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EXCLUSIF R aventure

découverte L’assurance d’une aventure très exclusive Fondée en octobre dernier par la jeune trentenaire Laure Wuilleret, la société AlpEmotion, basée aux Crosets, propose de «faire vivre une émotion intense à des personnes qui ont envie de découvrir une région du Valais, le temps d’un court séjour, entièrement sur mesure et sans aucun souci pratique».

Safari de luxe dans les Alpes

Le concept Des professionnels conçoivent ainsi un séjour selon les envies, les goûts, la condition physique et le niveau technique du client, qu’ils accompagnent durant les activités, pour assurer son confort et sa sécurité. En arrière-plan, l’organisation logistique garantit une excursion absolument sereine. Le concept s’adresse à un public cible aimant évidemment la montagne, n’ayant pas le temps d’organiser ses week-ends, voyageant fréquemment et doté d’un pouvoir d’achat supérieur. Des clients qui gagnent en temps et en qualité l’assurance d’une émotion très exclusive. En été, cela peut signifier balade à 4000 mètres, dont la marche d’approche est évitée par une dépose en hélicoptère, looping au-dessus du Cervin à bord d’un avion de chasse russe de la Seconde Guerre mondiale, dégustation de plantes sauvages au son du brame des cerfs, ou encore gastronomie très privée avec un grand chef dans une cabane. Un luxe accessible à partir de 1500 francs par jour et par personne.

Découvrir la montagne balade à raquettes à 3700 mètres au pays des neiges éternelautrement, dans une les. Un programme qui éveille intimité où luxe et en réalité plus de questions qu’il émotions se bousculent, n’en résout. Seule certitude, le séjour promet d’être très excluc’est possible. Récit sif. Histoire de prouver, comme d’une aventure l’affirme le concept de la jeune extraordinaire, le temps entreprise, que la montagne peut être vécue autrement, dans d’un week-end en le luxe, mais surtout l’émotion. compagnie de son organisatrice, Laure Des muses au rendez-vous de Wuilleret, fondatrice l’effort et des sens d’AlpEmotion. Texte et photos Pierre Dabitz

quelques jours du week-end très privé auquel Bilan a été invité par AlpEmotion, les seuls indices quant aux activités prévues se lisent entre les lignes de questions: «Avez-vous une appréhension du vide? Avez-vous des restrictions particulières au niveau de votre santé? Êtes-vous allergique à certains aliments?» Mais l’impatience et le goût de l’aventure chassent l’angoisse naissante. La surprise sera totale quand Laure Wuilleret, jeune fondatrice de la société, lèvera, la veille du départ seulement, un pan du voile: via ferrata couronnée d’une dégustation de vins du terroir, cueillette en compagnie d’une herboriste, ou encore

Samedi matin, 6 heures. Sans réveil, l’impatience se lève avec l’aube d’une journée qui s’annonce magnifique. Rendez-vous est pris à Sion à 9 heures, devant le magasin de sports de montagne Là-Haut. Une jeune femme rayonnante et timide à la fois descend d’un rutilant bus VW aux couleurs argent d’AlpEmotion. Laure Wuilleret, le teint halé d’une randonneuse expérimentée, déploie immédiatement des trésors d’attention et présente la guide du week-end: Séverine Bornet. Ce petit brin de femme pétillant est l’une des six seules femmes qui égaient la corporation des 1500 guides suisses. Complices, l’une se hâte de faire déguster un thé vert du Japon aromatisé au jasmin tandis que l’autre fait essayer chaussons et baudriers d’escalade.

La cuillette de l’après-midi s’est transformée en mesclun aux fleurs.

Surplombant Sion et la vallée du Rhône, la falaise de Nax a finalement mené à une dégustation des vins du terroir.

Les chiffres Dotée d’un capital social de 30 000 francs, la société à responsabilité limitée a connu une réjouissante première saison d’hiver. Au terme de l’été, Laure Wuilleret compte, en douze mois, avoir couvert les frais de gestion, acquis une certaine notoriété et mis en place des produits pour toute l’année. Objectifs qui seraient atteints avec 150 000 francs de chiffre d’affaires. A trois ans, ils sont plus ambitieux: les frais de démarrage devraient être amortis, un salaire décent payé et deux collaborateurs à temps partiel. Avec des revenus annuels de 600 000 francs, Laure Wuilleret aura alors étendu son offre à l’Oberland bernois, aux Alpes françaises et gagné une renommée garante d’un succès durable.

Deux sommets vaincus en deux heures... avec l’aide de l’hélicoptère.

EXCLUSIF R ma carrière

Safari de luxe dans les Alpes

«Offrir des émotions me permet d’accepter tous les sacrifices» Laure Wuilleret, née à Romont (FR) en 1976, étudie à Lausanne et aux Etats-Unis avant de se lancer dans une carrière dans l’univers du luxe. Devenue cheffe de produits parfums chez Cartier, elle décide en juin 2006 de lancer sa propre entreprise, AlpEmotion. Interview. Laure Wuilleret, vous abandonnez une prometteuse carrière dans l’univers du luxe pour tenter l’aventure, dans tous les sens du terme. Par goût du risque? Par goût de la montagne plutôt. J’ai longtemps réfléchi, pesé le pour et le contre. Je me suis sentie prête à me lancer dans une activité indépendante, avec la sécurité d’un parcours qui me permettrait de revenir si les choses devaient mal tourner. Parlez-nous de ce parcours. La montagne m’a toujours marquée. Durant mes études, lors d’une année d’échange aux Etats-Unis, j’ai choisi une université du Colorado pour faire partie de son équipe de ski. De même, l’enseignement de ce sport a accompagné toute ma vie professionnelle. Chez Gucci Timepieces comme assistante marketing d’abord, et ensuite chez Cartier en tant que cheffe de produits parfums durant six ans. Mais je n’arrivais plus à mener deux vies. Que vous apporte aujourd’hui votre expérience du luxe? Une fibre esthétique sans doute, mais surtout la capacité d’anticiper et de comprendre les besoins de cette clientèle particulière. Une clientèle parfois difficile? Il m’est arrivé de rencontrer des gens qui changeaient d’avis tous les quarts d’heure. Mais en montagne, il ne suffit pas de payer pour pouvoir faire n’importe quoi: il faut du respect, de l’humanité. Se risquer du luxe à l’aventure, cela signifie aussi faire des sacrifices, non? J’ai vécu simplement, mettant de l’argent de côté. Cela m’a permis de créer ma société sans emprunt. Il y a une époque pour tout: après le plaisir des premiers salaires de la vie professionnelle est venu pour moi le temps de l’indépendance. Amener des gens en montagne pour leur offrir des émotions me permet d’accepter tous les sacrifices.

Le luxueux bus et l’excitation avalent ensuite les quelques kilomètres qui séparent Sion de la première mise en jambes: une via ferrata. A cheval entre l’escalade et la randonnée, cet itinéraire rocheux équipé d’échelles et de câbles permet un accès facile à la magnifique falaise qui surplombe la vallée du Rhône. Le premier tronçon, légèrement en dévers, fait grimper l’adrénaline nécessaire au franchissement du premier pont de câble. A quelques dizaines de mètres du sol, l’émotion est déjà au rendez-vous, accrochée aux rochers sous un soleil de plomb. Séverine, la guide, tout en prévenance, rythme l’ascension d’encouragements bienvenus. L’enthousiasme est tel que le village de Nax surgit trop vite au détour d’un rocher. Avec lui, une autre surprise attend, bien à l’ombre, au sommet de la vie ferrata. De magnifiques bouteilles du Domaine des Muses, sur les hauteurs de Sierre, récompensent l’effort. La dégustation d’un assemblage de blancs vinifiés en barrique, dédié à Euterpe, muse de la musique, ravit les sens déjà déroutés par la vue époustouflante. Lové dans la couverture de pique-nique, un véritable festin s’étale. Fromages, viandes séchées et saucissons du terroir, sélectionnés avec soin, sont mis en valeur par un pinot noir de la gamme «réserve», tirée d’une vigne centenaire. Un chocolat Villars à l’abricotine finit d’achever cet intermède gastronomique et l’élan sportif matinal.

Gastronomie dans un hôtel oublié Le bus VW, apparu comme par magie au détour du sentier, soulage une digestion heureuse et

Arrivée au sommet de la Serpentine, à 3789 mètres, sur fond de Cervin (à droite).

prend une route secondaire escarpée en direction d’Evolène. Dans la quatrième commune de Suisse par sa superficie, rencontre étonnante, en ce début d’après-midi, avec une herboriste passionnée et passionnante. Yvonne Pahud parle d’abondance des trésors de la flore, qu’elle cueille soigneusement à chaque pas… et déguste! C’est que ces plantes sauvages trouvées lors de cette bucolique balade seront au menu du soir, révèle-t-elle. La richesse de la nature, d’autant plus aux abords immédiats des sentiers, est insoupçonnable. Ici, de l’oxalis, dont le feuillage ressemble à une touffe de trèfles, se révèle citronnée et très riche en vitamine C. Là, des violettes, aussi précieuses que les pensées, un peu plus loin, pour la salade du soir. Tout a l’air comestible, finalement, mais l’herboriste prévient: nombre de plantes sont toxiques, parfois au point d’être fatales. Du coup, la via ferrata ne semble plus être l’activité la plus risquée de la journée. D’autant qu’il s’agit maintenant de cueillir des orties… Heureusement, le plantain, ramassé plus tôt, a, une fois mâché et appliqué, des vertus calmantes et curatives. Trois heures se sont déjà écoulées quand des branches d’épicéa rejoignent le sac de récolte.

Elles serviront à fumer un filet de lapin. Laure, Séverine et Yvonne disparaissent en effet dans la cuisine du délicieux hôtel auquel la balade a finalement mené. Blotti sur les hauteurs, le très secret Hôtel de La Sage, amoureusement rénové, est soudain empli de senteurs magiques. Les trois fées de sa cuisine concoctent un menu de découverte des plantes sauvages.

Sur la magnifique et ancienne table en bois de la salle à manger s’étalent maintenant les mets les plus inimaginables: un mesclun aux fleurs et un gratin d’asperges aux «mauvaises herbes» précèdent les fameux filets de lapin fumés, un chabichou du Poitou à la vapeur de thym et une incroyable glace à l’oseille. La révélation est absolue, le palais à la fête. Aux chandelles, Laure et Séverine racontent leurs aventures passées, et c’est

Une niche inoccupée Dans le segment très haut de gamme de l’organisation sur mesure et l’accompagnement d’excursions en montagne, AlpEmotion n’a pas encore de véritables concurrents en Suisse. L’initiative Whitepod, lancée par Sofia de Meyer au pied des Dents-du-Midi (lire Bilan N° 217), offre certes un logement au charme extraordinaire, mais ni un accompagnement comparable ni, pour l’instant, des séjours estivaux. SwisSKIsafari, basé à Anzère (VS), propose des services de luxe similaires, mais plutôt à des groupes et à des dates fixes. Les écoles de ski et les bureaux de guides ne pouvant prétendre à offrir l’accompagnement et surtout l’organisation haut de gamme qui caractérise AlpEmotion, les autres concurrents sont à chercher à l’étranger. Ainsi, le britannique Original Travel propose, en collaboration avec Whitepod notamment, deux circuits en Suisse, sans pourtant avoir de représentant propre sur place. L’entreprise de Laure Wuilleret s’est installé dans une niche prometteuse avec une avance certaine qu’elle ne pourra cependant maintenir qu’à la condition de gagner en visibilité, à l’étranger et en Suisse alémanique en particulier.

l’esprit plein d’images, de senteurs et de goûts alpins qu’un sommeil mérité ravit la vedette à la découverte d’une chambre sublime, à la somptueuse baignoire relaxante et au décor intime.

Deux sommets en deux heures Après une délicieuse nuit bercée par le ruisseau adjacent à l’hôtel, le croustillant petit-déjeuner à une table inondée de soleil inaugure la seconde journée, plus forte encore en émotions. Direction Arolla, où attend… un hélicoptère! Embarquement immédiat. Souple et puissant, il s’arrache du fond du val d’Hérens pour gagner le glacier du Pigne, au col du Brenay. Le long de la pente, de minuscules randonneurs ne trichent pas avec l’ascension. Mais le plaisir n’est pas une seconde boudé quand s’ouvre la vue jusqu’au Cervin. Dûment équipée de lunettes de soleil, de moufles et de raquettes, Séverine entraîne la cordée hypnotisée par la majesté des Alpes vers son premier succès. Après une trentaine de minutes, en effet, le sommet de la Serpentine, à 3789 mètres, est vaincu. La balade au pays des neiges éternelles est surréaliste, les émotions trop violentes. Heureusement, Laure tire de son

sac des pains au chocolat pour calmer les estomacs bouleversés. De retour au col, l’excursion n’est pourtant pas terminée. En ligne de mire, le sommet jumeau, le mythique Pigne-d’Arolla. La cordée s’ébranle, dodelinant sur les raquettes. Plus vite qu’imaginé, la montagne, culminant à 3790 mètres, est soumise. Une seconde fois, la bise de Séverine récompense, comme le veut la tradition, la réussite, dont la contribution héliportée est déjà oubliée. Le pilote d’Air Glaciers, appelé pour un sauvetage de héros plus méritants, s’impatiente et plonge dans la vallée. Près de 2000 mètres plus bas, c’est une raclette au feu de bois qui attend au pied du glacier fondant. L’esprit encore en haute montagne, l’estomac jouit seul et sans réserve du fromage de Bagnes. Le dessert, accompagné d’un vin mielleux du Domaine des Muses, sera servi un peu plus loin, de retour sur les terres d’Evolène. Au pied d’une majestueuse cascade, la salade de fruits parvient à peine à détourner le regard d’une vallée qui s’ouvre sur la Dent-Blanche. Les yeux ne réalisent pas le retour au bord du Rhône, quarante minutes plus tard. Les souvenirs vagabondent entre les rochers et les muses, entre les herbes folles et les neiges éternelles. Laure Wuilleret sourit, pour une autre raison. Elle a gagné son pari: faire oublier le quotidien et lui substituer des émotions indicibles. B

Séjour et prestations offerts par AlpEmotion.

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