FdTunisie - avril 2009

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Culture

La sélection FDT des meilleures ventes de livres

par WBL

avec la collaboration de la librairie El Kitab

Gomorra

Roberto Saviano Après le « Cosa Nostra » de John Dickie, référence sur la mafia sicilienne, « Gomorra » s’avère tout aussi important, à propos cette fois de la Camorra, la mafia napolitaine. Avec ceci comme différence que l’essai de Roberto Saviano est aussi épidermique et impliqué que celui de Dickie était minutieux et universitaire. L’auteur a donc enquêté pendant plusieurs années sur les activités de la Camorra, l’organisation criminelle qui règne sur Naples et toute la Campanie. Une organisation moins connue que la mafia sicilienne mais bien plus dangereuse, car la mafia se pose comme un « contre-Etat », a un code d’honneur et respecte certaines règles, alors que la Camorra est une forme « d’ entreprenariat » criminel dont le seul but est de maximiser ses profits, ses membres étant prêts à tout pour atteindre cet objectif.. Loin de lui ôter de la crédibilité, cette implication de Saviano dans son sujet donne à « Gomorra » une force dévastatrice, et l’écriture du jeune homme, qui n’a même pas trente ans, porte en elle toute la hargne, le désespoir et le courage de son auteur. Né à Naples dans les quartiers pauvres, Roberto Saviano a vécu les chantiers épuisants, le débarquement nocturne de caisses de marchandises illicites. Son récit n’est toutefois pas celui d’un camorriste, plutôt celui d’un type au cœur de l’action sans le vouloir qui, alors que tout le monde est sur son siège à regarder le spectacle, se trouve assis au milieu de la scène du théâtre.La justesse des mots, la violence latente de sa plume font de ce « Gomorrhe » non seulement un essai instructif au possible, mais aussi un livre intense, qui laisse abasourdi.

Si tu m’abandonnes

Nora Roberts Le lieutenant de police Phoebe MacNamara est la meilleure négociatrice de crise de tout Savannah. Libérer des clients pris en otages lors d’un hold-up ou convaincre un forcené de relâcher son épouse et ses enfants constitue son lot quotidien. Elle ne redoute rien ni personne, menant de front un métier éprouvant, sa mère agoraphobe et sa fillette surdouée de sept ans, Carly. Mais lorsque Phoebe elle-même est agressée dans sa propre maison par un assaillant qui dissimule son visage, son assurance vacille. Devant une série de messages qui la menacent directement, elle n’aura d’autre choix que d’affronter ses peurs les plus enfouies. Même si la couverture peut paraître douce, presque enfantine, ce roman est rempli de rebondissements à chaque page. Avec ces 400 millions d’exemplaires vendus dans le monde, Nora Roberts est devenue une référence dans le thriller et de plus elle est prolifique. 52

J’aurais voulu être égyptien

Alaa El Aswany « Si je n’étais pas né égyptien, j’aurais voulu être égyptien », la célèbre citation de Mustapha Kamel donne le ton de ce recueil : voici l’Egypte placée sous le feu d’un écrivain amoureux de son pays et qui, par le détour de la fiction, fait apparaître les turpitudes et les contradictions d’une société à la dérive. Interdit de publication par l’Office du livre, pour cause d’insulte à l’Egypte, le premier de ces récits, « Celui qui s’est approché et qui a vu », donne précisément à voir un monde où règnent les faux-semblants et l’hypocrisie. On le connaît pour ses fictions denses et polyphoniques. Pourtant, avant de se lancer dans le savant imbroglio de « L’Immeuble Yacoubian », Alaa El Aswany, alors dentiste au Caire, faisait ses premiers pas en écriture avec un bref roman. « Celui qui s’est approché et qui a vu », c’est son titre, ouvre ce recueil de nouvelles qui explorent le caractère égyptien et révèlent autant la fascination réciproque entre Orient et Occident que l’hypocrisie d’Etat pratiquée en Egypte. Censuré par l’Office du livre, ce texte ramassé offre un aperçu de ses talents de conteur et du regard sans concession qu’il porte sur sa patrie. Un regard par ailleurs tendre et ouvert, terriblement généreux. « J’aurais voulu être égyptien » n’a rien d’un coup d’essai. Il révèle au contraire un écrivain aussi à l’aise dans les récits plus intimistes que dans les romans chorale. Mieux, les nouvelles qui concluent ce recueil investissent des terrains plus douloureux, plus introspectifs, tels que l’humiliation au travail, la violence à l’école, ou simplement la souffrance, comme dans ce récit poignant d’un enfant handicapé dont la différence disparaît le temps d’une course folle à vélo. Parce qu’il sait incarner ses défauts jusque dans les inflexions de la langue, Alaa El Aswany dépasse la simple peinture au vitriole de l’Egypte pour donner vie à sa fiction et animer le tableau qu’il esquisse. Plus qu’un incroyable portraitiste, il s’impose comme une voix discordante, anticonformiste, qui sait emprunter à toutes les castes sociales, religieuses ou politiques les traits qui les caractérisent. Un caméléon qui ne se réclame d’aucune de ces voix… ou peut-être de chacune d’entre-elles.


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