Magazine Zoo 16

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N°16 nov-déc 2008

Un Ben Hur savamment «Mittonné»

zoom bd *

fantastique laboratoire où il expérimente, à travers une histoire en feuilleton très ésotérique, toutes les formes de narration. Après un douzième épisode entièrement muet, il adopte ici un découpage en gaufrier de 20 cases de taille égale. Andreas joue avec cette cage et le rêve de son héros, allant même jusqu’à faire sortir des personnages de la planche. Avec cet album, l’auteur réalise une nouvelle fois une performance tout à fait fascinante.

© Jean-Yves Mitton / DELCOURT

En novembre, Guy Delcourt accueille au sein de sa maison le prolifique Jean-Yves Mitton, connu notamment pour son travail sur les séries Vae Victis, Les Chroniques barbares ou encore Les Survivants de l’Atlantique. Entretien avec un faiseur d’albums comme on n’en fait plus (assez), à la technique sans faille et au don de narrateur intarissable.

THIERRY LEMAIRE

Ratafia, T.5, Le Nénuphar instantané, de Pothier et Salsedo, MILAN, 48 P. COULEURS,10,50 € Les pirates du vaisseau La Kouklamou sont de retour pour une cinquième aventure. Et cette fois, direction le Japon, pardon, la Nipponie, pour une quête un peu particulière : la recherche du nénuphar instantané, sensé procurer la chance à celui qui le possède. Disons-le tout de go, cet album est à emporter lors de votre prochain voyage au pays du soleil levant. Il passe en revue tous les us et coutumes de l’archipel de manière un peu… décalée. Calembours à tous les étages, clins d’œil aux mangas, aux jeux vidéos, situations ridicules, Nicolas Pothier ose tout et c’est ça qu’est bien.

L

a Rome Antique (Vae Victis), les Vikings (Chroniques Barbares, Les Survivants de l’Atlantique), les Aztèques (Quetzalcóatl)… Le contemporain ne vous inspire pas ? Toutes les époques de l’histoire humaine sont intéressantes à narrer et à illustrer, pour peu que l’intrigue me captive avant de captiver le lecteur. Si vous entendez par «contemporain» l’époque où demeurent encore aujourd’hui des survivants, disons un petit siècle, les temps forts de notre histoire ne manquent pas. Entre batailles, massacres, génocides et Shoah, le genre humain nous offre, hélas, un choix intarissable, et, à moins de se cantonner dans le polar, je crois que le XXe siècle bat tous les records puisqu’il s’est donné les moyens politiques, sociaux et militaires pour la destruction massive. J’ai déjà abordé la Deuxième Guerre mondiale en la

Le Goût du chlore, de Bastien Vivès, CASTERMAN, COLL. KSTR, 144 P. COULEURS, 13,75 € C’est l’histoire d’un jeune homme qui va à la piscine et qui nage. Sur 135 pages. Avec moins de 10 mots par page en moyenne. Dos crawlé, crawl, apnée, … a priori, pas passionnant. Et pourtant : diablement envoûtant, de par les magnifiques couleurs bleu-vert, le trait simple, les non-dits. Regards croisés, occasions manquées… Cet album (dont même la maquette est des plus agréables), sorti en mai dernier et sélectionné au Festival d’Angoulême 2009,

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© Jean-Yves Mitton / DELCOURT

THL

reliant à l’actualité dans Le Dernier Kamikaze pour mon ami Félix Molinari [prévu en 3 tomes chez Soleil]. Mais je dois avouer que je préfère évoquer le passé plus lointain, plus exotique, parce qu’il est enfoui dans notre part de rêve, sans qu’aucun «survivant» ne vienne vous casser l’inspiration. Au fond, la manipulation du passé n’est rien d’autre que de la science-fiction à l’envers, offerte à toute spéculation artistique et intellectuelle. Vous n’avez de compte à rendre à aucun témoin, si ce n’est les historiens. Et croyez-moi, ils vous guettent à chaque sortie d’album ! Le roman intitulé Ben Hur sert de base à votre nouvel album, pas le film. Est-ce une volonté de l’éditeur, ou un choix personnel ? J’avais appris que Delcourt développait une collection nommée histoire dans l’Histoire, basée sur l’adaptation en BD de grands romans historiques dont les droits étaient tombés dans le domaine public. Je savais que c’était le cas de Ben Hur, roman paru en 1880. J‘ai alors pris l’initiative de le proposer à cet éditeur, lequel a tout de suite accepté, sous la condition que le récit soit tiré exclusivement du roman, en oubliant les deux adaptations cinématographiques de 1920 et de 1959. Difficile de faire l’impasse sur ces deux colosses d’Hollywood ! Disons que je leur ai emprunté le visuel, le cinémascope et la grande mise en scène. Mais l’écriture, elle, est inspirée du roman, lequel est beaucoup plus touffu et narratif, d’une pédagogie biblique édifiante dans le style romanesque du XIXe siècle,


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