Zoo numéro 65

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zoom mangas

Grace à un joli prétexte romanticoétudiant, nous effectuons un retour au bercail délicat aux côtés de Xia Zhixun, jeune Taiwanais qui va devoir mettre en regard sa vie à la capitale et ses souvenirs champêtres de jeunesse. La force de ce diptyque réside dans une discrète maturité matinée de pics dÊhumour plus classiques qui devraient rendre ce récit introspectif accessible à des lecteurs plus souvent concentrés sur des histoires davantage typées adolescentes. Entre malaises familiaux et découverte du folklore rural local, Retour aux sources distille une ambiance estivale bucolique au goût doux-amer de nostalgie et de folles festivités.

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À L’ÉCOUTE DE SON PLAISIR Vous souvenez-vous de cette scène dans Intouchables, où le personnage campé par François Cluzet se fait masser les lobes d’oreille ? C’est un plaisir très similaire qui est exploré dans Mimikaki – L’étrange volupté auriculaire, qui sort le 7 juin, au Lézard Noir. YAMAMOTO MIMIKAKI TEN by Yaro ABE © 2010 Yaro ABE All rights reserved.

Retour aux sources,T.1, de Zuo Hsuan

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Kana, 212 p. couleurs, 12,70 € ALEX MÉTAIS

Drop Frame,T.1et 2, de Nariie Schinichiro Les bouleversements temporels sont légion dans les fluvres de fiction, mais celui-ci semble plus tenir de la déconstruction psychologique. La désagrégation temporelle se lie alors étrangement à la confusion mentale pour un récit qui assume vite son éclatement tout en prenant un malin plaisir à perdre son lecteur dans des méandres savamment dispersés. La série débute gentiment comme un classique récit dÊété, shôjo neutre à progression amoureuse classique. Ne vous laissez pas tromper. LÊéditeur ne cesse de répéter quÊil faut lire le second volume dans la foulée et force est de constater quÊil a raison. 20/20 pour le changement surprenant de prisme narratif.

Doki-Doki, 200 p. n&b, 7,50 € ALEX MÉTAIS

Blue, de Kiriko Nananan Dans un lycée japonais, la dernière année avant la fac, deux jeunes filles se rapprochent et vivent une histoire hors normes. Amour, amitié, homosexualité, avenir⁄ Blue aborde tous ces sujets avec finesse et subtilité, mettant aussi le doigt sur les attentes et les désillusions de la jeunesse japonaise. Paru initialement en 1996 dans le magazine Comic Are puis en album, Blue revient dans son sens de lecture original chez Casterman Écritures. Une nouvelle occasion de découvrir ce titre tout en langueur de cette dessinatrice surdouée. Casterman, coll. Écritures, 240 p. n&b, 13,75 € HÉL˚NE BENEY

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ans un trou de souris de la ville de Nakamichi, madame Yamamoto, une femme un peu lunaire, tient un salon de mimikaki. Le mimikaki est le nom donné aux cureoreilles traditionnels japonais. Pour 800 yens, hommes, femmes, jeunes et vieux peuvent se faire nettoyer les oreilles de façon experte. Nous suivons des extraits de vie de neuf quidams qui ont pour seul point commun dÊêtre clients du salon Yamamoto. En neuf saynètes, ces visiteurs vont trouver un peu de réconfort et parfois même des solutions aux tracas qui les animent, tout en se faisant désensabler les portugaises. Ce sont autant de fenêtres sur le quotidien japonais.

COMPLEXE D’ŒDIPE Car au Japon, le mimikaki est associé à lÊenfance. Bien souvent, cÊest la mère qui cure les oreilles de sa progéniture : les enfants, la tête posée sur ses genoux, se délectent de ce petit plaisir familial. Quelques décennies plus tard, les salons de mimikaki permettent aux adultes de revivre ces moments intimes, qui peuvent même se transformer en

plaisir érotique. Mimikaki réunit les premiers essais de Yaro Abe dans le monde du manga. ¤ lÊinstar de sa série phare La Cantine de minuit (éditée également au Lézard Noir), lÊauteur sÊamuse à explorer le quotidien japonais à travers des expériences personnelles. Car la nourriture comme le curage dÊoreilles appellent au mémoriel. Dans Mimikaki, ces petites oasis de plaisir vont provoquer un émoi sexuel, permettre de revivre un premier amour, ou encore provoquer une épiphanie religieuse. Les clients du salon ne se confient pas à madame Yamamoto ; elle nÊest quÊun catalyseur, permettant de réveiller les émotions. Pour accompagner ces récits contemplatifs, Abe utilise un dessin assez arrondi, plutôt tendre. Les visages des personnages, pourtant tout en économie de traits, sont très expressifs. Surtout, pour chaque client, les sensations du mimikaki sont représentées comme un papillon butinant lÊoreille, un courant dÊair traversant la tête ou réseau de filaments caressant le cerveau. Mimikaki – LÊétrange volupté auriculaire sÊadresse dÊabord à un lectorat souhai-

tant rentrer un peu plus dans lÊintimité du Japon du quotidien. Cependant, son dessin accessible et son propos simple conviendra à tout amateur de bande dessinée en général. THOMAS HAJDUKOWICZ

MIMIKAMI LÊÉTRANGE VOLUPTÉ AURICULAIRE

de Yaro Abe, Le Lézard Noir, 200 p. n&b, 13 €


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