hassan echair

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Hassan Echa誰r



Hassan Echaïr Exposition Du 15 février au 10 mars 2012

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Sans titre, 2011 Bambous noircis et technique mixte sur toile 50 x 180 cm

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Rachid Benlabbah, Variations sur l’Afrique, Rabat, IEA, 2011

Les ombres de la chute « …Un attachement de la pierre, particularisé par la couleur noire, avec le support classique d’une toile marouflée sur contreplaqué blanc, puis attachement avec son où ses ombres qui marquent chaque passage de lumière, comme pour retenir l’instant. C’est une réflexion sur la rencontre d’éléments antagonistes, sur la mémoire, l’environnement, les sentiments, les structures. Réflexion aussi sur le poids, la trace, l’énergie latente, la transparence, la liberté, la fragilité, l’identité-non identité, la matière ou encore sur le temps et sa mesure ». En quelques mots Hassan Echair définit l’essence de sa création. Que dire de plus dans ce cas, à moins de chercher à commenter le discours de l’artiste ou reprendre ses propres mots pour parler de son art ? Echair est de plus extrêmement disert sur la création artistique, il dissimule rarement la verve de passeur de sens qui l’anime et peut surprendre parfois par son obstination empathique à prolonger une réflexion sur le dessin ou le matériau. Son commentaire sollicite singulièrement l’esprit. Il est sans nul doute sensible aux attentes émotionnelles et sentimentales relatives à l’œuvre d’art mais se risque volontiers à souvent l’appréhender sous un rapport rationnel. Fréquemment, à travers ses paroles, il donne l’impression que son art n’a aucun secret pour lui, il en dévoile les facettes au point même de troubler son interlocuteur qui l’écoute avec plaisir. « Hassan Echair, rimeur d’objets », entretien avec La Gazette du Maroc, 9 janvier 2006.

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En réalité la transparence du propos sur son art est une illusion et il vaut mieux ne pas trop l’écouter afin d’éviter d’aliéner le rapport inédit à son œuvre. Ses paroles certes inspirent un cheminement, l’important est qu’elles n’aient pas à réprimer l’expression d’une expérience personnelle à la rencontre de sa création. Echair intellectualise sa démarche, à l’origine de l’œuvre d’art il y a l’idée. Le risque est certes grand qu’il y ait un hiatus entre ce sur quoi la pensée s’arrête et le faire qui l’exécute. Devant son œuvre, on réagit en effet au-delà de l’esthétique visuelle et de la facture, fondamentales par elles-mêmes. La composition bien qu’elle dispose des entités formelles n’arrête le regard qu’au niveau second de la signification. Son approche est ordonnée, elle laisse transparaître un contrôle conscient du processus créatif de l’œuvre, elle minimalise les imprévus et l’intervention intempestive du hasard. La destination et la nature de l’acte sont suffisamment claires dans l’esprit de l’artiste au point de laisser soupçonner la traduction plastique ou l’illustration d’une idée. Son œuvre artistique est constamment exposée au péril de son propre discours. L’économie du sens prime, néanmoins sa déclinaison n’est pas primaire. J’évoque cet aspect en pensant à quelques artistes marocains actuels qui manifestent une opinion sur la religion, l’islam en l’occurrence, en s’aidant de la dimension créatrice qu’offre l’œuvre d’art. L’art se réduit pour ces derniers à un simple recours et à un prétexte, chez eux c’est une opinion et non une idée qui sous-tend l’acte d’agir sur la matière. Le report du sens dans l’œuvre d’Echair est complexe à cause de la relation qu’il établit avec le réel. 4

L’une des exécutions intéressantes durant cette année est une pièce intitulée « appropriation de l’ombre ».


Les éléments brutes, façonnés et récupérés (bois, fil de fer, cordage, voile, pierre, verre...) fonctionnent comme des citations d’une réalité et d’une mémoire qu’il cherche moins à transposer qu’il ne tente de recomposer (la tente de l’enfance, la transhumance, l’aventure méditerranéenne, le temps, l’espace). Noir et blanc. Le matériau qu’il emploie est tout sauf des pigments ou des tubes de couleurs. Echair n’est pas un peintre au sens premier du mot. Son œuvre se prive jusque-là volontairement de l’expressivité chromatique. Son monde ne se représente sous aucune couleur, ses figures ne s’informent pas du contact par exemple d’un bleu et d’un rouge ou d’un vert et d’un jaune. L’œuvre d’Echair s’attache, au moins depuis 1999 , à pousser aux limites l’appropriation des ressources du noir et du blanc. Sa palette exploite les effets noirs de la carbonisation, du goudron ou du charbon et la blancheur de la chaux. La valeur duelle structurante de ces extrémités chromatiques ne se résout pas forcément dans la formulation d’un antagonisme comme il le suppose. Elle élabore, à mon avis, la manifestation de la lumière qui prend ici le sens d’une transposition cumulée de l’ombre. Ce que j’appelle le palimpseste de la mémoire en ayant à l’esprit les compositions à la pierre suspendue qui imprime en dégradé son impact contre la toile marouflée ou le papier, en démultipliant l’ombre. Ces compositions ressemblent à une sédimentation de traces, suggérant une profondeur continue. L’artiste évoque dans ce sens le trou qui, au rythme du regard, « est à chaque fois plus profond qu’avant ». Sur ce décor de la profondeur s’expose en relief la scène de la chute suspendue. 5



Sans titre, 2012 Bois, ĂŠponge noircie et technique mixte sur toile 200 x 130 cm

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La capture de l’instant. Les traces signifient bien entendu l’écoulement du temps, mais c’est l’instant qui fige la chute qui est pérennisé. L’expression du temps est assez particulière dans l’œuvre de l’artiste. Elle se lit à travers la représentation du mouvement, de la mobilité, de la verticalité et de l’horizontalité, rien dans son œuvre n’est statique ni rendu en repos. L’ensemble, composé de planches de bois rectangulaires, est une allusion claire aussi bien à la partition musicale qu’au pendule des heures. Mais la temporalité n’est ici ni progressive ni régressive. Elle n’a pas la puissance suffisante de transporter de manière narrative le récit de l’œuvre d’art, en même temps celle-ci donne l’impression de vouloir dire et raconter, d’être porteuse justement d’un récit. Or, c’est à cause de cela que l’œuvre de l’artiste est contrariante. On a du mal à mettre les bouts artistiques les uns à côté des autres, de manière à rendre possible une lecture linéaire, à identifier une histoire. On peut l’inventer tout en étant leurré par la certitude que l’artiste veut nous dire quelque chose. De ce côté, sa création est ludique sauf que le jeu est sérieux. Le récit d’Echair correspond à mon avis au désir de la capture de l’instant crucial. Décomposé en des instants, le temps peut-être fixé, visualisé en arrêt. On relève facilement la primauté accordée à la dimension spatiale sur laquelle l’artiste inscrit sa sensibilité temporelle. Son travail est du temps mis en espace, ce qui explique pourquoi il est d’abord un installateur. 8


Artiste d’une œuvre unique. Hassan Echair est l’artiste d’une œuvre d’art au singulier. Toutes les manifestations de sa création (tableau, structures érigées, composition sur le sol, mobiles) participent d’une installation qui semble encore éloignée de son achèvement, ce qui me fait penser au vœu d’une expérience limite. Aucune pièce montrée n’est entière, ne parvient à exister pleinement par elle-même, elle n’est à chaque fois que des prémices, un fragment d’une installation qui met l’imagination au défi de la circonscrire, l’artiste lui-même le pourrait-il ? Le concept de cette œuvre est spatial et ses déclinaisons sont bi- et tridimensionnelles, on la regarde de face, on tourne autour, on y est dedans. L’œuvre se démultiplie sur différentes surfaces et semble travaillée par la récurrence, pour autant la répétition ne gêne pas outre mesure, elle interrogerait plutôt. La création d’Echair est puissante, puissance de l’œuvre unique. La qualifier par une émotion ressentie ou une énergie poétique ne suffirait pas à asseoir un dialogue vivant à son égard. Les racines du ciel. « Impression d’Afrique », une structure érigée, en bois de bambou, dont la base est peinte en noir et la hauteur en blanc, exposée en permanence par le musée de Bamako, inspire une pléiade d’interprétations. Malgré le contexte africain et le sousentendu de la verticalité, je n’y vois ni racisme ni colonisation, ni ange ni démon. Elle provoque plutôt dans mon esprit une image, celle des racines du ciel et de la terre.

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Deux extrémités sûres et fortes qui exposent le milieu au « flottement » (titre d’une composition sérielle de cannes couchées). Ce milieu est peut-être l’espace où l’histoire de l’homme se déroule. Ni la réalisation de l’ascension ni celle de la chute ne retiennent l’esprit mais la suspension, la zone de l’ombre et du palimpseste. J’accompagne la démarche d’Echair en retrait depuis quelques années, l’ombre dans son art rejoignait celle d’autres artistes et écrivains africains que j’apprécie. Je m’inquiétais en fait de l’authenticité de cette ombre portée dans son art avant que je ne découvre qu’il est, jusqu’à maintenant, l’artiste d’une unique œuvre qui se dévoile par fragments. Je m’inquiétais aussi que l’œuvre exécutée d’Echair artiste ne puisse jamais rattraper l’œuvre discursive d’Echair homme du mot. Il n’est sans doute pas solitaire dans sa démarche, il doit certainement avoir une parenté dans le monde de l’art, heureusement d’ailleurs car les correspondances affranchissent du qualificatif insidieux du particularisme.

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Sans titre, 2011 Ficelle, corde et technique mixte sur toile 150 x 100 cm

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Sans titre, 2012 Technique mixte et pigment sur toile 180 x 150 cm

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Sans titre, 2012 Carton toilĂŠ, bois noircis et technique mixte 150 x 150 cm

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Sans titre, 2011 Bambous noircis et technique mixte sur toile 50 x 180 cm


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Sans titre, 2011 Bambous marouflĂŠs, ficelles et technique mixte sur toile 60 x 50 cm

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Sans titre, 2011 Bambous marouflĂŠs, ficelles et technique mixte sur toile 60 x 50 cm


Sans titre, 2012 Technique mixte sur papier plume collĂŠ sur toile 40 x 180 cm

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Sans titre, 2011 Bois noircis et technique mixte sur toile sur contreplaquĂŠ 205 x 90 cm

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Sans titre, 2012 Technique mixte sur toile 120 x 80 cm


Sans titre, 2012 Technique mixte sur toile 120 x 80 cm

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Sans titre, triptyque, 2012 Technique mixte sur papier marouflĂŠ sur toile 120 x 240 cm



Sans titre, triptyque, 2012 Technique mixte sur papier marouflĂŠ sur toile 120 x 240 cm

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Sans titre, 2011 Bambous noircis et technique mixte sur toile 50 x 180 cm

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Sans titre, 2011 Dessin sur papier 70 x 40 cm


Sans titre, 2011 Bambous noircis et technique mixte sur toile 50 x 180 cm

Sans titre, 2011 Dessin sur papier 70 x 40 cm

Sans titre, 2011 Dessin sur papier 70 x 40 cm

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Sans titre, 2011 Bambous noircis et technique mixte sur toile 50 x 180 cm

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Sans titre, 2011 technique mixte sur papier 140 x 70cm


Sans titre, 2011 Bambous noircis et technique mixte sur toile 50 x 180 cm

Sans titre, 2012 Mousse, bois et fil mĂŠtallique noircis et technique mixte sur toile tendue sur contreplaquĂŠ 200 x 50 cm

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Expositions

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2012

Loft Art Gallery, Casablanca

2011

Facieses, Independent art room le Cube, Rabat

2011

Biennale de Marrakech

2011

Art et nature, espace de SGMB, Casablanca

2010

Sense of time and Space, Johannesburg, Afrique de Sud

2010

Saisir l’ombre, Galerie LOFT, Casablanca, Maroc

2009

Œuvres récentes, Galerie Noir sur blanc, Marrakech, Maroc Les Transculturelles des Abattoirs, Anciens abattoirs de Casablanca, Maroc

2008

Collectif 212, Casa Arabe, Madrid, Espagne Estiu art, Chateau de Denia, Denia, Espagne

2007

Noirs évanescents, Espace Souffle, Casablanca, Maroc Contact zone, Musée d’Art Contemporain africain, Bamako, Mali Reflet(s), Galerie 29, Institut Français, Barcelone, Espagne Flottement, galerie Delacroix, Tanger, Maroc

2006

Parcours nocturne, galerie le cube, Rabat, Maroc Passerelle artistique V, Parc de l’Hermitage, Casablanca, Maroc Camp de vision, galerie Kassaba, Chefchaouen, Maroc Fil d’Ariane, Art Urbain, médina de Casablanca, Maroc

2005

Ligatures, galerie le cube, Rabat, Maroc Installation, Institut français de Meknès, Maroc


2004

Matière et terre, Palais de Sintra, Portugal Constellation, Villa des Arts, Casablanca, Maroc La nouvelle génération de l’école de Tétouan, Fondation Antonio Perez, Cuenca, Espagne Gravité, Institut National des Beaux-arts de Tétouan, Maroc Parcours d’artistes, Rabat, Maroc Installation, Goethe Institut, Casablanca, Maroc Installation, Goethe Institut, Rabat, Maroc

2003

Sculpture en plurielle, Société Générale, Casablanca, Maroc Artistes exposent pour L’UNICEF, Galerie de l’Institut Cervantes, Tanger, Maroc Regard sur art contemporain marocain, Lycée Descartes, Rabat, Maroc 2X5 générations, galerie dar Essanaâ, Tétouan, Maroc Appel du Nord n° 2, Galerie Delacroix, Tanger, Maroc Ateliers, Galerie Mohamed El Fassi, Rabat, Maroc Artistes en création, Palais de l’UNESCO, Beyrouth, Liban 9ème festival de vidéo art de Casablanca, Maroc

2002

2001

Artistes du monde, Galerie Bernanos, Paris, France Séjour à la Cité Internationale des arts de la ville de Paris Cheremoyo, 1er festival vidéo art de Tanger, Maroc

2000

Arte contemporani del Maroc, Barcelone, Espagne

1999

Artistes marocains, Galerie de l’ARIAP, Lille, France Ombre porté, Institut Français de Tétouan, Maroc

1998

Traces, Musée Ethnographiqie de Tétouan, Maroc

1996

Plasticiens du Maroc, Palais des congrés de Marrakech, Maroc

1995

Jeunes plasticiens, Institut National des Beaux-arts de Tétouan, Maroc

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Ce catalogue est édité par :

Loft Art Gallery Casablanca, février 2012 Textes du catalogue : Rachid Benlabbah Crédit photos : Hassan Echaïr Conception graphique : Inovatek

13, rue Al Kaissi -Triangle d'Or 20500 Casablanca - Maroc - Tél : +212 (0) 522 94 47 65 - loftartgallery@gmail.com - www.loftartgallery.net



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