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critiques bédé THOREAU*** Henry David Thoreau (prononcer « soro ») est un précurseur des hippies, à la veille de la guerre de sécession des Etats-Unis. Injustement méconnu au profit de moralistes parfois tout à fait creux. L’esclavagisme fonde le dégoût de la société et de la politique de cet anarchiste qui trouva refuge dans la forêt (mais s’abstînt en raison de son pacifisme de lutter physiquement contre l’esclavage). Comme il n’y a pas d’esclavage sans argent, ni d’argent sans esclavage, celuilà révulsait Thoreau autant que celui-ci, et il l’a exprimé dans de nombreux aphorismes : « Si je n’avais qu’à lever le petit doigt pour posséder toutes les richesses du monde, je trouverais encore que c’est trop cher payé. » Thoreau considère l’argent comme la peste ou le choléra, un agent infectieux qui finit nécessairement par avoir raison du corps social.

GUERRE ET SPRAY*** D’emblée l’éditeur de « Guerre et Spray » tient à nous avertir qu’il ne souscrit pas à cette opinion du graffeur Banksy : « Le copyright, c’est pour les losers ». De fait le titre du bouquin est très con (le « spray » fait penser plutôt au déodorant), et ne rend pas bien compte de l’humour de Banksy, meilleur que le simple calembour à la manière du « Canard enchaîné ». En effet, l’artiste de rue britannique incite ses contemporains les plus jeunes à délaisser les arts estampillés destinés aux musées, galeries ou collections, et la justification de ce recueil de photos des pochoirs de Banksy –c’est sa spécialité -, est que les graffitis de Banksy, en général, sont très rapidement effacés par les services de la voirie (peut-être Banksy sera-t-il un jour assez riche pour graisser la patte des employés municipaux, souvent des immigrés sous-payés pour nettoyer au kärcher les murs des beaux quartiers, tandis que les toutous à leurs mémères peuvent se soulager partout en toute impunité.)

(Un autre anarchiste, Marx, aurait répliqué qu’il n’y a rien de plus naturel que l’argent, ou bien encore que la violence est dans la nature, à l’état pur ; où Thoreau voit une solution ou bien une parade à la corruption sociale (dans la nature vierge), Marx voit plutôt la cause du problème. Pas facile d’adapter en bande-dessinée la vie d’un tel type, qui a fait l’effort toute sa vie pour penser autrement, au lieu de chercher à conquérir quelque partie du monde. La biographie de M. Leroy et A. Dan fait penser à ces vies de saints catholiques illustrées ou en BD, produites en grand nombre dans les années 50-60, dans le but d’édifier la jeunesse, genre auquel le Belge Jijé prêta son savoir-faire, lui évitant de rester entièrement au niveau de l’imagerie d’Epinal ou « sulpicienne ». Saint laïc, Thoreau ? La BD nous apprend qu’il n’était pas tant fâché avec dieu qu’avec la façon dont les hommes en parlent, au point d’en faire souvent une arme de destruction massive… comme l’argent. Maximilien Leroy n’a sans doute pas le talent de Jijé, et il est trop jeune pour ça, mais l’absence de virtuosité s’accorde bien avec le sujet choisi, puisque Thoreau est tout sauf élégant.◊ « Thoreau » ou « La Vie sublime », par A. Dan et M. Leroy, 2012, éd. Le Lombard, 20 euros.

ainsi Banksy, d’une manière paradoxale car son essentiellement conceptuel, et son dessin presque graphique. Il joue plutôt sur le trompe-l’oeil pour l’attention des passants sur un message largement d’Orwell, mieux que les calligraphes ne le font.

art est photocapter inspiré

Je ne crois pas que Banksy ait beaucoup travaillé sur le patrimoine immobilier français. Personnellement je le lui déconseille : non pas que les policiers français soient particulièrement méchants, mais en revanche il y en a à tous les coins de rue, et il est difficile d’échapper à leur vigilance.◊

« Guerre et Spray », par Banksy, éd. Alternatives : à ne pas acheter, mais feuilleter plutôt dans les lieux de culture payante ou gratuite. Il semble que Banksy a renoncé à ses droits d’auteur par amour de l’art.

D’ailleurs le bouquin, énième réédition et succès de librairie, nous renseigne sur le but de Banksy, qui n’est pas purement décoratif (on dit parfois que les villes les plus laides du monde sont aussi les plus recouvertes de graffitis), ni d’auto-affirmation d’un ego frustré, mais je dirais plutôt un détournement des signes distinctifs du totalitarisme (mur entre Israël et les Palestiniens, qu’il lui est reproché par certain d’enjoliver, zoos, panneaux d’interdiction, etc.) « Tous les artistes sont prêts à souffrir pour leur art, mais combien sont prêts à apprendre à dessiner ? », énonce

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Michel Tamer


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Louise Asherson

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Ungerer, Ogre ou Petit Poucet ? par Zombi

A propos de Gus Bofa, j’indiquais dans une précédente chronique (Zébra n°3) que la renommée de cet illustrateur est inversement proportionnelle à son ambition d’élever l’illustration au rang de l’art : au soir de sa vie, Bofa qui s’était efforcé de faire de l’illustration un art majeur, était déjà oublié. Sur ce point, au moins, Tomi Ungerer se démarque de son prédécesseur, puisque son œuvre a été couronné de tous les honneurs possibles : médaille de ci, médaille de ça, musée dédié à Strasbourg, et tutti quanti. Cette différence mise à part, les deux artistes ont en commun de repousser les frontières traditionnelles de l’illustration. L’ENFANCE DE L’ART A l’instar du Britannique Quentin Blake, le renom de l’Alsacien Jean-Thomas Ungerer (dit « Tomi », né en 1931) est international. Et, si ce nom ne vous dit rien, tâchez de vous souvenir de ces trois brigands portant des chapeaux noirs et se détachant sur la nuit bleue : quel gamin n’a pas eu entre les mains cet album, maintes fois réédité ? Ungerer n’est pas connu seulement pour ses contes pour enfants, mais aussi pour ses publications érotiques, en même temps que macabres et pleines de sarcasme, suivant une tradition germanique qui remonte au moins à Baldung-le-Vert et s’est poursuivie jusqu’à Félicien Rops, Otto Dix, Georges Grosz. Dans « Fornicon », l’illustrateur s’amuse notamment à souligner le lien entre la technologie et la sexualité.

sif des adultes, qui tirent parfois à balles réelles et ne se contentent pas de faire semblant. D’ailleurs, érotisme compris, toute l’impulsion de cet artiste part de l’enfance, la sienne, qui fut malheureuse ; cela contribua selon lui à le rendre meilleur, plus compréhensif. En effet Tomi perdit son père très tôt, à cause d’un accident, puis fut délaissé par Caricature sa mère, avant de Ungerer en brigand de connaître la par Z. guerre et l’Occupation nazie dans une zone frontalière où les combats furent particulièrement vifs. Sous ses larges épaules d’ogre, Ungerer abrite donc un enfant. LES TROMPETTES DE LA RENOMMEE

Encore faut-il dire que Tomi n’est pas le type du pédagogue habituel, puisqu’il prône la subversion des enfants ; il entend en effet les prévenir contre le vice exces-

Or le succès ou les honneurs ne semblent guère changer la donne, puisque l’appétit d’Ungerer, malgré ses quatre-vingt printemps, n’a pas faibli pour autant. Son imagination ne le laisse pas en repos, et il continue de travailler huit heures par jour, loin de s’endormir sur ses lauriers. D’une certaine façon, on peut dire que c’est l’imagination de l’artiste qui ôte à la gloire sa séduction. On a vu aussi Picasso, à un âge très avancé, néanmoins l’idolâtrie dont il faisait l’objet, se démener dans tous les sens comme s’il venait d’entamer sa carrière. J’ajoute qu’Ungerer partage avec Picasso le tempérament viril, sur lequel on oublie souvent de dire que l’esprit d’indépendance d’un artiste s’appuiera naturellement, tandis qu’une santé défaillante contraint a contrario à composer. De même, on oublie souvent de dire que si l’esprit d’indépendance était aussi répandu dans l’armée que chez les artistes, le pacifisme ne paraîtrait pas aussi utopique...

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Est-il exagéré de dire que le succès public d’Ungerer est, pour une large part, un malentendu ? Je ne crois pas. Voyez plutôt : - Alsacien honoré dans sa ville natale, Strasbourg, Ungerer va à l’encontre du chauvinisme de l’illustrateur Hansi, auteur des fameuses images montrant une Alsace caricaturale et pleine de joie sous les couleurs françaises retrouvées (« pédophilie folklorique » selon U.). Français ou allemand, le patriotisme revient au même pour Ungerer, qui a subi plusieurs changement de nationalité successifs forcés. - Après avoir choisi d’émigrer aux Etats-Unis, Ungerer y a vécu suffisamment longtemps (quinze ans) pour s’y faire connaître comme affichiste et illustrateur publicitaire de talent. Cet exil new yorkais a beaucoup contribué à sa notoriété. Cependant le pacifisme d’Ungerer, doublé

de quelques provocations misogynes (dans un pays où le

féminisme est quasi une religion d’Etat), ont ensuite joué en sa défaveur, sous l’administration Reagan. - Enfin Ungerer publie des contes pour enfants, sans but pédagogique (les contes anciens n’en avaient pas non plus le plus souvent), à une époque qui ne jure que par la pédagogie.

« C’est dommage, la vie serait bien plus rayonnante si la raison du meilleur était toujours la plus forte. » : le décalage entre le dynamisme de l’imagination et la platitude journalière de la vie est la faille au-dessus de laquelle se tient l’artiste.Z

BIBLIOGRAPHIE (non exhaustive)

POUR FINIR LE PORTRAIT Pour terminer, j’en reviens à ma comparaison avec Gus Bofa, qui m’aide à préciser mon portrait. D’Ungerer, on peut dire qu’il est moins littéraire, moins moderne : il n’a pas, comme son confrère auvergnat, cherché à créer un style reconnaissable entre tous. Mais plutôt, comme dit un critique d’Ungerer, « n’imitant personne, il emprunte à tous ». D’ailleurs si le dessin de Bofa est précurseur de la bande-dessinée, celle de Morris par exemple, qui dessinait à ses débuts à la manière de Bofa, Ungerer est moins rattachable à une époque en particulier, et son trait s’adapte aux différents genres qu’il a pratiqués. Il se dit même gêné par les bulles, et revendique l’illustration. Enfin la guerre et sa blessure ont fait perdre à Bofa son optimisme, à l’âge d’homme, tandis qu’Ungerer s’est dépouillé dès l’enfance de cette cette sorte de sensibilité :

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Les Mellops (-1957) Les Trois brigands (1961) Jean de la Lune (1966) The Party (1966) Le Géant de Zéralda (1967) Fornicon (1969) Die Eifel (avec Willy Brant, 1972)

SUR LA TOILE : • Interview donnée à Actuabd : http://www.actuabd. com/Tomi-Ungerer-Je-dis-toujours-que • Site officiel de Tomi Ungerer (en anglais) : http:// www.tomiungerer.com/ • Site du musée de Strasbourg où plusieurs centaines de croquis et dessins d’Ungerer sont consultables : http://www.musees.strasbourg.eu/index. php?page=musee-tomi-ungerer • Vidéo présentant quelques dessins pacifistes d’Ungerer : http://www.dailymotion.com/video/ xh3fzy_tomi-ungerer-politrics-les-dessins-politiques_ news



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