Syndicaliste n°974

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BIMENSUEL ÉDITÉ PAR LA CONFÉDÉRATION DES SYNDICATS CHRÉTIENS | CHAUSSÉE DE HAECHT, 579 | 1031 BRUXELLES | BUREAU DE DÉPÔT GAND X | P 912043 LE RENDEZ-VOUS DES DÉLÉGUÉ.E.S ET DES MILITANT.E.S DE LA CSC / 16 NOVEMBRE 2022 / N° 974 L’étau se resserre Coupes sombres NORME SALARIALE CRÉDIT-TEMPS 27/11 N’oubliez pas les intérimaires! CAMPAGNE INTERIM UNITED Stop aux violences faites aux femmes!

La campagne sur les primes de fin d’année Intérim, c’est le rendez-vous incontour nable pour nous faire connaître auprès des intérimaires. > pp. 11-13 © Shutterstock

L’étau se resserre autour de la loi sur la norme salariale

Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), la loi sur la norme sala riale est incompatible avec la liberté de négociation collective.

est impossible d’accepter une telle marge basée sur une loi injuste. Ce sera donc au gouvernement de trancher et à nous de maintenir la pression!

SYNDICALISTE

PB 10, 1031 Bruxelles Tel. 02 244 34 83

RÉDACTION dcoppieters@acv-csc.be www.lacsc.be

Donatienne Coppieters

TRADUCTION

Ilse Cambier, Mylène Demeure, Pascal Drèze, Riccardo Riva, Anne Scieur, Isabelle Tuteleers, Hilde van Lancker

LAY-OUT Gevaert Graphics

IMPRIMERIE

‘t Hooft

ÉDITRICE RESPONSABLE

Dominique Leyon

En 2017, le gouvernement Michel adap tait la loi sur la norme salariale de 1996, sous la dictée des organisa tions patronales. Résultat: les négociations salariales, déjà bridées, sont devenues im possibles.

Il est désormais interdit de tenir compte des milliards versés aux entreprises sous la forme de subventions salariales. La loi im pose en outre une norme salariale maxi male contraignante.

Les secteurs et entreprises dont les béné fices sont florissants ne peuvent plus accor der d’augmentations salariales au-delà de cette norme. Elles peuvent par contre accor der moins, voire rien du tout.

Pour les négociations salariales 2021-2022, la marge était de seulement 0,4%. Pour 2023-2024, la marge disponible serait de 0% selon les calculs du Conseil central de l’éco nomie. Pour les organisations syndicales, il

Depuis sa modification en 2017, nous contestons cette loi. Par des grèves, des manifestations, une audition au Parlement. Nous avons également saisi l’Organisation internationale du travail (OIT) à Genève.

Nous y avons obtenu une grande avancée: le conseil d’administration de l’OIT a approuvé les conclusions du Comité de la liberté syn dicale (CLS) au sujet de la plainte que nous avons introduite contre cette loi. Le CLS conclut que la loi sur la norme salariale est incompatible avec la liberté de négociation collective (convention 98 de l’OIT). Fort de ces constats, le CLS a enjoint le gouverne ment à «prendre les mesures nécessaires pour assurer que les interlocuteurs sociaux puissent décider librement des critères sur lesquels baser leurs négociations sur les évolutions de salaires au niveau intersecto riel et des résultats desdites négociations».

Bien que les conclusions du CLS ne soient pas juridiquement contraignantes, il s’agit

d’une avancée significative. Le gouverne ment belge se doit d’y donner suite.

Comme l’indiquait d’ailleurs récemment la ministre des Affaires étrangères en com mission du Parlement fédéral, «la Belgique est parmi les neuf membres fondateurs de l’OIT et siège, pour un mandat de trois ans, au conseil d’administration de l’organisa tion. Elle a toujours soutenu l’OIT et son système normatif». Le temps est donc aujourd’hui venu pour le gouvernement belge de joindre la parole aux actes.

Tant que la loi sur la norme salariale ne sera pas modifiée, nous continuerons à dénoncer la violation de la Convention 98 de l’OIT par le gouvernement belge. Les juges nationaux devront aussi tenir compte des constats dressés par le CLS. Notre opposition à la loi sur la norme salariale est un combat de longue haleine. L’étau se resserre lentement mais sûre ment. Grâce à votre mobilisation, nous finirons par obtenir gain de cause.

/ Marie-Hélène Ska, secrétaire générale CSC /

QUESTION / RÉPONSE

EN DÉBAT

DE MILITANTE

Stop aux violences faites aux femmes! 15 22 7 Noir sur blanc Coupes sombres dans le crédit-temps 27/11
à face
colère ZOOM 2 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | 3 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |
Face
Le Royaume-Uni en
1 en couverture
4 TAPE
Pas
6 BON À SAVOIR 8 L’ACTU Concertation sociale: de grandes divergences de vues 11
11 Intérimaires: plus jamais seuls 12 Affiche: Intérimaire? Ne passez pas à côté de vos primes! 14
14 Protection des données: une décision utile pour les délégués 15 Coupes sombres dans le crédit-temps 16 Fin de contrat pour cause
force
18 À TABLE Au menu du CPPT
19
À L’ŒIL «Se chauffer ou se nourrir?
question de devoir choisir!»
INTÉRIM
NOIR SUR BLANC
de
majeure médicale
et du CE en décembre
20
Un certificat médical est-il encore requis en cas de maladie de courte durée?
22
24
Si vous réduisez leurs allocations, les chômeurs chercheront plus vite du travail
FACE À FACE Mick Lynch, syndicaliste, à propos du malaise social au Royaume-Uni
© Shutterstock
PAROLES
Alice, militante Jeunes CSC

«Se chauffer ou se nourrir?

Pas question de devoir choisir!»

Accompagnée d’autres militants de la CNE et de Puls, Patri cia est passée d’une institution financière bruxelloise à une autre, armée de son panneau en carton et de son mégaphone. À l’origine du mécontentement, les factures exorbi tantes que les gens reçoivent tous les jours dans leurs boîtes aux lettres, alors que la loi sur la norme salariale bloque toute évolution des salaires depuis des années et que de nombreuses entreprises engrangent des bénéfices historiquement élevés.

Tout comme Patricia, des militants CSC de tous les secteurs de Belgique ont fait entendre leur voix ce 9 novembre. En réaction, les employeurs et les responsables politiques de droite ont réitéré leurs doléances habituelles: «Avec toutes ces revendications salariales, nous risquons de ne plus être concurrentiels», «De quoi les gens se plaignent-ils? Ils ont quand même l’index»…

Ce qu’ils omettent de préciser, c’est que l’indexation est appliquée avec un certain retard, souvent seulement un an après les augmentations de prix. De plus, si l’index est un excellent tampon, il ne couvre pas toutes les augmentations de prix. De plus, le débat sur l’index n’aborde pas le fond du problème, à savoir les augmentations de prix que les entre prises répercutent.

Si l’on veut juguler l’inflation, il faut prendre des mesures, notamment plafonner les prix du gaz et de l’électricité. Cer tains apprentis sorciers proposent d’autres solutions et affir ment par exemple que les salaires ne doivent pas augmenter mais que les gens doivent avoir plus en net.

Ils oublient de préciser comment on financerait alors les pen sions, les soins de santé et le reste de la sécurité sociale…

Voir d’autres photos de la journée d’action et de grève nationale www.facebook.com/media/set/?set=a.501756865326995&type=3 www.facebook.com/media/set/?vanity=het.acv&set=a.5899986903386473

BRUXELLES 09.11.22 4 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | TAPE À L’OEIL 5 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |
Patricia Van Walle, déléguée CNE chez AXA, a porté ce slogan lors de la journée d’actions et de grèves organisée pour dénoncer la crise du pouvoir d’achat. TEXTE Patrick Van Looveren & David Vanbellinghen | PHOTO Michael De Lausnay

Découvrez la nouvelle App CSC

Gardez l’actualité de votre secteur et tous les avantages et services de la CSC à portée de main grâce à la nouvelle application ACV-CSC! Une fois téléchargée, vous pouvez la personnaliser pour rester informé des dernières actualités de votre secteur grâce aux notifications automatiques. De cette façon, vous pouvez, entre autres, suivre l’évoluti on des conditions salariales et d’emploi dans votre secteur et vous savez, par exemple, quand votre prime syndicale est payée.

Avec l’application, vous pouvez également calculer rapidement votre salaire net, votre délai de préavis et votre crédit-temps.

Dans le module de contact, vous pouvez accéder aux adresses et numéros de téléphone des centres de services de la CSC et de votre centrale, et prendre contact pour toutes les questions liées à votre situation de travail et vos conditions d’emploi.

Profitez pleinement de toutes les possibilités de ce nouvel outil! Téléchargez l’app dans l’App Store (Apple) ou Google Play (Android).

Vous avez des remarques? Envoyez-nous un mail à servicedesk@acv-csc.be pour nous aider à l’améliorer.

Une pétition pour mettre fin à la crise!

Des travailleurs de tous horizons partagent l’histoire des augmentations folles des prix alors que les sociétés énergétiques en grangent les bénéfices et que les cadres supérieurs doublent leurs salaires.

Signez la pétition de la Confédérati on européenne des syndicats (CES) pour taxer les bénéfices excessifs et plafonner les prix Il est urgent que les responsables politiques européens met tent en œuvre le plan de sortie de crise MAINTENANT!

Signez la pétition sur https://action-europe.org/end-costliving-crisis-increase-wa ges-tax-profits-0

27/11

STOP aux violences faites aux femmes!

Pour la 6ème année consécutive, des dizaines d’organi sations de la société civile fédérées au sein de la plateforme Mirabal appellent à une manifestation na tionale le 27 novembre à Bruxelles.

Pour une réforme de la pension minimum

non genrée

Les syndicats et les organisations féministes sont très

En 2021, des syndicalistes ont été tués dans 13 pays, 41% des pays ont supprimé ou restreint la liberté d’expression et d’association, des travailleurs ont été arrêtés ou détenus arbitrairement dans 69 pays et 66% d’entre eux ont empêché ou restreint l’accès des travailleurs à la justice (hausse de 76 à 95% en Afrique).

Source: Indice des droits dans le monde 2022 de la Confédération syndicale internationale (CSI) - www.ituc-csi.org/2022-global-rights-index-fr

Nous voulons une fois de plus dénoncer les violences faites aux femmes, déplorer les victimes et pousser les pouvoirs publics à assumer pleinement leurs responsabilités dans cette lutte. La CSC dans son ensemble a adhéré à la plateforme Mirabal. Elle invite chacun et chacune à participer à cette manifestation.

Rendez-vous à 13h au Mont des Arts à Bruxelles (près de la Gare centrale) pour le village associatif.

Départ de la manif à 14h (boucle avec retour au Mont des Arts).

D’ici-là, mobilisez sur les réseaux sociaux: prenez une photo de vous et/ou de vos collègues en ayant peint l’une de vos mains en mauve pour dire STOP aux violences faites aux femmes.

Partagez la photo sur vos réseaux avec les hashtags #mirabalbelgium et #stopviolencesfaitesauxfemmes et envoyez-la à ayla.serbest@acv-csc.be

Partagez l’event FB: https://fb.me/e/2477HX2pA

Journée égalité

Comme chaque année, les Femmes CSC et les ACV Vrouwen orga nisent leur journée égalité de genre destinée aux délégués et militants de la CSC. Le thème de cette année: «Les femmes sur le marché du travail: une précarité à durée indéterminée».

Cette journée participative, nourrie de témoignages, abordera entre autres les questions suivantes:

• Genre et contrats précaires

• Les «nouvelles» formes d’emploi précaire

• Comment la précarité s’insinue-t-elle dans les secteurs?

Inscriptions en ligne via www.lacsc.be/formulaire/?form=31882

Plus d’infos: ayla.serbest@acv-csc.be

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BON À SAVOIR
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DE GRANDES DIVERGENCES DE VUES

La concertation interprofessionnelle est bloquée, c’est le moins que l’on puisse dire. Par conséquent, il appartiendra au gouvernement de trancher. Ses décisions vont parfois dans le bon sens, mais il n’est pas rare non plus qu’elles nous soient défavorables.

Quelques bonnes nouvelles tout d’abord. Dans notre précédent numéro de Syndicaliste, nous avons donné des informations relatives à la confection du budget 20232024 par le gouvernement fédéral. Selon la CSC, ce budget posait trois gros problèmes: la réduction des régimes de congés, l’exten sion des flexi-jobs à une nouvelle série de secteurs et l’extension du travail étudiant. Le gouvernement est occupé à rédiger les projets de lois et les arrêtés royaux qui formalisent ce budget. Dans ce cadre, il a quelque peu modéré ses propositions sur deux points:

• La suppression du crédit-temps à mitemps pour les travailleurs à temps par tiel ne concerne que le crédit-temps ordinaire. Finalement, les travailleurs à temps partiel (qui ont un contrat à au moins ¾ temps) conservent la possibili té d’accéder à un emploi de fin de carriè re à mi-temps. (Pour plus d’informations sur la réduction des crédit-temps et des régimes de fin de carrière, voir p. 15). Sous la pression des interlocuteurs soci aux, les secteurs de l’agriculture et de l’horticulture ne seront finalement pas concernés par l’extension des flexi-jobs, au contraire des secteurs du sport, du cinéma, du spectacle et de l’aide aux personnes.

Autre bonne nouvelle: le gouvernement a décidé d’étendre la mesure selon laquelle la récupération des allocations de chôma ge passera désormais par l’employeur. Cette mesure s’appliquera aussi au chôma ge temporaire pour cause de force majeure, d’intempéries ou par suite d’un accident technique.

Autre bonne surprise, qui intervient plus rapidement que prévu: dans le cadre du plan d’action gouvernemental pour la san

té mentale au travail, chaque entreprise qui occupe au moins 50 travailleurs devra désigner au moins une personne de confi ance pour la prévention des risques psy chosociaux. L’employeur est obligé de nom mer une ou plusieurs personnes, après avoir obtenu l’accord du CPPT. Au moins une de ces personnes de confiance doit faire partie du personnel de l’entreprise. Cette désignation est aussi obligatoire dans les entreprises de plus petite taille si la délégation syndicale ou le personnel le demande. Dans ce cas, au moins une des personnes de confiance doit faire partie du personnel si l’entreprise compte au moins

Liaison au bien-être et norme salariale: retour à l’envoyeur

Au Groupe des dix aussi, les divergences de vues étaient grandes. Après que les em ployeurs aient refusé de rendre un avis sur la liaison au bien-être des allocations soci ales pour le 15 septembre, comme la loi le prescrit pourtant, le gouvernement avait soumis une proposition de médiation fin septembre. Les interlocuteurs sociaux dis posaient d’un délai d’un mois pour statuer sur cette proposition. Le gouvernement leur demandait également de se position ner au sujet de la norme salariale pour 2023 et 2024. Les interlocuteurs sociaux, réunis au sein du Groupe des dix, devaient donc régler les deux dossiers, après des travaux préparatoires au Conseil national du travail (CNT) et au Conseil central de l’économie (CCE). Le CNT et le CCE devaient préparer ensemble le dossier de la liaison au bien-être. Tandis que le secrétariat du CCE devait finaliser le rapport technique sur la compétitivité et indiquer la marge maximale disponible pour les négociations salariales, le critère qui sert de base pour la norme salariale légale. La liaison au bien-être et la marge salariale constituent la base de la suite de la concertation au sein du Groupe des dix.

20 travailleurs et si celle-ci fait appel à un service de prévention externe. La date d’entrée en vigueur de ces dispositions sera fixée par arrêté royal.

Certaines de ces mesures budgétaires sont actuellement soumises pour avis au Con seil national du travail (CNT). Les divergen ces de vues étant trop importantes, il ne faut pas s’attendre à ce que les interlocu teurs sociaux soient capables de s’entendre sur beaucoup de choses.

Au sein du Groupe des dix, les employeurs continuent de faire le lien entre ces deux questions. Ils maintiennent leur refus de trancher la question de la liaison au bi en-être tant qu’ils n’obtiennent pas l’accord des syndicats à propos de la marge salaria le. Selon eux, cette marge doit forcément être nulle, de sorte que les négociations ont finalement été rompues le 7 novembre. La balle est donc à nouveau dans le camp du gouvernement fédéral. Faute d’accord entre les interlocuteurs sociaux, il devra prendre une décision concernant la liaison au bien-être, d’une part, et la norme salari ale d’autre part.

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LA CONCERTATION INTERPROFESSIONNELLE EST BLOQUÉE L’AC TU
Chaque entreprise doit désigner une personne de confiance pour la prévention des risques psychosociaux.
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IL N’Y AURA PAS D’ACCORD

INTERPROFESSIONNEL POUR 2023-2024. LA QUESTION EST DE SAVOIR SI UN ACCORD EST POSSIBLE SUR DES SOUS-DOSSIERS, QUI CONSTITUERAIENT LA BASE DE LA SUITE DE LA CONCERTATION DANS LES SECTEURS ET LES ENTREPRISES.

En ce qui concerne la liaison au bien-être, le gouvernement a déjà fait connaître ses intentions. Sa proposition de médiation reprenait pour 2023-2024 plus ou moins les mêmes mesures que pour 2021-2022. Nous pouvons accepter cette approche, parce qu’elle est fort semblable aux priorités de la CSC. Reste à savoir si le gouvernement confirmera vraiment sa précédente proposi tion de médiation.

Reste la question de la norme salariale. D’après le rapport technique du CCE, une application stricte de la loi impliquerait forcément une marge salariale nulle. Mais c’était déjà le cas la dernière fois. Le gou vernement avait pourtant accepté une certaine marge grâce à une adaptation temporaire de la loi pour autoriser – lors que c’était possible – des négociations concernant des «chèques-consommation» (la fameuse «prime corona»). Au sein du gouvernement, certains demandent à nou veau d’autoriser une certaine marge pour 2023-2024. Reste à savoir si un accord poli tique pourra être conclu à ce propos.

Une chose est sûre en tout cas: il n’y aura pas d’accord interprofessionnel pour 20232024. Autre chose est de savoir si les inter locuteurs sociaux interprofessionnels par viendront à conclure un accord sur d’autres sous-dossiers, qui constitueraient la base de la suite de la concertation dans les secteurs et les entreprises. Ils y étaient parvenus pour 2021-2022. À l’époque, quatre dossiers étaient principalement à l’ordre du jour: le salaire minimum, les pensions complémentaires, les régimes de fin de carrière et les heures supplémentai

res volontaires. Le tout était présenté com me «un cadre d’accords pour 2021-2022».

Les tentatives seront-elles à nouveau cour onnées de succès? Les paris sont ouverts…

Trois jours de maladie sans certificat médical

La Chambre a finalement adopté, le 26 octobre, la suppression du certificat médi cal pour trois jours de maladie par an. Tou tefois, le texte doit encore être publié au Moniteur. En outre, les PME ne sont pas

concernées par la suppression du certificat médical pour trois jours de maladie par an. Il s’agit, pour la CSC, d’une exception inac ceptable. (Voir «Votre question/Notre réponse» p. 19).

La même loi comporte également le durcis sement de la possibilité, pour l’employeur, de licencier son travailleur pour cause de force majeure médicale, sans préavis ni indemnité. Ce durcissement était annoncé depuis longtemps (voir pp. 16-17).

Intérimaires: plus jamais seuls

La campagne sur les primes de fin d’année Intérim, c’est le rendez-vous incontournable pour nous faire connaître auprès des travailleuses et travailleurs intérimaires et les encourager à s’affilier à la CSC!

Les intérimaires ont souvent l’im pression d’être seuls. Ils ont le sentiment d’être abandonnés à leur sort ou que l’on joue avec leurs pieds. Ils ne savent pas toujours ce qu’est un syndicat, ni ce que nous pouvons leur apporter.

Ils sont souvent mal informés, se perdent dans la complexité administrative liée à leur type de contrat et aux périodes d’activités entrecoupées de périodes de chômage, ou ne parviennent pas à faire respecter leurs droits. En outre, le fait de travailler pendant une longue période avec des contrats de courte durée, parfois même de très courte durée (comme dans le cas de contrats jour naliers successifs), est source de grande insécurité sur les plans financier et social.

C’est pour cela qu’existe Interim United, le service CSC dédié aux intérimaires. Ensem

LES INTÉRIMAIRES NE PARVIENNENT SOUVENT PAS À FAIRE RESPECTER LEURS DROITS

ble, avec vous, nous veillons à ce que leurs droits soient respectés, à conclure des con ventions collectives de travail solides, à ce que les intérimaires soient traités de la même manière que les travailleurs fixes.

S’affilier à la CSC, c’est se doter d’une pro tection professionnelle tout en agissant sur l’action collective. Soulignons tout particuli èrement les avantages et services suivants:

• Une prime syndicale Intérim qui est passée de 104 euros à 112 euros (à condi tion d’avoir travaillé au moins 65 jours entre le 1.7.2021 et le 30.6.2022) sans

condition d’ancienneté en tant que mem bre!

• Un paiement rapide de la prime de fin d’année Intérim

• Une intervention rapide en cas de pro blème (le non-paiement des jours fériés payés ou du salaire garanti en cas de maladie, la rupture unilatérale de con trat…).

• Une assistance juridique les membres peuvent faire appel à l’aide juridique de la CSC en cas de conflits et de procédures devant le tribunal du travail.

• Une assistance dossier chômage.

• Des négociations collectives solides qui ont abouti au droit de vote des intéri maires, à un nouvel accord du CNT visant à éliminer le recours abusif aux contrats journaliers successifs, et au dernier ac cord sectoriel contenant quelques belles avancées syndicales!

Quelques outils clés à utiliser sans modération

• Le guide «SOS intérimaire, 20 questions - 20 réponses - Édition 2023».

• La check-list Intérim pour les délégués, édition 2023.

• Les 2 nouveaux outils «Sa laire garanti» et «Jours fériés payés» permettant aux intérimaires de savoir en quelques clics, si oui ou non, ils y ont droit.

• Le Helpdesk Intérim que vous pouvez contacter (les intérimaires également) en cas de questions spécifiques liées au tra vail intérimaire: interimunited@acv-csc.be

Vous trouverez ces outils sur www.interimunited.be

(ou 3 jours)

Les PME ne sont pas concernées par la suppression du certificat médical pour trois jours de maladie par an. Il s’agit, pour la CSC, d’une exception inacceptable.

Le tout nouveau matériel de campagnes «primes de fin d’année» est prêt!

Demandez-le à votre permanent Nous vous invitons à utiliser l’affiche en cartée dans ce numéro en l’accrochant aux valves de votre entreprise.

10 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | 11 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | Nog geen lid? Word nu lid en krijg meteen ook een syndicale premie! Ben je lid van het ACV? Dan krijg je ook 112 euro syndicale premie Scan voor meer info (of contacteer je ACV-afgevaardigde) www.hetacv.be/interimunited Affiche A2-interim-eindejaar-2022.indd
CAM PAGNE
SOS intérimaire questions, réponses Édition 2023
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Intérimaire? Selina Adam Pas encore membre? Affiliez-vous et vous aurez droit à votre prime syndicale! Vous êtes membre de la CSC? Vous recevrez aussi votre prime syndicale de 112 euros ! Scannez le code QR (ou contactez votre délégué·e CSC) Ne passez pas à côté de vos primes! a travaillé 65 jours comme intérimaire et est membre de la CSC. a travaillé 220 jours comme intérimaire et est membre de la CSC. Et vous? Adam et Selina ont droit à leurs primes! Vous avez travaillé au moins 65 jours comme intérimaire entre le 01.07.21 et le 30.06.22? Vous avez droit à une prime de fin d’année ! www.lacsc.be/interimunited E.S.: Dominique Leyon, Chaussée de Haecht 579, 1030 Schaerbeek Affiche A3-interim-eindejaar-2022.indd 2 19/10/2022 16:02:10

Protection des données

Une décision utile pour les délégués

Le 1er juin dernier, l’Autorité de protection des données, l’institution chargée de contrôler le respect de la règlementation sur la protection des données personnelles (RGPD), a rendu une décision dans le cadre d’une plainte que plusieurs travailleurs avaient introduite à l’encontre d’un délégué syndical.

des données personnelles profession nelles. Sur cette base, quiconque aurait pu facilement constituer l’adresse électronique de chaque membre du personnel de l’entreprise. En soi, les adresses électroniques ne sont pas un secret et peuvent facile ment être obtenues par des person nes extérieures.

Coupes sombres dans le crédit-temps

De lourdes mesures d’économies toucheront les régimes de crédit-temps. À partir du 1er janvier 2023, les travailleurs à temps partiel ne pourront plus demander d’allocations pour un crédit-temps avec motif. Le crédit-temps pour prendre soin d’un enfant sera raboté. Et les allocations majorées pour les plus de 50 ans seront supprimées.

75% gardent leurs droits aux emplois de fin de carrière à mi-temps. Il faut toutefois tenir compte du fait que, suite à des mesu res d’économies décidées antérieurement, l’âge d’accès aux emplois de fin de carrière est porté à 60 ans à partir du 1er janvier 2023, à moins qu’un accord interprofessi onnel puisse être conclu à ce sujet.

I

l a été reproché à ce délégué syndical le fait d’avoir envoyé deux courriels portant sur des informations syndica les, adressés à l’ensemble des mem bres du personnel, en ayant mis en copie deux adresses électroniques appartenant à deux syndicats, et donc extérieures à l’entreprise (en CC). Le délégué n’a pas utilisé l’option copie-cachée (CCI). Par conséquent, les deux destinataires exter nes ont pu prendre connaissance des iden tités et adresses électroniques de tous les membres du personnel de l’entreprise.

En vertu de la CCT n°5 concernant le sta tut des délégations syndicales, qui stipule que la délégation syndicale peut procéder à toute communication utile au person nel, il n’est en rien reproché au délégué d’avoir adressé ces courriels à ses collè gues. Par contre, ce qui pose problème est la communication des adresses électroniques de tous les membres du personnel de l’entreprise aux destinataires externes à l’entreprise, à savoir les organisations syndicales.

Selon l’Autorité, il s’agit d’une violation du RGPD. Celui-ci autorise le traitement de données personnelles à certaines conditions, et aucune condition n’a été remplie dans ce cas. En outre, cette viola tion de la confidentialité aurait dû être signalée à l’Autorité de protection des données, ce qui n’a pas été fait.

Il est cependant reconnu dans cette déci sion que la violation des données person nelles a causé un préjudice très limité. Les courriels en question ont été suppri més par les destinataires en copie après quelques jours.

Par ailleurs, l’adresse électronique et les noms et prénoms des travailleurs sont

L’Autorité reconnait dans sa décision une violation du RGPD de la part du délégué, mais nuance sa décision en reconnaissant que ce n’était pas intentionnel et que le préjudice est limité. Aucune sanction n’a été adop tée; il s’agit d’un simple rappel à la loi pour le délégué.

Quelle leçon en tirer?

Cette décision est intéressante à plusieurs égards. Elle nous rappelle d’abord l’importance d’utiliser l’opti on copie-cachée (CCI) dans l’envoi de courriels dans le cadre du travail syndical, afin de ne pas rendre visible la liste des destinataires à tous les destinataires. Mais surtout, elle re connait la base légale de la CCT n°5 pour le traitement des données per sonnelles de collègues dans le cadre des missions syndicales des délé gués. C’est un précédent à garder à l’esprit, et un argument à faire valoir auprès d’un employeur récalcitrant qui aurait tendance à prétendre que le RGPD limite les facilités accordées aux délégations syndicales. 

Àpartir du 1er janvier 2023, un tra vailleur devra avoir travaillé au moins un an à temps plein pour obtenir le droit à une allocation. Pour les travailleurs qui bénéficient déjà d’un crédit-temps ou d’un congé thématique (congé parental, par exemple), on se basera, lors de la demande suivante, sur l’occupation au cours de l’année qui a précédé le premier crédit-temps ou le congé parental. Le fait de prendre un crédit-temps à temps partiel ou un congé thématique ne remet donc pas en cause une demande ultérieure.

La condition d’une occupation à temps plein s’applique à partir de 2023 à toutes les for mes de crédit-temps, tant au crédit-temps à temps plein (interruption complète) qu’aux interruptions à mi-temps ou à un 1/5 ème temps.

Crédit-temps raboté

Trois mesures concernent spécifiquement le crédit-temps pris par des parents pour s’oc cuper d’un enfant jusqu’à l’âge de 8 ans:

• L’âge est ramené de 8 à 5 ans pour le crédit-temps à temps plein. À partir de 2023, il faudra donc demander un cré dit-temps à temps plein avant que l’enfant ait effectivement atteint l’âge de 5 ans.

• La durée maximale du crédit-temps sera réduite à 48 mois (au lieu de 51 mois). Cette réduction s’appliquera immédiatement aux crédits-temps en cours au 1er janvier 2023, sauf pour les travailleurs qui ont déjà pris au moins 30 mois à cette date.

• À partir de 2024, un travailleur devra être au service de son employeur depuis au moins trois ans pour pouvoir bénéficier de ce motif, au lieu de deux ans actuelle ment.

À partir du 1er janvier 2023

D’après les informations disponibles actuellement, ces nouvelles règles s’ap pliqueront aux demandes introduites auprès de l’employeur à partir du 1er jan vier 2023. Vous avez donc tout intérêt à introduire votre demande auprès de votre employeur avant cette date. Pour les demandes introduites à partir du 1er jan vier 2023, vous garderez le droit à l’inter ruption (un crédit-temps à temps plein pour un enfant de 7 ans par exemple), mais vous ne recevrez plus d’allocation et subirez donc une perte au niveau de vos droits de pension par la suite. 

Ces deux dernières mesures s’appliquent aussi bien au crédit-temps à temps plein qu’aux crédits-temps à temps partiel.

Plus de 50 ans

Les allocations majorées pour les plus de 50 ans dans le cadre des congés thématiques ainsi que les allocations majorées pour les plus de 50 ans et les travailleurs comptant cinq ans d’ancienneté dans le crédit-temps sont supprimées. Pour les nouvelles deman des, les allocations normales, d’un montant plus faible, s’appliquent désormais.

Emplois de fin de carrière préservés

Ces économies n’ont pas d’impact sur les emplois de fin de carrière. Ainsi, les travail leurs à temps partiel occupés au minimum à

NOIR SUR BLANC CRÉDIT TEMPS
NOIR SUR BLANC
14 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | 15 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |

Fin de contrat pour cause de force majeure médicale

Dans le cadre de la réforme des trajets de réintégration des malades de longue durée, la procédure de résiliation du contrat pour cause de force majeure médi cale a été adaptée. Il est probable que cette procédure suscite davantage de questions de la part de collègues malades.

Fin octobre, le Parlement a adopté le dernier volet de la législation qui réforme les trajets de réinté gration pour les malades de longue durée. Les principales modifica tions ont pour objectif d’éviter que les employeurs ne continuent à abuser des trajets de réintégration pour mettre des travailleurs à la porte pour cause de force majeure médicale. La réforme instaure deux procédures distinctes, une pour la réintégration et une autre pour la résilia tion du contrat pour cause de force ma jeure médicale, ainsi qu’une période obli gatoire de neuf mois d’incapacité de travail entre ces deux procédures. L’em ployeur n’aurait ainsi plus aucune raison d’entamer une procédure de réintégration s’il vise en fait une force majeure médi cale.

Prudence requise

Compte tenu du découplage des deux procé dures, les employeurs sont occupés à étudier en profondeur ce que cette procédure dis tincte pour la force majeure médicale peut représenter pour eux. Certains finalisent en

toute hâte des procédures de réintégration selon les anciennes règles, pour qu’elles puissent déboucher sur une force majeure médicale. Les syndicats doivent donc être particulièrement attentifs.

Pourquoi l’utilisation de la force majeure médicale est-elle aussi dangereuse d’un point de vue syndical? Parce que c’est un moyen pour l’employeur de résilier un contrat de travail sans qu’il ne soit question d’un licenciement sur le plan juridique.

Toutes les règles qui sont liées à un licencie ment (protections pour les travailleurs et obligations pour les employeurs) ne s’ap pliquent donc pas, ou seulement dans une moindre mesure.

Ainsi, le travailleur n’a pas droit à une in demnité de licenciement. Les règles relatives à la protection contre le licenciement des groupes de travailleurs protégés, comme les délégués des travailleurs, ne sont pas non plus d’application. L’employeur peut ainsi faire supporter par le travailleur individuel et la société le coût et le risque qu’un travail leur qu’il a engagé soit à ce point malade (notamment suite à son travail) qu’il n’est plus en mesure de travailler.

Une piste très douteuse

Le travail pathogène organisé par de nom breux employeurs a pour conséquence que des centaines de milliers de travailleurs se retrouvent malades de longue durée en raison de troubles liés à leur travail, comme des burnouts ou des troubles musculosque lettiques. En conséquence, la résiliation du contrat pour cause de force majeure médi cale constitue une piste très douteuse dans notre système belge.

Une mesure annoncée le mois dernier dans le cadre de l’accord budgétaire fédéral sem ble reconnaître partiellement ce problème.

Le gouvernement a l’intention de remplacer l’obligation pour les employeurs d’offrir un outplacement en cas de force majeure mé dicale par une cotisation obligatoire de 1.800 euros à un fonds qui soutient des mesures en faveur du retour au travail. La mesure proposée n’est pas directement en ligne avec l’avis des interlocuteurs sociaux (nous avions conseillé d’élargir le droit à l’outplacement), mais correspond bien au principe du pollueur payeur défendu par la CSC. L’employeur doit recevoir la facture pour des comportements que nous souhaitons avant tout décourager.

Force majeure souhaitée par le travailleur

le. La perte de droits sociaux dans de telles situations est un problème pour lequel la CSC veut une solution. On supprimerait ainsi une grande partie des motifs pour lesquels des travailleurs veulent emprunter cette piste douteuse.

Plus de soutien de la part des militants

Suite à la réforme des procédures, il est possible que davantage de questions soient posées aux militants sur la force majeure médicale. La CSC a en effet obtenu que, lors du lancement de la procédure, le médecin du travail doive obligatoirement informer le travailleur de son droit de bénéficier de l’assistance d’un délégué de travailleurs dans l’entreprise. Cette assistance syndicale permet au travailleur malade de ne pas être seul face à son employeur et les militants ont une meilleure vision de l’attitude de l’employeur à l’égard de collègues malades de longue durée.

Force majeure médicale?

Après neuf mois d’incapacité de travail, tant l’employeur que le travailleur peuvent entamer une procédure pour mettre fin au contrat de travail. Le conseiller en préventionmédecin du travail examine si le travailleur est définitivement inapte à exécuter son travail. Si tel est le cas, et si le travailleur ne demande pas un travail adapté, le contrat est résilié pour cause de force majeure médicale. La force majeure implique que personne n’est «coupable» de la résiliation du contrat, et donc qu’aucun délai de préavis ou indemnité de licenciement ne s’applique.

PAR LE BIAIS DE LA «FORCE MAJEURE MÉDICALE», UN EMPLOYEUR PEUT RÉSILIER UN CONTRAT DE TRAVAIL SANS DEVOIR RESPECTER LES OBLIGATIONS LIÉES À UN LICENCIEMENT.

Malgré les inconvénients de cette piste, on constate qu’un certain nombre de travail leurs sont demandeurs d’une résiliation de contrat pour cause de force majeure médi cale. Il s’agit souvent de situations où le travailleur ne s’estime pas en état de re prendre le travail compte tenu de son état médical ou craint de se retrouver dans l’en vironnement de travail qui l’a rendu malade.

En cas de démission par le travailleur ou de commun accord, le travailleur perd le droit à des allocations de chômage. Ce n’est pas le cas s’il demande à ce que son contrat soit résilié pour cause de force majeure médica

En plus d’expliquer clairement les avan tages et les inconvénients de la force ma jeure médicale aux collègues qui posent des questions à ce sujet, il est utile de leur signaler que les deux procédures – trajet de réintégration et résiliation de contrat – ont été dissociées mais ne s’excluent pas mu tuellement. Que ce soit l’employeur ou le travailleur qui la démarre, une procédure de force majeure médicale peut toujours, à la demande du travailleur, être suivie par une procédure de réintégration par laquelle le médecin du travail vérifie si un travail adap té ou un autre travail est possible et l’em ployeur est tenu de vérifier. L’objectif est de garantir autant que possible le droit à une adaptation raisonnable du travail. 

Restructuration en cours?

Veillez à ce que l’indemnité de reclassement soit indexée!

Tous les travailleurs inscrits dans une cellule pour l’emploi et qui ont au moins une année d’ancienneté ininterrompue auprès de l’employeur ont droit à une in demnité de reclassement.

Cette indemnité est en principe payée tous les mois. La loi prévoit qu’elle doit être indexée selon le même mécanisme d’indexation qui était applicable au salaire du travailleur concerné (article 36 de la loi du 23 décembre 2005 relative au pacte de solidarité entre les générations et article 39bis de la loi relative aux contrats de travail)

Si votre entreprise est en cours de restructuration et qu’une cellule pour l’emploi a été mise en place, veillez à ce que l’employeur procède bien à l’indexation de l’indemnité de reclassement payée aux travailleurs inscrits dans la cellule de re conversion.

16 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |
NOIR SUR BLANC
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DÉCONNEXION

Le droit à la déconnexion

Si le droit à la déconnexion n’a pas fait l’objet d’une CCT secto rielle dans les entreprises de 20 travailleurs ou plus, une CCT d’en treprise ou le règlement de travail devra concrétiser ce droit pour fin 2022.

Vous trouverez plus de précisions à ce sujet dans le Syndicaliste n°973 du 26 octobre 22, ainsi qu’un modèle de CCT sur www.lacsc.be/deconnexion

DÉCEMBRE

À titre indicatif, voici l'ordre du jour et les points d'attention obligatoires pour les réunions du CPPT et du CE en décembre. Vous avez aussi le droit d’inscrire d’autres points à l’agenda. Voici quelques suggestions. Préparez bien ces réunions!

FORMATION

La formation du personnel, une priorité syndicale

Agenda CPPT

• Suivi des réunions précédentes: l’em ployeur a-t-il donné suite aux avis du CPPT dans les délais prévus? Les accords pris en novembre ont-ils été suivis d’effets? Faut-il rediscuter certains points?

• Discussion du rapport mensuel du service interne de prévention et de protection au travail le conseiller en prévention chargé du service interne PPT doit présenter et expli quer oralement son rapport mensuel sur la sécurité, la santé et le bien-être dans l’en treprise.

• Mise en œuvre du plan annuel d’action pour 2022 état d’avancement et évaluation.

• Plan annuel d’action 2023 la réunion de décembre permettra de terminer les discus sions entamées en novembre et d’émettre un avis définitif sur le nouveau plan. Celui-ci entrera en vigueur le 1er janvier 2023, même si le CPPT n’a pas émis d’avis.

Au conseil d’entreprise

• La fixation des dates des vacances annuelles doit figurer à l’agenda. Si la com mission paritaire du secteur ne prend pas de décision en la matière, c’est le CE qui doit s’en charger. Si la commission paritaire a fixé la date des vacances, le CE n’est chargé que des modalités pratiques relatives à l’exécu tion et au contrôle de la déci sion.

En dehors de ce point à traiter obligatoirement en décembre, le CE peut se saisir de nombreuses autres questions. Deux exemples:

• À la demande des délégués, le chef d’entre prise est tenu d’informer le CE sur les règles en matière de politique du personnel et sur les modifications envisagées. Cela concerne les règles relatives à l’embauche, à la sélec tion, à la mutation, à la promotion, au pas sage du temps plein au temps partiel, à l’or ganisation de l’accueil, etc. (CCT n°9, art. 9).

• Le CE peut aussi, si nécessaire, se saisir de l’adaptation du règlement de travail La brochure de la CSC à ce sujet (disponible en

Le CE doit être informé et consulté sur les mesures à caractère collectif relatives à la formation et à la réadaptation professionnelles (CCT n°9, art.8). Suite à la loi du 29.9.2022, deux nouvelles obligations s’imposent aux entreprises: outre le droit de formation individuel pour chaque travailleur, à définir dans une CCT sectorielle ou un «compte formation individuel», à partir de 2023, toute entreprise occupant au moins 20 travailleurs devra aussi établir, avant le 31 mars, un plan de formation annuel formel. Une concertation préalable doit avoir lieu au CE. Il est donc temps de mettre le point à l’agenda du CE dès maintenant!

À partir de décembre 2022, un travailleur ne sera plus obligé de remettre un certifi cat médical pour le premier jour de maladie. Ce sera le cas tant en cas de maladie d’un jour que pour le premier jour d’une période d’incapacité de tra vail plus longue.

Cette dispense de l’obligation de rentrer un certificat médical ne vaut que pour les trois premières périodes d’incapacité de travail par an née civile. La loi prévoit en outre que les entreprises occupant moins de 50 travailleurs – calcul basé sur le nombre de membres du person nel en service au 1er janvier de l’année au cours de laquelle la maladie survient – peuvent revoir cette règle à la baisse, soit en concluant une CCT, soit en adaptant le règlement de travail. Les entreprises oc cupant moins de 50 travailleurs peuvent donc abroger cette règle en modifiant leur règlement de travail.

ligne pour les délégués), vous permet d’exa miner si le règlement en vigueur est à jour. Pour cela, il est conseillé de travailler en équipe syndicale, avec tous les délégués (CPPT, CE, DS). S’il s’avère que le règlement de travail n’est plus à jour et devrait être adapté, l’équipe pourra préparer des proposi tions, consulter le personnel et charger les membres du CE de les mettre à l’ordre du jour d’une prochaine réunion.

Toutes les entreprises ont, bien entendu, la possibilité d’adopter des règles encore plus favorables par le biais d’une CCT ou du règlement de travail et, par exemple, de supprimer totalement l’obligation de rentrer un certificat médical.

Remarque: le travailleur qui ne séjourne pas à son adresse habituelle, connue de l’employeur, doit fournir à celui-ci l’adresse à laquelle il séjourne. À ce sujet, le Conseil d’État a fait remarquer à juste titre que cette obligation n’implique pas l’interdiction, pour le travailleur, de se déplacer ce jour-là, par exemple pour se rendre chez le médecin.

La date précise d’entrée en vigueur de cette mesure dépend de la date de publication de cette nouvelle loi. Elle devrait en principe l’être début décembre. Avec cette nouvelle loi, un travailleur aura déjà le droit d’être malade trois fois au mois de décembre sans devoir intro duire de certificat. 

Un certificat médical est-il encore requis en cas de maladie de courte durée?
VOTRE QUESTION NOTRE RÉPONSE
TEXTE Kris Van Eyck & Geneviève Laforet ILLUSTRATION Shutterstock
À TABLE
18 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | 19 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |
AU MENU DU CPPT ET DU CE
Piet Van den Bergh, conseiller juridique CSC

SI VOUS RÉDUISEZ LEURS ALLOCATIONS, LES CHÔMEURS CHERCHERONT PLUS VITE DU TRAVAIL.

En novembre 2012, le gou vernement Di Rupo a réfor mé l’assurance-chômage, en renforçant notamment la dégressivité. Cela signifie que les allocations de chô mage diminuent de manière plus rapide et plus abrupte, jusqu’à atteindre un strict minimum. Cette réforme s’est inscrite dans le cadre de la crise financière de 2008 et de la volonté de réaliser des économies. Un nouveau rapport de l’Onem montre que cette baisse progressive des allocations en fonction de la durée du chômage n’a pas d’effet sur l’accès à l’emploi pour les chômeurs. C’est pourtant là un des grands arguments avancés par les partisans de cette mesure.

Hilde Thys, demandeuse d’emploi de longue durée

Hilde Thys (56 ans): «Il est faux de dire que les personnes au chômage depuis un certain temps ne veulent pas travailler. J’aimerais vraiment trouver un emploi. Les personnes que je rencontre dans le cadre des Travailleurs sans emploi de la CSC disent la même chose. Il y a un problème d’inadéquation et nous passons systématiquement à côté des opportunités.

J’ai une formation d’architecte d’intéri eur. J’ai été licenciée après une faillite et j’ai ensuite occupé quelques autres emplois, mais je suis maintenant au chômage depuis un certain temps déjà. Je souffre d’os téoporose (décalcification des os) et de problè mes de dos, et ne peux donc plus accepter n’importe quel emploi. Je ne suis par exemple pas capable de travailler toute la journée de vant un ordinateur. J’ai suivi des formations au VDAB, mais ils n’ont pas débouché sur l’emploi souhaité. J’aimerais suivre un cours d’opto métrie, mais il n’est pas reconnu par le VDAB alors que c’est un métier en pénurie, très re cherché par les opticiens. Si je suis ce cours, je perds donc mes allocations. Je suis régulière ment invitée à des entretiens d’embauche mais

toujours sans succès. Le fait que je ne travaille plus depuis longtemps joue contre moi, tout comme mon âge. J’ai déjà fait beaucoup de bénévolat, mais cela ne m’a malheureusement pas permis de trouver un emploi.

En tant qu’isolée, je dois m’en sortir avec des allocations de chômage de 1.270 euros par mois. Chaque euro compte. Je me prive be aucoup. Avant, quand je travaillais, je partais régulièrement en vacances. Ce n’est plus pos sible aujourd’hui. J’ai la chance que mon papa ait un jardin. Je ne manque donc pas de légu mes verts. C’est lui aussi qui a payé mes lu nettes à verres progressifs parce que je n’avais pas d’argent. Tout ce que je fais, c’est surviv re.» 

ET VOUS

Quel est votre avis? Que pensez-vous de la dégressivité des allocations de chômage? Que faut-il faire pour permettre aux demandeurs d’emploi de se réinsérer plus rapidement?

Réagissez sur syndicaliste@acv-csc.be

Karim Dibas, responsable Travailleurs sans emploi (TSE)

«Appauvrir les chômeurs, cela ne fonctionne pas.»

Karim Dibas, ne s’étonne pas des résultats du rapport de l’Onem. «Alors que des économistes et d’autres voix continuent de prôner une baisse rapide et radicale des allocations de chômage, même l’Onem confirme aujourd’hui ce que la CSC dit depuis des années: cela ne sert à rien de pousser les gens vers l’emploi avec des menaces financières. Il faut avant tout supprimer les obstacles que rencontrent les chômeurs de longue durée, comme le manque d’expérience professionnelle pour les jeunes ou le fait de ne pas disposer des qualifications et connaissances requises pour répondre à des exigen ces qui changent en permanence. Il faut veiller à ce que les gens soient suffisamment sou tenus et les accompagner au mieux vers un emploi qui leur convient.»

En renforçant la dégressivité des alloca tions de chômage, le gouvernement fédéral de l’époque voulait économiser sur les dépenses liées aux allocations en remet tant plus vite les chômeurs à l’emploi. Karim: «On espérait que la diminution des allocations aurait un effet sur le comportement de recherche. Tant les organisations de lutte contre la pauvreté que les syndicats ont alors affirmé que le renforce ment de la dégressivité ne ferait que pousser plus de gens vers la pauvreté et qu’ils ne trouve raient pas plus vite un nouvel emploi.» Cet avis est confirmé par un nouveau rapport de l’Onem, qui étudie l’effet des règles renforcées dix ans après leur mise en œuvre. Selon l’Onem, on ne peut pas prouver de lien entre la diminution plus rapide des allocations de chômage et l’accès à l’emploi pour les chômeurs.

Les pouvoirs publics n’assurent pas leur mission de protection

Karim: «Dans son rapport, l’Onem stipule que les pouvoirs publics négligent un des objectifs princi paux des allocations de chômage, qui est d’éviter le risque de pauvreté pour les personnes qui perdent leur emploi. Les allocations du chômeur moyen sont inférieures au seuil de pauvreté. Les pouvoirs publics n’assurent ainsi pas leur mission de protection des chômeurs. Le faible montant des allocations a aussi pour conséquence que, pour les personnes qui tombent en dessous du niveau de pauvreté, il est plus difficile encore de trouver un nouvel emploi. Une personne qui vit dans la pauvreté a surtout pour objectif de sur vivre et ne trouve souvent pas toute l’énergie nécessaire à la recherche d’un nouvel emploi. Sans oublier que les déplacements inhérents à une recherche d’emploi coûtent cher.»

TROIS PÉRIODES D'INDEMNISATION

Le montant des allocations de chômage diminue en 3 phases et dépend de la situation familiale.

Le cohabitant avec charge de famille reçoit 65% de sa dernière rémunération pendant les 3 premiers mois et 60% du 4 è au 12è mois, puis cela dépend de la longueur de sa carrière professionnelle. En der nière phase, son allocation forfaitaire est de 1.537,90€/mois.

L’isolé reçoit 65% de sa dernière rémunération pendant les 3 premiers mois et 60% du 4 è mois au 12è mois, puis 55% pour une durée qui dépend de la longueur de sa carrière professionnelle. En dernière phase, son allocation est de 1.246,18€/mois.

Le cohabitant reçoit 65% de sa dernière rémunération pendant les 3 premiers mois et 60% du 4 è au 12 mois, puis 40% pour une durée qui dépend de la longueur de sa carrière professionnelle. En dernière phase, son allocation est de 646,88€/mois.

0,5

À l’époque, le gouvernement Di Rupo pensait faire des écono mies grâce à cette réforme, en se basant sur des effets particu lièrement positifs pour l’emploi. L’économie totale réalisée entre 2012 et 2020 ne dépasse pas 0,5 % des dépenses totales.

L’effet d’économie espéré par les économistes et le gouvernement est donc loin de se concrétiser.

1.270

Pour un isolé, l’allocation de chômage minimale est de 1.270 euros par mois, bien en-dessous du seuil de pauvreté de 1.461 euros par mois (calcul du SPF Sécurité sociale).

Lors d’une enquête réalisée récemment par les Travailleurs sans emploi (TSE) de la CSC au près de 2.265 demandeurs d’em ploi, 97% ont indiqué qu’ils éprouvaient des difficultés à joindre les deux bouts. 15% doivent faire appel à leur fa mille. 22,5% doivent puiser dans leurs économies (pour autant qu’ils en aient).

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TEXTE Dominic Zehnder & Patrick Van Looveren
EN DÉBAT
«Penser que l’on serait plus motivé pour rechercher un emploi si l’on diminue nos allocations, c’est un raisonnement totalement erroné.»
97
«

«Les gens en ont marre des inégalités»

Si le feu social couve en Belgique, alors le Royaume-Uni est aux prises avec des incendies. Face à une crise du pouvoir d’achat sans précédent, des actions de grève dans d’innombrables secteurs sont organisées pour en finir une bonne fois avec la stagnation des salaires et des économies glaciales. Mick Lynch, syndicaliste: «Le gouvernement croyait que les travailleurs ne pourraient pas faire preuve de solidarité. Il s’est trompé.»

Lorsque le syndicat natio nal britannique des che mins de fer, du transport maritime et des trans ports (RMT) a annoncé, au début de l’été, qu’il était contraint de partir en grève, en raison de l’enlisement des négociations salariales, le gou vernement conservateur a pensé que le malaise ne serait que de courte durée. «Ils ont cru pouvoir casser rapidement notre action explique Mick Lynch, le secrétaire général du RMT, mais ce mépris affiché par le gouvernement lui est revenu à la figure comme un boome rang. Quand les Britanniques ont vu nos revendications, ils y ont adhéré. Un sondage a montré que plus de 70% de la population nous soute nait».

Le 21 juin, 40.000 cheminots affiliés au syndicat RMT ont arrêté le travail une première fois. Plusieurs autres jours de grève ont eu lieu durant tout l’été. Seul le décès de la Reine a été un motif pour annuler une grève prévue en septembre. Et le combat n’est pas encore terminé. Des ac tions sont encore prévues en no vembre. Il s’agit du plus grand mou vement de grèves qu’ait connu le Royaume-Uni depuis 1989. La com battivité des cheminots a eu un effet contagieux sur d’autres sec teurs. Les dockers, les facteurs, le

personnel des aéroports, etc. se sont tous mis en grève ces derniers mois. Même les enseignants et le personnel des soins de santé pré voient des grèves à l’automne.

Pourtant, la législation britannique complique singulièrement les possi bilités de faire grève: les syndicats sont obligés d’organiser au préa lable un vote de leurs membres par voie postale et au moins la moitié des membres habilités à voter doivent émettre un vote valable. Parce que ce malaise est assez généralisé, la presse britannique évoque, par comparaison avec les troubles des années ’70, «un été de la colère» (a summer of discontent) qui est loin de se calmer. En effet, le mécontentement est assez général: la crise actuelle du pouvoir d’achat jette directement dans la pauvreté des milliers de travailleurs qui n’ont pas droit à de vraies augmentations de salaire et, après douze années d’économies dans les services pu blics, les Britanniques en ont marre de cette austérité. Entretemps, le gouvernement britannique désire continuer de restreindre le droit de grève. Pire encore, le parti gouver nemental conservateur s’enlise dans des contradictions internes et la Première ministre, Liz Truss, a été contrainte de démissionner après un mandat de 45 jours seulement,

marqué par des pressions constantes.

Mick Lynch est devenu le symbole du mouvement de protestation de la classe ouvrière. Il plaide pour des actions communes: «Tous les syndi cats, qu’ils soient modérés ou radi caux, doivent s’unir et faire front avec les travailleurs». En tant que cofondateur de «Enough is Enough» («Trop, c’est trop»), une coalition hétéroclite de divers syndicats et mouvements sociaux, il veut fournir une soupape de sûreté qui permette à la population d’exprimer sa colère. «Bon nombre de gens, en particulier les jeunes générations, veulent un réel changement. Ils veulent des dirigeants politiques qui se soucient de l’environnement et des minorités. Ils en ont marre des inégalités. Ils veulent à nouveau pouvoir compter sur un État providence et des soins de santé de qualité. Notre message est que toutes ces campagnes doivent se rassembler en un mouve ment progressiste.»

Le gouvernement conservateur a-t-il sous-estimé la solidarité de la classe ouvrière?

Je le crois, oui. Le gouvernement s’est mis à croire à ses propres ren gaines, selon lesquelles le pays est plein de gens qui ne croient pas à la solidarité, qui nient l’existence d’une

Mick Lynch est le secrétaire général du syndicat national britannique des chemins de fer, du transport maritime et des transports (RMT) et cofondateur du mouvement «Enough is Enough» («Trop c’est trop»), qui bénéficie d’un large soutien. Ces derniers mois, Mick Lynch est devenu le symbole et le porte-parole du mouvement de protestation britannique.

communauté, comme le prétendait Margaret That cher (NDLR: Première ministre de 1979 à 1990), que c’est le règne du chacun pour soi. Mais cet ancien message de solidarité est toujours vivant. Les gens n’acceptent plus d’être opposés les uns aux autres. Dans bon nombre de communautés, les gens savent qu’ils ne vont pas mieux s’en sortir si la situation des autres se détériore.

Pourquoi le moment est-il venu de dire que «la coupe est pleine»?

La crise du pouvoir d’achat me semble pire au Royaume-Uni qu’en Belgique. Nous voyons des gens qui travaillent à temps plein et qui doivent quand même se tourner vers les banques alimen taires. Ce phénomène n’a vraiment pris de l’am pleur qu’au cours de la dernière décennie. Ces banques alimentaires fonctionnent sur la base de dons, qui émanent souvent de personnes qui appartiennent à la classe ouvrière. Aujourd’hui, certaines banques alimentaires sont confrontées à une pénurie de denrées alimentaires parce que la population ne peut plus se permettre de donner de la nourriture. Les employeurs prétendent sou vent que l’augmentation des salaires nourrit l’in flation mais, au Royaume-Uni en tout cas, cela ne peut pas être vrai. Nous avons connu des années d’austérité dans les services publics et les salaires ont augmenté moins vite que l’inflation. Malgré que de grandes entreprises comme Shell ou Briti sh Petroleum engrangent de plantureux bénéfices et distribuent de généreux dividendes à leurs actionnaires. Les hausses de prix et les factures d’énergie élevées sont en partie la conséquence de la guerre en Ukraine, mais elles découlent aussi de l’incompétence du gouvernement. La baisse d’impôts en faveur des plus riches, que Liz

Truss avait proposée, a entretemps été annulée mais cette mesure a provoqué l’envol de l’inflation et des taux d’intérêt. Conséquence: même les ci toyens qui gagnent bien leur vie éprouvent des difficultés à payer leur loyer ou rembourser leurs emprunts. Le gouvernement cherche délibérément à enrichir encore davantage les super-riches. Il pense échapper ainsi à toute critique, mais les temps changent. J’ignore s’il s’agit d’une révolu tion, mais cela peut ouvrir la voie à une société plus équitable. Le pays aspire à un changement de gouvernement.

On remarque que les premiers métiers qui se sont mobilisés sont justement ceux qui étaient indispensables durant la pandémie… Les gens ont continué à travailler pendant la pan démie. Ils ont fait front, soi-disant au nom de l’inté rêt supérieur de la patrie, mais après les applaudis sements, ils n’ont eu droit ni à de meilleurs salaires, ni à de meilleures conditions de travail. Notre gou vernement semble vouloir laisser la main au marché libre dans tous les domaines, et advienne que pour ra. Qu’il s’agisse des prestataires de soins, du sec teur des transports, de celui du nettoyage, etc., tous ces métiers ne donnent pas droit à un salaire équitable et l’influence que l’on peut exercer sur les marchés y est nulle. La colère est énorme face aux droits dont les travailleurs sont privés. Les contrats zéro heure sont une pratique courante au RoyaumeUni: les travailleurs n’ont pas d’heures fixes, ils dépendent des heures que leur employeur leur attribue de manière flexible. Pensez à l’armateur P&O Ferries qui a licencié cette année 800 hommes d’équipage pour les remplacer par des travailleurs moins coûteux provenant de pays extérieurs à l’Union européenne. 

«NOUS VOYONS DES GENS QUI TRAVAILLENT À TEMPS PLEIN ET QUI DOIVENT SE TOURNER VERS LES BANQUES ALIMENTAIRES.» Mick Lynch TEXTE Simon Bellens et Lies Van der Auwera PHOTO Steve Eason
FACE À FACE
Mick Lynch, syndicaliste, à propos du malaise social au Royaume-Uni
Il s’agit du plus grand mouve ment de grèves qu’ait connu le Royaume-Uni depuis 1989
Mick Lynch BIO
22 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 | 23 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |

«IL Y A UN RENOUVEAU DE LA LUTTE SYNDICALE QUI SE MET EN PLACE ET DONT LES SYNDICATS ONT BIEN BESOIN.»

ALICE

MILITANTE JEUNES CSC

Étudiante en psychologie en 2ème année de Bachelor, Alice a participé au tour des piquets de grève organisé par les Jeunes CSC Bruxelles. Le 8/11, elle était devant le siège de Bpost de 20h à 23h. Le 9/11, elle a commencé par le zoning de Neder-over-Hembeek à 5h…

«Je suis arrivée aux Jeunes CSC parce que ma sœur y était et que j'ai rencontré des militants des Jeunes CSC pendant la manif climat de l'an née passée. Je me suis affiliée parce que j'avais eu un meilleur contact avec eux qu'avec d’autres syndicats de jeunesse, on avait un chouette accompagnement et de bonnes explications.

Ce qui me motive? C’est la merde! Il y a des inégalités partout, on n’a plus assez d'argent pour payer quoi que ce soit. En tant qu'étudiant surtout, on est à bout. Là, il me reste 80 balles pour terminer le mois et on est le 9 novembre. Je jobbe comme polyvalente cuisine dans une maison de repos un week-end par mois et les jours fériés, soit 16h par mois en dehors de Bruxelles. Ils ne me proposent pas plus d'heures parce qu’ils engagent beaucoup d’étudiants.

Trouver quelque chose sur Bruxelles où tu n’es pas soit payé au noir, soit avec des conditions de travail de merde, c'est super compliqué et entre les études, les courses, mon boulot, je n’ai juste pas le temps de chercher un emploi à Bruxelles.

J’ai déjà fait des piquets de grève lors de la grève des cheminots le mois dernier et c’est la première fois que je fais un tour des piquets.

C’est chouette de voir autant de personnes se mobiliser. En discutant, on se rend compte que même si les gens travaillent un jour de grève, la plupart sont de notre côté et comprennent parfaitement pourquoi on fait la grève et ça se passe plutôt bien.

Les témoignages que j’ai entendus, c'est à chaque fois les mêmes: "Il y a 2 ans, on avait un niveau de vie confortable et puis maintenant on ne peut plus rien se permettre." Presque personne n'a encore allumé son chauffage. Il y a des gens qui se chauffent à la bougie parce qu’ils ne peuvent pas payer le gaz. De manière générale c'est "On survit plus qu'on vit et on va avoir froid cet hiver"».

PAROLES DE MILITANTE
Alice Imberechts (20 ans)
24 SYNDICALISTE 974 | 16 NOVEMBRE 2022 |
TEXTE ET PHOTO Donatienne Coppieters

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