Fondation Phénix: Rapport d'activités 2013

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Qu’apporte l’approche des neurosciences dans la com­préhension de l’addiction ? – Elles offrent un modèle neurobiologique expliquant la convergence de toutes les substances vers un système clé : le système dopaminergique. Grâce à de nouvelles tech­nologies, ce qui était suggéré depuis les années 1980 est maintenant prouvé. Dans mon laboratoire, nous utilisons la technique de l’optogénétique. Elle consiste à rendre sensibles à la lumière des neurones que l’on a au préala­ble modifiés génétiquement. Du coup, il devient possible d’activer un petit groupe de neurones au moyen d’un laser. Ainsi, nous avons pu manipuler le système cérébral de récompense de façon très sélective, et obtenir les mêmes changements du comportement qu’avec une drogue. C’est une grande avancée. Elle ouvre par ailleurs la porte à la compréhension de toutes les addictions sans subs­tances. De quelle manière ? – Des expériences ont montré que le jeu pathologique est la même maladie que l’addiction aux drogues dures. Ce sont des phénomènes identiques qui créent l’adaptation et modifient le comportement. Les cliniciens nous disent qu’il s’agit d’une banalité, mais prouver cette identité de mécanisme représente une avancée majeure. Comment utilisez ­ vous l’optogénétique pour stimuler spécifiquement les cellules du système de récompense ? – L’optogénétique nécessite un canal ionique – formé par la protéine canal­-rhodopsine 2 ou ChR2 – découvert dans une algue verte, qui change de conformation lors d’une exposition à la lumière bleue. Pour créer ce canal dans les membranes de neurones, nous injectons dans le cer­veau de souris transgéniques, en choisissant la zone du circuit de récompense par stéréotaxie, un virus contenant le gène codant pour ChR2. Le virus infecte toutes les cel­lules du centre, mais l’expression du gène n’est possible que dans les cellules dopaminergiques, car le génome des souris a été modifié pour que seules ces cellules puissent exprimer un élément nécessaire à la synthèse de la pro­téine ChR2. Avec un laser, nous pouvons donc spécifique­ment stimuler ces cellules et obtenir un signal cérébral proche de la réalité. La même expérience peut être repro­duite avec les cellules gabaergiques. C’est la grande force de

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