Les ksours de Figuig ou l'espoir d'une sauvegarde

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conservation. Il s’agit d’une pièce généralement située au rez-de-chaussée avec une toute petite ouverture, à peine assez large pour ventiler un peu l’espace mais aussi pour permettre au chat d’entrer et de sortir, pour nettoyer et chasser toutes bêtes pouvant nuire à leurs récoltes et produits stockés. Aujourd’hui ce Bayt Lakhzin6 est encore utilisé, même dans les maisons inhabitées. D’après ma visite sur place et les entretiens menés, on observe que les familles visitent leur ancienne habitation dans le ksar pour cette pièce. On se poserait alors la question de savoir s’ils le font par nostalgie ou par habitude. Puisque avec la techniques d’aujourd’hui, on arrive quand même à conserver des aliments au frais dans des réfrigérateurs des chambres froide. À moins que la raison ne soit économique? En tout cas d’après les échanges que j’ai eu avec les habitants poursuivant encore ces pratiques, comme le stockage de dattes dans les jarres enterrés7, les deux raisons sont valables. En effet, cela coûte cher de construire une chambre froide et cela permet également de jeter un coup d’œil sur leur héritage (très souvent en état de ruine mis à part le rezde-chaussée). « C’est vrai que notre maison est fermée à double tour et inaccessible au public, donc pourquoi ne pas profiter des pièces ‘utiles’, comme bayt lakhzin, qui est dédiée à l’usage de stockage de dattes, et comme notre maison dans ksar est proche de la palmeraie, c’est plus facile et pratique pour nous d’y stocker les récoltes en dattes, on en possède trois de ces pièces au rez-dechaussée qui sont encore utilisées, d’autant plus que le commerce affilié à notre maison et qui donne sur la place extérieure devant le ksar, était utilisé pour les activités commerciales jusqu’aux années 2000. » Driss Kouddane8 Les figuiguis vivaient de l’élevage local du bétail, des dattes et de l’agriculture ; légumes et fruits étaient aussi cultivés dans des parcelles au cœur des palmeraies. Ils échangeaient entre eux par une sorte de troc9. Ils étaient aussi auto-suffisants en matière constructive, puisqu’à la base leur architecture est vernaculaire, et construite avec des matériaux locaux faciles à trouver. Parmi les formes d’entre-aide , la plus répandue était la Touiza10. Elle n’existe plus aujourd’hui. Elle est le 64

Pièce de conservation, équivaut un grenier, sans aucune ouverture, sert à stocker les dattes, récoltes et autres objets considérés comme précieux. 6

Aussi appelée «koulla», des jarres en argile, qui permettaient de conserver les dattes compressés, cette technique augmentait la durée de vie des aliments de plusieurs mois. 7

Extrait de l’entretien de Driss Kouddane, voir fiches d’entretien. 8

Echange direct de biens entre les habitants ou de services sans l’intermédiaire de la monnaie. 9

Aide volontaire de plusieurs ksouriens dans la construction d’une nouvelle maison, sans recevoir de l’argent en contrepartie. 10


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