Le Biodesign Assisté par Algorithmes

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Travail de fin d’études

Réalisé par Mouad Elbaze

Encadré par Pr. Karima Berdouz Docteur en Architecture, Enseignante Année Universitaire 2021-2022

Jury :

Mr. Mounir El Ouardighi : Architecte Urbaniste Enseignant à l’ENA. Pr. Khalid El Harrouni : Professeur d’enseignement supérieure à l’ENA.

Ecole Nationale d’Architecture de Rabat Année Universitaire 2021-2022

Abstract

Biodesign is about creating products or living spaces using nature for humans with considerations towards their natural tendencies. The three main objectives of this design approach are psychological comfort, natural aesthetic, and structural/functional optimization. Consequently, three concepts derive from Biodesign which are Biophilic design, Biomorphism and Biomimcry. The Biophilic design is built upon the natural tendencies that were developed in the brain of primary mankind, which allowed him to survive and live in community and in harmony with nature. Thus, the concept of biophilia is not the mere implementation of plants inside the living environment, instead it is about establishing a relationship with nature following certain principles. On the other hand, Biomorphism is about using nature forms for symbolic expressions or natural geometries and proportions for an aesthetic harmony in Architecture. Finally, Biomimicry is a solution research approach that relies upon transferring solutions from nature to Architecture. It is often used for structure optimization given the multitude of the perfect engineering solutions found in nature. Moreover, it can lead also to functional solutions.

The digital revolution brought new algorithmic tools which can simulate natural process and genetic code to research, optimize and model complex architectural solutions. The associative system of algorithms which compiles and derives information on its own based upon variables and constraints given by the designer leaves less room for error and provides holistic solutions. This new technology and advancement of biology research has set the path for Biodesign to be the optimal answer for the Architecture of the future.

To study the efficiency of Biodesign in Architecture for future demands, a benchmarking of nature inspired Projects from contemporary Architecture firms. The study assessed the biophilic, biomorphic and biomimic aspect of each project.

1

ةﺎﻛﺎﺤﻣ ﺎﮭﻨﻜﻤﯾ ﻢﻤﺼﻤﻟا ﺎﮭﻣﺪﻗ ﻲﺘﻟا دﻮﯿﻘﻟاو تاﺮﯿﻐﺘﻤﻟا ﻰﻠﻋ

2 : ﺺﺨﻠﻣ . ﺔﯿﻌﯿﺒﻄﻟا ﻢﮭﺗﻻﻮﯿﻣ ةﺎﻋاﺮﻣ ﻊﻣ ﺮﺸﺒﻠﻟ ﺔﻌﯿﺒﻄﻟاﺮﯿﺨﺴﺘﺑ ﺔﺸﯿﻌﻣ تﺎﺣﺎﺴﻣ وأ تﺎﺠﺘﻨﻣ ءﺎﺸﻧإ لﻮﺣ ﻲﺟﻮﻟﻮﯿﺒﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا مﻮﻘﯾ ءﺎﻨﺑ ﻲﻔﯿظﻮﻟا / ﻲﻠﻜﯿﮭﻟا ﻦﯿﺴﺤﺘﻟاو ﺔﯿﻌﯿﺒﻄﻟا ﺔﯿﻟﺎﻤﺠﻟاو ﺔﯿﺴﻔﻨﻟا ﺔﺣاﺮﻟا ﻲھ ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا اﺬھ ﺞﮭﻨﻟ ﺔﺛﻼﺜﻟا ﺔﯿﺴﯿﺋﺮﻟا فاﺪھﻷا ﺪﯿﻠﻘﺘﻟاو ﻲﺋﺎﯿﺣﻹا ﻲﻠﯿﻜﺸﺘﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا , ﻲﻠﯿﻓﻮﯿﺒﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا ﻲھو ﻲﺟﻮﻟﻮﯿﺒﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا ﻦﻣ ةﺪﻤﺘﺴﻣ ﻢﯿھﺎﻔﻣ ﺔﺛﻼﺛ , ﻚﻟذ ﻰﻠﻋ ﮫﻟ ﺖﺤﻤﺳ ﻲﺘﻟاو ،ﻲﺋاﺪﺒﻟا نﺎﺴﻧﻹا غﺎﻣد ﻲﻓ ﺎھﺮﯾﻮﻄﺗ ﻢﺗ ﻲﺘﻟا ﺔﯿﻌﯿﺒﻄﻟاﺰﺋاﺮﻐﻟا ﻰﻠﻋ ﻲﻠﯿﻓﻮﯿﺒﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا مﻮﻘﯾ . ﻲﺋﺎﯿﺣﻹا ﺔﺌﯿﺒﻟا ﻞﺧاد تﺎﺗﺎﺒﻨﻟا ﻊﺿو دﺮﺠﻣ ﺲﯿﻟ ﺎﯿﻠﯿﻓﻮﯿﺒﻟا ﻲﻟﺎﺘﻟﺎﺑ مﻮﮭﻔﻣ ﺔﻌﯿﺒﻄﻟا ﻊﻣ مﺎﺋو ﻲﻓو ﻊﻤﺘﺠﻣ ﻲﻓ ﺶﯿﻌﻟاو ءﺎﻘﺒﻟﺎﺑ ماﺪﺨﺘﺳﺎﺑ ﻖﻠﻌﺘﯾ ﮫﻧﺈﻓ ﻲﺋﺎﯿﺣﻹا ﻲﻠﯿﻜﺸﺘﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا ﺎﻣأ . ﺔﻨﯿﻌﻣ ئدﺎﺒﻣ عﺎﺒﺗﺎﺑ ﺔﻌﯿﺒﻄﻟا ﻊﻣ ﺔﻗﻼﻋ ﺔﻣﺎﻗﺈﺑ ﻖﻠﻌﺘﯾ ﻞﺑ ، ﺔﯿﺸﯿﻌﻤﻟا . ﺔﯾرﺎﻤﻌﻤﻟا ﺔﺳﺪﻨﮭﻟا ﻲﻓ ﻲﻟﺎﻤﺠﻟا مﺎﺠﺴﻧﻻا ﻞﺟأ ﻦﻣ ﺔﯿﻌﯿﺒﻄﻟا ﺔﯿﺳﺪﻨﮭﻟا لﺎﻜﺷﻷا وأ ﺔﯾﺰﻣﺮﻟا تاﺮﯿﺒﻌﺘﻠﻟ ﺔﻌﯿﺒﻄﻟا لﺎﻜﺷأ ﻢﺘﯾ ﺎﻣ ﺎﺒﻟﺎﻏ ﺔﯾرﺎﻤﻌﻤﻟا ﺔﺳﺪﻨﮭﻟا ﻰﻟإ ﺔﻌﯿﺒﻄﻟا ﻦﻣ لﻮﻠﺤﻟا ﻞﻘﻧ ﻰﻠﻋ ﺪﻤﺘﻌﯾ لﻮﻠﺤﻠﻟ ﻲﺜﺤﺑ ﺞﮭﻧ ﻮھ ﻲﺋﺎﯿﺣﻹا ﺪﯿﻠﻘﺘﻟا ،اﺮﯿﺧأ ﺔﻌﯿﺒﻄﻟا ﻲﻓ ةدﻮﺟﻮﻤﻟا ﺔﯿﻟﺎﺜﻤﻟا ﺔﯿﻔﯿظﻮﻟا و ﺔﯿﺳﺪﻨﮭﻟا لﻮﻠﺤﻟا دﺪﻌﺘﻟ اﺮﻈﻧ ﻞﻜﯿﮭﻟا ﻦﯿﺴﺤﺘﻟ ﮫﻣاﺪﺨﺘﺳا ةﺪﯾﺪﺟ ﺔﯿﻣزراﻮﺧ تاودأ ﺔﯿﻤﻗﺮﻟا
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ﻢﺗ ، ﻞﺒﻘﺘﺴﻤﻟا ﺐﻟﺎﻄﻣ ﺔﯿﺒﻠﺗ ﻰﻠﻋ ﺎﮭﺗرﺪﻗ ىﺪﻣو ﺔﯾرﺎﻤﻌﻤﻟا ﺔﺳﺪﻨﮭﻟا ﻲﻓ ﻲﺟﻮﻟﻮﯿﺒﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻟا ةءﺎﻔﻛ ﺔﺳارﺪﻟ عوﺮﺸﻣ ﻞﻛ ﻦﻣ ﻲﻤﯿﻤﺼﺘﻟا ﺐﻧﺎﺠﻟا ﺔﺳارد و ﺔﻌﯿﺒﻄﻟا ﻦﻣ ةﺎﺣﻮﺘﺴﻣ
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ﻞﺒﻘﺘﺴﻤﻟا ﺔﺳﺪﻨﮭﻟ ﻞﺜﻣﻷا ﻞﺤﻟا نﻮﻜﯿﻟ يﻮﯿﺤﻟا ﻢﯿﻤﺼﺘﻠﻟ ﻦﻋ ﺚﺤﺒﻟا
ﺮﺻﺎﻌﻤﻟا رﺎﻤﻌﻤﻟﺎﺑ ﺔﯿﻌﺟﺮﻣ ﻊﯾرﺎﺸﻣ.

Résumé

Le biodesign consiste à créer des produits ou des espaces de vie en utilisant la nature pour les humains en tenant compte de leurs tendances naturelles. Les trois principaux objectifs de cette approche de conception sont le confort psychologique, l'esthétique naturelle et l'optimisation structurelle/fonctionnelle. Ainsi, trois concepts découlent du biodesign, à savoir le design biophile, le biomorphisme et le biomimétisme. Le design Biophilique est fondé sur les tendances naturelles qui se sont développées dans le cerveau de l'homme primaire et qui lui ont permis de survivre et de vivre en communauté et en harmonie avec la nature. Ainsi, le concept de biophilie n'est pas la simple implantation de plantes dans l'environnement de vie, il s'agit plutôt d'établir une relation avec la nature en suivant certains principes. D'autre part, le biomorphisme consiste à utiliser les formes de la nature pour des expressions symboliques ou des géométries et des proportions naturelles pour une harmonie esthétique dans l'architecture. Enfin, le Biomimétisme est une approche de recherche de solutions qui repose sur le transfert de solutions de la nature à l'architecture. Il est souvent utilisé pour l'optimisation des structures étant donné la multitude de solutions d'ingénierie parfaites trouvées dans la nature. En outre, il peut également conduire à des solutions fonctionnelles.

La révolution numérique a apporté de nouveaux outils algorithmiques qui peuvent simuler le processus naturel et le code génétique pour rechercher, optimiser et modéliser des solutions architecturales complexes. Le système associatif d'algorithmes qui compile et dérive lui-même des informations sur la base de variables et de contraintes données par le concepteur laisse moins de place à l'erreur et fournit des solutions holistiques. Cette nouvelle technologie et les progrès de la recherche en biologie ont ouvert la voie au Biodesign, qui sera la réponse optimale à l'architecture du futur.

Afin d'étudier l'efficacité du biodesign dans l'architecture pour les demandes futures, une analyse comparative des projets inspirés par la nature des cabinets d'architecture contemporains a été réalisée. L'étude a évalué l'aspect biophilique, biomorphique et biomimétique de chaque projet.

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier Allah (swt) pour ses dons innombrables et pour avoir choisis pour moi l’architecture comme profession et surtout vocation.

Je remercie ma mère pour son soutien inconditionnel et sa bienveillance à m’inculquer les bonnes valeurs.

Je remercie mon père pour ses multiples sacrifices, et pour être ma première source d’inspiration dans la vie.

Je remercie mon encadrante Madame Karima Berdouz pour sa gentillesse et son support à poursuivre mes ambitions en Architecture.

Je remercie Monsieur Hassan Maazioui et Monsieur Said Berrada pour tout ce qu’ils m’ont appris en Architecture et leur encadrement.

Je remercie ma professeure en école primaire Ilham Trafi, pour m’avoir encouragé à dessiner dès l’enfance.

Je remercie mes amis Akram El Hammami, Anass Ezzahir, Adnane Lahzaoui et bien d’autres pour leurs soutiens.

Je remercie Mouad Laalou et Mahmoud Ramdane, pour m’avoir inspiré et aidé à apprendre l’outils algorithmique

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SOMMAIRE

Partie I - Prologue

Introduction 13

Etat de la question 14 Problématique 14 Méthodologie de travail 15

Partie II – Pourquoi le Biodesign ?

I. Biophilie

1-La nature de l’homme et la Biophilie. 20 2-Les principes du Design Biophilique. 25 3-La pratique du Design Biophilique. 28

II. Biomorphisme

1-Organicisme : l’origine du Biomorphisme. 46 2-La nature comme source de formes. 48 3-Principes de géométrie dans la nature pour la conception 51

III. Biomimétisme

1-Qu’est-ce que le Biomimétisme ? 63 2-La recherche de l’intersection entre architecture et nature 65 3-Optimisation des structures par Biomimétisme 67 4-Méthode de Biomimétisme 71 5-Structures de Biomimétisme 73

IV. Approche algorithmique

1-Les algorithmes dans la conception. 90 2-System Thinking. 92 3-Intégration du design algorithmique en Architecture 94

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Partie III – Références Architecturales du Biodesign

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Pavillon
Terrasses
106
La gratte-ciel
110 Partie IV – By the River Bioliving Analyse du site Situation et Accessibilité 119 Repères 121 Visite du Site 123 Analyse climatologique 125 Bibliographie 153 Projet Vision 129 Démarche Conceptuelle 132 Démarche Algorithmique 133 Plans 135 Storyboard 147 Conclusion 149 Tableau des Matières 151
I.
de recherche 2013-2014 101 II.
de Shenzhen
III.
Energy Maison de Shenzhen

Liste des figures

Figures Signification

Figure 1 Niveau du Cortisol dans le sang des sujets 19

Figure 2 Les Rythmes cardiaques des sujets 20

Figure 3 Coupe transversale du centre Genzyme 28

Figure 4 Atrium du Centre Genzyme 28

Figure 5 Nouveau Campus de l'Université de Nottingham en Angleterre 30

Figure 6 McLaren Technology Center 30

Figure 7 Le musée du Quai Branly 32

Figure 8 Le Jardin Andalous de l’Oudaya 33

Figure 9 Le centre de villégiature de l'île de Frégate 34

Figure 10 Fenêtre a vitre colore conçu par Frank lloyd Wright 36

Figure 11 Le dôme en verre du palais de la musique de Barcelone 37

Figure 12 Le village de Malang en Indonésie 38

Figure 13 Restaurant du « Jardines de Mexico » 39

Figure 14 La cathédrale de Gloucester 40

Figure 15 Temple Ekouin Nenbutsudo 41

Figure 16 La maison flottante a Hermosa de Cóbano 42

Figure 17 Prairie Chicken House 47

Figure 18 Tour du Turning Torso 48

Figure 19 Pavillon H2O 48

Figure 20 Les préférences des sujets selon les proportions des rectangles 50

Figure 21 La truite arc-en-ciel 51

Figure 22 Proportions du Pomme du Pin 52

Figure 23 Les rectangles de la racine carrée 2 52

Figure 24 Les rectangles de la racine carrée 3 53

Figure 25 Le prisme hexagonal régulier dans les cristaux de neige 53

Figure 26 La façade du Parthénon 54

Figure 27 La façade de la cathédrale Notre Dame 55

Figure 28 Farnsworth House 56

Figure 29 La proportion des Façades Latéraux Farnsworth House 57

Figure 30 Philip Johnson Glass House 57

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Figure 31 La façade Est Proportions du nombre d'or 58

Figure 32 L’élévation nord Proportions du nombre d'or 58

Figure 33 Les six principes de base proposés par Biomimicry 3.8 68

Figure 34 Optimisation de structures par algorithmes 73

Figure 35 Construction de Structure Arborescente à partir de robots 73

Figure 36 Shadow Pavilion 74

Figure 37 Coupe sur Shadow Pavillon 75

Figure 38 Feuille d’arbre Magnolia 76

Figure 39 Structure en dentelle de coquillage 76

Figure 40 Structure en dentelle de coquillage 77

Figure 41 La voute de Guastavino 79

Figure 42 Coque en grillage de bois 80

Figure 43 Le pont Luxmore de Jamie McCulloch 82

Figure 44 La structure du toit en spirale réciproque du théâtre de Seiwa Bunraku 82

Figure 45 Les lignes de contrainte dans un fémur 83

Figure 46 Image radiographique 83

Figure 47 Le métacarpien du vautour 83

Figure 48 Le tissue du crâne des corbeaux 84

Figure 49 Auvent inspiré du tissu osseux 84

Figure 50 Le squelette de l'oursin 85

Figure 51 Le squelette de l'oursin 86

Figure 52 Landesgartenschau Exhibition Hall 86

Figure 53 Académie militaire Ali al Sabah 95

Figure 54 NURBS 96

Figure 55 Pavillon de recherche ICD/ITKE 2013-2014 100

Figure 56 Comparaison de l'architecture interne de l'élytre chez un coléoptère volant et un coléoptère terrestre

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Figure 57 Eléments de construction en fibre composite fabriqué de manière robotique 102

Figure 58 Système léger en fibres composites à haute capacité structurelle 103

Figure 59 Projet Terrasses Shenzhen 105

Figure 60 Projet Terrasses Shenzhen 106

Figure 61 Projet Terrasses Shenzhen 107

Figure 62 Tissu plissé et feuille de palmier 109

Figure 63 Tours de Shenzhen 110

Figure 64 Détails de Façade 111

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Partie 1

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Prologue

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Introduction

La nature est un système ingénieux et autonome qui agit sur la base de mécanismes dont la majorité reste un mystère. L'être humain faisant partie de la nature se distingue par sa capacité à innover et à adapter son environnement à ses besoins. A notre époque, les besoins de l’homme s’entrecoupent avec l'intérêt de son environnement, notamment le besoin de matériaux durables, la réduction des émissions de CO2 etc… De surcroît, l’absence de conventions stylistiques contraignantes, le biodesign peut offrir un grand potentiel d’expression symbolique en Architecture.

L’histoire démontre que les cerveaux innovateurs de chaque époque se référaient à la nature comme source d’inspiration. Leonardo Da Vinci passait des heures à faire des croquis d'études des crânes, ailes d’oiseaux et entre autres… De nos jours, les recherches ont amené à découvrir et à comprendre plusieurs systèmes naturels. Chose qui a multiplié les sources d’inspiration pour le biodesign. L’architecture comme le reste les autres domaines, peut profiter de l'opportunité de ce vaste champ d’information. Non seulement est-il devenu possible d’utiliser la nature comme un exemple à suivre, mais aussi incorporer la biotechnologie au profit du bien-être de l’homme et de son environnement.

Le Biodesign s’impose à notre époque comme solution architecturale grâce à l'évolution digitale octroyée par l’outil paramétrique. Vu les grandes capacités de modélisation et d’automatisation de ce dernier, les architectes pourront reproduire des formes inspirées de la nature, que ce soit pour des raisons symboliques ou bien fonctionnelles. En outre, l'outil paramétrique permet de produire des designs à base de data, et il se trouve que plusieurs formes naturelles adeptes à des ordres mathématiques, notamment la suite de Fibonacci, le nombre d’or…

Etat de la question :

Que veut-on dire par le biodesign ? Selon Michael Pawson, le biodesign est un terme qui a émergé partiellement dans le domaine médical, qui a ensuite évolué pour englober plusieurs disciplines, à savoir le biomimétisme, le biomorphisme, la biophilie. En somme, cela signifie l’utilisation de la nature a l'intérêt de l'être humain.

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Dans son livre “Biomimicry in Architecture”, Michael Pawson précise que l’inspiration de la nature pour trouver des solutions est le meilleur moyen de construire un futur positif pour l'être humain. Après avoir atteint un stage nocif à la nature, le monde n’a d’autre choix que d’intervertir son économie fossile avec une économie écologique. Le biodesign en architecture a la possibilité de créer un environnement sain pour ses occupants tout en utilisant la fraction des matériaux utilisés dans un bâtiment ordinaire. En outre, le potentiel de ce dernier ne peut se résumer à générer des bâtiments écologiques, ou bien créer des systèmes autosuffisants. La nature contient un riche vocabulaire de formes dont l’architecture peut en tirer profit. Plusieurs architectes de renommés ont utilisé des éléments biologiques comme outil d’expression symboliques, citons à titre d'exemple Santiago Calatrava

L’histoire de l’architecture témoigne du recours incessant de la part des architectes à la nature comme source d’inspiration. A la veille du 20eme siècle des pionniers d’architecture ont procédé à une nouvelle procédure de design qui permet de créer des liens associatifs entre matériaux, forme et structure, similaire au processus auto-générateur de la nature. Ce fut nommé le “Form Finding 1*” qui consistait à utiliser des dispositifs analogiques permettant de générer des formes paramétrées par la gravité. Arturo Tedeschi cite que ce fut le premier pas vers l'outil paramétrique. L'avènement de cette technologie ainsi que celle de l’intelligence artificielle coïncide avec une richesse en termes d’information en biologie dans notre époque. Cela a permis aux architectes de concevoir des œuvres architecturales basées sur un système associatif et auto-suffisant inspiré de la faune et de la flore.

Problématique :

L’intelligence artificielle a influencé l’architecture contemporaine, on peut constater plusieurs projets à forme complexe produit par les pionniers de notre époque. En outre, on peut voir d’autres agences qui ont développé des systèmes auto générateurs de formes à partir de contraintes d’environnement tirées de l'étude des systèmes naturelles. Cependant, certains critiques avancent que cette technologie ainsi que le biodesign dépourvoient l’architecture de sa créativité et sa symbolique. D’autres, présument que la technologie humaine dépasse les systèmes de la nature.

1 Le concept de "recherche de formes" a été approfondi par les expériences de frei otto, qui a utilisé de l'eau et du savon pour générer des formes.

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A l’instar de ceci et des idées discutées au début, la question suivante se pose :

L’architecture du futur aura-t-elle besoin du Biodesign ?

Méthodologie du travail :

Pour l’élaboration de cette étude, le travail se décline en 3 parties après un chapitre introductif qui présente le sujet et identifié la problématique ainsi que l’hypothèse de cette étude.

● Une étude explicative du biodesign qui décortique ses différents concepts notamment le design biophilique, le biomorphisme et le biomimétisme. Tout en abordant une démarche analytique pour ressortir les différentes valeurs et principes nécessaire pour l’intégration de chaque concept. Ainsi que l’exploration des nouvelles technologies d’intelligence artificielle en architecture (outils paramétrique, algorithmes de recherches…).

● Un Benchmarking des projets contemporains incorporant les principes du biodesign, afin de comprendre l’utilité de ce dernier dans le contexte contemporain.

● Une étude analytique du site d’intervention assisté par l’outil algorithmique pour ressortir les contraintes (variables) et données à incorporer dans le script du design par la suite. Ensuite une explication de la démarche algorithmique et architectural de la conception.

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Partie 2

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Pourquoi le Biodesign ?

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I-Biophilie

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1- La nature de l’homme et Biophilie

L'être humain d’aujourd’hui se caractérise par un mode de vie radicalement différent par rapport à celui des autres espèces animales. Jouissant de tous les atouts qu’il s’est offert par le biais de la technologie, il se permet de choisir son espace de vie indépendamment des ressources naturelles. Cependant, 99% de l’histoire de l’homme a eu lieu au beau milieu de la nature. Auquel les regroupements humains s'installaient à proximité des éléments naturels nécessaires pour la survie. Étant menacée chaque jour par la famine, les reptiles, les pestes… L’homme de l'époque, contrairement à nos jours, avait une vie courte, soucieuse et dépendante des conditions de l’environnement auquel il vit.

La vie quotidienne de l’homme était cernée par la nature. Tout comme les autres êtres vivants, il lui a fallu un mécanisme de survie. Il développa son raisonnement en fonction des conditions de son environnement, ce qui lui permit de distinguer les menaces, les opportunités, les différents types de plantes, animaux, terres cultivables… Cette capacité a permis non seulement à l'être humain de survivre mais de développer sa créativité et son imagination pour innover et établir éventuellement une sorte de conquête sur la nature.

Ce type de raisonnement se base principalement sur une association symbolique chez l’homme et les différentes couleurs et formes disponibles dans la nature. A titre d’exemple le bleu, associé à l’eau représente la sécurité, le jaune, couleur de la lumière de l’aube donne un aspect d’optimisme, le rouge, couleur du sang, a un effet dynamique et agressif. Mais aussi, l’homme utilise les traits du visage et le mouvement des yeux pour évaluer l’hostilité des animaux environnants. 2Cette caractéristique explique la capacité de l’homme à réagir instinctivement vis-à-vis du danger, choisir l’environnement adéquat à son épanouissement …etc.

Malgré la révolution technologique, et le nouveau mode de vie sédentaire dans la ville. Les interprétations symboliques des éléments naturelles font toujours une grande partie de la psychologie humaine. Le sens esthétique est à priori largement influencé par les formes présentes

2 Cette caracteristique humaine, appelé anthropomorphsime, est exploité dans le design à priori celui des produits.

Biophilie 20

dans la nature. Dans ses recherches sur le cerveau et l’esthétique, le doctorant en Psychologie Oshin Vartanian démontra que certaines régions du cerveau humain dédiées à la beauté réagissent positivement lorsque le sujet est exposé à des formes et espaces curvilignes. Les lieux qui reprennent les formes présentes dans la nature créent des endroits adéquats à la nature de l’homme.

Le lieu de vie contribue à la santé mentale de l’homme par le biais des matériaux utilisés. Un espace auquel on retrouve une palette de couleur inspirée de la nature ou bien des matériaux naturels à titre d’exemple le bois favorise l’association de l’homme a cet espace et diminue la sécrétion des hormones de stress dans le corps humain. Une étude établie en 2019 à laquelle deux groupes de sujets ont été amenés à faire un examen scolaire, le premier sur une table en bois, le deuxième sur une table blanche. Les résultats (fig. 1) ont démontré que le bois pouvait diminuer le niveau du cortisol chez les sujets d’un taux de 38%. Le choix des matériaux avait par conséquent un effet sur la performance, la motivation et le stress. De surcroît, les battements du cœur sont plus stables chez les individus du premier groupe (fig. 2).

La Biophilie peut être définie comme l’attraction aux aspects naturels ayant contribué à la survie et au développement de la race humaine. L'architecture Biophilique peut être définie comme la conception d’environnement adapté au côté biologique de l'être humain en se basant sur les aspects cités précédemment. Mais quels sont ces aspects ?

Figure 1 : Niveau du Cortisol dans le sang des sujets

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Biophilie

source: Michael David and Andreja Kutnar (2020) human stress responses in office-like environments with wood furniture, building research & information

Figure 2 : Rythmes cardiaques des sujets

En effet, la réaction biologique de l’homme a tant été interpellée par les autres créations liées à sa survie. Par exemple, les gens sont plus susceptibles d’avoir une réaction biologique envers les autres animaux ayant contribué à leur survie comme les chevaux, les chiens… ainsi que les animaux sauvages comme l’ours, le serpent, le loups…L'être humain est aussi prédisposé à apprécier les plantes comestibles et les arbres fruitier ainsi qu'éviter les plantes potentiellement toxiques. En outre, les conditions d’environnement qui ont une grande valeur chez les êtres humains sont celles qui incorporent l'éclairage naturel, la disponibilité de l’eau, un climat tempéré etc…

L'être humain étant une créature diurne, le sens de vue s'avère indispensable dans son développement et sa survie. La capacité de voir à distance et de distinguer plusieurs couleurs lui confèrent la possibilité de déchiffrer les géométries dans la nature et de trouver les terrains fertiles et les ressources naturelles. Éventuellement de développer une association sociale et écologique à ces lieux naturels. Ces aspects et bien d’autres sont importants pour la bonne pratique de l’Architecture Biophile et s'avèrent déterminant de la qualité du confort de l’espace.

Biophilie 22
source: Michael David and Andreja Kutnar (2020) human stress responses in office-like environments with wood furniture, building research & information

Selon S. Robert Keller, professeur à l'université de Yale. Il existe huit Valeurs 3 de la biophilie basées sur la relation de l’homme avec la nature et qui déterminent les objectifs et les résultats de l’architecture biophile. Elles reflètent les manières avec lesquelles l’homme exploite et ressort des sens de la nature. Le contenu et la priorité de chaque valeur varie selon les cultures, expériences individuelles etc… Mais toutes ces valeurs sont présentes universellement et contribuent au bien-être de l’humain.

Ces Valeurs sont :

L’Affection : La prédisposition de l’homme à exprimer un fort attachement émotionnel pour les caractéristiques de la nature. 

L’Attrait : L'appréciation de la beauté et du côté esthétique de la nature dans toute ses formes. 

La Répulsion : La tendance à éviter les aspects de la nature qui suscitent des sentiments d'anxiété, menaces et de peur. 

Le Control : Le penchant à maîtriser, dominer et parfois soumettre la nature. L’avantage de ce point est une meilleure maîtrise de la nature et des capacités à résoudre les problèmes, esprit critique et développement cognitif.

L’Exploitation : L’utilisation du monde naturel comme mine de matériaux et ressources. Ce point confère un renfort de sécurité, meilleure technique d’extraction.

L’Intellect : L’inclinaison à utiliser la nature comme moyen pour pousser le raisonnement et le développement intellectuel. En retour, cela accorde les compétences cognitives, des capacités empiriques, et l’apprentissage. 

Le Symbolisme : La tendance à employer l’image de la nature pour la communication visuelle et l’expression des idées abstraites. Cette valeur en résulte les langues et culture et renforce l’imagination et la créativité.

La Spiritualité : Le penchant à vivre au sein de la nature pour aboutir à un sens, une fin et se connecter à Dieu. Les avantages associés à ce point incluent le sentiment d’existence significative, une meilleure confiance en soi et liens avec les autres.

La mise en œuvre de chaque valeur requiert de l'expérience, un apprentissage et un soutien social. Elle nécessite des expériences

3 Kellert’s nature-related values typology (Kellert 1996, 2012)

Biophilie 23

récurrentes et engageantes avec la nature plutôt que des expositions isolées. Pour intégrer efficacement la nature dans l'espace de vie, il faut créer un environnement propice à l'apprentissage et encourager la participation des membres de la communauté. Les expositions isolées ou sporadiques ont peu d'effets durables dans le temps.

L'importance de ces valeurs et leur relation avec l'expérience et l'apprentissage soulèvent la question suivante : Quel est le rôle de la biophilie dans la conception de l'environnement de vie moderne ?

Tout d'abord, nous devons reconnaître que toutes les expériences de la nature ne sont pas considérées comme biophiles. Les bâtiments et les paysages qui offrent un contact significatif avec la nature ont été façonnés par les tendances humaines à s'affilier à la nature, mettant ainsi en œuvre de manière sélective des aspects adéquats pour le bienêtre de l'homme, plutôt que des bâtiments qui incorporent une exposition à la nature sans grande signification.

Deuxièmement, chaque valeur Biophilique représente une tendance inhérente à s'associer à la nature qui peut contribuer au bien-être de l'homme. Dès lors, chaque valeur est un objectif important de la conception Biophilique. Il est fréquent que les projets donnent la priorité à une valeur plutôt qu'à une autre, par exemple, un parc public est plus susceptible de se concentrer sur la valeur d'attraction de la nature que d’autres. Cependant, plus le projet intègre de valeurs Biophilique, indépendamment de son utilisation principale, plus il est susceptible de générer des avantages pour les gens et de les encourager à maintenir ces structures dans le temps.

Enfin, la biophilie repose sur l'apprentissage et le développement afin d'être bénéfique et fonctionnelle. Désormais, une conception Biophilique réussie nécessite des expériences de la nature engageantes, immersives et écologiquement connectées. Les personnes doivent faire partie d'un système valorisant et cohérent. C'est pourquoi les tentatives infructueuses de conception Biophilique incluent des éléments naturels isolés et sporadiques, plutôt que des systèmes engageants et récurrents interconnectés avec les caractéristiques et processus naturels

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Biophilie

2-Les Principes du Design Biophilique

La conception Biophilique consiste à créer des environnements de vie pour les personnes en tant qu'animaux biologiques. Il s'appuie sur la compréhension de base de la psychologie biologique humaine. Ainsi, l'exploration de la science de la biophilie offre une explication des tendances humaines à s'affilier à la nature, ce qui peut être expliqué par les 8 valeurs de la biophilie mentionnées dans le chapitre précédent. Ces valeurs représentent également le centre d'intérêt et les objectifs du design Biophilique. En les respectant, nous obtenons un espace de vie adéquat pour les êtres humains, avec des avantages qui peuvent être maintenus par ses occupants dans le temps.

La réalisation d'un environnement de vie biophile ne peut être obtenue par la simple incorporation d'éléments naturels dans l'espace. Il faut au contraire s'engager dans les tentes et les principes de la biophilie, ce qui peut aboutir à des conceptions qui améliorent la santé et la productivité des personnes. Dans son livre Nature by design, Stephen R. Keller résume ces principes en 9 éléments :

2.1-L'accent sur un impact positif L'esprit et le corps humains sont de puissantes machines d'adaptation. Un design Biophilique réussi utilise la nature pour susciter une adaptation positive chez les occupants de l'espace, et ainsi faire progresser leur santé mentale, leurs performances et leur bien-être. Un contact isolé, tel que des toits verts inaccessibles, une seule plante et une peinture séquestrée de la nature, n'apporte que peu de bénéfices à long terme.

2.2-La conception comme un système écologique interdépendant La conception Biophilique crée des connexions complémentaires et intégrées entre les constituants de l'environnement, ce qui permet de fonctionner comme un tout à vivre. Les éléments déconnectés deviennent de simples décorations et ont tendance à avoir des effets pervers tels que l'encouragement à l'exploitation de la nature.

2.3-L'immersion

dans les caractéristiques naturelles

Le design Biophilique encourage l'engagement et l'immersion dans la nature en utilisant des expériences d'apprentissage récurrentes et engageantes et un support culturel. La cour-jardin dans l'architecture

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méditerranéenne est un bon exemple de système Biophilique qui se fond dans la culture et offre une vie immersive dans la nature, tout en fournissant de la lumière naturelle, de l'air frais et parfois à ses occupants.

2.4-Le

large éventail de mise en œuvre des valeurs Biophilique

Les 8 valeurs de la biophilie abordées dans le chapitre précédent sont des conceptions réussies qui sont : Affection, Attraction, Répulsion, Contrôle, Exploitation, Intellect, Symbolisme, Spiritualité. Les conceptions Biophilique réussies mettent en œuvre autant que possible ces valeurs. Les bâtiments qui ont des formes organiques à des fins esthétiques uniquement, ou un centre d'apprentissage qui se concentre sur l'amélioration cognitive ou des installations conçues pour exploiter la nature génèrent peu de bénéfices à long terme.

2.5-Lien émotionnel avec le lieu

Une conception Biophilique réussie crée des espaces qui contribuent constamment au confort des êtres humains. Par conséquent, les gens ont tendance à avoir un lien émotionnel avec ce bâtiment, ce paysage où cette structure, qui finit par faire partie de leur identité. Cependant, les lieux qui manquent de lien émotionnel et d'engagement avec leurs utilisateurs sont rarement durables dans le temps, malgré leur efficacité en termes de ressources et leurs émissions non polluantes.

2.6-Créer un sentiment de communauté entre les personnes et leur environnement

Une conception Biophilique réussie encourage un sentiment de connexion avec la nature qui inclut également les autres personnes. Les bureaux fermés, les salles à manger isolées renforcent le sentiment de solitude et de séparation. Il est donc important d'encourager une interaction et une collaboration approfondies entre la communauté et son environnement naturel, qui suscite la volonté de partager les connaissances et les ressources.

2.7-Le design Biophilique se manifeste dans une multitude de contextes. Une bonne application du design Biophilique exige le contact avec la nature dans tous les contextes spatiaux. Cela permet de créer un lien entre l'intérieur, l'extérieur et les espaces de transition, voire de les organiser par thème. L'écart entre l'extérieur et l'intérieur crée une confusion qui va à l'encontre de l'objectif du design Biophilique.

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2.8-Expérience authentique de la nature

Une expérience authentique de la nature est une condition nécessaire à la réussite d'un design Biophilique. Elle favorise les sentiments d'authenticité et de connexion véritable avec la nature et ses processus. Une jardinière captive non indigène ou un mobilier artificiel sont souvent perçus comme inauthentiques. Ils n'apportent donc que peu d'avantages durables dans le temps et suscitent le mépris et la dérision.

2.9-Améliorer la relation de l'homme avec la nature

L'objectif de l'insertion de la nature dans l'environnement bâti est de garantir la durabilité en réduisant les impacts et en améliorant l'expérience humaine de la nature. Le défi n'est cependant pas d'éviter les impacts à court terme, mais d'augmenter la productivité à long terme des systèmes naturels (bio décomposition, cycle biogéochimique, régulation hydrologique, pollinisation, dispersion des graines, décomposition et autres services écosystémiques vitaux). En créant des liens profonds et durables avec la nature et ses processus qui sont bénéfiques pour la santé humaine. On peut obtenir le meilleur habitat possible pour les êtres humains.

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3-La Pratique du Design Biophilique

Les stratégies de conception peuvent être un excellent outil pour inclure la nature dans l'environnement bâti. L'histoire de l'architecture présente de nombreux exemples de bâtiments qui ont réussi à relier l'homme à la nature. Ce résultat a été obtenu grâce à de nombreuses tactiques découvertes par essais et erreurs, et dont nous pouvons tirer profit de nos jours. Malheureusement, la pratique de la construction de nos jours a abandonné l'idée centrale de la conception Biophilique, et se concentre sur quelques objectifs tels que la réduction de l'empreinte carbone, ou tente de manière maladroite de relier l'homme à la nature en utilisant une décoration naturelle. Nous avons besoin de stratégies qui peuvent guider le design vers une approche plus biophile. Cela soulève la question suivante : quelles sont ces stratégies ?

Dans le chapitre précédent, nous avons vu les principes qui ne doivent pas être transgressés pour obtenir une approche correcte de la conception Biophilique. Cependant, les stratégies, bien qu'elles soient strictement liées à ces principes, doivent être appliquées avec prudence et flexibilité. Selon Brian Lawson, dans son livre "How Designers Think", la pratique du design ne peut être décrite dans une méthodologie, sinon elle devient une science ou une ingénierie. C'est pourquoi les stratégies suivantes ne disent pas à l'architecte ce qu'il doit faire, mais montrent plutôt ce qui est important et comment on peut mettre en œuvre efficacement la nature dans son cadre de vie.

Dans cette optique, nous pouvons parler des stratégies mentionnées par Keller qui sont divisées en 3 éléments :

Expérience directe de la nature : Elle représente le contact effectif avec les éléments de base de la nature tels que la lumière, l'air, l'eau, les plantes, les animaux et les paysages. La définition commune de la biophilie se résume à l'incorporation de l'expérience directe de la nature, néanmoins cela ne représente que le point de départ.

Expérience indirecte de la nature : Elle s'appuie sur des images et des représentations de la nature, des processus naturels, des motifs... et de tous les éléments qui se sont avérés déterminants pour le bien-être humain. En outre, elle implique la mise en œuvre de matériaux naturels tels que le bois, le métal, le cuir et les motifs subtils et les géométries naturelles qui se sont avérés importants pour la biologie humaine.

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L'expérience de l'espace et du lieu : Il s'agit des paramètres spatiaux qui déterminent la façon dont les gens gèrent et organisent leurs circonstances environnementales. Cela inclut les perspectives et les refuges, la complexité organisée, les espaces de transition, la mobilité... Ces attributs de l'espace assurent la coordination et l'interconnexion entre les parties, créant ainsi un ensemble écologique.

Les gens font l'expérience de leur environnement grâce à leurs cinq sens. Il convient toutefois de mentionner que l'homme est une espèce diurne et qu'il se fie à sa vue pour repérer les opportunités et les dangers. C'est pourquoi les gens se sentent confus et anxieux lorsqu'ils sont confinés dans des espaces sans fenêtre ou loin de la vue de la nature. Néanmoins, les autres sens sont importants pour l'expérience de la nature. Par exemple, les gens ne sont pas seulement attirés par la vue de l'eau, mais aussi par son bruit, sa sonorité et même son odeur.

3.1 Expérience directe de la nature :

Lumière

La lumière fait partie des besoins fondamentaux de la vie. Elle affecte la façon dont les gens s'orientent dans l'espace, leurs habitudes quotidiennes et leur état émotionnel. Les êtres humains s'adaptent aux changements de conditions lumineuses en réagissant aux conditions météorologiques, au ciel diurne et nocturne et au rythme circadien. Les fluctuations de la lumière aident les gens à déterminer l'écoulement du temps et à s'orienter facilement dans l'espace. L'absence de cet aspect entraîne souvent de l'anxiété et une baisse de la santé mentale et des performances.

Les progrès technologiques ont toutefois remplacé l'éclairage naturel par un éclairage intérieur artificiel. Bien que cela ait pu répondre à la densité de la population, en particulier dans les zones urbaines, cela ne tient pas compte du besoin biologique d'éclairage naturel. Heureusement, la mise en œuvre de stratégies de conception Biophilique peut fournir un éclairage naturel aux occupants de l'environnement, notamment des murs en verre, des claires-voies, des puits de lumière, des atriums, des couleurs et des matériaux réfléchissants, et des miroirs qui captent la lumière du soleil et la réfléchissent dans les zones intérieures.

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En outre, les stratégies de conception Biophilique réussies peuvent améliorer l'expérience de la lumière en manipulant l'éclairage et l'obscurité de manière pratique grâce à des intensités variables, à la diffusion de la lumière, aux puits de lumière et aux ombres. Le bâtiment Genzyme à Cambridge, dans le Massachusetts, est un bon exemple de diffusion intérieure de la lumière naturelle. (Fig. 3-4)

Figure 3 : Coupe transversale sur le centre Genzyme. source: behnisch.com

Figure 4 : Atrium du Centre Genzyme source : behnisch.com

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Le centre Genzyme a été conçu de l'intérieur vers l'extérieur. Son atrium est équipé d'un héliostat qui reflet la lumière dans un ensemble de miroirs qui la dirige à leur tour vers un skydome diffusant la lumière. Les lustres ont été réalisés dans un matériau réfléchissant qui finit par créer un effet chatoyant.

L’Air

L'air est un autre élément fondamental pour la vie et l'expérience des conditions atmosphériques. Bien qu'il soit invisible, il peut être perçu par le mouvement, l'odeur et ses effets immédiats sur notre santé. La technologie moderne nous permet de traiter et de conduire l'air dans les espaces intérieurs. Néanmoins, des études indiquent que l'exposition à l'air traité favorise la fatigue, la baisse de moral et les problèmes de santé.

La conception Biophilique suggère un groupe de stratégies de ventilation naturelle. Il s'agit notamment de fenêtres ouvrantes, d'évents, de pièces et de structures plus étroites et d'effets de cheminée. Il est également possible de stimuler la ventilation en manipulant le flux d'air, les températures, l'humidité et la pression barométrique.

L’eau

L'eau est la base de la vie pour tous les organismes vivants. C'est une ressource cruciale pour la survie de la population humaine, qui a donc associé l'eau à une opportunité et à l'essence de la vie. Néanmoins, la mentalité moderne perçoit l'eau comme un élément à exploiter uniquement et non comme un élément à chérir ou à expérimenter. Cette vision superficielle de l'eau dévalorise les nombreux avantages potentiels de l'eau pour le bien-être humain. La recherche a prouvé que l'exposition à l'eau peut générer de nombreux avantages, tels que le soulagement du stress, l'amélioration des performances, la résolution de problèmes et la créativité. La vue, le son et le mouvement de l'eau font appel aux sens de l'être humain. En plus de son utilité, elle possède une symbologie intéressante qui peut être exploitée pour l'expression personnelle. Elle peut être un sujet de crainte, un lieu de contrôle ou une base d'admiration et de vénération.

Certaines stratégies de conception Biophilique peuvent améliorer l'expérience humaine de l'eau dans l'environnement de vie. Il s'agit notamment des fontaines, des zones humides aménagées, des étangs, des rigoles, des gouttières et des aquariums. Il convient également de noter que l'eau est plus attrayante lorsqu'elle est en mouvement. En cas

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d'impossibilité, il est possible d'y remédier par une expérience indirecte telle que des images, des vidéos, des audios et certains motifs.

Deux études de cas architecturales de l'ère moderne représentent une mise en œuvre réussie de l'eau dans l'environnement de vie. Le nouveau campus de l'Université de Nottingham en Angleterre (fig. 5) et le McLaren Technology Center (fig. 6).

source:

Figure 6: McLaren Technology Center

Source: form -five.com

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Figure 5 : Nouveau Campus de l'Université de Nottingham en Angleterre architecture.com

Les plantes

Les plantes sont des ajouts courants aux environnements de vie afin d'établir un lien entre l'homme et la nature. Ces plantes sont conçues pour être ajoutées aux paysages près des bâtiments, à l'intérieur des bâtiments et aux espaces de transition entre l'intérieur et l'extérieur. Les bienfaits thérapeutiques de la végétation à l'intérieur de l'environnement bâti ont prouvé qu'elle soulageait le stress et l'anxiété, améliorait les performances et le moral.

Les grandes structures manquent rarement d'ajouter délibérément de la verdure, que ce soit dans le paysage ou à l'intérieur. Cependant, ces ajouts impliquent des plantes artificielles et formelles ou non indigènes qui nécessitent une gestion intensive et continue dans le temps. A l'intérieur, les plantes sont artificielles ou exotiques placées dans des jardinières isolées et incohérentes avec l'ensemble.

Le design Biophilique favorise les systèmes naturels écologiquement intacts, la végétation indigène et un design plus naturaliste. En outre, la technologie a permis des approches plus ambitieuses pour intégrer des plantes à l'intérieur des bâtiments. Il s'agit notamment de murs verts ou plantés verticalement. Cependant, il ne faut pas oublier que tous ces ajouts doivent être interconnectés et interdépendants.

Le musée du Quai Branly conçu par Patrick Blanc (fig. 7) est un bon exemple de l'approche de conception biophile de l'implantation de plantes dans l'architecture, tout comme le bâtiment adjacent qui intègre des balustrades de balcon de forme organique.

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Paysage

L'élaboration de conceptions paysagères à proximité des bâtiments ou parfois à l'intérieur des cours d'immeubles est une stratégie efficace pour établir un lien entre l'homme et la nature. Néanmoins, les paysages doivent être soigneusement planifiés afin d'obtenir une expérience significative du monde naturel plutôt qu'une décoration superficielle. On peut distinguer un paysage qui offre une promenade permettant la découverte et l'affiliation avec l'environnement naturel plutôt qu'un paysage peu inspirant offrant des plantes exotiques ou artificielles.

En général, un paysage bien conçu a des effets positifs sur les êtres humains. Néanmoins, les paysages les plus réussis sont ceux qui ont contribué à la survie et à l'épanouissement de l'humanité au fil du temps. Parmi les exemples, citons les arbustes et les arbres qui s'étendent, les feuillages et les fleurs colorés, la présence d'eau, les longues perspectives, les espaces abrités, les arbres dominants, les sentiers naturels, les paysages de type savane et les lisières boisées.

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Figure 7 : Le musée du Quai Branly Source : murvegetalpatrickblanc.com

Les paysages peuvent prendre de nombreuses formes, il peut s'agir d'une zone humide construite, d'étangs, de prairies, de forêts... Les stratégies Biophilique suggèrent des sols, des eaux, des plantes, des animaux et des formes géologiques interconnectés dans un ensemble cohérent.

La conception Biophilique des paysages intérieurs se concentre sur les atriums, les cours, les entrées, les couloirs, les salles de réunion et les salles à manger. De tels environnements contribuent massivement au bien-être et à la productivité de ceux qui habitent ces espaces. Cependant, ces paysages intérieurs doivent être cohérents avec les espaces intérieurs, sinon ils seront ignorés au fil du temps.

Les jardins andalous (fig. 8) sont des espaces intérieurs dédiés. Ils contiennent divers éléments tels que de l'eau et différents types de plantes locales et offrent des vues imprenables à leurs habitants.

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Figure 8 : Le Jardin Andalous de l’Oudaya Source : gardencollage.com

Vues

La vue de la nature est une stratégie efficace pour se connecter avec la nature. Ces vues apportent souvent des effets de relaxation aux person0nes. Elles peuvent être enrichies d'éléments tels que les montagnes, la forêt, la mer... Cependant, malgré les résultats bénéfiques de cette caractéristique, elle doit souvent engager les gens de manière plus complémentaire afin d'être plus bénéfique et satisfaisante.

Les vues sont plus appréciées lorsqu'elles se trouvent à des distances modérées ou courtes, à des hauteurs adéquates et sous un abri. Les belles vues de la nature peuvent être dévalorisées si l'endroit est trop élevé, ou s'il n'y a pas d'abri ou de rebord extérieur qui atténue la transition entre une vue intérieure élevée et une vue extérieure abrupte. Beaucoup de gens craignent les hauteurs, et c'est une phobie commune comme celle des araignées, des serpents, etc. Ainsi, il est recommandé d'atténuer les sentiments de hauteur.

Les vues sur la nature doivent éviter les systèmes naturels dégradés ou les environnements artificiels. Toutefois, elles ne doivent pas être artificielles ou en diagonale par rapport à la vue extérieure.

Le centre de villégiature de l'île de Frégate (fig. 9) est un bon exemple d'intégration réussie d'une vue dans un concept biophile. Le paysage est encadré par un abri qui offre une perspective et un refuge avec des matériaux naturels, ce qui intensifie le lien avec l'espace.

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Figure 9 : Le centre de villégiature de l'île de Frégate Source : exclusifvoyages.com

3.2

L'expérience indirecte de la nature

a) Images

Depuis la nuit des temps, l'homme a utilisé l'image pour faire entrer la nature dans son espace de vie. Elle a toujours été un sujet d'art prépondérant, des peintures rupestres aux peintures romantiques. Cela est dû à l'impression profonde et durable qu'elle produit sur les gens. Selon l'anthropologue Elizabeth Lawrence : "Le besoin humain d'expression métaphorique trouve sa plus grande satisfaction dans la référence à la nature, et notamment au règne animal. Aucun autre domaine ne permet une expression aussi vivante des concepts symboliques".

Une étude a été menée au centre médical universitaire des Pays-Bas, où 46 recrues ont été exposées à des images de la nature alors qu'elles étaient connectées à des capteurs pour surveiller leur niveau de stress et leur rythme cardiaque. Les résultats ont montré que le niveau de stress diminuait grâce à l'activation de leur système nerveux parasympathique - qui contrôle certaines fonctions de repos.

L'implication de l'image dans l'architecture ne peut être réduite à la peinture. Elle intègre plutôt des images de plantes et d'animaux qui ornent les supports et les structures des bâtiments.

Dans certains cas, les images peuvent devenir de peu d'effet et superficielles. C'est pourquoi il est suggéré dans l'approche de conception biophilique de remplir trois conditions. Premièrement, les images doivent être prolifiques et diverses, plutôt que de se concentrer sur un seul élément. Deuxièmement, ces images doivent inclure une expérience de l'homme dans la nature. Troisièmement, les images doivent créer un ensemble thématique plutôt que des éléments isolés ou aléatoires de la nature.

Les images ne doivent cependant pas nécessairement être réalistes, elles peuvent aussi être fantastiques. Parmi les arts les plus appréciés de l'histoire, on trouve des créations d'êtres humains qui suivent les principes de la nature. Il est également possible de représenter des principes naturels qui sont nécessaires au bien-être de l'homme, tels que la croissance et la géométrie naturelle des formes organiques. L'historien de l'art Owen Jones (1986) a conclu que de nombreux dessins sont souvent inspirés par des images de la nature, en déclarant brillamment : "Dans les meilleures périodes de l'art, tout l'ornement

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était plutôt basé sur une observation des principes qui régissent l'arrangement des formes dans la nature, que sur une tentative d'imiter les formes absolues de ces œuvres...". L'art véritable consiste à idéaliser, et non à copier, les formes de la nature".

La conception par Frank Lloyd Wright de l'ornement d'un vitrail appelé "Arbre de vie" (fig. 10) est un exemple d'œuvre d'art reproduisant un principe naturel.

b) Matériaux

L'utilisation de matériaux naturels est un moyen efficace de faire entrer la nature dans le cadre de vie. Ils possèdent des qualités visuelles et tactiles que peu de matériaux artificiels peuvent reproduire. En outre, l'exposition aux matériaux naturels suscite une réaction humaine forte et profondément satisfaisante, même si ces matériaux sont parfois soumis à des procédures qui les transforment de leur état naturel.

c) Texture

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Figure 10 : Fenêtre a vitre colore conçu par Frank lloyd Wright Source : ardythpr.blogspot.com

La texture fait référence à la sensation, à l'aspect et à la relation entre chaque élément et l'ensemble. Les propriétés texturales qui suivent l'approche de conception Biophilique mettent en évidence la taille, la forme, la qualité tactile et la proportion d'un bâtiment et d'un paysage.

L'expérience de la texture est souvent réduite au toucher des matériaux naturels. Néanmoins, elle va au-delà pour inclure la lumière, la couleur et le son qui suivent des rythmes et des harmonies

Le dôme en verre du palais de la musique de Barcelone (fig. 11) est un exemple original de l'utilisation de la texture dans l'environnement de vie. Ses couleurs dorées et bleues brillantes qui font référence au ciel et au soleil, sa texture organique et ses vitraux qui diffusent la lumière naturelle dans toute la pièce en font une étude de cas remarquable de conception Biophilique.

Figure 11 : Le dôme en verre du palais de la musique de Barcelone

Source : solotripsandtips.com

d) Couleur

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La couleur est un élément significatif de la nature qui a joué un rôle important dans la survie et l'épanouissement des premiers humains. Étant une créature diurne, l'homme s'appuie sur la couleur pour repérer les opportunités, identifier les dangers et se déplacer en toute sécurité dans son environnement. Sa capacité à identifier et à différencier les objets lui permet de rendre plus cohérente une scène confuse et désorganisée. Le village de Malang en Indonésie (fig. 12) est un exemple d'espace de vie cohérent malgré le manque d'uniformité entre ses composants.

Selon la théorie de la valence écologique des couleurs, les humains sont davantage attirés par les couleurs de la nature qui se sont avérées avantageuses pour l'humanité au fil du temps. Il s'agit de couleurs comme le bleu, associé à un ciel clair ou à de l'eau propre, et le vert, associé aux plantes vasculaires. En revanche, d'autres couleurs suscitent des réactions négatives chez les gens, comme le brun et le violet, qui font référence aux matières fécales et à la nourriture en décomposition.

3.3 Expérience de l'espace et du lieu a) Prospect et Refuge

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Figure 12 : Le village de Malang en Indonésie Source : news.destination-asia.com

Les premiers humains ont toujours exigé de leur environnement de vie une longue vue afin de repérer les menaces et les opportunités tout en étant protégés. D'où le besoin de perspective, qui concerne la vue sur de longues distances, et de refuge, qui fait référence à l'abri et à la protection contre les menaces pendant l'observation. Ces deux éléments sont des concepts complémentaires du design biophilique qui découlent des besoins biologiques des humains dans leur espace.

Les gens aspirent à introduire la perspective et le refuge dans leur environnement de vie. À l'intérieur, ce besoin est satisfait par de longues vues depuis les bureaux et les salles à manger. À l'extérieur, ce besoin est satisfait par les balcons, les porches et les terrasses.

Le concept de perspective et de refuge a été développé par l'architecte pionnier Frank Lloyd Wright. Il préconisait de relier les espaces par de longues lignes de vue plutôt que de les cloisonner, un concept qu'il appelait "breaking the box". Les architectes contemporains favorisent les plans ouverts en raison des longues lignes de vue qui relient les pièces entre elles, mais ils négligent le concept tout aussi important de refuge. Le restaurant des collines au complexe « Jardines de Mexico » près de Cuernavaca (fig. 13) est un cas architectural intéressant qui met en œuvre ces deux concepts.

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Figure 13 : Restaurant du « Jardines de Mexico » Source : aeworldmap.com

b) Complexité Organisée

L'ordre et la complexité sont deux autres concepts complémentaires qui améliorent la productivité et le bien-être des personnes dans leur espace de vie. La complexité est le reflet de la richesse et de la diversité des ressources de l'environnement de vie, tandis que l'ordre est le garant de la cohérence et de l'intégrité de l'ensemble.

Un espace doit présenter un équilibre entre l'ordre et la complexité. Un environnement trop complexe et trop riche en détails devient souvent chaotique. À l'inverse, un environnement qui suit un ordre strict devient monotone et ennuyeux.

Les chefs-d'œuvre architecturaux les plus appréciés présentent un niveau élevé d'ordre et de complexité. Cela inclut l'architecture religieuse, les palais historiques... La caractéristique de ces bâtiments est la richesse des détails et la diversité, le tout présenté de manière cohérente et significative.

L'équilibre entre l'ordre et la complexité se retrouve souvent dans l'architecture historique. La cathédrale de Gloucester (fig 14) est un bon exemple de richesse d'informations et de complexité organisée.

Figure 14 : La cathédrale de Gloucester

Source : britishpilgrimage.org

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c) Mobilité

La mobilité concerne le déplacement effectif et efficace d'un lieu à un autre. Son absence conduit à des parcours absurdes et peu clairs entre les lieux, ce qui engendre souvent des frustrations.

La mobilité extérieure repose sur les marches, les sentiers et les routes pour faciliter la mobilité. À l'intérieur, les gens utilisent des couloirs, des escaliers, des portes, des ascenseurs, des escalators et d'autres connecteurs spatiaux. Il est également possible de créer des liens symboliques avec la nature pour embellir et informer les modes de mobilité à l'intérieur.

Une conception Biophilique efficace offre des voies claires à l'intérieur et à l'extérieur. Un bon exemple de cette approche est l'élégant temple Ekouin Nenbutsudo à Tokyo (fig. 15).

Figure 15 : Temple Ekouin Nenbutsudo

Source : designboom.com

d) Espaces transitionnels

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Les espaces de transition servent essentiellement à relier l'intérieur à l'extérieur, bien qu'ils puissent également être utilisés pour l'extérieur. Ils contribuent à un sentiment de sécurité, de mobilité et d'orientation pour les habitants. Les espaces de transition biophiles facilitent souvent la transition d'un espace à un autre, en particulier vers l'extérieur, générant ainsi un attrait émotionnel et esthétique.

Les stratégies de conception Biophilique suggèrent de mettre en place des porches, des balcons, des cours et des jardins pour établir des connexions entre l'intérieur et l'extérieur. À l'intérieur, il est conseillé d'inclure des zones d'entrée, des foyers, des couloirs et des atrias.

La maison flottante a Hermosa de Cóbano (fig. 16) est un exemple réussi d'espace de transition biophile. Avec son point d'observation élevé et ses grands balcons, elle semble flotter au-dessus de la jungle.

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Figure 16 : La maison flottante a Hermosa de Cóbano Source : idesignarch.com
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II-BIOMORPHISME

1-Organicisme : L’origine du Biomorphisme

Le biomorphisme consiste à prendre la nature comme source de vocabulaire formel et esthétique afin de communiquer certaines idées et d'établir la cohérence de l'ensemble. Cette idée a été prédominante pendant des siècles dans l'art et l'architecture de toutes les civilisations, et les a influencés à la fois sur un plan métaphorique et conceptuel. Avec la tendance naturelle de l'humanité à s'affilier à la nature, comme nous l'avons vu dans les chapitres précédents, l'homme a cherché à imiter la nature dans son art et à la rapprocher ainsi de lui. Le philosophe français a réduit les beaux-arts à un seul principe, à savoir "ars imitatur naturam".

Pour mieux comprendre le Biomorphisme, il faut d'abord comprendre la doctrine de l'Organicisme et les théories aristotéliciennes qui en découlent. L'organicisme affirme que tout dans la nature a une base organique ou fait partie d'un tout organique. Avec cette idée en tête, Aristote a énoncé la théorie de la forme organique. Elle implique que la valeur provient du déploiement de l'essence la plus profonde de l'âme. En revanche, tout mouvement qui ne relève pas de son essence est contraire à sa nature et donc nuisible. En d'autres termes, tout élément particulier qui entre en contact avec l'organisme intérieur est nuisible.

Cette idée a été transposée à l'architecture par l'architecte Frank Lloyd Wright après avoir critiqué l'architecture classique en disant : "Le 'classique' était plus un masque à porter pour la vie qu'une expression de la vie elle-même [...] L'architecture moderne - disons maintenant l'architecture organique - est une architecture naturelle - l'architecture de la nature, pour la nature." Alors que l'architecture traditionnelle y parviendrait en disciplinant officiellement le bâtiment, c'est-à-dire en le soumettant à la rigueur d'une forme rationnelle, dans le modèle organique, la forme provient de l'essence même de la nature du bâtiment, comme une plante dont l'existence coïncide avec la manifestation de sa propre forme. Inspiré par les idées de Frank Lloyd Wright, Bruno Zevi a résumé les principes de l'architecture organique comme suit 4 : 4

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B. Zevi, Towards an Organic Architecture (Faber & Faber, London, 1950)

1. Plaidoyer pour des travaux intuitifs plutôt que rigidement constructifs.

2. Préférant le naturalisme des formes irrégulières au stylisme abstrait des formes régulières.

3. Être un organisme en croissance plutôt qu'un mécanisme structuré selon un ordre immuable.

4. Préférer les formes dynamiques aux formes statiques.

Ces courants de pensée ont conduit à un intérêt pour la planification sans auteur, les stratégies biomorphiques, les traditions vernaculaires et la planification par l'utilisateur. Elle sous-tend également le concept de "la mort de l'auteur" qui redéfinit le rôle de l'architecte et fournit une base philosophique pour les conceptions générées par ordinateur qui se réfèrent aux sciences naturelles.

L'idée que l'architecture doit venir de son essence soulève la question : Quelle est la nature d'un bâtiment ? Certains architectes théoriciens, comme Peter Eisenman, soutiennent qu'un bâtiment est une fin en soi. Néanmoins, la plupart des architectes ont tendance à croire que l'architecture est une extension du soi, de la pensée et de l'expression. Aristote implique cependant que les limites d'une entité ne sont pas les limites de son corps immédiat, mais qu'elles impliquent la maison, les machines et autres biens. À la lumière de cette théorie, une maison devrait être considérée comme une sécrétion naturelle d'une person

À cet égard, nous pouvons dire que l'architecture biomorphique n'est pas seulement une simple imitation de la nature. C'est le choix sélectif de modèles naturels et de principes de forme qui peuvent être intégrés avec succès dans l'environnement de vie et être en accord avec l'identité de l'utilisateur afin de créer un ensemble organique.

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2-La Nature comme source de formes

Le retour à la philosophie et aux systèmes naturels pour trouver des stratégies de conception est un phénomène récurrent dans l'histoire de l'architecture. La notion d'organicisme a conduit à l'imitation platonique des formes naturelles en architecture. L'ordre corinthien, conçu par Callimaque, a connu une utilisation répandue dans l'architecture occidentale et même dans d'autres civilisations. L'application de plantes ou d'animaux représente le cas le plus évident d'imitation de la nature en architecture. Néanmoins, ce principe ne se limitait pas à l'ornementation. Un architecte français a conçu une laiterie en forme de vache (1790), Herb Greene a construit sa maison de vacances dans une forme évoquant un buffle (1960) (fig. 17), et Imre Makovecz a donné des cils aux lucarnes de ses bâtiments (1982).

Bien que l'architecture moderne rejette complètement l'ornement, ses pionniers et théoriciens ont cherché à s'inspirer de la nature. Selon Walter Gropius, la nature est "l'exemple éternel pour toute création humaine" 5. Le Corbusier, qui était un défenseur de la technologie moderne et du fonctionnalisme, voyait en mère nature l'ultime professeur. Et pourtant, bien qu'ils aient un maître commun, les architectes modernes avaient des visions architecturales opposées. Même les théoriciens post-structurels, tels que Greg Lynn et Daniel Libeskind, font souvent référence à la nature et aux sciences naturelles, bien que leur travail puisse être considéré comme une réinterprétation, voire un défi, du paradigme organique.

Ces approches du design sont fondées sur une préoccupation plus symbolique qu'esthétique. Imre Makovecz, par exemple, a utilisé les étymologies biomorphiques liées aux bâtiments dans la langue hongroise afin d'atteindre l'essence de l’Architecture.

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Le Corbusier, L’art décoratif d’aujourd’hui, ´Ed. by Arthaud (Paris, 1980), p. 176

D'autres architectes se sont davantage intéressés aux lois naturelles pour générer des formes. L'architecte allemand Frei Otto, par exemple, a fusionné des formes trouvées dans la nature avec des techniques de construction modernes afin d'étirer les structures créées par l'homme. Dans son livre " Biology and Buildings 2 ", il a examiné comment la construction légère en sandwich des crânes d'oiseaux pouvait être appliquée à l'architecture.

Des architectes contemporains tels que Renzo Piano et Santiago Calatrava montrent de fortes affinités avec les structures inspirées par des organismes naturels. Santiago Calatrava conçoit des squelettes expressifs qui se plient et se courbent comme des parties du corps ; sa conception de la tour "Turning Torso" (fig. 18) s'inspire du squelette humain. En outre, chaque étage pivote de 1,6 degré, ce qui confère à la forme générale un mouvement naturel fluide. Un exemple plus explicite est le pavillon H2O (fig. 19) de Nox et Oosterhuis Architects, qui évoque une baleine échouée tandis que son intérieur semble aborder la fluidité d'un espace virtuel et liquide.

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Figure 17: Prairie Chicken House Source: archdaily.com

Figure 18 :Tour du Turning Torso

Source : researchgate.net

Figure 19 : Pavillon H2O

Source : archdaily.com

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3-Principes de géométrie dans la nature pour la conception

Je suis d'avis qu'il est possible de développer un art en grande partie sur la base de la pensée mathématique.” Max Bill 6

Dans son livre "complexité et contradiction", Robert Venturi 7parle du rôle de l'architecte qu'il définit comme le choix et l'expression d'idées à travers des constructions. Néanmoins, le choix des moyens, autrement dit le "comment ?" n'est pas possible. L'outil éternel de l'architecte est l'ordre qui peut être utilisé pour diriger la relation entre les éléments du bâtiment et finalement exprimer l'idée.

L'ordre peut être subdivisé en de nombreux éléments, principalement les types de composition (asymétrie ou symétrie), les ratios, la répétition... etc. Cependant, au regard des études présentées dans le chapitre précédent, l'ordre trouvé dans la nature a tendance à être plus attrayant pour l'homme. Les premières observations de la géométrie de la nature par les mathématiciens et les artistes ont conduit à la découverte du nombre d'or et d'autres géométries qui s'en inspirent. La mise en œuvre de ce principe a donné lieu à un art et une architecture étonnante.

3.1 Rapport d'or

Le nombre d'or, également désigné par le chiffre Φ, est un principe de la géométrie naturelle qui confère une esthétique agréable aux formes organiques. Dans l'environnement bâti humain, la première preuve de l'utilisation du nombre d'or est documentée dans l'architecture des pyramides qui ont été construites de 2700 avant J.-C. jusqu'à environ 1700 avant J.-C. En outre, il a été utilisé par

6 Max Bill, d'après une interview de 1949, Typographic Communications aujourd'hui, 1989

7 Robert Venturi est un architecte américain, lauréat du prix Pritzker en 1991. Il était un fervent défenseur de la complexité en architecture et a critiqué le dicton moderniste "less is more" en disant "less is bore".

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d'autres civilisations préhistoriques. La StoneHenge, qui a été construite à peu près à la même époque (2500 av. J.-C.), avait une géométrie organisée autour du nombre d'or. D'autres preuves documentées se trouvent dans l'écriture, l'art et l'architecture des Grecs anciens au cinquième siècle avant J.-C. La première découverte du nombre d'or reste un mystère, ce qui nous amène à nous demander s'il s'agissait d'une découverte intuitive ou d'une tendance innée dans les œuvres d'art de l'humanité.

Plus tard, les artistes et les architectes de la Renaissance ont également étudié, documenté et utilisé les proportions du nombre d'or dans des œuvres remarquables de sculpture, de peinture et d'architecture. Outre les œuvres créées par l'homme, les proportions du nombre d'or se retrouvent également dans la nature, à travers les proportions humaines et les modèles de croissance de nombreuses plantes, animaux et insectes vivants.

Le psychologue allemand Gustav Fechner a mené à la fin du XIXe siècle une recherche sur la réaction humaine aux qualités esthétiques du rectangle à section dorée. Ce qui a éveillé son intérêt, ce sont les preuves documentées de la préférence esthétique archétypale interculturelle pour les proportions du nombre d'or. Il a pris des mesures d'objets fabriqués par l'homme tels que des livres, des boîtes, des journaux, etc... Puis il a mené une enquête sur les proportions de rectangle les plus appréciées par les gens. Il a constaté que les gens ont tendance à apprécier les rectangles dont les proportions sont proches ou égales au rapport 5:8 (1:1,618).

Figure 20 : Les préférences des sujets selon les proportions des rectangles

Source : researchgate.net

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Cela soulève la question suivante : pourquoi aimons-nous le nombre d'or ? Dans son livre, le pouvoir des limites, György Doczi affirme que le pouvoir particulier du nombre d'or est de créer l'harmonie et l'unité entre les différentes parties d'un tout afin que chacune d'entre elles conserve sa propre identité. Cependant, l'harmonie n'est pas l'objet derrière la quête du nombre d'or, car elle peut être obtenue avec d'autres principes tels que la symétrie, la répétition et d'autres types d'ordre géométrique.

Si nous observons de nombreux éléments dans la nature, qu'il s'agisse d'un animal ou d'une plante, nous pouvons remarquer un nombre d'or discret ou flagrant qui régit la géométrie globale. Par exemple, le corps du poisson truite arc-en-ciel peut être divisé en trois sections dorées parfaites. De plus, chaque nageoire individuelle possède un nombre d'or proportionnel (fig. 21). D'autre part, la géométrie de la pomme de pin est composée de deux spirales qui se croisent et se déplacent dans des directions opposées. Il y a 8 spirales qui se déplacent dans le sens des aiguilles d'une montre et 13 dans le sens inverse, ce qui se rapproche des proportions du nombre d'or (fig. 22). Il convient également de mentionner que 8 et 13 sont deux nombres consécutifs de la séquence de Fibonacci où le rapport des nombres adjacents se rapproche progressivement des proportions du nombre d'or de 1:1,618.

La plupart des éléments naturels, y compris l'homme, ont un nombre d'or qui régit les proportions de leur corps, qu'il soit apparent ou caché. Ce phénomène explique l'attrait naturel du nombre d'or.

Figure 21 : La truite arc-en-ciel 8 source: Geometry of design

8 Le corps de la truite est entouré de trois rectangles de section dorée. Le site œil se trouve au niveau du rectangle d'or réciproque et la nageoire caudale est définie par un rectangle d'or réciproque rectangle d'or réciproque.

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Figure 22 : Proportions du Pomme du Pin

source: Geometry of design

3.2 Proportions du rectangle dynamique

Il existe deux types de rectangles, les statiques avec des rapports rationnels tels que ½, ⅔,¾... et les dynamiques avec des fractions de rapports irrationnels tels que √2, √3, √5, Φ etc... Les rectangles statiques ne produisent pas d'esthétique lorsqu'ils sont subdivisés en raison de sa régularité et de sa facilité d'anticipation. Cependant les rectangles dynamiques représentent une quantité infinie de subdivisions harmoniques et de rapports visuellement agréables lorsqu'ils sont subdivisés.

Les rectangles de la racine carrée 2 (fig. 23) peuvent être subdivisés à l'infini en rectangles plus petits de proportions égales et apparentés au rectangle d'origine. Il faut également noter que les proportions √2 sont égales à 1,41 qui est proche du nombre d'or 1,618, ce qui le rend capable d'assurer une harmonie naturelle.

Figure 23 : Les rectangles de la racine carrée 2 source: Geometry of design

Tout comme le rectangle de racine 2, les rectangles de racine 3 peuvent être subdivisés en d'autres rectangles similaires. Le rectangle √3 peut

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être subdivisé en trois rectangles verticaux (fig. 24). Il a également la capacité de construire un prisme hexagonal régulier que l'on retrouve sous la forme de cristaux de neige (fig. 25), de nids d'abeilles et d'autres éléments de la nature.

Figure 24 : Les rectangles de la racine carrée 3 source: Geometry of design

3.3 Proportions de l'architecture

L'architecture du Parthénon représente un exemple du système de proportionnalité grec. L'analyse de la façade montre qu'elle s'inscrit dans un nombre d'or, tandis qu'un rectangle réciproque forme la hauteur de l'architrave, de la frise et du fronton. Le carré du rectangle principal donne la hauteur du fronton, et le plus petit rectangle du diagramme donne l'emplacement de la frise et de l'architrave.

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Figure 25 : Le prisme hexagonal régulier dans les cristaux de neige source: Geometry of design, Kimberly Elam

Figure 26 : La façade du Parthénon

Des siècles plus tard, la proportion dorée a été consciemment utilisée dans l'architecture des cathédrales gothiques. Dans son livre "Vers une nouvelle architecture", Le Corbusier cite le rôle du carré et du cercle d'or dans les proportions de la façade de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Le rectangle qui entoure la cathédrale est au nombre d'or. Le carré de ce rectangle à section dorée entoure la majeure partie de la façade, et le rectangle à section dorée réciproque entoure les deux tours. Le portail central de la façade est également dans le nombre d'or, comme le montre la figure ci-dessous. (fig. 27)

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Figure 27 : La façade de la cathédrale Notre Dame de Paris Source : Vers une Nouvelle Architecture, Le Corbusier

3.4 Les sections d'or en architecture.

a) Farnsworth House

Le toit de la maison est en porte-à-faux au-dessus d'une terrasse extérieure, ce qui procure de l'ombre et permet d'intégrer l'espace à la maison. L'espace extérieur est prolongé au soleil par une plate-forme inférieure et le rythme des larges escaliers bas invite le visiteur. À l'approche des visiteurs, la maison semble planer au-dessus du sol, s'élevant de six pieds au-dessus de la plaine inondable sur des pilotis en poutres d'acier.

La maison s'est avérée être trop en avance sur son temps pour être confortable pour le Dr Farnsworth. Pendant les froids hivers de l'Illinois, la chaleur qui rayonnait du système de plancher rencontrait le verre froid et de la condensation se formait, faisant couler les fenêtres. Le soleil d'été rayonnait à travers les murs de verre et rendait la maison presque impossible à refroidir, et les terrasses extérieures étaient rarement appréciées à cause des moustiques.

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Figure 28: Farnsworth House Source: archdaily.com

Figure 29 : La proportion des Façades Latéraux Farnsworth House

Source : Geometry of design, Kimberly Elam

b) Philip Johnson Glass House

L'espace entre la série de colonnes de soutien correspond à la largeur d'un rectangle à section dorée. Le débordement du toit, à gauche et à droite, ainsi que la petite vitre sont à peu près équivalents à la largeur de l'un des petits carrés du schéma de construction du rectangle à section dorée.

Figure 30: Philip Johnson Glass House

Source : archdaily.com

La Glass House était le projet de thèse de maîtrise de Johnson à Harvard au début des années 1940. Après avoir obtenu son diplôme, il a continué à développer la conception de la maison et,

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en 1945, il a acheté un site boisé de cinq acres à New Canaan, dans le Connecticut. La construction a commencé en 1948 et s'est achevée en 1949. Il s'agit d'une étonnante structure vitrée aux proportions et aux détails méticuleux. La transparence choquante de la maison est soulignée par l'absence de murs intérieurs et la possibilité de regarder à l'intérieur et à l'extérieur. Seul un cylindre de brique, contenant une baignoire et une cheminée, s'élève du sol et perce le plafond. Le monde de l'architecture est prévenu, Philip Johnson est arrivé.

Figure 31 : La façade Est Proportions du nombre d'or

Source: Geometry of design, Kimberly Elam

Chacune des trois divisions de la maison, séparées par des colonnes verticales en acier, est en proportion du nombre d'or. Dans chaque division, le carré d'un rectangle à section dorée réciproque s'inscrit dans la fenêtre horizontale inférieure. Dans la division centrale, un rectangle à section dorée réciproque s'inscrit dans les fenêtres situées à gauche et à droite de la porte.

Figure 32 : L’élévation nord Proportions du nombre d'or

Source: Geometry of design, Kimberly Elam

L'élévation nord est également dans la proportion du nombre d'or. On y voit deux rectangles à section dorée superposés en rouge et bleu. Comme dans l'élévation est, le carré du rectangle à section

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dorée réciproque s'insère dans la fenêtre inférieure et le bord se pose sur la division de la fenêtre. Les deux rectangles à section dorée se chevauchent au niveau du carré du rectangle à section dorée réciproque et ont la largeur de la porte.

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III-Biomimétisme

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1-Qu'est-ce que le biomimétisme ?

Tout au long de l'histoire, les hommes ont utilisé la nature comme source d'inspiration esthétique et comme moyen d'expression. De temps à autre, certains esprits brillants se sont inspirés de la fonctionnalité naturelle et de l'ingénierie pour trouver une solution. Cependant, avec l'avènement de la Renaissance, un génie appelé Léonard de Vinci a passé d'innombrables heures à dessiner des ailes d'oiseaux, l'anatomie humaine à partir de cadavres, des corps de chevaux et de nombreux autres animaux et plantes. Il n'était cependant pas un biologiste, mais un inventeur. Après sa mort, il a laissé à l'humanité d'innombrables inventions ingénieuses qui ont modifié le cours de la technologie et inspiré d'autres inventeurs des générations suivantes. Cependant, il a laissé une importante approche d'invention qui s'appuie sur la nature pour trouver des solutions, et c'est le biomimétisme.

Le biomimétisme consiste à transférer des connaissances de la biologie à la conception, ou à rechercher une solution de conception dans la biologie. L'objectif principal est l'émulation du génie de la nature pour trouver des solutions fonctionnelles. En outre, il s'agit de la perception des systèmes biologiques en tant que systèmes d'ingénierie qui découle de plus de 3,8 milliards d'années d'expérimentation. D'innombrables chefs-d'œuvre architecturaux et techniques de construction ont vu le jour grâce au biomimétisme. Filippo Brunelleschi s'est référé aux formes des coquilles d'œuf pour concevoir le Duomo de Florence. Même le béton, qui est considéré comme un matériau non naturel, a été inventé par le jardinier français Joseph Monier, qui a expérimenté le grillage métallique pour rendre les pots de plantes plus durables après avoir remarqué la structure sclérenchymatique des fibres 9 .

L'impact du biomimétisme dans l'histoire de l'architecture est loin d'être ignoré, mais cela soulève la question suivante : Avons-nous besoin du biomimétisme à notre époque ? De mon point de vue personnel, il y a trois raisons principales pour lesquelles le biomimétisme est important à notre époque. Tout d'abord, comme nous l'avons vu dans le premier chapitre, les humains sont naturellement attirés par l'esthétique

9 Le tissu sclérenchymatique désigne l'un des types de tissus permanents simples ou terrestres, qui possède une paroi primaire et une paroi secondaire rigide. Ils existent sous forme de cellules ligneuses rigides avec une disposition compacte.

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naturelle et les formes organiques. Le biomimétisme peut fournir des structures fonctionnelles qui sont esthétiquement agréables et plus humaines. Deuxièmement, les structures naturelles sont très économiques et optimales. Les os, par exemple, sont naturellement formés pour être plus épais dans les zones où la pression est la plus forte, contrairement aux poutres uniformes modernes. L'adoption de ces systèmes permettrait aux architectes de concevoir des structures avec une fraction des matériaux nécessaires aux constructions moyennes.

Enfin, la technologie avancée que l'humanité a atteint à notre époque, nous permet de reformuler les codes génétiques trouvés dans la nature afin d'émuler l'ordre et les formes exactes trouvés dans la nature, en plus de cela, de nouvelles découvertes en biologie ont été faites, donc les architectes de notre époque ont beaucoup de ressources à apprendre.

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2-La recherche de l'intersection entre l'architecture et la nature

Malgré l'importance évidente du lien entre la nature et l'architecture, il y a eu peu de tentatives d'examen stratégique du sujet. Des disciplines plus restreintes, telles que l'architecture zoomorphe et anthropomorphe, ont été étudiées, en mettant l'accent sur la composante morphologique.

Parmi les premières recherches dans ce domaine figure le livre encyclopédique "Nature and Architecture 10" de Paolo Portoghesi, qui contient non seulement la collection la plus complète de comparaisons entre la nature et l'architecture, mais explore également les connexions structurelles et fonctionnelles.

Dans les années 1970, le Russe Juri Lebedew a publié un livre sur le biomimétisme architectural, qui présente une collection complète des développements architecturaux alors en cours dans le monde entier, qui s'appuyaient sur des principes dérivés de la nature, même si leurs créateurs ne se considéraient pas comme des biomimétiseurs. Werner Nachtigall a écrit un livre intitulé "Bau-Bionik" qui se concentre sur les analogies de construction et l'utilisation de catégories structurelles pour ordonner les constructions naturelles telles que les structures renforcées de fibres, les coquilles, les structures pliantes et les membranes. Nachtigall mentionne également l'architecture vernaculaire comme source de solutions, en particulier dans les domaines de la climatisation et de la physique du bâtiment, et montre des conceptions modernes qui incluent des principes de ventilation naturelle.

10 Dans son livre, Paolo Portoghesi considère l'architecture comme la transcription magique des formes et des lois de la nature dans l'univers artificiel de la ville.

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Dans l'œuvre de sa vie, "The Nature of Order", Christopher Alexander décrit une interprétation architecturale de la vie et de l'émergence de modèles convergents dans la nature et l'architecture, en soulignant la pertinence des structures vivantes en tant qu'environnements pour l'existence humaine. Alexander est convaincu qu'un changement de paradigme est nécessaire pour passer de processus de vie mécanisés à des processus de vie globaux omniprésents impliquant une complétude qui se déploie et une différenciation fondamentale. Un processus vivant, selon lui, est tout processus adaptatif qui, étape par étape, construit des structures vivantes par des modifications préservant la structure. L'approche d'Alexander n'est pas biomimétique ; en revanche, il étudie et applique le concept de vie et de vivacité à l'architecture.

En 2002, les conférences "Design by Nature" ont été créées à Udine, en Italie, afin de fournir un lieu pour une exploration complète de la nature et de son importance pour le design et l'architecture. "Nature Design" examine la relation entre la nature et le vaste sujet du design, en incluant des exemples contemporains et historiques. Quatre pièces explorent l'évolution de la relation entre la nature et le design du XIXe siècle à nos jours, en établissant des liens avec les tendances politiques et économiques.

Par la suite, Neri Oxman a apporté des idées évolutives basées sur la synergie entre la nature et l'humanité. Avec son équipe, elle a apporté des conceptions centrées sur la nature et basées sur la biotechnologie. Le résultat est une architecture purement naturelle qui peut faire partie de l'écosystème. Il s'agit de passer de la consommation de la nature en tant que ressource géologique à son entretien en tant que ressource biologique.

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3-Optimisation des structures par Biomimétisme

L'utilisation de l'énergie et des ressources par l'homme est aujourd'hui non durable. Les solutions biologiques ayant fait leurs preuves depuis des milliards d'années et représentant des techniques éprouvées pour exister sur Terre, les concepteurs peuvent utiliser le biomimétisme pour favoriser la création de technologies ayant des implications environnementales nettes nulles ou nettes positives.

Les exemples suivants illustrent comment le biomimétisme peut être utilisé pour informer la conception durable. BioTRIZ 11 a été créé en adaptant TRIZ, une technique de résolution de problèmes d'ingénierie largement utilisée. La TRIZ originale, créée en 1946 par l'inventeur soviétique Genrich Alt shuller et ses collègues, est une matrice dont les intersections représentent des compromis techniques ; par exemple, pour qu'une voiture roule plus vite, il faut plus de puissance, ce qui consomme plus d'essence. Une cellule à chaque croisement contient des chiffres qui font allusion à des concepts de conception technologique permettant de résoudre un compromis. 21 Si l'on rend la carrosserie du véhicule plus aérodynamique, par exemple, on peut le faire rouler plus vite tout en utilisant la même quantité de puissance et de carburant. BioTRIZ a été développé en examinant 2 500 compromis et résolutions en biologie et en alimentant une matrice avec des principes de conception biologique plutôt que des concepts de conception technologique. Seuls 12 % des compromis conseillés par BioTRIZ et TRIZ se sont avérés identiques, ce qui prouve que la biologie et la technologie abordent les problèmes différemment. La manipulation de l'énergie peut représenter jusqu'à 70 % d'une solution dans la technologie, alors qu'elle ne représente jamais plus de 5 % d'une solution dans la biologie. Les solutions biologiques, plutôt que de gérer l'énergie, reposent sur le transfert d'informations et la structure.

Le biomimétisme marque une rupture avec la révolution industrielle non durable, qui a été caractérisée comme "une ère fondée sur ce que nous pouvons extraire de la nature". Récolter ou domestiquer des organismes pour réaliser une fonction particulière n'est pas la même chose qu'imiter la biologie. Cette distinction peut sembler évidente, mais les novices du

Bio Theory of Inventive Problem Solving

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11

biomimétisme veulent souvent "exploiter un organisme pour "faire ce qu'il fait" plutôt que d'utiliser les principes de conception de l'organisme". Au lieu de comprendre et d'utiliser la chimie complexe impliquée dans la bioluminescence 12, cela revient à utiliser des lucioles pour faire de la lumière".

Au-delà du lien évident entre le biomimétisme et la durabilité, un lien bien plus profond se dessine. Nous ne devons pas ignorer la réalité selon laquelle le biomimétisme ne donne pas toujours des résultats durables. Un système biomimétique peut être performant en termes de fonctionnalité mais ne pas être viable à long terme. Les concepteurs qui souhaitent recourir au biomimétisme pour concevoir des produits plus durables doivent essayer de refléter les enseignements biologiques à trois niveaux : la forme, la méthode et l'écosystème. Cette stratégie multicouche est la plus efficace pour produire des solutions qui sont à la fois impressionnantes et durables :

1. La forme. Les feuilles gigantesques du nénuphar d'Amazonie sont un exemple du premier niveau, celui de l'imitation de la forme. La conception et les nervures de soutien de ces feuilles pourraient inspirer un nouveau type de panneau de construction léger mais structurellement solide. Cette invention, toutefois, pourrait être durable ou non. Si les panneaux solaires sont composés de produits chimiques nocifs qui contaminent l'environnement, par exemple, les coûts l'emporteront sur les avantages.

Le processus. Le deuxième niveau du biomimétisme se concentre sur la reproduction des processus biologiques ou, plus précisément, sur la façon dont la nature crée. La nature utilise une chimie non toxique pour construire des structures à température et pression ambiantes. La plupart des usines, en revanche, sculptent, plient, fondent, moulent ou manipulent d'énormes blocs de matières premières à des températures et des pressions élevées pour produire des produits finis. L'approche industrielle présente de nombreuses possibilités de développement par rapport à la production biologique. Elle consomme beaucoup plus d'énergie, pollue l'environnement et gaspille beaucoup d'argent.

Compte tenu de l'infrastructure très différente requise, il sera difficile d'encourager un passage à grande échelle de la production

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12
La bioluminescence, c'est la production et l'émission de lumière par un organisme vivant.

traditionnelle à la production biomimétique. En principe, une équipe peut concevoir une solution biomimétique écologiquement durable, mais si aucun processus de fabrication approprié n'est disponible, la réalisation de cette solution risque d'être difficile. Le développement d'infrastructures pour la création de biens biomimétiques écologiquement durables et rentables est en retard.

Cependant, l'impression 3D, qui consiste à générer une chose concrète à partir d'un modèle numérique en déposant des couches successives de matériau, est une technique potentielle pour améliorer la fabrication. Cette méthode s'inspire des techniques de fabrication additives et économes en ressources de la nature. Les progrès de l'impression 3D sont vraiment passionnants, mais les procédures doivent être considérablement améliorées avant que cette technologie puisse être considérée comme inoffensive pour l'environnement. D'autres éléments de la fabrication biologique doivent être examinés tout en cherchant des moyens d'améliorer cette technologie.

2. L'écosystème. Même en reproduisant la forme et la technique, il n'est pas certain qu'un produit ayant un effet net nul ou net positif sur l'environnement soit développé. En termes d'intégration dans le grand écosystème, la conception peut encore faire défaut. Chaque créature est membre d'un biome, qui est une composante de la biosphère. Par conséquent, la santé de la biosphère détermine la viabilité à long terme de chaque être vivant. Le degré le plus exigeant du biomimétisme, l'imitation de l'écosystème, est le plus difficile à atteindre car il nécessite une réflexion professionnelle sur les systèmes afin de garantir que la conception s'intègre harmonieusement dans la biosphère. Biomimicry 3.8 13 a créé une méthodologie appelée Life's Principles pour aider à analyser la durabilité des conceptions biomimétiques au niveau de l'écosystème. Le livre Life's Principles compile une liste de modèles et de principes récurrents exposés par les animaux et les écosystèmes de la planète. Ces modèles et concepts sont censés contribuer au maintien d'une biosphère saine. L'outil présente six principes de base et vingt sous-principes au total (fig. 34). Les incohérences avec les principes de la vie sont des signes d'une invention potentiellement non durable, et elles peuvent vous aider à trouver des moyens d'améliorer votre conception. Lorsque l'outil 13 (le 3.8 signifie 3,8 milliards d'années)

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est utilisé comme norme tout au long du processus de conception, et que l'équipe s'efforce d'inclure les principes de vie en cours de route, ces divergences sont plus faciles à repérer et à surmonter.

Figure 33 : Les six principes de base proposés par Biomimicry 3.8

Source : biomimicry.net

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4-Méthodes de Biomimétisme

En général, la biomimétique utilise les techniques suivantes. Selon la direction du flux d'informations et le point de départ de la recherche, deux méthodes alternatives à la transmission d'informations biomimétiques peuvent être déterminées.

Biomimétique par induction - ascendante - basée sur les solutions.

- Prendre les phénomènes trouvés dans la nature comme point de départ, approche basée sur les solutions.

Biomimétique par analogie - descendante - basée sur les problèmes.

– Prend le problème de la technologie comme point de départ, approche basée sur les problèmes.

T. Speck et D. Harder ont popularisé les termes "top-down" et "bottomup" dans ce contexte, ainsi qu'une explication étape par étape des actions requises dans un processus d'innovation biomimétique. Gebeshuber et Drack s'y opposent car ils suggèrent une hiérarchie entre la nature et la technologie, et recommandent plutôt d'utiliser la "biomimétique par induction" ou la "biomimétique par analogie". Des procédures similaires, appelées approches "basées sur les solutions" et "basées sur les problèmes", ont été étudiées en profondeur par des chercheurs du Center for Biologically Inspired Design du Georgia Institute of Technology. Tous les groupes décrivent cependant des processus comparables, et les expériences acquises en utilisant la nature comme modèle semblent similaires. Pour la réussite du transfert, la phase d'abstraction après une étude approfondie dans les sciences biologiques est jugée critique.

Cette étape nécessite la réduction de données compliquées et l'identification de paramètres clés et de conditions limites. Pour garder des alternatives ouvertes au début du transfert d'informations, il est préférable d'éviter de catégoriser trop rigoureusement et de poursuivre plutôt les pistes d'intérêt, en utilisant l'intuition comme ligne directrice.

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La stratégie la plus privilégiée dans la méthode du biomimétisme est le transfert de caractéristiques fonctionnelles, qui repose sur le concept selon lequel toutes les constructions et structures existantes dans la nature ont une origine fonctionnelle, et que la fonction est la clé de la formation de parallèles appropriés. La responsabilité environnementale et la durabilité sont directement intégrées dans le processus d'invention, contrairement à la biomimétique. L'innovation est définie comme une exigence pour faire avancer le progrès industriel vers un avenir plus durable. Les idées du biomimétisme sont utilisées comme guide et critères d'évaluation dans le processus d'innovation.

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5-Structures de biomimétisme

L'essence de l'architecture biologique est capturée dans cet aperçu. Dans la plupart des cas, c'est la forme qui est coûteuse en technologie. La nature fait un usage exceptionnellement efficace des matériaux, ce qui est généralement accompli par la créativité de formes évoluées. Les créatures naturelles ont produit des structures efficaces qui font preuve d'une efficacité stupéfiante en utilisant le pliage, la voûte, les nervures, le gonflement et d'autres méthodes. Les nombreuses expressions de ce phénomène chez les créatures naturelles offrent une riche bibliothèque d'idées pour des bâtiments qui pourraient être bien plus efficaces que ceux que l'on voit dans la conception traditionnelle.

Pourquoi la nature se comporte-t-elle de la sorte ? Les contraintes de la survie sous toutes ses formes - se nourrir, se chauffer, s'accoupler, échapper aux prédateurs, pour n'en citer que quelques-unes - ont impitoyablement poli les structures et autres adaptations que les mutations et recombinaisons génétiques ont produites au fil des âges. Cette procédure est toujours en cours. En fait, nombre des plus grandes structures qui se sont développées au cours de l'histoire de la vie sur Terre peuvent être observées dans la nature aujourd'hui. Moins de matériaux, plus de design, telle est la philosophie architecturale qui se développe à partir de l'observation. En explorant ce paradigme, nous verrons plusieurs exemples de l'utilisation optimale de ressources limitées.

5.1 Structures Arborescente :

Notre compréhension des arbres et de la manière d'appliquer ce que nous avons appris d'eux à l'ingénierie a progressé de manière spectaculaire ces dernières années, en grande partie grâce aux travaux de Claus Mattheck. Les formes biologiques dans la nature obéissent à une norme de base, qu'il appelle l'axiome de la contrainte uniforme. La matière s'accumule dans les zones de concentration des contraintes jusqu'à ce qu'il y en ait suffisamment pour répartir les pressions de manière égale ; il n'y a pas de matière dans les zones non chargées. Les arbres montrent également comment une meilleure conception des jonctions peut minimiser les concentrations de contraintes et s'adapter

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au fil du temps. Le résultat final est proche de l'efficacité maximale, sans déchets de matériaux et avec tous les matériaux existants supportant leur part de la charge. En revanche, de nombreux bâtiments en acier et en béton sont construits de telle sorte que les conditions de charge les plus sévères (qui ne se produisent que dans certaines zones) déterminent la taille globale de la poutre ou de la colonne.

Mattheck et ses collègues du centre de recherche de Karlsruhe ont créé une technique de conception qui utilise deux processus logiciels (fig. 29) pour construire des formes de conception biologiques presque équivalentes aux améliorations naturelles. L'outil permet aux concepteurs de simuler les forces qui seraient subies dans la vie réelle sur un modèle informatique structurel préliminaire. Parmi celles-ci figurent les contraintes dues à la neige, au vent et aux séismes, ainsi que les charges imposées par l'utilisation du bâtiment. La première étape consiste à utiliser le logiciel "Soft Kill Option" (SKO) pour détruire les matériaux dans les zones de faible ou d'absence de contraintes. Ensuite, à l'aide d'un outil d'"optimisation assistée par ordinateur" (CAO), les formes sont affinées et, le cas échéant, du matériau est ajouté aux connexions pour réduire les concentrations de contraintes susceptibles de provoquer une défaillance. Le concepteur peut décider s'il aime ou non le résultat et rechercher d'autres approches pour atteindre l'intégrité structurelle. Selon M. Mattheck, cette procédure commence par une pièce de bois brute taillée à la hache qui est ensuite sculptée jusqu'à obtenir une forme quasi définitive (étape SKO) avant d'être poncée et polie (étape CAO). Le produit final peut sembler étonnamment organique et être nettement plus efficace que les constructions traditionnelles. Le designer Joris Larman a utilisé cette méthode pour créer une variété de meubles magnifiques ainsi qu'un pont imprimé en 3D qui traversera un canal (fig. 35). Nous pourrions faire de même avec les bâtiments, ce qui permettrait de réaliser des économies massives de matériaux et d'obtenir des conceptions plus attrayantes et structurellement compréhensible

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Figure 34: Optimisation de structures par algorithmes 14

Source : Biomimicry in Architecture, Michael Pawson

Figure 35 : Construction de Structure Arborescente à partir de robots

Source : dezeen.com

14 Diagramme montrant le processus d'affinement de la conception de Claus Mattheck à l'aide des logiciels "Soft Kill Option" (SKO) et "Computer Aided Optimisation" (CAO).

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5.2 Transformations des surfaces planes :

L'une des méthodes les plus simples consiste à rouler une surface plane pour en faire quelque chose qui offre une protection. La chenille de l'enrouleur de feuilles enroule une feuille en un tube, le lie avec de la soie et utilise cette structure pour achever sa transformation. Cette construction tubulaire est utilisée par la chenille pendant une semaine, mais une nouvelle étude révèle qu'elle est ensuite utilisée par d'autres créatures et qu'elle remplit une fonction importante en augmentant la densité et la variété des arthropodes. L'exquis pavillon de PLY Architecture aux jardins botaniques de Matthaei, dans le Michigan, présente un niveau d'inventivité similaire (fig. 36-37). Des feuilles d'aluminium découpées au laser ont été roulées en cônes, puis assemblées à l'aide de motifs de géométrie phyllotaxique 15 .

Source: Archdaily.com

15 Géométrie qui caractérise la disposition autour d'un axe de croissance de tout élément botanique : feuille, branche, bourgeon, écailles, fruits, fleurs, pétales…

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Figure 36: Shadow Pavilion

Figure 37: Coupe sur Shadow Pavilion

Les plantes ont dû trouver le moyen d'afficher d'énormes quantités de surface photosynthétique afin d'absorber la lumière. Cependant, comme le développement de feuilles plus grandes en augmentant leur épaisseur présente des inconvénients considérables, une plus grande surface nécessite plus de structure. Pour obtenir des parties plus rigides à partir d'un matériau fin, des courbes et des plis sont apparus. Le pli de la feuille du magnolia du Sud se trouve le long de la nervure centrale, et chaque moitié de la feuille est incurvée (fig. 38). La rigidité de la feuille est influencée à la fois par le pli et la courbure. La lumière du soleil étant rare au niveau du sol dans les forêts tropicales, de nombreuses plantes se sont adaptées en pliant leurs énormes feuilles en forme d'éventail.

Les architectes Tonkin Liu et l'ingénieur structurel Ed Clark de la société Arup se sont inspirés des formes des mollusques marins et des techniques de pliage pour créer un nouveau type de structure de surface plane. Cette structure est connue sous le nom de "structure en dentelle de coquillage" (fig. 39). La structure, comme les mollusques, tire sa rigidité de l'articulation d'une surface mince : les plis augmentent la profondeur structurelle effective, les courbes donnent de la rigidité et les torsions ajoutent de la triangulation. Le résultat final est un bâtiment étonnant réalisé avec peu de matériaux et dont la force provient de sa forme plutôt que de sa masse (fig. 40).

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Figure 38 : Feuille d’arbre Magnolia 16

Source: Biomimicry in Architecture, Michael Pawson

Figure 39 : Structure en dentelle de coquillage

Source: Biomimicry in Architecture, Michael Pawson

16 La feuille de magnolia du Sud, rigidifiée par une combinaison de d'une courbe et d'un pli

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Figure 40 : Structure en dentelle de coquillage

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Source : arch2o.com

Coquilles et Dômes

Les coquilles et les dômes sont fabriqués de manière experte par Mère Nature. L'ormeau est un de ces constructeurs dont les caractéristiques ont été rigoureusement évaluées. Il a développé une coquille formée de plaques polygonales de carbonate de calcium reliées entre elles par un mortier polymère flexible, comme le montre la microscopie électronique. Le résultat final est une substance qui est 3 000 fois plus durable que la craie qui constitue 95 % de sa masse. Alors que nous préférons concevoir des matériaux homogènes qui propagent facilement les fissures une fois qu'elles ont commencé, la nature a produit une matrice de plaquettes dures présentant une incroyable résistance aux fractures. Chaque plaquette produit un endroit où la fissure s'arrête et doit repartir sur une nouvelle plaquette si elle veut traverser le matériau.

La voûte de Guastavino (fig. 41) est une méthode de construction traditionnelle qui présente des similitudes fascinantes avec l'architecture et qui a récemment connu un regain de popularité. Cette technique, qui doit son nom à l'architecte et constructeur valencien Rafael Guastavino (1842-1908), consiste à créer une couche inférieure de tuiles en terre cuite à partir d'un soubassement circulaire en béton, à son niveau le plus élémentaire. Cette opération peut être réalisée sans coffrage car on utilise un mortier de plâtre de Paris qui permet aux carreaux d'absorber l'humidité assez rapidement pour former une bonne liaison en une demi-minute. Un mortier de ciment plus solide est utilisé pour appliquer une deuxième couche de carreaux disposés en diagonale, suivie d'une troisième couche à la diagonale opposée.

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Le résultat est une structure de coquille extrêmement solide, capable de couvrir de grandes distances et de prendre des formes très variées. Bien que cette forme de construction soit antérieure à notre compréhension actuelle de la structure détaillée de l'ormeau, cela ne nous empêche pas de développer cette idée en nous inspirant de la biologie. L'origine est-elle biomimétique au sens où nous l'utilisons aujourd'hui ? Il s'agit d'une question intéressante, car certaines solutions architecturales vernaculaires pourraient être adoptées comme véritablement biomimétiques, ce qui permettrait au biomimétisme de démontrer son champ d'application, de la basse technologie à la technologie contemporaine de pointe.

Nous pourrions utiliser un mortier flexible pour renforcer la résistance à la rupture et la portée d'une structure, en nous inspirant des caractéristiques fonctionnelles de l'ormeau. Les mollusques peuvent également nous apprendre à créer des ondulations et à repousser les distances de portée tout en utilisant très peu de matériaux. Cette stratégie présente un grand potentiel

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Figure 41 : La voute de Guastavino Source: architizer.com

dans les pays où les tuiles de terre sont régulièrement cuites au soleil afin d'optimiser l'efficacité des ressources et de la main- d'œuvre locales pour construire des structures expressives et efficaces.

Figure 42 : Coque en grillage de bois

Source : triangularlatticeroof.blogspot.com

Les coques en grillage de bois (fig. 42) sont des modifications de surface planes ; en fait, elles sont souvent réalisées en partant d'un grillage plat, puis en le pliant pour lui donner une forme. L'objectif structurel est de créer un ensemble de pièces linéairesprincipalement en bois - qui fonctionnent ensemble comme une coquille, et non de produire un plan raidi. La conception des dômes et des coquilles a très certainement été influencée par des exemples naturels. Le Weald and Downland Gridshell, conçu par Ted Cullinan Architects en collaboration avec Buro Happold et Green Oak Carpentry, ne pèse que 6 tonnes, contre une centaine de tonnes pour une grange typique de taille égale. L'élégance des Gridshells démontre ce qui peut être accompli avec de l'inventivité plutôt qu'avec la force brute.

5.3 Structures tissées, attachées et réciproques

Il existe plusieurs exemples de tissage dans la nature, dont la plupart sont réalisés par des oiseaux. Les oiseaux tisserands du village (Ploceus

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cucullatus) utilisent jusqu'à six nœuds distincts, dont des boucles, des demi-accrochages, des accrochages, des liaisons, des nœuds coulissants et des nœuds à plat, en plus des techniques de tissage. La famille des mésanges pendulines (Remizidae) est une autre espèce d'oiseaux qui mérite d'être connue. Elle construit un nid suspendu en forme de sac à partir de toile d'araignée, de laine, de poils d'animaux et de fibres végétales si densément entrelacées que même les singes ne peuvent les séparer. Ils étaient utilisés comme chaussons d'enfants dans certaines régions d'Europe de l'Est. Pour maintenir son nid de brindilles ensemble, la mésange à longue queue (Aegithalos caudatus) utilise un mélange de cocons d'œufs en soie d'araignée et de mousses à feuilles fines comme une sorte de Velcro naturel. Le martinet des cheminées (Chaetura pelagica) utilise du mucus salivaire pour créer son nid, tandis que des rivets pop en soie sont utilisés par la minuscule arachnothère (Arachnothera longirostra) pour fixer son nid à de grandes feuilles.

Une structure réciproque a une portée globale supérieure aux portées individuelles de ses composants, et chaque poutre soutient et est soutenue par les autres poutres de la structure. Cette stratégie est couramment utilisée lorsque la distance à franchir, par exemple entre les branches d'un arbre, dépasse la longueur de la plupart des brindilles disponibles, comme on le voit dans de nombreux nids d'oiseaux. De courtes longueurs de brindilles peuvent être utilisées pour combler l'espace entre deux morceaux voisins qui forment un angle l'un par rapport à l'autre, couvrant finalement la zone nécessaire à la base du nid. Alors que certains de ces nids ne sont qu'une collection de bâtons maintenus ensemble par la gravité et la friction, d'autres oiseaux utilisent diverses méthodes de fixation pour maintenir leurs composants ensemble.

Le pont Luxmore de Jamie McCulloch et Atelier One (fig. 43) et le théâtre de marionnettes Seiwa Bunraku de Kazuhiro Ishii sont deux exemples étonnants de structures artificielles qui utilisent des approches parallèles (fig. 44). Il est encore possible d'adapter plus directement ces approches de construction des structures naturelles aux structures artificielles. La conclusion la plus importante est que les structures tissées, attachées et réciproques de la nature peuvent donner un meilleur aperçu de la façon dont nous pouvons développer des structures à portée attrayante avec des composants structurels relativement modestes au lieu de grosses poutres ou de fermes.

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Figure 44 : La structure du toit en spirale réciproque du théâtre de marionnettes Seiwa Bunraku

Source : cobinbaja.blogspot.com

5.4 Squelettes

Les os sont plus complexes. Les forces asymétriques sont généralement résolues dans les structures squelettiques. La figure 45 illustre les lignes de contrainte dans un fémur, tandis que la figure 46 représente une image radiographique du même os.

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Figure 43: Le pont Luxmore de Jamie McCulloch Source : atelierone.com

Il existe une correspondance parfaite entre la densité des filaments osseux et la concentration des contraintes ; là où la contrainte est importante, il y a une prolifération de matière, et là où il n'y a pas de contrainte, il y a un vide. Le métacarpien du vautour (fig. 47) est semblable à un treillis de Warren, comme l'a montré l'influent ouvrage de 1917 du mathématicien biologique D'Arcy Wentworth Thompson, intitulé On Growth and Form30. Le vautour est un exemple extrême de la manière dont une énorme pression de sélection visant à acquérir une grande force pour un poids minimal peut produire des résultats spectaculaires.

Les oiseaux se sont développés en réponse à une pression de sélection importante sur le poids, les différentes espèces présentant des manifestations variées du dicton "les matériaux sont chers, la forme est bon marché". Les crânes des corbeaux et des pies, par exemple (fig. 50), ne sont rien de moins que des merveilles d'ingénierie. Alors que le poids est réduit, l'épaisseur effective du crâne est augmentée.

Figure 45 :

Figure 46 :

Figure 47 :

Le métacarpien du vautour 17 contrainte dans radiographique Un fémur

Les lignes de Image

Source: Biomimicry in Architecture, Michael Pawson

La construction ressemble à une structure spatiale, avec des entretoises et des liens reliant deux niveaux de composants

17 En raison d'une pression sélective intense en faveur de la légèreté, certains oiseaux ont développé des formes structurelles remarquablement efficaces, comme le métacarpe de ce vautour, qui est effectivement identique à une console.

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structurels. Le crâne d'oiseau va encore plus loin en générant une forme de dôme, ce qui améliore l'efficacité. Il s'agit d'une combinaison étonnante de l'action d'un obus et de la technologie d'une structure spatiale, le tout dans une humble pie.

Source: thoughtco.com

Ce principe a inspiré la structure d'un auvent (fig.48) conçu par l'architecte André Harris. La conception résulte d'une compréhension détaillée de la manière dont le tissu osseux se forme autour de cellules pressurisées, créant des vides d'air entre des surfaces solides. Il est possible de construire la canopée d'une manière très similaire à la nature : en utilisant une toile de videurs gonflés, autour desquels des matériaux appropriés pourraient être coulés.

Figure 49 : Auvent inspiré du tissu osseux

Source : steemit.com

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Figure 48 : Tissue du crâne des corbeaux

L'architecture biomorphique simple et l'architecture biomimétique complète ont toutes deux étés inspirés par l'oursin. Le squelette de l'oursin est constitué de plaques interconnectées (fig. 50), chacune ayant une structure cristalline unique en calcite. La calcite serait lourde si elle était solide, mais en raison de son épaisseur effective accrue, les osselets ont une structure spongieuse, poreuse, légère et rigide. Les os d'oursins ont servi de référence visuelle pour la Doughnut House de Future Systems (fig. 51), même si la structure n'avait que très peu de points communs avec celle de la vie marine sur le plan fonctionnel. Le hall d'exposition Landesgartenschau de l'université de Stuttgart en Allemagne, où se déroulent actuellement certaines des recherches les plus passionnantes et les plus approfondies sur l'architecture biomimétique, est un bâtiment qui s'est volontairement rapproché de la structure d'un oursin (fig. 52). L'Institute for Computational Design (ICD, professeur Menges (PI)), l'Institute of Building Structures & Structural Design (ITKE, professeur Knippers) et l'Institute of Engineering Geodesy ont collaboré au projet (IIGS, professeur Schwieger).

Figure 50 : Le squelette de l'oursin

Source : flickr.com

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Figure 51 : Le squelette de l'oursin Source : ribaj.com

Les osselets emboîtés des oursins ont été une source d'inspiration pour la structure. Elle est créée à partir de panneaux de contreplaqué de 50 mm d'épaisseur, reliés par des joints de précision. Selon M. Menges, "les constructions biologiques naturelles présentent un degré de complexité géométrique nettement supérieur à celui des constructions humaines." La conception par ordinateur a été cruciale pour résoudre la complexité de la détermination de la meilleure forme. Ensuite, chaque panneau a été fabriqué par des robots. La construction a une surface de 250 m2 et est plus fine qu'une coquille d'œuf en termes d'épaisseur.

Source : archdaily.com

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Figure 52 : Landesgartenschau Exhibition Hall

IV-Approche algorithmique de La Conception

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1-Les algorithmes dans la conception

L'informatique a un impact profond à la fois sur la perception et la réalisation de la forme, de l'espace et de la structure architecturale. Elle modifie la façon dont on perçoit la forme, la façon dont la forme est produite et la façon dont la forme est produite. Les concepts fondamentaux qui sous-tendent la théorie et les techniques informatiques exposent la forme comme une composante subsidiaire de l'environnement, et l'environnement comme un réseau complexe d'énergies en échange dynamique de régénération et de dégénérescence. L'émergence de cette perspective s'est produite à la confluence de différents modes de pensée, en accord avec diverses avancées scientifiques, technologiques et culturelles s'étendant sur plusieurs décennies, voire plusieurs siècles. Plus précisément, le calcul dans la conception représente une accumulation de concepts multicouches allant de la théorie des systèmes et de la cybernétique 18 à la morphogenèse et à la biologie du développement.

Pour comprendre le calcul, et sa pertinence pour la conception architecturale, il faut comprendre la distinction entre calcul et informatisation. En principe, cette dernière peut être décomposée en méthodes qui soit déduisent des résultats à partir de valeurs ou d'ensembles de valeurs, soit compilent ou associent simplement des valeurs ou des ensembles de valeurs donnés. L'une augmente la quantité et la spécificité de l'information, tandis que l'autre ne contient que la quantité d'information initialement fournie. Cette prémisse de base contradictoire est toujours présente dans les diverses méthodes par lesquelles les ordinateurs ont été intégrés dans la conception architecturale. Fondamentalement, la distinction réside dans l'approche de la conception, plutôt que dans des compétences ou des connaissances particulières. Une approche assistée par ordinateur suppose une stratégie basée sur l'objet pour encapsuler l'information dans des représentations symboliques - des méthodes d'organisation de l'information. En revanche, une approche informatique permet de réaliser des données spécifiques à partir d'une abstraction initiale - sous la forme de codes qui encapsulent des valeurs et des actions. Ces

18 Le concept de cybernétique porte sur la causalité circulaire où les résultats des actions sont utilisés comme entrées pour d'autres actions afin de soutenir la poursuite d'une tâche ou d'une condition particulière.

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distinctions se retrouvent dans les perspectives philosophiques par lesquelles l'architecture, née de processus informatiques, est perçue. Après l'introduction des premiers outils informatiques dans l'architecture, on a découvert que l'optimisation n'était pas possible dans le processus de conception étant donné la multiplicité des contraintes, des exigences et des intentions qui enveloppent un problème architectural. Sous le nom de conception automatisée, il y a eu une vision holistique des programmes informatiques qui pouvaient traiter des briefs de conception complexes en solutions architecturales spécifiques. Cela faisait allusion à la question de savoir comment un ordinateur pouvait, ou même devait, imiter les processus de pensée et l'ingéniosité de l'homme. C'est au même moment que la théorie cybernétique a été popularisée. La cybernétique a mis en avant la nouvelle existence de la relation homme-machine, stimulant la notion de comment les ordinateurs peuvent être utilisés pour développer l'intellect humain, plutôt que de travailler de manière redondante aux processus qui forment cette connaissance. En bref, il en est résulté une perspective dans laquelle l'architecture pouvait être perçue comme un "système". Cela implique que la formulation de l'architecture se fait à travers la compréhension et le développement de l'interrelation complexe des éléments matériels et de l'engagement social, façonnant la forme, l'espace et la structure.

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Approche Algorithmique de la Conception

2-System Thinking

Dans sa définition du holisme 19, Aristote pose la première pierre en comprenant les systèmes comme un tout qui est plus que la somme de ses parties. Il procède cependant à la compréhension des parties de manière isolée. Descartes a ajouté à ce point de vue la notion de compréhension des processus par le biais de la causalité simple, les relations étant déduites de deux éléments en interaction, au maximum. Au milieu du 20e siècle, Ludwig von Bertalanffy 20a introduit la théorie générale des systèmes en réponse à la longue évolution de la conception du "tout" des systèmes en fonctionnement. Sa théorie est basée sur une critique fondamentale de la physique classique et de ses méthodes déductives et se concentre sur des phénomènes isolés.

Bertalanffy considérait que ces méthodes ne convenaient pas à la biologie, estimant que rien dans la nature n'existe de manière isolée ou dans le cadre de dépendances simples, mais doit plutôt être compris comme des systèmes complexes d'interactions et de réciprocités. Audelà des relations causales simples et linéaires, Bertalanffy a proposé le concept et les opérations mathématiques permettant de définir des systèmes basés sur des pertes non linéaires. Les boucles causales appelées "rétroaction", c'est-à-dire les processus impliquant des causes qui se stabilisent mutuellement, en sont des exemples. Dans ce cas, les effets réagissent sur leurs causes et ouvrent ainsi la possibilité de conceptualiser ce que Bertalanffy définit comme un "système ouvert", composé de matière et de processus élémentaires en échange réciproque entre l'organisme et l'environnement. Il s'agissait d'un modèle qui pouvait déterminer le comportement global en comprenant l'ensemble des éléments individuels et leurs interactions intimes.

La théorie générale des systèmes a été formulée comme une discipline scientifique universelle visant à déchiffrer les lois qui régissent la définition des "ensembles organisés". Intégrée à l'architecture, comme en témoignent les écrits de Christopher Alexander sur le processus de conception et les organisations physiques, la forme et la fonctionnalité dans les années 1960, la théorie a entraîné de profonds changements

19 Théorie selon laquelle l'homme est un tout indivisible qui ne peut être expliqué par ses différentes composantes (physique, physiologique, psychique) considérées séparément.

20 Ludwig von Bertalanffy était un biologiste autrichien connu comme l'un des fondateurs de la théorie des systèmes généraux.

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dans la réflexion sur la conception. Contrairement aux approches de conception établies, Alexander a soutenu qu'un problème de conception global ne peut être divisé en sous-problèmes et, par conséquent, qu'il est impossible d'arriver à une solution de conception novatrice par un processus sommaire de résolution de problèmes individuels les uns après les autres.

La cybernétique, qui évolue parallèlement à la théorie générale des systèmes, contribue au concept de causalité cyclique en permettant de comprendre comment les machines peuvent être capables de résoudre une telle complexité. En particulier, la notion de rétroaction et de stabilité fournit des fonctions permettant de déterminer comment l'ensemble est organisé. Associées à l'idée de "qualité de l'ajustement", la prédiction et la précision de la prédiction sont des facteurs critiques dans ce que Norbert Wiener, qui a inventé le terme "cybernétique", appelle la "machine à apprendre".

La compréhension du fonctionnement des systèmes, en tant que formes et en tant que constructions d'ordre mathématique, est fondamentale pour la conception informatique. Pour comprendre leur fonctionnement, il est essentiel de connaître le niveau de prédiction contenu dans le modèle qui envisage le système. Au départ, il s'agissait d'une considération primordiale pour les premiers systèmes graphiques en architecture, énoncée comme suit : Avec l'aide de modèles assistés par ordinateur, le concepteur sera en mesure de prédire la performance de toute alternative de conception qu'il pourrait générer. Le succès de cette démarche dépend des paradigmes de conception qui sont orientés vers la définition de systèmes avec des paramètres concis, et l'utilisation de l'effort de prédiction et de rétroaction pour informer, spécifier davantage et définir globalement le comportement du système organisé.

Approche
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3-Intégration du design Algorithmique en Architecture

Lors de la conception de bâtiments et de villes, les architectes et les urbanistes sont rapidement confrontés à des complexités inhérentes d'au moins deux natures très différentes, l'une relative au processus de conception lui-même, et l'autre relative aux sujets de ces processus de conception (les bâtiments et les villes). Tout d'abord, les designers comprennent tacitement que le champ de toutes les solutions de conception possibles (l'espace des solutions) pour un problème de design donné est beaucoup plus vaste que ce que l'équipe n’aura jamais l'occasion d'explorer complètement. Compte tenu des délais d'un cycle de conception typique, l'équipe de conception n'aura l'occasion de concevoir (et encore moins d'interroger rigoureusement) qu'une très petite fraction de toutes les approches possibles pour concevoir le bâtiment ou la ville. De même, le fait que cet échantillon soit si petit ne permet pas à l'équipe de prétendre à une connaissance substantielle de la qualité réelle de la conception (définie par la mesure de votre choix) par rapport aux conceptions non découvertes dans l'espace de solution qui sont en fait les meilleures.

Le deuxième type de complexité que la communauté de conception a été forcée de marginaliser est la complexité basée sur les systèmes. Bien que le nombre de systèmes qui composent les bâtiments et les villes soit relativement faible (bien qu'il reste extrêmement important), le nombre d'interconnexions qui alimentent chaque système dans les autres, et dont l'ampleur peut varier dans le temps, s'accumule rapidement de manière exponentielle en un nombre stupéfiant d'événements en domino qu'il est également impossible de suivre dans les contraintes de temps du processus de conception. Face à cette impossibilité, les concepteurs ont historiquement été contraints de simplifier systématiquement le problème, de déconnecter les interdépendances entre les modèles de systèmes, d'utiliser des règles empiriques et/ou de faire diverses hypothèses au fur et à mesure de leur itération dans l'espace de conception.

Récemment, cependant, les ordinateurs et les plateformes de modélisation paramétrique permettent aux concepteurs de gérer et de s'engager dans certaines de ces formes de complexité d'une manière qui

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n'a jamais été possible auparavant. En particulier, des stratégies informatiques permettant d'effectuer des recherches dans de vastes espaces de conception et de saisir des relations systémiques complexes commencent à émerger au sein des professions de conception. Non seulement ces types d'outils permettent une meilleure gestion de la complexité de nos problèmes de conception, mais ils peuvent même être utilisés pour diriger ces processus de conception.

3.1 Algorithmes de recherche

L’utilisation des algorithmes de recherche est une bonne illustration de cette nouvelle capacité à se connecter à la complexité. Généralement, ce mot évoque des images de moteurs de recherche Web qui peuvent créer des listes de sites Web qui, en fonction des paramètres de recherche de l’utilisateur, sont susceptibles de contenir des informations pertinentes. L’utilisateur peut également essayer de se souvenir de tous les sites Web qu’il connaît et qui pourraient contenir les informations dont il a besoin, puis naviguer manuellement sur chaque site pour déterminer s’il contient des informations pertinentes. Évidemment, cela serait extrêmement inefficace.

Des restrictions similaires dans les processus de conception peuvent être résolues en utilisant des algorithmes de recherche. Cette méthode est communément appelée « optimisation », mais il s’agit essentiellement d’un processus de recherche. Ces algorithmes sont censés automatiser la tâche consistant à filtrer de très vastes espaces de solutions pour trouver d’excellentes solutions, étant donné que l’espace de solutions contient beaucoup plus de conceptions que celles qui peuvent être échantillonnées. Étant donné que l’efficacité de ces algorithmes dépend fortement de la capacité du concepteur à définir le terme « très bon » en des termes que l’ordinateur peut comprendre et/ou calculer, ils sont actuellement utilisés plus fréquemment dans des situations où le concepteur s’intéresse à des qualités structurelles, de durabilité ou de performance financière qui sont plus facilement mesurables.

Le sujet des topologies efficaces des fermes est étudié dans le cadre d’un projet de recherche en cours dans notre studio d’ingénierie structurelle. Une approche d’optimisation connue sous le nom de méthode force-densité est l’une des tactiques utilisées dans cette étude. L’espace de solution dans cette approche de recherche est un bloc de matériau vaguement défini avec des supports et des charges appliquées explicitement définis. L’algorithme de recherche fonctionne comme un sculpteur, en supprimant les sections du bloc de matériau

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qui fournissent le moins d’efforts pour transférer les forces des points de charge aux supports de manière répétée. Cette procédure de soustraction répétée permet d’obtenir une conception de ferme qui utilise au mieux le matériau disponible ; en d’autres termes, une ferme structurellement optimale. Si les conditions de charge ou de support sont modifiées, la forme résultante le sera également.

La conception d’une tour à Sydney, en Australie, exprimant une idée structurelle connue sous le nom de cadre contreventé, a été influencée par la même méthode. Le Hancock Center de Chicago, à la fin des années 1960, est peut-être l’exemple le plus marquant de l’utilisation du cadre contreventé par SOM. À l’époque, on pensait que deux éléments droits se croisant à mi-portée constituaient la configuration la plus efficace pour un contreventement. En réalité, les concepteurs ont découvert qu’une forme plus efficace pour le contreventement était celle où le point de jonction était surélevé d’une certaine distance par rapport au point d’intersection à mi-portée en utilisant la même approche de recherche.

3.2Algorithmes génétiques

L’algorithme génétique est un autre outil de recherche utilisé pour les défis de conception. Avec un AG, le concepteur doit d’abord définir la conception comme un ensemble de variables numériques qui correspondent aux caractéristiques géométriques de la conception, ou son génome. Ces variables sont libres de varier au cours de l’exécution de l’algorithme, qui recherche les combinaisons optimales de valeurs donnant les meilleures solutions. Là encore, le concepteur doit définir le terme « meilleur » en des termes qui peuvent être calculés et mesurés par un ordinateur.

Contrairement aux algorithmes de densité de force, qui sont créés spécifiquement pour les études structurelles, les algorithmes génétiques peuvent être utilisés pour tout type de recherche performative pour laquelle les exigences de performance peuvent être calculées. Bien que les AG sont utilisés pour des études structurelles, ils sont également utilisés pour des recherches sur les paramètres de rayonnement solaire et d'éclairage naturel. L'Académie militaire Ali Al-Sabah au Koweït (fig. 53) en est un exemple. Pour chacune des principales orientations des murs, on a utilisé l’AG pour nous aider à découvrir une variété de conceptions de fenêtres très performantes. Dans cette situation, « performant » indique que les formes de fenêtres ont fait un excellent travail pour limiter les gains solaires directs tout en améliorant l’éclairage naturel indirect.

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3.3 Modélisation des systèmes

Tant au niveau architectural qu'urbain, le deuxième domaine de complexité qui peut être géré par les outils algorithmiques sont les systèmes interconnectés. Un domaine qui revêt une importance croissante pour les architectes et les ingénieurs en termes d'architecture est la zone d'assemblage de la peau extérieure, en particulier à mesure que les conceptions de bâtiments deviennent plus compliquées sur le plan géométrique (il ne s'agit plus de simples extrusions rectangulaires). Les défis de la durabilité (notamment ceux liés à l'énergie et à l'eau) devenant de plus en plus sérieux à l'échelle urbaine, nos urbanistes s'intéressent de plus en plus à la conception des systèmes d'infrastructure de la ville.

Ces deux exemples - l'assemblage de murs extérieurs et l'infrastructure des services publics - représentent des exemples de complexité de systèmes que nos équipes de conception abordent désormais avec une rigueur accrue, en raison des percées dans les capacités de calcul.

Les applications de modélisation géométrique telles que Rhino, Grasshopper et Digital Project ont rendu relativement simple pour les concepteurs la construction de bâtiments très complexes et courbes grâce à des palettes intégrées d'outils de génération de formes à base

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Figure 53 : Académie militaire Ali al Sabah Source : archello.com/

de NURBS 21 (fig. 54). Ces géométries curvilignes compliquées doivent ensuite être rationalisées en systèmes de revêtement de murs-rideaux, qui sont souvent constitués de panneaux de verre quadrilatéraux et de systèmes de cadres en aluminium. Les systèmes structurels qui soutiennent le système de mur-rideau (y compris les dalles de plancher, les colonnes périphériques et les composants sous-structurels) doivent également être rationalisés pour correspondre à la géométrie de surface du bâtiment.

Figure 54 : NURBS

Source : researchgate.net

Même si les équipes de conception responsables de chacun de ces éléments sont extrêmement distinctes et généralement responsables de leurs propres modèles, la peau et la structure d'un immeuble de grande hauteur sont des systèmes étroitement liés. Il est plus facile de coordonner et d'intégrer les conceptions et les modèles des deux systèmes lorsque les surfaces extérieures du bâtiment sont d'aplomb et planes ; mais, lorsque la forme du bâtiment devient plus compliquée, la coordination et l'intégration deviennent considérablement plus difficiles. Le fait que la forme de la structure, ainsi que l'emplacement et la taille des composants structurels, puissent rester indépendants pendant la majeure partie de la phase de conception, est peut-être le facteur le plus important de cette difficulté.

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21 Non-uniform
rational B-spline

Partie 3

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Références Architecturales du Biodesign

100

I-Pavillon de Recherche 2013-2014

ICD/ITKE

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source : www.icd.uni-stuttgart.de

D’après le journal de publication de L'Institut du Computational Design and Construction (ICD) et l'Institute of Building Structures and Structural Design (ITKE) de l'université de Stuttgart ont construit un pavillon de recherche bionique. Ce projet fait partie d'une série réussie de pavillons de recherche qui présentent le potentiel des nouveaux processus de conception, de simulation et de fabrication en architecture. Le projet a été planifié et construit en un an et demi par des étudiants et des chercheurs au sein d'une équipe pluridisciplinaire de biologistes, paléontologues, architectes et ingénieurs.

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Figure 55 : Pavillon de recherche ICD/ITKE 2013-2014

Ce projet se concentre sur une stratégie parallèle de conception ascendante « Bottom Up » pour l'étude biomimétique de coquilles composites en fibres naturelles et sur le développement de nouvelles méthodes de fabrication robotique pour les structures en polymère renforcé de fibres. L'objectif est le développement d'une technique d'enroulement pour les structures composites modulaires en fibres à double couche, qui réduit au minimum le coffrage nécessaire tout en conservant un grand degré de liberté géométrique. Les principes fonctionnels des structures légères naturelles ont donc été analysés et extraits en coopération avec l'Institut d'évolution et d'écologie et le département de paléobiologie de l'université de Tübingen. Grâce au développement d'une méthode de fabrication robotique personnalisée, ces principes ont été transférés dans un pavillon prototype modulaire.

Figure 56 : Comparaison de l'architecture interne de l'élytre chez un coléoptère volant et un coléoptère terrestre

Source : www.icd.uni-stuttgart.de

En coopération avec l'installation de rayonnement synchrotron ANKA et l'Institut pour la science des photons et le rayonnement synchrotron de l'Institut de technologie de Karlsruhe (KIT), des modèles 3D haute résolution de divers élytres de coléoptères ont été extraits par

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tomographie micro-informatique. Associés aux scans MEB de l'université de Tübingen, ces modèles ont permis d'analyser les structures internes complexes de la carapace des coléoptères. La morphologie de l'élytre est basée sur une structure à double couche reliée par des éléments de support doublement courbés en forme de colonne, les trabécules. La disposition des fibres à l'intérieur d'un trabécule fusionne les segments supérieur et inférieur de la coquille avec des fibres continues. La distribution et l'articulation géométrique des trabécules sont très différenciées dans la coquille du coléoptère. Grâce à des études comparatives de plusieurs espèces de coléoptères volants, les principes structurels sous-jacents ont pu être identifiés et traduits en règles de conception pour les morphologies structurelles.

Sur la base de la morphologie différenciée des trabécules et de l'agencement des fibres individuelles, un système modulaire à double couche a été généré pour être mis en œuvre dans un prototype architectural. Grâce au développement d'outils informatiques de conception et de simulation, les caractéristiques de la fabrication robotique et les principes biomimétiques abstraits ont pu être intégrés simultanément dans le processus de conception

Figure 57 : Eléments de construction en fibre composite fabriqué de manière robotique

Source : www.icd.uni-stuttgart.de

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Figure 58 : Système léger en fibres composites à haute capacité structurelle

Source : www.icd.uni-stuttgart.de

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II-Terrasses de Shenzhen MVRDV

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Le projet « Terrasses de Shenzhen » a été conçu de manière qu’il soit le cœur du quartier universitaire florissant de Universiade New Town, dans le district de Longgang, à Shenzhen. Le projet comprend un empilement de plaques accessibles contenant le programme des bâtiments, où toute la communication a lieu sur les terrasses ombragées afin de maximiser la vie publique. Conçus dans un souci de durabilité, les espaces verts extérieurs du projet se mêlent à une grande variété d'activités - dont un théâtre, une bibliothèque, un musée, un centre de conférence et des commerces - pour faire du site un lieu de rencontre, d'apprentissage, de loisirs, de culture et de détente.

Le projet fusionne le paysage existant avec le nouveau développement en utilisant des plateaux empilés pour ses différents bâtiments. Les terrasses horizontales empilées offrent un contraste intéressant avec les tours tout autour, mais elles remplissent également une fonction écologique : les surplombs procurent de l'ombre et la forme ronde favorise la circulation du vent et la ventilation naturelle.

Associant un paysage favorable aux piétons à pas moins de 20 programmes différents, dont des transports publics, Shenzhen Terraces est en passe de devenir un centre durable pour la zone environnante. Les plantations abondantes et les jeux d'eau réduisent la température locale et offrent un habitat à la faune urbaine, tandis que les jardins et la collecte des eaux de pluie génèrent des ressources alimentaires et hydriques. Le béton utilisé dans les bâtiments eux-mêmes sera fabriqué

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Figure 59 : Projet Terrasses Shenzhen Source : www.mvrdv.com/

à partir de béton recyclé, et des panneaux photovoltaïques orneront de vastes portions des toits.

Figure 60 : Projet Terrasses Shenzhen

Source : www.mvrdv.com

Une ambition importante pour le projet était de fusionner le bâtiment avec le paysage et de rendre le projet aussi durable que possible. L'aménagement paysager, développé en collaboration avec Openfabric, ajoute des parcelles de verdure semblable à une jungle et une programmation publique entre les voies piétonnes. Ces parcelles accueillent des plantations qui imitent les forêts naturelles subtropicales de la région, mélangées à des éléments tels que des collines herbeuses, des œuvres d'art public, des bassins réfléchissants et des zones d'activités pour l'escalade ou le tennis de table. Les toits font également partie de ce paysage, utilisés non seulement pour les panneaux photovoltaïques et la collecte des eaux de pluie, mais aussi pour de grandes pelouses vertes accessibles.

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Figure 61 : Projet Terrasses Shenzhen

Source : www.mvrdv.com

Les terrasses sont adaptées pour servir une diversité de fonctions : de grands surplombs protègent les visiteurs du soleil chaud, tout en offrant des endroits pour s'asseoir et profiter de la vue. Ces terrasses ombragées créent des espaces pour les plantes et les bassins d'eau qui rafraîchissent les vérandas et créent un tampon climatique pour les intérieurs.

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III-Le gratte-ciel Energy Mansion de Shenzhen BIG

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Le projet des tours énergétiques de Shenzhen a été conçu pour être efficace sur le plan énergétique et intégré dans le contexte contemporain de la ville de Shenzhen. Le défi était de réguler le climat intérieur malgré les façades en verre du bâtiment. La réponse a été une façade ondulée comme la structure d'une feuille de palmier ou d'une robe plissée. (fig. 61)

Figure 62 : Tissu plissé et feuille de palmier Source : www.google.com

En suivant cette logique, il a été possible d'étirer la façade dans certaines conditions clés telles que la création d'ouvertures plus grandes pour le hall d'entrée ou les grandes salles de réunion aux étages supérieurs en suivant la règle suivante : tout ce qui fait face au soleil est aussi fermé que possible, et tout ce qui fait face au nord est ouvert.

Cette stratégie a permis de réduire de 30% l'exposition solaire et les dépenses de climatisation qui en découlent, sans aucune technologie cinétique. Grâce aux avantages inhérents à la géométrie du bâtiment, celui-ci est plus performant en termes de consommation d'énergie, d'empreinte carbone et de qualité de la lumière du jour. (fig. 63 )

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Figure 63 : Tours de Shenzhen Source : www.dezeen.com

Figure 64 : Détails de Façade

Source : Hot to Cold, BIG

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Partie 4

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I-Analyse du Site

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Situation
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Analyse de l’ensoleillement et du vent

L’outils algorithmique, Lady bug, sert à extraire les données climatologiques d’un site afin d’orienter l’approche de la conception et l’acquisition des variables nécessaire pour la conception algorithmique.

Apres usage de cet outil, nous avons obtenu les diagrammes suivants. Les données ressortis ont démontré que le climat est tempéré. Trois états caractérisent le climat de ce site : période chaude, confortable et froide. Primo, la période chaude est marquée d’une part par une exposition direct forte au soleil de 1074 heures et d’autre part au besoin d’ombrage et la ventilation naturelle. Secundo, une période confortable durant laquelle l’ombrage est préférable. Enfin, une période froide qui ne nécessite pas le recours à l’ombrage.

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II-Projet

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Conclusion

La nature de l'homme est d'aimer les objets et de courir constamment après l'argent. Cette attitude a façonné la vie moderne, l'économie et la politique, car presque toutes les activités humaines sont motivées par le profit. Comme chaque domaine, l'architecture a été largement influencée par cet état d'esprit. Contrairement aux temps anciens, l'architecture contemporaine et moderne se concentre sur la mise en valeur de la technologie de construction et l'atteinte de plus hauts sommets, reflétant ainsi une image de puissance ou satisfaisant certaines tendances esthétiques qui ne correspondent pas à la véritable nature de l'homme.

Après plusieurs études et recherches menées par des psychologues, les résultats ont montré que le sens esthétique humain est attiré par les formes et les couleurs naturelles. En outre, la santé mentale et les performances des occupants d'un espace sont considérablement améliorées par la présence de plantes et de palettes de couleurs naturelles. Cela peut s'expliquer par la tendance naturelle de l'homme à s'associer à la nature. En outre, la survie des êtres humains dans la nature dépend de leur capacité à repérer rapidement les dangers ou les opportunités. Cela a conduit au développement instinctif de telles associations de couleurs et de formes. C'est ce qu'on appelle la biophilie. L'architecture peut en tirer profit en mettant en œuvre certaines stratégies qui permettent de concevoir un espace adapté à la nature humaine.

La mise en œuvre de formes naturelles dans l'architecture contribue également à la conception d'un espace adapté à la nature humaine. La philosophie de conception biomorphique consiste à utiliser l'ordre naturel et les géométries comme moyen d'établir une harmonie esthétique ou une expression architecturale. Elle a été employée instinctivement et délibérément dans l'architecture et l'art à travers l'histoire. Malgré la nature fonctionnaliste de l'architecture contemporaine, les maîtres architectes de l'époque utilisaient des principes naturels dans leurs conceptions, tels que le nombre d'or, les lignes régulatrices...

Les architectes contemporains n'utilisent pas les formes naturelles avec autant de ferveur qu'auparavant. Certains d'entre eux s'intéressent

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toutefois davantage à l'aspect structurel des formes naturelles, comme Santiago Calatrava. La recherche de solutions fonctionnelles et structurelles dans la nature, appelée biomimétisme, peut-être d'une grande utilité pour l'architecture étant donné la riche expérience des systèmes naturels depuis des milliards d'années, et permettrait de construire en utilisant une partie des matériaux utilisés dans la structure traditionnelle avec une esthétique naturelle comme résultat indirect.

La révolution des outils algorithmiques a changé le processus de conception, ce qui peut conduire soit à une conception aliénante, soit à une conception respectueuse de la nature humaine. Ceci est dû à son potentiel de simulation des algorithmes génétiques que l'on trouve dans la nature et qui donnent des dimensions précises aux matériaux pour des structures et des orientations optimisées.

La phase du projet était une expérimentation de la théorie accumulée sur le biodesign, ainsi que des possibilités offertes par les outils algorithmiques. Après avoir effectué une analyse du site à l'aide de l'outil Ladybug, des données ont été recueillies sur la course du soleil et la direction du vent, ainsi que les coordonnées des plantes existantes. Le résultat a été un projet qui n'a causé aucun dommage à son site et a offert une structure et une orientation optimisées à ses habitants.

À la lumière de ce qui a été mentionné précédemment, le biodesign peut être une bonne réponse aux besoins contemporains de l'architecture. Cependant, il est plus puissant avec l'aide d'outils paramétriques. Contrairement à la croyance populaire, il ne limite pas la créativité en architecture. Au contraire, il l'amplifie en fournissant un ensemble d'outils et de principes qui peuvent assurer le bien-être des occupants ainsi que l'harmonie géométrique de l'ensemble.

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Table des Matières

Partie 1 Prologue 11

Introduction 13

Etat de la question : 13

Problématique : 14 Méthodologie de Travail 14

Partie 2 17

I-Biophilie 19

1- La nature de l’homme et Biophilie 20

2-Les Principes du Design Biophilique 25

2.1-L'accent sur un impact positif 25

2.2-La conception comme un système écologique interdépendant 25 2.3-L'immersion dans les caractéristiques naturelles 25

2.4-Le large éventail de mise en œuvre des valeurs Biophilique 26 2.5-Lien émotionnel avec le lieu 26 2.6-Créer un sentiment de communauté entre les personnes et leur environnement 26

2.7-Le design Biophilique se manifeste dans une multitude de contextes. 26 2.8-Expérience authentique de la nature 27

2.9-Améliorer la relation de l'homme avec la nature 27

3-La Pratique du Design Biophilique 28

3.1 Expérience directe de la nature : 29 3.2 L'expérience indirecte de la nature 37 3.3 Expérience de l'espace et du lieu 40

II-BIOMORPHISME 45

1-Organicisme : L’origine du Biomorphisme 46

2-La Nature comme source de formes 48

3-Principes de géométrie dans la nature pour la conception 51

3.1 Rapport d'or 51 3.2 Proportions du rectangle dynamique 54 3.3 Proportions de l'architecture 55 3.4 Les sections d'or en architecture. 58

III-Biomimétisme 62

1-Qu'est-ce que le biomimétisme ? 63

2-La recherche de l'intersection entre l'architecture et la nature 65

3-Optimisation des structures par Biomimétisme 67

4-Méthodes de Biomimétisme 71

5-Structures de biomimétisme 73

5.1 Structures Arborescente : 73

5.2 Transformations des surfaces planes : 76 5.3 Structures tissées, attachées et réciproques 82 5.4 Squelettes 84

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IV-Approche algorithmique de La Conception 89

1-Les algorithmes dans la conception 90

2-System Thinking 92

3-Intégration du design Algorithmique en Architecture 94

3.1 Algorithmes de recherche 95

3.2Algorithmes génétiques 96

3.3 Modélisation des systèmes 97

Partie 3 99

I-Pavillon de Recherche 2013-2014 101

II-Terrasses de Shenzhen 106

III-Le gratte-ciel Energy Mansion de Shenzhen 110

Partie 4 By the River Bioliving 115

I-Analyse du Site 118 Situation et Accessibilité 119 Repères 121 Visite du Site 124 Analyse de l’ensoleillement et du vent 125

II-Projet 128 Vision 129

Démarche Conceptuelle 132

Démarche Algorithmique 133 Plans 135 Storyboard 147

Conclusion 149

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PLANCHES

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