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Chronique d'un jardinier composteur à l'Ile de La Réunion

Nourrir son sol pour fertiliser ses plantes grâce à des apports réguliers de matières organiques !

Un sol vivant est capable de recycler de grandes quantités de matières organiques. En milieu tropical, la chaleur et l’humidité accélèrent les processus de décomposition, rendant les éléments organiques plus rapidement

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disponibles et assimilables par les plantes. Il est donc simple de se passer d’engrais de synthèse si l’on respecte quelques règles élémentaires pour valoriser ses « déchets organiques » ou « biodéchets » !

Les biodéchets, une ressource précieuse !

Les biodéchets englobent tous les déchets d’origine organique. Il s’agit aussi bien des déchets verts provenant du jardin que des déchets alimentaires issus de la cuisine. Nous vivons aujourd’hui dans une drôle de société où nous croulons sous les déchets que nous envoyons chaque semaine dans l’un des 2 centres d’enfouissement de l’île. Or, 38 % de nos poubelles sont aujourd’hui constituées des restes venant de

nos cuisines, auxquels s’ajoutent les déchets végétaux des jardins. Dans le même temps, la majorité des jardiniers consomment et achètent en jardinerie de quoi faire pousser leurs légumes et plantes d’ornement : engrais de synthèse, lisiers et fumiers en granulés, compost industriel, vermicompost ensaché, copeaux de toutes sortes en paillis et autres terreaux composés d’éléments provenant des 4 coins du monde.

Pourquoi ne pas utiliser nos propres biodéchets qui pourraient aisément fertiliser nos sols plutôt que de les entasser en décharge ?

À La Réunion, chaque année, nous envoyons donc à l’enfouissement près de 130 000 tonnes de déchets alimentaires. Face à tout ce gaspillage de ressources et pour permettre le recyclage de cette ressource organique, l’Europe a décidé d’imposer et de généraliser, dès le 31 décembre 2023, l’obligation de tri et de valorisation des biodéchets.

Le compost, une transformation aérobie de la matière organique

Le compostage est un processus de transformation de la matière organique en présence d’eau et d’oxygène par le biais de micro-organismes. Ce sont donc les bactéries, les champignons et autres petits animaux de la vie du sol qui transforment nos restes alimentaires et déchets de jardins en un humus riche, capable de fertiliser nos plantes de jardin ! Pour arriver à ce résultat, rien de compliqué. Nul besoin de grands diplômes ou de machines coûteuses, bourrées de technologies. Il faut cependant respecter certaines règles et avoir un peu de bon sens :

Couper ses déchets en petits morceaux, diversifier les apports, toujours ajouter suffisamment de matière sèche (broyat de bois) et arroser copieusement sont ici quelques principes de base enseignés dans la cadre des formations « compostage » proposées par l’ADEME et les différentes intercommunales de l’île pour produire un compost de qualité à réutiliser au jardin !

La mise en décharge, une décomposition anaérobie de la matière organique

La mise en décharge des déchets organiques est considérée par l’Europe comme la pire des solutions. En effet, il faut comprendre que l’entassement et le compactage des déchets organiques à l’enfouissement entraîne une absence d’oxygène. Ce sont donc de nouvelles bactéries, dites anaérobies, qui entrent en jeu pour décomposer la matière organique. Cela génère une production importante de méthane, un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le CO2 en potentiel de réchauffement global.

Au jardin comme dans la nature, rien ne se jette, tout se transforme !

Limiter ses déchets organiques, composter ses biodéchets et recycler ses déchets verts au jardin sont donc des petits gestes du quotidien qui permettent d’éviter la collecte, le transport et la mise en décharge des biodéchets. De plus, ils contribuent au cycle naturel de la matière organique, favorisant un retour à la terre et nourrissant le sol qui pourra à son tout nourrir les plantes du jardin.

Biodéchet (définition)

« Tout déchet non dangereux biodégradable de jardin ou de parc, tout déchet non dangereux alimentaire ou de cuisine issu notamment des ménages, des restaurants, des traiteurs ou des magasins de vente au détail, ainsi que tout déchet comparable provenant des établissements de production ou de transformation de denrées alimentaires. »

L’article R.541-8 du Code de l’environnement

LAURENT DENNEMONT

Maître-composteur [angraecum.re]

Passionné du vivant, il est le co-fondateur de la première microferme urbaine pédagogique de La Réunion avec Luca PICCIN et y propose des formations à l’agroécologie et au jardinage naturel. Président du « Réseau Compost Citoyen La Réunion », il développe et offre des solutions de gestion de proximité des biodéchets en vue d’un retour à la terre. Initiateur du centre de formation « Les Tisserands », il travaille sur les domaines de la lutte contre le gaspillage alimentaire, l’agriculture urbaine, l’alimentation durable, l’économie circulaire, la transition écologique et la bioéconomie.