Souvenirs d'un officier 1896

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SOUVENIRS

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D'UN

OFFICIER

diables à longue queue cramponnés au bord d'un prédes grandes fourches gigotent cipice d'où bavent des flammes. Au bout les malheureux damnés médiocrement ravis, s'il faut en croire les grimaçantes contorsions de tout leur être ; puis le Purgatoire et enfin le Ciel où avec ses nombreux

divine avec sa belle barbe rayonne Dieu le père entouré d'une auréole blanche retombant à flots sur sa poitrine. Il est assis sur un trône magnide Saintes et de Bienfique, au milieu de sa cour de Saints, d'Archanges, se tandis que la Mère des élus heureux, perd à ses pieds dans une éternelle, cette grande félicité promise sur la terre aux justes et aux sages. C'est ce dernier et naïf chef-d'oeuvre qui doit certainement car cette adoration convenir le mieux à ces contemplatifs Asiatiques, admiration

n'exigera pas beaucoup d'efforts ; elle donnera au contraire la béatitude infinie, provoquera les somnolentes extases et aura le précieux avantage de remplacer là-haut l'opium absent. cette longue série, je remarque dans un angle Enfin, pour terminer le déluge tel qu'a pu le concevoir plus sombre une peinture représentant sans fin de la divinité

d'un pieux artiste indigène. Robida aurait crayonné une l'imagination de cet de l'histoire Sainte, charge épisode que certainement, pour notre il n'aurait trouvé de situations fantaisie, égayer pas plus étranges de naïveté et des antagonismes aussi fantastiques. Voilà le vénérable Noé avec sa vieille

sur l'avant

un rocher.

leurs

femme, Ils tendent

la reproduction être entendue.

doit

être

d'un gigantesque ponton adossé contre mains vers tous les êtres de la création dont

assurée

et leur bienveillante

invitation

semble

Ce sont

devant eux des cochons dodus, des oies à la et bête, des hippopotames grave superbes, des souris toutes blanches, des buffles paresseux, des cerfs gracieusement campés et des le ruissellement de leurs plumes. Sur la paons étalant orgeuilleusement

démarche

rive rongée

par l'écume et battue de tous les animaux

des flots, on ne distingue plus qu'un invariablement grouillement accouplés. Et le bon mes chères bêtes, .... le patriarche affairé semble dire: « Hâtons-nous, le danger presse !!....» sur un air connu. Les temps s'envole, semblent attristés de ce se laissent conduire éléphants déménagement, mais avec résignation l'une des belles filles de Noé les par qui pousse gentiment devant elle armée d'une simple petite gaule. Sem, Cham et Japhet, sans doute préposés au bureau des renseignements et à la distribution des se tiennent devant eux de la défilent des cabines, près passerelle. Et de jolis agneaux aux blanches frisures, des tigres subitement radoucis, rats énormes tout réjouis à l'idée d'un long séjour à fond de cale, des leurs ventres, crapauds avec de grands yeux ronds traînant lourdement — et même l'un d'eux, en des chiens, la queue en trompette, gavroche la en sa furtive sur l'un irrespectueux, patte l'air, projette pulvérisation — des pans de la jolie robe moirée de ce Enfin une nuée pauvre Sem ! d'oiseaux de toute espèce voltigeant dans l'air, viennent s'abattre sur les


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