Discours radiodiffusé prononcé par M° Moktar Ould Daddah, président du Conseil de Gouvernement de la Mauritanie le 1er Octobre 1958 (à la suite du referendum du 28 Septembre 1958)
Par son vote massif, la Nation mauritanienne a, sans équivoque possible, manifesté le 28 Septembre son désir de construire son avenir avec l’aide de la France. Nous avons voté oui parce que la Constitution proposée par le Général de Gaulle comporte d’une part des options dont l’une permet à la Mauritanie d’obtenir la gestion complète de ses propres affaires et reconnaît par ailleurs au peuple mauritanien son droit imprescriptible et sacré à l’indépendance. En votant oui, nous avons donc opté pour la Communauté des Peuples libres, au sein de laquelle nous jouirons d’ici quatre mois d’une totale autonomie interne dont nous entendons assumer tous les attributs. Il me paraît dès à présent indispensables que les institutions nouvelles soient conçues et mises en place par une Assemblée Territoriale et un Conseil de Gouvernement renouvelés. Je pense que l’actuelle Assemblée Territoriale devra donc, après le vote du budget en Décembre prochain, démissionner pour permettre l’élection d’une nouvelle Assemblée en Janvier. Le Conseil de Gouvernement remettrait sa démission à la réunion de cette Assemblée. Un nouveau Conseil de Gouvernement serait formé qui, avec le concours de l’Assemblée nouvelle opterait pour le statut d’Etat membre de la Communauté et élaborerait la Constitution locale à soumettre au referendum du peuple mauritanien. Ayant ainsi déterminé sa place au sein de la Communauté et grâce à l’aide que celle-ci nous apportera dans tous les domaines pour continuer et amplifier l’aide que la France métropolitaine nous accordait jusqu’à présent, la Mauritanie pourra préparer dans les meilleures conditions l’accession à son indépendance totale. Ce « stage » de quelques années dans la Communauté nous permettra de parfaire notre structure politique et d’asseoir notre économie sur des bases solides. Lorsque ces tâches essentielles auront été menées à bien, nous déciderons de notre indépendance sans pour autant rompre les liens qui nous unissent à la France et aux Etats de la Communauté. Grâce à la Constitution que le peuple mauritanien vient d’approuver à une si large majorité, nous sortirons le moment venu de la Communauté des Peuples libres du Titre XII pour conclure avec elle les accords d’association prévus au Titre suivant. Je suis profondément convaincu que la France et la Communauté parfaitement conscientes des impératifs géographiques, historiques et ethniques de la Mauritanie l’aideront sans réserve à préparer cette indépendance qui nous permettra, entre l’Afrique méditerranéenne et l’Afrique noire, d’affirmer notre personnalité et de devenir cette « Suisse africaine » que nous appelons de tous nos vœux.
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