessez-le-feu, il aurait aujourd’hui 101 ans. André Souche

Mouloud Féraoun est né le 8 mars 1913 dans le village de Tizi-Hibel (ancienne commune mixte de FortNational), son nom est Aït-Chabane, Feraoun étant le nom attribué par l'état-civil français. Il fréquente l'école de Tizi-Hibel à partir de l'âge de 7 ans. En 1928, il est boursier à l'Ecole Primaire Supérieure de Tizi-Ouzou. Il entre à l'Ecole Normale de Bouzaréa en 1932 où il fait la connaissance d'Emmanuel Roblès. En 1935, il est nommé instituteur à Tizi-Hibel où il épouse sa cousine Dehbia dont il aura 7 enfants. En 1946, il est muté à Taourirt-Moussa. En 1952, il est nommé directeur du Cours Complémentaire de Fort-National. En 1957, nommé directeur de l'Ecole Nador de Clos-Salembier, il quitte la Kabylie pour les hauteurs d'Alger. En 1951, il est en correspondance avec Albert Camus. Le 15 juillet, il termine La terre et le sang récompensé en 1953 par le prix populiste. En 1960, il est Inspecteur des Centres Sociaux à Château-Royal près de Ben-Aknoun. Avec cinq de ses collègues, c'est là qu'il est assassiné par l'OAS le 15 mars 1962 à quatre jours du cessez-le-feu. Mouloud Feraoun a commencé son premier roman autobiographique Le Fils du Pauvre en 1939 ; il n'est publié qu'en 1950 à compte d'auteur. Ce n'est qu'en 1954 que Le Seuil le publie, expurgé des 70 pages relatives à l'Ecole Normale de Bouzaréa. Les éditions du Seuil publient, en 1957, Les chemins qui montent; la traduction des Poèmes de Si Mohand étant éditée par les Editions de Minuit en 1960. Son Journal, rédigé de 1955 à 1962 est remis au Seuil en février 1962 et ne sera publié qu'après sa mort. 5


Le Fils du Pauvre Dans cet ouvrage, tel un livre ouvert, Mouloud Féraoun projette sa propre vie sur Fouroulou Menrad (anagramme de son propre nom) et nous parle de sa famille au complet, où chacun a sa place. Les aïeux sont respectés, les petits sont éduqués, les forts sont craints et les faibles protégés. Il y a quelques jalousies et moqueries, comme dans toutes les communautés d'ailleurs, mais Fouroulou demeure le petit préféré de tous. Un bled dans les belles montagnes de Haute-Kabylie. Les habitants vivent à la limite de la misère. Ils se battent pour que la joie ne quitte pas leur foyer. Le père est le pilier, et il se tue à la tâche pour nourrir les siens et pour préserver l'équilibre précaire des finances. Il doit donc venir comme ouvrier en France où il est grièvement blessé dans une usine d’Aubervilliers. La mère, les tantes et les sœurs travaillent dur aussi aux champs, au tissage et à la poterie. Elles adoucissent les jours par leurs rires, leurs caresses et leurs chansons et la perte de ses tantes fut un moment douloureux pour le jeune Fouroulou. Il se découvre un appétit certain pour l'école. Sa fierté est de contenter son père, car malgré lui, il culpabilise de le laisser seul pour les travaux pénibles. En fait, il excelle dans les études sans en avoir le choix. La fin du livre nous apparaît comme un commencement... à suivre. Un livre court qui se lit bien. Un style précis, fluide et familier. Riche de détails sur l'environnement, sur le caractère des personnages. L'auteur explique à merveille les murs et les oliviers et l'on se retrouve sans difficulté au creux des ruelles, vêtus d'une gandoura, on entre dans les maisons et partageons le quotidien, les labeurs et les pleurs.

Un village de Haute-Kabylie Tizi est une agglomération de deux mille habitants. Ses maisons s’agrippent l’une derrière l’autre sur le sommet d’une crête comme les gigantesques vertèbres de quelque monstre préhistorique : deux cents mètres de long, une rue principale qui n’est qu’un tronçon d’un chemin de tribu reliant plusieurs villages, conduisant à la route carrossable et par conséquent aux villes. De larges dalles de schiste sur cinquante centimètres de maçonnerie indécise, comme les pignons des maisons, forment des bancs de la « tadjemaït» sur lesquels viennent s’asseoir les hommes et les enfants. Une faveur spéciale a 6

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doté l’un de ces bancs d’une toiture à claire-voie. C’est le plus recherché à cause de sa fraîcheur en été et parce qu’il abrite en hiver. Le village a trois quartiers et par conséquent trois djemas (les places). Chaque djema a ses bancs de pierre et ses dalles luisantes. Il existe aussi deux mosquées. Les mosquées ont manifestement moins d’importance que les djemas. Vues du dehors, elles ressemblent aux autres maisons leurs voisines. Au-dedans, le sol est cimenté, les murs sont blanchis à la chaux. C’est vide et désolant de simplicité. Les vieux qui y vont prier ont l’air d’appartenir à un siècle révolu. Le café maure est situé hors du village. Ceux qu’il intéresse doivent aller à sa recherche et sortir de l’agglomération. Quelques habitations prétentieuses ont été construites récemment grâce à l’argent rapporté de France. Ces maisons dressent leurs façades impudiques et leurs tuiles trop rouges parmi la vétusté générale. Mais on sent que ce luxe est déplacé dans un cadre pareil. Il existe deux catégories de gens : ceux qui se suffisent régulièrement et ceux qui passent, au gré de la bonne ou de la mauvaise fortune, de la misère la plus complète à l’humble aisance des favorisés du ciel. Les familles riches ont plusieurs figueraies, quelques olivettes, un hectare de terre à semer, parfois une source dans un de leurs champs. Lorsqu’on évalue à la djema les propriétés de tel fellah à un mois de labour, on lit l’admiration et l’envie dans les yeux. Or une journée de labour sur nos terrains escarpés avec une paire de bœufs un peu plus gros que des moutons représente à peine vingt ares. Le gros propriétaire kabyle posséde, lui, six hectares. Il possède du bétail : une paire de bœufs, une vache, quelques moutons, un mulet ou un âne. Son habitation peut avoir deux pièces en vis à vis. Toutes les bâtisses sont construites en blocs de schiste liés avec du mortier d’argile. La toiture est en tuiles creuses reposant sur un lit de roseaux. Le parquet bien damé est recouvert d’une couche de chaux polie, luisante et jaunâtre, qui donne une impression de propreté. Les familles pauvres du village mènent le genre de vie des riches lorsqu’elles le peuvent, sinon elles attendent. Le pauvre n’a pas de terres ou en a très peu. De quoi s’occuper quand il chôme. Son habitation se réduit à une seule pièce. . 7


La famille kabyle Mon oncle Lounis a les traits fins, le regard moqueur, le teint blanc. Il est méticuleux et propre. Je le revois toujours avec une gandoura blanche et un turban soigneusement enroulé. Je l’imagine rarement une pioche à la main, la taille serrée du large ceinturon à clous dorés. Cela lui arrive quelquefois. Alors, il manie l’outil maladroitement, y met de la mauvaise volonté, bâcle son travail. Certes, il est mieux à la djema. Les gens savent qu’il est franc et nerveux. Sa parole est vive. Sa rancune est un feu de paille. Mon père Ramdame est brun, plus solide et plus trapu que son frère, c’est le type du paysan kabyle noueux et bien musclé. Il n’est pas bavard comme Lounis mais timide jusqu’à l’impolitesse, renfermé et apparemment aussi lourd d’esprit que de manières. Il semblait tout destiné aux travaux du fellah. Halima, la femme de mon oncle, est originaire du quartier d’en haut. C’est une grande femme sèche et droite avec deux yeux étincelants, une grosse voix, la main leste et l’allure feline. Ahmed, mon grand-père, était veuf. Il n’ignorait pas que ses filles n’auraient aucun soutien. Mais il n’osa pas leur donner ses propriétés, avant sa mort, ce qui eût été la seule façon de les garantir de la misère. Il craignait pour ses biens, proie facile entre des mains de femmes. Il ne voulait pas que d’autres s’installassent sur ses terrains, fussent-ils des gendres ou des petits-enfants.

Le travail de la poterie en Kabylie Mes tantes travaillaient l’argile et la laine. La courette était toujours encombrée de poterie. Voici, à l’angle, près du portail, un gros tas de bois qui servira à la cuisson. L’argile se travaille dès le printemps. Baya et Khalti vont la chercher dans des paniers, à plusieurs kilomètres du village. Les mottes sèchent au soleil dans la cour, puis elles sont écrasées et réduites en poussière. Avec cette poussière imbibée d’eau, mes tantes font une pâte dont elles emplissent des jarres. La pâte devient consistante au bout de deux jours. Il faut alors la malaxer vigoureusement et lui incorporer les débris d’un vieil ustensile broyé. Les brins de terre cuite ainsi ajoutés forment avec l’argile fraîche une pâte qui ne fendra pas. Il est temps de modeler. 8

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Khalti, le bas de sa gandoura tiré jusque sur les genoux, les bras nus, le foulard relevé en turban, dépose un gros paquet de pâte sur une planche. Elle façonne vivement le fond de la cruche, de la marmite ou du plat. C’est toujours une galette bien ronde. Khalti est attentive, elle travaille vite. Je sais qu’il ne faut pas lui parler. Ce n’est pas le moment. Nana, souriante et très à l’aise, saisit l’argile entre ses petites mains pâles, triture, tâte, caresse : de ses doigts agiles sort une espèce de bâton qui s’allonge, vacille et zigzague comme un serpent. Puis elle coupe la couleuvre en tronçons et, avec précaution, entoure la galette préparée par Khalti. Alors, munie d’une planchette bien lisse, elle tire l’argile, amincit le tronçon et dessine bientôt le bas de la paroi.

L’écolier Kabyle Je me souviens, comme si cela datait d’hier, de mon entrée à l’école. Un matin, mon père arriva de la djema avec un petit air mystérieux et ému. Il n’avait pas son pareil pour effrayer les gens. – Vite, vite, dit-il à ma mère, lave-le entièrement, les mains, la figure, le cou, les pieds. Crois-tu que le cheikh acceptera un singe pareil ? – Il y a aussi sa gandoura qui est sale, dit ma mère. Il faudrait peut-être attendre demain. Je la laverai ainsi que son burnous. – Demain, toutes les places seront prises. Et puis, il vaut mieux ne pas commencer l’école par des absences. Dépêchons-nous ! Ma première journée de classe, ma première semaine et même ma première année ont laissé dans ma mémoire très peu de traces. J’ai beau fouiller parmi mes souvenirs, je ne retrouve rien de clair. Je serais très embarrassé de dire si je fus bon ou mauvais élève, si j’appris beaucoup ou peu. Du moins, je n’éprouvais aucune répugnance à être écolier. J’allais à l’école sans arrière-pensée. Simplement parce que tous les enfants y allaient. Le meilleur moment de la journée était sans conteste onze heures, lorsque nous remontions essoufflés vers le couscous qui nous attendait chez nous. Un soir, après quatre heures, ayant passé le reste de la journée avec des camarades, en dehors du village, je revenais à la maison , une petite flûte entre les doigts, essayant avec acharnement de retrouver un air que je venais d’apprendre. Mon père était sur le seuil de la porte, délaçant ses mocassins. 9


Il arrivait du champ. Ma mère m’avait vainement recherché pour lui faire une commission et avait dû se plaindre de mon absence. – « Le voilà, dit-il, n’aie crainte, il te revient. Et avec une flûte ! Dieu merci, s’il n’apprend rien à l’école, il ne perd pas son temps avec ses camarades. – Ah ! dit mon père. Je ne m’étonne plus que ton maître se plaigne de toi. Je le vois bien, tu es dissipé. C’est à cause de ta paresse qu’il ne t’a pas changé de division, il me l’a dit ». C’était en effet ma deuxième année d’école et j’étais toujours dans le même cours. Cette révélation inattendue me surprit beaucoup. Apparemment, le maître avait parlé de moi à mon père. Moi qui croyais passer inaperçu parmi la cinquantaine de camarades qui formaient la classe, voilà qu’il se rendait compte de mon travail, qu’il me connaissait particulièrement, qu’il connaissait mon père ! C’était donc qu’il connaissait tous ses élèves ! Certainement, il aimait les bons et détestait les mauvais. J’avais beau réfléchir, je ne trouvais pas. Tant pis, il fallait se rendre à l’évidence. Il avait dit à mon père que j’étais un mauvais élève... Mon père pensait m’avoir fait de la peine par le ton sévère qu’il avait pris. Au fond, j’étais presque heureux de constater qu’il s’intéressait à ce que je faisais, qu’il était peiné de me voir parmi les trainards et qu’il partageait cette peine avec le maître. Cette petite réprimande me fit prendre mon rôle au sérieux. J’exagérai mon importance. En réalité, mon père était plus fâché de ma flânerie que de ma mauvaise place à l’école. Je suis bien certain que c’est tout à fait par hasard, au cours d’une conversation ordinaire, grâce à une association d’idées quelconque, que l’instituteur avait parlé de moi à mon père. N’empêche ! Cette scène décida de mon avenir d’écolier : à partir de ce jour, je devins bon élève, presque sans effort. « J’ai écrit Le Fils du Pauvre pendant les années sombres de la guerre, à la lumière d’une lampe à pétrole. J’y ai mis le meilleur de mon être » Mouloud Féraoun

Tous les extraits et toutes les citations proviennent de l’édition «POINTS» des éditions du Seuil, du roman de Mouloud Féraoun. LeFils du Pauvre, dans cette édition, vaut : 5,70 € www.lecerclepoints.com Les citations proviennent d’un choix personnel, dans le désir de montrer le style de l’auteur et de décrire des passages documentaires. André Souche 10

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Point d’histoire :

Qui se souvient encore des ajistes d’Algérie ? On ne parle jamais d’eux et pourtant… Il y avait, « au temps des colonies », trois associations départementales de la FNAJ : Alger, Oran et Constantine, qui rassemblaient, sans distinctions, des militants de toute origine : des « pieds noirs », des « culs verts » (métropolitains !), des Arabes, des Kabyles, des Juifs, des Oranais. Situation quelque peu exceptionnelle dans une société assez ségrégationniste. Leurs AJ étaient implantées dans des localités que la guerre allait bientôt rendre tristement célèbres : Aïn Nadjel, Aïn Taya, Alger, Blida, Bou Saada, Sidi Ferruch, Tipaza, dans l’Algérois, Bougie, Philippeville, SoukAhras, Les Aftis, dans le Constantinois, Cap Falcon et Tlemcen en Oranie. Ces ajistes, si divers, et que nous retrouvions dans nos congrès, organisèrent, en particulier avec les ajistes de l’Isère et de Loire-Atlantique des « caravanes musulmanes » faisant séjourner dans des familles de France des jeunes filles algériennes, avec l’accord de leurs parents. Pourtant, dès le début des années cinquante, nos copains nous alertèrent sur les risques d’une conflagration que personne ne soupçonnait alors de ce côté-ci de la Méditerranée. Nous nous souvenons d’un article paru tout au début de 1954 − il y a tout juste 60 ans − sous leur signature, dans un numéro de Nous des Auberges, et nous mettant en garde, sans détours, à ce propos. A la Toussaint de cette année-là, ce fut chose faite et au cours des années qui suivirent, l’éclatement se produisit : nombre des Algériens rejoignirent le maquis, la plupart des « culs verts » repassèrent la Méditerranée, suivis sur la fin par les « pieds noirs »; (nous 11


nous souvenons de ces trois copains, par ailleurs membres du Parti communiste algérien, que nous avons soustraits aux tueurs de l’OAS, qui les « coursaient » depuis l’aéroport d’Alger pour les abattre…). Les ajistes d’Algérie étaient si conscients de la catastrophe à venir que dans le guide de AJ de 1952, en présentation du réseau algérien, on pouvait lire : « Si les questions sociales t’intéressent, fais-y un long séjour, les problèmes qui s’y posent en valent la peine », « Derrière les fastueux décors, tu rechercheras le pittoresque des ruelles, des casbahs, des foules grouillantes des souks, des bidonvilles insalubres, véritables cours des miracles où se côtoient : pauvreté, maladies, vices et misères », « Tu éviteras les monuments de la conquête qui n’a pas su conquérir les cœurs ». Constats lucides autant qu’amers de ces camarades que nous ne devons pas oublier et qui, dans leur diversité, affirmaient les mêmes principes que nous et pratiquèrent la même fraternité ajiste avant d’être dispersés par le souffle de l’Histoire. Un beau jour de 1963, je vis débarquer dans mon bureau de la FUAJ un ancien ajiste qui avait combattu comme moi dans le djebel, mais de l’autre côté, et qui était devenu attaché à la toute nouvelle ambassade d’Algérie à Paris : il venait simplement dire bonjour aux copains d’autrefois. L’amitié ajiste demeurait et l’avait emporté sur tout le reste… Arlette et René Sedes.

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La Méditerranée Aucune poubelle au monde ne peut offrir pareille variété Tout se passe sur trois fuseaux horaires. Cela va du crottin laissé par un éléphant et charrié par les pluies du Kenya au rinçage de la lessive hebdomadaire d’une mama napolitaine tandis qu’à la même heure le soleil fait fondre les dernières neiges de Saronovo, près de Smolensk. Toutes ces eaux en mouvement finissent dans la Méditerranée. Cela comporte les égouts de Bratislava et de Constantine, ceux de Dijon et d’Ankara, cela inclut les champs aspergés de produits chimiques, du Dobroudja jusqu’au plateau marocain, riche en phosphates. A tout cela s’ajoutent les lisiers des élevages en batterie de Hongrie et d’Espagne, les eaux dites « de refroidissement » dont Tchernobyl nous a livré un spécimen, les eaux « industrielles » du bassin du Donets et, dans les quarante-six pays qui alimentent de manière invisible le bassin de la Méditerranée, les urines chargées des produits Bayer, Roche, Sanofi-Aventis et autres Pechiney. Toutes les médications que nous absorbons et que nous restituons pour le grand malheur des poissons et crustacés.

46 pays ? Burundi, Rwanda, Congo, Tanzanie, Kenya, Soudan, Ethiopie, Erythrée, Egypte, Gaza, Israël, Cisjordanie, Liban, Syrie, Chypre, Turquie, Libye, Malte, Tunisie, Algérie, Maroc, Géorgie, Russie, Ukraine, Biélorussie, Moldavie, Roumanie, Bulgarie, Hongrie, Slovaquie, Tchéquie, Grèce, Macédoine, Albanie, Kosovo, Monténégro, Serbie, Bosnie, Croatie, Slovénie, Autriche, Suisse, Allemagne, Italie, France, Espagne, ce qui fait bien 46 pays en omettant Andorre, Monaco et San Marin (En italiques : les pays dont la totalité des eaux vont à la Méditerranée). Le Nil (4.800 m³/sec), le Don (900 m³/sec), le Dniepr (1.670 m³/sec), le Danube (6.500 m³/sec), le Pô (1.560 m³/sec), le Rhône (1.710 m³/sec), l’Ebre (425 m³/sec) et divers fleuves côtiers pour 5.000 m³/sec, pour un total de 22.565 m3/sec. 13


Cela signifie que chaque jour 20 km³ d’eaux chargées de toutes nos turpitudes se déversent dans cette mer qui fut le berceau de la civilisation occidentale.

En examinant la carte ci-dessus, on imagine les eaux des grands fleuves cités allant finalement se jeter dans l’Atlantique par le détroit de Gibraltar.

Or, c’est exactement l’inverse qui se produit : L’évaporation naturelle est plus importante que l’apport des eaux fluviales. Dit d’une autre manière, pour conserver son niveau, la Méditerranée doit prélever de l’eau à l’océan Atlantique (déficit d’environ 3 000 millions de m³/an). Que se passe-t-il alors ? L’eau de la mer s’évapore mais les saletés demeurent et s’accumulent dans les fonds… ainsi les Etats européens entretiennent la plus belle poubelle de l’histoire de l’humanité. Et Bruxelles ne semble pas être au courant. G. Brenier. 14

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SUDEL C'était la première fois que je pouvais assister à cette réunion annuelle dite "Sudel". Je vais vous raconter : Chacun apportant sa participation à l'élaboration de ce repas très convivial On installe sur une première table toutes les préparations concernant toutes les petites gourmandises destinées à l'apéritif. Sur une deuxième table, on met les plateaux de fromages. - une première copine passe et dit : "ça ne va pas, j'ai besoin de la table pour exposer les hors-d'oeuvres ; elle prend les plateaux et les porte sur la grande table (celle prévue pour l'apéro). - une deuxième copine passe et dit : "ah non ! pas les fromages à côté des toasts et des quiches ! elle prend les plateaux de fromages et les remet sur la deuxième table. - une troisième copine arrive avec les plateaux des hors d'oeuvres qu'elle ne peut poser, les fromages ayant investi les lieux. - finalement, une quatrième copine a enlevé les plateaux indésirables et les a consignés à la cuisine. Jeannine et moi, qui assistions aux ballets des plateaux, avons pouffé de rire. Enfin, voici le moment de l'apéritif ; on nous a servi un vin blanc merveilleux (je n'ai pas regardé l'étiquette et je le regrette) ; je l'ai bu nature : c'était délicieux et je continue à penser que c'est un sacrilège d'y ajouter framboise ou cassis. Je termine en vous disant que nous avons tous eu la surprise et un grand plaisir de voir Guy et Madeleine Brenier. Amitiés de tous pour eux deux. Geneviève Bop Rectification sur un article paru dans Notre Amitié n° 136 de juin 2013 A la page 6 de ce bulletin, les paroles de la chanson citée ont été "censurées". Le texte ainsi modifié ne veut absolument rien dire ; voici les paroles exactes Bonjour à vous, bonjour chers camarades, Soyez ici chez vous, soyez ici chez vous, Si vous aimez les rires et les danses Vous serez bien chez nous, vous serez bien chez nous Si vous aimez les jeux et les gambades Restez donc avec nous, restez donc avec nous Mais si vous ne chantez pas en cadence, Prenez bien garde à vous, prenez bien garde à vous." Geneviève Bop 15


Les aubergines de Sudel 2014 Plusieurs camarades nous ayant demandé la recette des entrées d’aubergines, tomates et poivrons servies à notre dernier Sudel, voilà qui est fait…

C’est une recette dérivée de l’escalivada catalane (littéralement : « braisée »), adaptée à un buffet froid. 1°) Aubergines : prendre de belles aubergines, les découper en tranches d’un cm. dans le sens de la longueur, puis les saler (au gros sel) et laisser dégorger une heure au moins dans un plat profond. Ce délai passé, rincer les tranches à l’eau froide, puis les essorer avec du papier absorbant. Les faire venir à la poêle, à l’huile d’olive et par petites quantités, sans laisser brûler. La cuisson est terminée lorsque les tranches deviennent transparentes. 2°) Tomates : choisir des tomates assez grosses. Les couper en deux perpendiculairement au pédoncule et éliminer les graines et le jus avec un couteau pointu. Poser sur une plaque à four, revêtue de papier de cuisson (surtout pas de papier alu !). Enfourner à feu doux (150°) pendant environ deux heures et retourner les tomates deux à trois fois. La cuisson est terminée quand les tomates ont perdu toute humidité, sans griller pour autant. Attendre leur refroidissement avant de les manipuler. 3°) Poivrons : utiliser des poivrons assez gros (peu importe la couleur, sinon pour la décoration…). Les enduire légèrement d’huile d’olive avant de la mettre à four chaud (280°), sur une plaque revêtue de papier de cuisson. Les retourner de temps à autre et les retirer du four dès que la peau commence à noircir sur toutes les faces. Envelopper chaque poivron dans un sachet plastique (pour faciliter l’épluchage) pendant un quart d’heure. Les retirer de leur sachet et les couper en deux dans le sens de la longueur, éliminer le jus de cuisson (attention : ça brule !), le pédoncule, les téguments et les graines. Oter délicatement la peau transparente (et indigeste…) avec la pointe d’un couteau. Laisser refroidir avant de les découper en grosses lanières régulières et en sacrifiant les deux bouts.. Assaisonnement : saler et poivrer légèrement (sauf les aubergines !), arroser d’un filet d’huile d’olive et de vinaigre balsamique et terminer par une persillade à l’ail. Arlette et René Sedes. 16

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V’la l’bon vent, v’la l’joli vent Depuis quelques décades, il est beaucoup question des éoliennes. On en voit fleurir partout dans nos campagnes. Certains sont contre, ils disent que cela fait moche dans le paysage (il y a bien des pylones électriques dans les campagnes et personne ne s'en offusque), certains pensent que les éoliennes font trop de bruit, qu'elles perturbent le vol des oiseaux - j'ai vu une cigogne perchée sur le haut d'une éolienne à l'arrêt, peut-être, prenait-elle du repos - d'autres sont pour, au prétexte que c'est une énergie nouvelle et d'avenir. Qu'en est-il exactement ? J'avoue, pour ma part, que je n'ai pas d'idée précise sur la question. Pourtant, je reçois d'un correspondant, ingénieur responsable à EDF, cette communication qui me laisse pantois (je n'ai aucune raison de mettre en doute ses paroles). Il écrit :

Sources : WWW.notreplanete-info

« Connaissez-vous Biville-sur-mer en Seine Maritime ? C'est un petit village du littoral près de Dieppe où six éoliennes sont récemment sorties de terre ; six engins de dernière génération qui occupent quatre kilomètres du littoral normand et dont les pales culminent à 85 mètres de hauteur. Chaque éolienne a une puissance maximale de deux mégawatts quand le vent souffle fort. Ce n'est pas grand chose comparé aux 2600 mégawatts qui sortent en permanence de la centrale nucléaire voisine, mais c'est déjà ça, surtout quand il fait très froid. » 17


Depuis quelques jours, il n'y a qu'une seule éolienne qui tourne ; les cinq autres seraient-elles privées de vent ? Que nenni, du vent, il n'y en a pas depuis plusieurs jours, ce qui est généralement le cas quand il fait très froid ou très chaud. C'est la nature, l'homme ne lui dicte pas encore sa loi. Mais alors, s'il n'y a pas de vent, comment expliquer qu'une éolienne, seule, est en fonction ? La réponse est simple : on veut nous faire croire à fond aux énergies renouvelables, alors on n'hésite pas à tricher pour en cacher le mauvais côté. Tout simplement, on en fait tourner une... au moteur, en lui donnant du courant ; ça consomme un peu d'électricité, mais on peut croire que ça produit de l'énergie. Il fallait y penser ! En France, on n'a pas de pétrole mais on a des idées ; ça coûte très cher, ça rapporte peu, mais l'essentiel n'est-il pas de montrer qu'on a du savoirfaire . Pourquoi ne nous-dit-on pas la vérité ? Un débat à la télé avec des gens compétents à l'heure d'une bonne écoute, cela pourrait être instructif pour tous. Quel lobby y a-t-il derrière cette implantation à outrance ? Qui a intérêt à nous cacher la vérité ? Eolienne ou pas, l'électricité nous coûte de plus en plus cher, ce qui fait l'affaire d'EDF. Jean Bernard

Cet article fait partie des nombreux documents que Jean Bernard nous a laissés. Ils nous permettent, via le souvenir, de garder en mémoire la façon dont Jean savait nous entretenir des sujets que l’actualité nous propose.

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Les « Bernard » et l’Anaaj Des « Anciens », ceux qui avaient construit puis géré l’auberge de la Hacquiniére (en vallée de Chevreuse) ont souhaité se rencontrer, pour les 40 ans de cette aventure. Beaucoup d’entre eux ne s’étaient pas vus depuis des années. La rencontre eut lieu à Bures en 1994 et a réuni une cinquantaine d’anciens ajistes, dont Jean qui en faisait partie et moi (ancienne du groupe de Montgeron ), pour faire leur connaissance. Puis, fut décidée une deuxième rencontre, cette fois autour d’un couscous dans un resto à Paris. Henri Chardin, qui habitait Bordeaux et ne pouvait se rendre à Paris, téléphona à Lucette et Jacques Le Flem, leur expliquant qu’un groupe d’anciens s’y réunissait. Lucette et Jacques se rendirent à ce resto, partagèrent le repas et nous remirent des exemplaires de « Notre Amitié », nous parlant de l’Anaaj et de ses nombreuses activités. C’est ainsi que Jean et moi pûmes faire connaissance avec l’association en nous rendant aux projos, puis au Sudel, et pour moi, surtout lors de nos randonnées. Depuis beaucoup d’anciens de la Hacquinière nous ont rejoints. J’ai, à l’âge de la retraite, apprécié de faire un bond de 40 ans en arrière, en retrouvant les principes même de l’ajisme, l’amitié, la tolérance et je me suis fait de nouveaux copains. Catherine Bernard

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Les ateliers Le panneau lumineux de la place Foch me le rappelle : mardi 4 mars, atelier d'écriture à 8 h, salle de l'Europe. Claude nous a donné quelques indications, mais comme toujours, je vais faire ce que je crois comprendre, et pour tout dire, faire comme je veux ! L'atelier pour moi est un moment de plaisir. Ce que je peux écrire me permet de raconter à mes petits enfants mon monde d'autrefois. Celui de ma mère : Marie Rachel Fischel, née à Sosnowitz, Pologne, en 1898. Arrivée en France, un seul débouché : l'atelier de confection. Travailler pour un petit confectionneur, travail à façon. La dernière arrivée a les tâches les plus mal payées. Dans le logement du patron, ils sont quatre ou cinq. Les mécaniciens font vibrer les machines à coudre, le presseur met en forme le vêtement. Le fer chaud et la pattemouille dégagent une forte odeur d'ammoniaque dans un nuage de vapeur qui colle aux vitres. Maman fait tout le travail à la main, les doublures, les boutons. Dans chaque vêtement, il y a des tickets pour le travail qu'on fait. Je revois ma mère, le samedi, qui compte ses points et remet tous les petits coupons dans une boîte de pastilles Valda. Ce qui m'intrigue, c'est sa façon de compter sur ses doigts : en France, on ouvre la main en commençant par le pouce. Ma mère compte en polonais, en rabattant les doigts. Dans cette pièce-atelier, c'est la vraie vie, on parle, on rit, on se dispute, on boit le thé avec du citron et l'on croque le sucre comme les gens du Nord. Les enfants apportent le français avec les devoirs pour l'école, en prenant un petit coin de table. Le soir, on dîne d'un café au lait et des 20

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tartines. Ma mère, de temps en temps cuisinait avec goût un bouillon bien gras et compote de pommes. J'ai connu cette façon de vivre avant la guerre. Peu de familles ont été épargnées, beaucoup ont été déportées avec les enfants. Pendant l'Occupation elle gagna quelques sous en faisant des ménages. Elle ne pouvait pas parler car son accent était têtu. Pour payer sa fausse carte d'identité, elle cassa ses deux couronnes dentaires et vendit l'or. Ma mère connaissait des proverbes yiddish pour bien des situations : "Les larmes c'est le seul stock qui ne s'épuise jamais" ; elle connaissait bien les soucis de Tévé le laitier, le souci des filles à marier... Après la guerre, d'autres ateliers. Maman, toujours finisseuse expérimentée. Dans son dernier atelier, on m'offrit le tailleur pour mon mariage. Un beau tissu, un modèle copié chez un grand couturier. Elle pleurait en écoutant Edith Piaf, les chansons réalistes la bouleversaient. Renée Lebas chantant "Tire, tire l'aiguille ma fille, demain tu te maries..." lui donnait confiance pour mon avenir. Merci à Jean-Claude Grumberg pour ses livres et sa pièce "L'atelier". Merci à Victor Zygelman pour la mémoire de Paris. C'était en 1942, j'avais 16 ans, pas d'étoile et faux-papiers. Après les rafles de juillet, les logements avaient été mis sous scellés avant d'être vidés de leur mobilier. Je passais dans la rue Julien Lacrois à Belleville. Les déménageurs chargeaient leur camion et rejetaient dans le caniveau le contenu des tiroirs, papiers et photos de famille des juifs arrêtés. Je n'ai pu alors ramasser ces tristes souvenirs. "Celui qui n'a pas de passé n'a pas d'avenir !" Solange Lehmann février 2014 21


Marthe Chalvin Notre ami Martine nous a quitté brutalement ce 29 mars. Nous avons tous été surpris, car elle venait de se faire poser une prothèse totale du genou, bien loin de ce départ subit ! Martine était un peu l’intellectuelle de notre foyer Bivouac. C’est elle qui m’a initié à la musique classique en m’inscrivant, voici soixante ans, aux Jeunesses Musicales de France. Elle s’est aussi intéressée au TNP, lorsque je faisais venir les Saint-Mauriens en bus pour assister aux représentations au Palais de Chaillot. Nous y avons rencontré ensemble les grands comédiens de l’ère Jean Vilar. Que de souvenirs ! Elle participait peu aux activités de l’Anaaj, mais était assidue aux sorties Théatre. Après Jean en février, les anciens de la Hacquinière voient avec amertume et tristesse leurs amis disparaître, petit à petit ! André Souche

Liliane Leclerc Comme une bougie, notre amie Liliane Leclerc s'est éteinte début mai, à 92 ans, ; nous l'avions vue au dernier SUDEL, épuisée mais souriante comme toujours. Devenue aphone depuis quelques années, très discrète déjà auparavant, peu d'entre nous savait qu'elle avait fait partie d'un réseau de résistance, parmi les Cam'routes de Montluçon, ville où sa famille, juive, s'était réfugiée pendant la guerre. De nombreux hommages émouvants lui ont été rendus lors de la cérémonie à Montreuil. Denise Bloch

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RASSEMBLEMENT

SEMUR en AUXOIX MAI 2014


BULLETIN  INTERIEUR des ANCIENS  et AMIS  des AUBERGES  de JEUNESSE Maison des Associations - Boîte 31 35-37, avenue de la Résistance 93100 - MONTREUIL

Parution : mars, juin, septembre, décembre Textes et dessins à adresser au plus tard pour le 30 du mois précédant la parution Responsable de la publication : Denise Bloch - 7, rue Hoche - 93100 - Montreuil Tel : 01 48 57 07 81 Courriel : bloch.denise@orange.fr

Le site Internet de l’AnaAJ - Paris

anaaj.paris.free.fr Sur ce site, vous trouverez : - les origines de l’anaaj et le texte fondateur - les numéros de NOTRE  AMITIé - les textes produits pour le bulletin par Guy Brenier, Jean et Catherine Bernard - le Diaporama d’André Souche sur l’AJ de la Hacquinière - les photos de la Découverte des Villages perchés en mai 2004 De nouveaux documents vont bientôt se trouver sur le site


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