SOCIÉTÉ CIVILE ET SOCIAL BUSINESS: les incidences pour le développement durable en Côte d'Ivoire

Page 1


U.F.R. LANGUES, LITTERATURES ET CIVILISATIONS CHAIRE UNESCO pour la culture de la paix

LE SOCIAL BUSINESS ET LA SOCIETE CIVILE :

Les incidences pour le développement durable en Côte d’ivoire Mémoire de Master en Développement Durable et Action Humanitaire Option : Développement durable

Présentée par:

Sous la direction de :

TRAORE Drissa

NASSA Dabié Désiré Axel Maître de Conférence -IGT

Soutenue publiquement le ………………………….


A mes deux mères, L’une pour m’avoir mis au monde Et m’avoir supporté durant mon enfance Et aujourd’hui encore, Et l’autre, pour m’avoir montré Le chemin pendant mes années d’adolescence, Époque de caprices et d’illusions.


Nous adressons nos premiers remerciements au Professeur LEZOU Dago Gérard, Titulaire de la Chaire UNESCO pour la culture de la paix. Nous adressons nos sincères remerciements également, à Monsieur NASSA Dabié Désiré Axel, Maitre de conférences, qui a bien voulu accepter de nous encadrer pour la réalisation de ce travail. Dr MALANHOUA Kouassi, Enseignant-Chercheur, Directeur Administratif de la Chaire Unesco, Université Félix HOUPHOUËT BOIGNY, ainsi qu’à tous les Enseignants et encadreurs de ladite Chaire pour la formation et l’encadrement de qualité dont nous avons bénéficié de leur part. Notre gratitude va également, à l’endroit de nos condisciples pour nous avoir supporté durant une année. Enfin, nous remercions du fond du cœur tous ceux qui de près ou de loin ont contribué de quelque manière que ce soit à la réalisation du présent document.


LISTE DES ABREVIATIONS

AGR : Activités Génératrices de Revenus BSDC : Business Sustainable Development Commission CNSCI : Commission Nationale de la Société Civile Ivoirienne DD : Développement Durable GAJA : Groupement Agropastoral des Jeunes Actifs MUSA : Mutuelle Solidarité AKEKENESSE MESAD : Mouvement pour l’Éducation, la Santé et le Développement OBNL : Organisations à But Non Lucratif ODD : Objectifs du Développement Durable ONG : Organisation Non Gouvernementale ONU : Organisation des Nations Unies OSC : Organisation de la Société Civile PAIPS : Programme d’Appui à l’Insertion Sociale et Professionnelle PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement RIESS : Réseau Ivoirien de l’Entrepreneuriat Social et Solidaire


LISTE DES FIGURES

Figure 1.1 : Le modèle d’affaire d’un SB selon le modèle de l’Osterwalder et Pigneur (2004) .................................................................................................................................. 37 Figure 1. 2: comparaison entre OSC et SB.......................................................................... 39 Figure 2.1 : Freins à l’utilisation des médias sociaux par les OSC ivoiriennes (source Institut Panos-Afrique de l’ouest)........................................................................................ 46 Figure 2.2 : Ressources ayant en charge la gestion de la présence des OSC sur les médias sociaux ................................................................................................................................. 49 Figure 2.3 : La rentabilité et les opportunités du Développement Durable ........................ 57 Figure 2.4 : le développement durable, une aubaine pour les pays en développement. ...... 62


SOMMAIRE

LISTE DES ABREVIATIONS ........................................................................................... 5 SOMMAIRE ........................................................................................................................ 7 INTRODUCTION ............................................................................................................... 8 PREMIERE PARTIE : CADRE DE REFERENCE ET THEORIQUE DE L’ETUDE ............................................................................................................................................. 11 CHAPITRE 1 : DEFINITION DES TERMES ET JUSTIFICATION DU SUJET ............ 12 CHAPITRE 2 : LA PROBLEMATIQUE ........................................................................... 18 CHAPITRE 3 : CADRE THEORIQUE .............................................................................. 20 2ème PARTIE : PRESENTATION ET DISCUSSION DES RESULTATS DE L’ETUDE ........................................................................................................................... 43 CHAPITRE 1 : LA SITUATION ACTUELLE DES OSC LIEE AUX ENJEUX ORGANISATIONNELS ET ECONOMIQUES ................................................................. 44 CHAPITRE 2 : LE DEVELOPPEMENT DURABLE, FACTEUR DE CONCILIATION DU SOCIAL BUSINESS ET DE LA SOCIETE CIVILE .................................................. 53 CONCLUSION .................................................................................................................. 63 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................ 65 ANNEXES .......................................................................................................................... 73 TABLE DES MATIÈRES ................................................................................................ 80


INTRODUCTION

L’Afrique est au cœur de tous les débats, de toutes les histoires tragiques. Les fléaux font la loi et l’actualité à l’affiche actuellement est l’immigration, la Libye et Lampedusa. On ne peut traiter de l’Afrique, en oubliant les épidémies et les pandémies. Le nombres de morts, le niveau de vie désastreux est le lot quotidien des populations. L’Afrique est donc un continent où les trois parques de Malthus 1, c’est à dire les guerres, les épidémies et les famines règnent en maître absolu. De ce fait, l’économie africaine est peu rentable et les pays africains sont tous endettés et les chiffres sont alarmants 2 : 15% de la population mondiale pour 1,5% du produit intérieur brut mondial et 3% du commerce mondiale et des investissements directs étrangers (IDE)de la planète. Pourtant, le continent paye un lourd tribut dans le développement économique mondiale à cause de l’exploitation massive de son milieu naturel, la destruction des écosystèmes des pays développés. Les conséquences de ces actions sont la prolifération des gaz à effet de serre, le réchauffement climatique, la destruction de la couche d’ozone et de la biodiversité. Cela a conduit à une prise de conscience mondiale. Ainsi, il fut question de rechercher des alternatives afin d’éviter la catastrophe : la destruction de la terre. Alors depuis 1987 3, le concept de développement durable entre en scène et il est au centre de toutes les politiques de développement. Cette nouvelle dynamique ne fait pas l’économie d’une réflexion sur les conflits de valeurs entre les groupes sociaux, qui participent ou qui sont exclus de sa mise en œuvre. Ce conflit se résume en la conception que chaque groupe a du

1

HUGAN Philippe, L’Afrique. Défis, enjeux et perspectives en 40 fiches pour comprendre l’actualité, Paris, Eyrolles, coll. « Eyrolles Pratiques », 2017, p.15 2 Idem., p.31 3 Le Rapport Brundtland a été publié en 1987 par la Commission mondiale pour l'Environnement et le Développement (CMED) mise en place par l'ONU dès 1983,

8


développement durable. Malgré cette incompréhension, le développement durable a trouvé dans les pays développés une traduction dans les programmes d’actions, des politiques publiques, des politiques locales et des stratégies d’entreprises. Tout cela est soutenu par un encadrement légal et juridique. Quant aux pays africains, ils peinent encore à s’en imprégner. Pourtant, les africains doivent trouver leur propre voie afin d’intégrer les valeurs du développement durable dans leurs actions. Ce qui complique le plus cette situation, c’est la multiplication des crises sociales et économiques. Nous assistons au ralentissement de la croissante et à la montée du chômage dans les pays africains. A partir des années 1990, on assiste à la montée des interrogations sur les valeurs et les principes qui fondent l’activité économique et l’organisation sociale. Celles-ci se manifestent, notamment, par le biais d’inquiétudes écologiques, par la méfiance du tout technologique, des manipulations génétiques, ou encore par le souci du respect des droits de l’homme. La place prise par la société civile et le social business montre que des institutions et des pratiques innovantes peuvent apporter des réponses à ces questions. La Côte d’ivoire, comme tous les pays du continent, n’a pas été épargné. La paupérisation des masses et le déficit d’emploi plongent le pays dans une période d’incertitude. Pourtant, cette situation préoccupe l’Etat tant bien que mal. Cela se perçoit dans tous les programmes nationaux de développement mis en place depuis la fin de la crise. La lutte contre la pauvreté est au centre de toutes ces politiques. Malgré tous ces efforts, l’Etat ivoirien peine à trouver les solutions adéquates. Face à toutes ces difficultés, l’Etat doit favoriser des voies alternatives afin de restaurer la confiance. En réalité, la situation en Côte d’ivoire révèle la crise de la régulation politique et économique qui l’a dominé de l’indépendance à nos jours. Ce qui laisse entrevoir l’épuisement des compromis sociétaux issus de la période postcoloniale. Elle informe aussi de l’ambivalence, qui caractérise la Côte d’ivoire contemporaine où persiste un décalage entre un mode de régulation épuisé mais résistant et l’émergence d’initiatives diverses portées par de nouveaux

types

d’acteurs.

Le

renouvellement

des

politiques

de

développement et des modalités de gestion publique, la refondation de 9


l’économie ou encore la recomposition de l’architecture institutionnelle devient une nécessité. L’enjeu de cette étude réside, donc, dans la reconfiguration des structures et des modalités de régulation politiques et économiques. De ce fait, l’entrepreneuriat social caractérise les dynamiques ou processus certes, qui sont capables de mettre en œuvre des solutions nouvelles appropriées.

Son caractère novateur réside dans sa capacité

d’une part, à améliorer le mieux-être des individus, des communautés, des organisations ou des institutions et d’autre part, à prévoir sinon gérer les incidences négatives subséquentes à cette amélioration. Plus généralement, ce caractère novateur met en évidence la discontinuité que le social business présente par rapport aux pratiques habituelles. Le SB est une alternative économique qui regorge de potentialités. C’est pourquoi, nous nous intéressons au lien, qui existe entre le social business et la société civile et à ses incidences sur le développement durable en Côte d’ivoire. Ainsi, formulerons-nous notre question de départ en ces termes : Comment la relation Social Business et Société civile peut-elle contribuer au développement durable en Côte d’Ivoire ? Cette interrogation nous permettra, d’une part, de vérifier le degré de connaissance des principes du social business par la société civile ivoirienne et d’autre part, de mettre en exergue la contribution de cette relation au développement durable. Nous inscrirons notre travail dans un cadre temporel qui part de l’année 2011 à 2017. Après la mise en place du cadre spatio-temporel, il est nécessaire pour la compréhension de notre travail de procéder à l’exposition du cadre de référence et théorique de cette étude.

10


PREMIERE PARTIE : CADRE DE REFERENCE ET THEORIQUE DE L’ETUDE Cette première partie a pour objet d’exposer le cadre de référence puis théorique de cette analyse. Elle se subdivise en trois (3) chapitres, organisés comme suit : - Le premier chapitre traite de la définition des termes et de la justification du sujet. - Le deuxième s’intéresse à la problématique. Ces deux (2) chapitres constituent le cadre de référence. - Le troisième chapitre met en exergue le cadre théorique. Il expose les objectifs et les hypothèses de l’étude d’une part et d’autre part la revue de littérature.

11


Cette première partie s’intéressera à la définition des termes et à la justification du sujet d’une part, et d’autre part, à la problématique et aux aspects théoriques.

CHAPITRE 1 : DEFINITION DES TERMES ET JUSTIFICATION DU SUJET Pour favoriser la compréhension de notre recherche, nous procéderons à la définition des différents termes du sujet et à sa justification.

1. DEFINITION DES TERMES Il s’agit de clarifier les concepts essentiels à la compréhension du sujet, en l’occurrence : le social business, la société civile, l’incidence et le développement durable. 1.1 LE SOCIAL BUSINESS Ce terme a son fondement dans l’entrepreneuriat, qui est un concept transversal. La créativité, l’initiative, la prise de risque et l’innovation sont au cœur du processus. Le concept de « social business » est une notion jeune. Ses contours sont encore mal définis. La certaine confusion qui règne autour du concept et le caractère relativement nouveau de la recherche dans le domaine justifie aussi l’intérêt que nous portons à ce thème. « Social business », « économie sociale et solidaire », « entrepreneuriat social » et autres « inclusive business » sont des notions proches, qui se superposent, et dont il existe autant de définitions que d’acteurs s’en réclamant. En ce qui concerne le terme de social business, il a été popularisé par Mohammed Yunus 4. Il décrive une entreprise qui se fixe un objectif social (accès aux services essentiels, lutte contre la pauvreté…) et qui ne doit ni faire de pertes ni distribuer de profits (qui sont intégralement réinvestis). Le terme a, depuis, largement échappé à son auteur et il n’existe pas aujourd’hui de définition harmonisée du social business. Pour notre part, les différentes notions représentent toutes la même idée. Pour mieux affirmer la relation entre ces concepts, nous allons mettre en exergue les valeurs communes que ces notions véhiculent. Notre lanterne est l’entrepreneuriat social en général. Cette forme d’entrepreneuriat, qui est au service de l’intérêt général, recouvre l’ensemble des initiatives économiques dont la finalité principale est sociale ou environnementale et qui

4

Mohamed YUNUS, Né au Bangladesh le 28 juin 19, étudie l’économie à l'université de Dhaka au Bangladesh et obtient, en 1961, son Master of Arts (Maitrise d’économie). Yunus a reçu de nombreuses récompenses, dont la plus importante distinction du Bangladesh, « Independence Day Award » et conjointement avec la Banque Grameen, le prix Nobel de la paix, le 13 octobre 2006 pour « leurs efforts pour promouvoir le développement économique et social à partir de la base ». Avec cette reconnaissance internationale, il est devenu l’homme le plus incontournable du Bangladesh.

12


réinvestissent tout ou la majorité de leurs bénéfices au profit de cette mission. 5 Pour aller plus loin et approfondir notre conception de la notion, nous allons confronter cette définition à celle du MOUVES (le mouvement des entrepreneurs sociaux). Il décrit l’entrepreneuriat social comme : Un mouvement de fond mondial qui participe au renouvellement des modèles économiques dominants qui ont montré leurs limites (économie de marché financiarisée ou bien prédominance de l’Etat) en créant une troisième voie émancipatrice à mi-chemin entre ces deux pôles. Il cherche à mettre l’efficacité économique au service de l’intérêt général. »6

Le mouvement présente l’entrepreneuriat comme une alternative au système financier mondial. Au vu de ces définitions, nous nous rendons compte qu’elles toutes tournent autour d’une idée centrale. Cette idée centrale converge vers deux principes communs, un objectif social prioritaire et la recherche de l’autonomie financière. Pour rester large, nous parlerons de projets de social business plutôt que d’entreprises sociales, car de nombreux projets n’ont pas le statut d’entreprise. Le social business se situe donc à l’intersection des logiques de l’entreprise, du marché, du social, du service public, et peut s'appliquer dans presque tous les secteurs (inclusion financière, nutrition et sécurité alimentaire, santé, éducation, logement, eau assainissement, énergie, etc.). Les bénéficiaires directs de la mission sociale peuvent être les clients (pauvres, à qui on offre un accès à bas prix à un bien ou service essentiel), les salariés (en recrutant des personnes en grande difficulté), les fournisseurs (en leur assurant des revenus stables, en aidant à structurer une filière), l’environnement (atténuation, adaptation, préservation), voire des personnes extérieures (ONG, population riveraine…). Le social business doit conjuguer l’efficacité économique et l’utilité sociale. En faisant la synthèse de ces définitions, nous en tirons la définition suivante pour notre étude : Un entrepreneuriat social se définit comme l’ensemble des initiatives qui permettent d’agir pour la justice sociale, de favoriser l’emploi pour tous, d’agir faveur de l’environnement et de modifier les règles de jeu économique.

5

Rapport de mission : « La dynamisation de l’Entrepreneuriat Social en Tunisie », préparé par Beyond Reform §Development, p.5 6 Idem, p.5

13


Donc, nous utiliserons autant le terme Social Business que celui d’entrepreneuriat social dans le cadre de cette étude. Aussi, est-il nécessaire de s’intéresser au terme de société civile. 1.2 LA SOCIETE CIVILE La société civile ne dispose pas de définition officielle. C’est un concept flou et controversé qui a toutefois réussi à se généraliser, faisant ainsi partie intégrante du vocabulaire des politiciens et des acteurs sociaux. Le terme n’est pas nouveau mais son sens a subi une certaine évolution au fil du temps. Elle prend naissance entre le XVI et XXème siècle grâce à l’action des philosophes, notamment à l’un des pères fondateurs du libéralisme anglais, John LOCKE. Il correspond alors « à la société organisée à un niveau supérieur à celui de la famille » 7. Deux siècles plus tard, c’est le philosophe allemand Hegel qui, en 1821, a été le premier à opposer ce terme à la société politique et à l’Etat, comme cela est encore le cas aujourd’hui. Dans les années 1970, le terme subit une renaissance et apparaît dès lors comme un « instrument d’analyse du développement politique des pays du sud »8. Une décennie plus tard, il s’impose véritablement sur la scène internationale. Aussi pour mieux comprendre le concept de société civile dans le cadre de notre étude, nous retiendrons la définition suivante : Les individus et les groupes, organisés ou non, qui agissent de manière concertée dans les domaines social, politique et économique et auxquels s’appliquent des règles et des lois formelles ou informelles. La société civile offre une profusion de perspectives et de valeurs, qui cherchent à s’exprimer publiquement. 9

Quant aux organisations de la société civile, il est défini comme suit : La myriade d’associations autour desquelles la société s’organise volontairement et qui représentent un large éventail d’intérêts et de liens, de l’origine ethnique et religieuse, à la protection de l’environnement ou des droits de l’homme, en passant par des intérêts communs sur le plan de la profession, du développement ou des loisirs. 10

Ce qui est intéressant à retenir dans la première définition est le caractère organisé ou non de la société civile. La société civile peut être organisée sous une forme associative mais peut également ne pas l’être. Ainsi, la société civile englobe dans le cadre de cette étude les associations, les organisations non gouvernementales, les organisations à base

7 PLANCHE Jeanne, Société civile : un acteur historique de la gouvernance, Paris, C.L Mayer, coll. « dossier pour un débat », 2007, p.12 8 Idem, p.13 9 BRODHAG Christian, GONDRAN Natacha, HUSSEINI Renate, BREUIL Florent, Glossaire pour le développement durable, 2001, p. 46(samedi 22 juillet 2017), disponible sur : www.agora21.org/dd/glossairedd.pdf 10 Idem. P.36

14


communautaire. Et quant à la seconde, elle fait ressortir leur rôle qui est essentiel dans la mise en place des politiques de développement à cause de leur proximité et de leur intégration au sein des populations par l’utilisation de méthodes de gestion adaptées et par la prise en charge de grandes causes écologiques, humanitaires ou du développement des pays pauvres grâce au bénévolat et à la charité publique. La société civile qui nous intéresse et celle qui intervient en Côte d’Ivoire qu’elle soit locale, nationale ou internationale. Il serait inconcevable de parler de la société civile et d’ignorer l’incidence de leur action. Nous allons donc clarifier le mot « incidence » pour mieux aborder notre étude. 1.3 INCIDENCE L’incidence n’est rien d’autre que l’impact. Selon le dictionnaire de management de projet « l’impact est un effet à long terme positif ou négatif, primaire ou secondaire, induit par un projet, directement ou non, intentionnellement ou non. »11 Elle représente le résultat final d’une action en termes de durabilité. Aujourd’hui, l’accent est mis sur l’amélioration continue à l’échelle des projets/programmes. La Gestion Axée sur les Résultats est devenue l’approche systématique pour tous les aspects de gestion de projets. Etymologiquement, le mot impact vient du latin impactus 12, c’est à dire heurter ; il signifie aussi l’effet d’une action ; son influence. Par extension de la langue anglaise, il désigne les retentissements (indirects ou non) d’un évènement, d’un processus, d’une activité, d’une infrastructure sur l’environnement, la santé, l’économie. C'est-à-dire les effets de cette action, cette activité. On peut donc retenir qu’un impact est la modification de l’environnement, un changement apporté par la présence d’un élément lié à un projet ou par l’exécution d’une activité du projet sur une ressource ou un récepteur. L’impact peut être négatif ou positif :  Négatif, s’il représente un changement défavorable par rapport à l’état initial ou s’il introduit un facteur indésirable.  Positif, s’il représente une amélioration de l’état initial ou s’il introduit un facteur favorable.

11

AFITEP, Dictionnaire de Management des Projets, Paris, Afnor, 2000, p 131. DUBOIS Jean, MITTERAND Henri, DAUZAT Albert, Dictionnaire Etymologique des mots Larousse, 2007, p 416. 12

15


Après, la clarification de l’incidence, nous nous intéresserons à celle du développement durable. 1.4 DEVELOPPEMENT DURABLE Nous allons nous intéresser à la définition du développement durable du rapport Brundtland de 1987, tout en tenant compte de l’évolution de notre société mais aussi des aspects du développement. Ainsi, le rapport définit-il le développement durable comme étant « un modèle de développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. » 13 Il est donc une tentative de créer un modèle de développement qui intègre à la fois l’économie, le progrès social et la protection de l’environnement. Cet objectif est né de l’idée que la qualité environnementale et le bien-être économique et social sont intimement liés et que, par conséquent, ces trois dimensions ne peuvent être considérées séparément. Le concept de développement durable tente donc de réorienter le développement vers un modèle plus englobant qui crée des liens entre l’économie, la société et l’environnement. Pour Faridah DJELLAL et Faiz GALLOW « la notion de développement durable s’est pour l’essentiel, construite en réaction aux dégâts initialement environnementaux puis également socio-économique associés à une économie industrielle et agricole intensive. » 14Ils affinent leur idée en ajoutant : Le développement durable se préoccupe, d’une certaine manière, de la transformation d’une entité collective (l’humanité), qu’il s’agisse de son support matériel (son milieu physique au niveau local et au niveau global), de son support économique (la manière de concevoir et de créer la richesse) ou de son support social et symbolique (l’équité dans la redistribution des richesses.) 15.

Cette idée contient à elle seule les dix-sept objectifs du développement durable élaborés par la communauté internationale en 2015 et dans notre étude, nous ne tiendrons compte que de cette définition.

13 La commission mondiale sur l’environnement et le développement présente le rapport « Notre avenir à tous » dans lequel elle propose une définition du développement durable qui deviendra la référence. 14 Faridah DJELLAL, Faïz GALLOUJ « Innovation dans les services et entrepreneuriat : au-delà des conceptions industrialistes et technologistes du développement durable », Innovations 2009/1 (n° 29), p. 60 DOI 10.3917/inno.029.0059 http://www.cairn.info/revue-innovations-2009-1-page-59.htm 15 Idem, p.63-64

16


Ayant procédé à la définition des termes clés de notre recherche, nous allons justifier notre choix pour ce sujet et sa pertinence.

2. JUSTIFICATION ET PERTINENCE DU SUJET Cette partie permet de mettre en exergue les raisons et les intérêts qui nous ont poussé au choix d’une telle étude. 2.1 JUSTIFICATION Plusieurs raisons, nous ont amené à porter la réflexion sur ce type de sujet. D’abord, notre démarche nous est suggérée par une insuffisance de travaux sur la question du rapport social business- société civile. On rencontre très peu qui présente l’enjeu de la promotion du social business au sein des organisation de la société civile. De ce point de vue, nous pensons combler un grand fossé. Ensuite, le constat laisse apparaître que la structure actuelle de l’économie ivoirienne ainsi que la sévérité voire l’ampleur de la pauvreté appellent des ruptures profondes pour inscrire la Côte d’ivoire sur la rampe de l’émergence. La crise structurelle du régime de l’accumulation a été accentuée par les années de crises. Aussi, la côte d’ivoire partage- t-elle avec la plupart des pays africains les crises énergétiques, financières et climatiques. Cela démontre l’épuisement du mythe du progrès à la base du modèle de développement des pays industrialisés. Ce modèle, reproduit en Afrique, relève du paradigme du rattrapage qui établit que le développement est positif, continu, unilinéaire et demeure un idéal à atteindre lorsqu’on suit les mêmes étapes que les sociétés occidentales. Ainsi, le sous-développement traduit-il le retard du pays à se hisser aux normes universelles du progrès que cristallise la civilisation occidentale. Réduisant le développement à la croissance économique, ce modèle s’appuie sur l’industrialisation, l’urbanisation et l’économie de marché. Il serait à la base d’un développement productiviste, techniciste, centralisé, extraverti, dépendant et basé sur les agrégats macroéconomiques dont les conséquences désastreuses sur l’environnement humain appellent l’avènement d’un nouveau paradigme plus soucieux de l’homme et son environnement. C’est dans cette optique que nous nous sommes intéressés à l’entrepreneuriat social et à la société civile. En outre, nous avons choisi de camper l’analyse sur les impacts de ce rapport sur le développement durable.

17


Enfin, nous pensons qu’un tel sujet peut servir de déclic au niveau des décideurs afin qu’ils aident à faire de la question du social business, une préoccupation nationale à travers l’édification de politiques claires à l’instar de celles concernant les autres aspects de la vie nationale. Tous ces éléments vont justifier les choix contenus dans cette étude. Notre choix et notre motivation pour cette étude ressortent de notre conviction qu’un autre modèle de développement est possible pour l’Afrique en général et la Côte d’ivoire en particulier. Pour mieux faire comprendre notre motivation pour ce sujet, il convient de présenter la pertinence d’une telle recherche. 2.2 LA PERTINENCE La pertinence d’un tel sujet est tant sociale que scientifique. Car comme le remarque Arnaud MAIRET, co-directeur d’ASHOKA-France : « L’entrepreneuriat social ou sociétal est une formidable opportunité de combiner impact et efficacité économique, d’inventer des modèles hybrides combinant philanthropie, subventions, activités génératrices de revenus à des degrés (en fonction de la maturité du projet, de son secteur d’activité) pour trouver son autonomie et s’inscrire dans la durée. »16 Cette affirmation consacre l’apport d’une telle étude du point de vue social mais elle sous-entend aussi l’apport scientifique en proposant une alternative, une nouvelle façon de voir l’économie.

CHAPITRE 2 : LA PROBLEMATIQUE Pour aborder la problématique, il convient d’en cerner l’essence en nous intéressant au problème. Un problème peut se définir « comme un écart constaté entre une

situation de départ insatisfaisante et une situation d’arrivée désirable. Un processus de recherche est entrepris afin de combler cet écart. » 17 Aussi, le développement durable est-il- un concept dont les enjeux entourant sa définition et sa mesurabilité interpelle la communauté de chercheurs afin de proposer des solutions nouvelles. Il doit améliorer la qualité de la vie humaine tout en respectant l’environnement et en tenant compte des problèmes écologiques. Le développement ne saurait se réduire à une course aux seules performances économiques et sociales. Se développer, c’est aussi s’inscrire dans une perspective aussi large que possible et se donner les moyens d’y parvenir. Le développement durable en conséquence nous impose de nous 16

Guide ASHOKA, Préface d’Arnaud MAIRET, co-directeur ASHOKA France Mace Gordon, PETRY François, Guide d’élaboration d’un projet de recherche, Québec, Presses Universitaires de Laval, 3e édition, 2017, p.20 17

18


approprier la maitrise des conditions du progrès de la société. C’est ce rôle que nous assignons à la société civile c’est-à-dire aux associations, aux ONG, aux acteurs non étatiques en général face à l’échec ou à l’inaction de l’Etat. La société civile doit rechercher les moyens pour être efficace afin d’offrir aux populations défavorisées et aux générations futures les meilleures conditions de vie possibles. Cela permettra à ceux-ci de passer d’une situation de survie à celle souhaitée d’un mieux-être matériel : -

La survie est entendue comme la situation précaire dans laquelle se trouve un individu, une société ou un pays qui lutte contre la misère, la maladie et la mort en raison des difficultés à couvrir ses besoins élémentaires d’alimentation, d’habillement et de logement.

-

Le mieux-être matériel se réfère à la bonification des conditions de vie précitée vers les niveaux successivement plus élevés des commodités et agréments de la vie. Ainsi, ce mémoire cherche-t-il les moyens de renforcement des actions des osc par

l’intégration de nouvelles valeurs, tenant compte des principes du développement durable mais aussi et surtout des objectifs du développement durable. C’est pourquoi, notre étude est incluse dans la recherche d’une voie nouvelle, permettant aux populations défavorisées de ne plus dépendre des aides sporadiques. Celles-ci sont faites selon le bon vouloir du donateur. Aujourd’hui, les ressources sont de plus en plus rares et la concurrence entre les OSC fait rage. En effet, la recherche de fonds peut devenir une source de problème et un facteur de dépendance. Cette situation rend les bailleurs de plus en plus exigeants et accroît leur pouvoir. Face à cela, les OSC doivent trouver les moyens pour se dégager de l’emprise des bailleurs, tout en favorisant une approche qui tienne compte des principes du développement durable. Pour nous, dans la recherche de solutions, le social business est une opportunité. En nous intéressant au social business et à la société civile, nous voulons faire le rapprochement entre ces deux concepts pour montrer que l’action des organisations de la société civile a besoin d’une nouvelle impulsion, impliquant de nouvelles formations et informations. Les projets de ces organisations sont une aubaine pour les populations fragiles ou défavorisées mais il faut bien le dire les effets sont éphémères et sans suite. De ce fait, les organisations se retrouvent dans un cercle vicieux dans lequel les mêmes projets sont répétés. Or, aujourd’hui l’accent est mis sur la durabilité des résultats et les financiers ont un attrait de plus en plus renforcé pour la Gestion Axée sur les Résultats. Face à cette situation, la société civile doit renforcer ses capacités afin de créer des projets qui puissent s’autofinancer et ainsi avoir des effets sur le long terme. 19


Le social business est une voie que ces organisations doivent saisir mais pour le faire, elles ont besoin de comprendre les fondements du concept mais aussi de la bonne volonté des pouvoirs publics. Il est donc impératif de s’interroger sur l’apport de la relation entre le social business et la société civile pour le développement durable. En d’autres termes, comment la relation social business et société civile peut-elle contribuer au développement durable en Côte d’Ivoire ? Ce constat nous amène à rechercher les réponses à une série de question telle que : -

Quels sont les principes du social business pouvant servir de base aux actions des OSC ivoiriennes ?

-

Quels sont les domaines d’actions des OSC impactés par le social business ?

-

Dans quelles conditions la société civile peut-elle favoriser l’émergence du social business en Côte d’ivoire ? Pour mieux cerner cette problématique, nous nous intéresserons au cadre théorique

de cette étude.

CHAPITRE 3 : CADRE THEORIQUE Le cadre théorique de notre étude s’articule autour des objectifs et des hypothèses de la recherche, de la revue de littérature et de la méthodologie.

1. LES OBJECTIFS ET HYPOTHESES DE LA RECHERCHE Nous ferons ressortir, d’une part, les objectifs de la recherche, et d’autre part, les hypothèses de cette étude. 1.1. LES OBJECTIFS DE LA RECHERCHE Les objectifs se conçoivent en un objectif général et en trois objectifs opérationnels. 1.1.1 L’objectif général Cette étude vise principalement à promouvoir l’entrepreneuriat social comme une solution à l’autonomisation des OSC et à l’atteinte des ODD en Côte d’ivoire. Cet objectif général se décline en trois objectifs opérationnels.

20


1.1.2

Les objectifs opérationnels

Les objectifs opérationnels sont : -

Identifier les principes du social business pouvant servir de base aux actions des OSC ivoiriennes

-

Analyser les domaines d’actions des OSC impactés par le social business

-

Déterminer les conditions dans lesquelles la société civile peut favoriser l’émergence du social business en Côte d’Ivoire. 1.2 LES HYPOTHESES DE LA RECHERCHE Il découle de cette étude une hypothèse centrale et trois hypothèses secondaires. 1.2.1 l’hypothèse centrale En ce qui concerne l’hypothèse centrale, nous la formulons ainsi : La relation social business et société civile est une source de financement du

développement durable en Côte d’ivoire. Pour mieux amplifier la compréhension de cette hypothèse, nous lui adjoindrons trois hypothèses secondaires. 1.2.2 les hypothèses secondaires Quant aux hypothèses secondaires, on a : -

Le social business repose sur plusieurs principes constituant des opportunités

d’actions pour les OSC -

Le social business, dans ses principes, impacte à plusieurs niveaux les actions

des OSC ivoiriennes -

Plusieurs facteurs conditionnent la participation de la relation social business

et société civile au développement durable en Côte d’Ivoire. La présentation des objectifs et des hypothèses de notre étude terminés, nous pouvons à présent faire la revue de littérature.

2. LA REVUE DE LITTERATURE Notre revue de littérature s’articule autour de cinq points. On y voit d’abord le social business comme innovation sociale, ensuite les missions de la société civile, suivi du social

21


business et le contexte de la pauvreté, enfin les premières étapes de la formalisation du social business et la comparaison entre le social business et les organisations de la société civile. 2.1 LE SB COMME INNOVATION SOCIALE Dans cette première partie de la revue de littérature, l’objectif est de présenter brièvement la catégorie d’innovations sociales, dans laquelle le modèle de SB occupe une place particulière. La description et l’analyse des écrits sur ce modèle émergent est nécessaire en vue de bien saisir le contexte social. 2.1.1 Les innovations sociales : définitions, enjeux, acteurs Le Centre de Recherche sur les Innovations Sociales (CRISES) caractérise l’innovation sociale comme : Une intervention initiée par des acteurs sociaux, pour répondre à une aspiration, subvenir à un besoin, apporter une solution ou profiter d'une opportunité d'action afin de modifier des relations sociales, de transformer un cadre d'action ou de proposer de nouvelles orientations culturelles 18

Il continue en ces termes « les initiatives en milieu local (…) visent à améliorer les conditions et la qualité de vie des citoyens » 19. C’est donc au cœur d’une dynamique collective que les innovations sociales trouvent leur origine et s’organisent pour structurer une action dont le but est de transformer l’environnement pour contribuer à la lutte contre un problème social. Pour s’inscrire dans la durée et constituer un potentiel d’action important, les innovations sociales se développent sous différentes formes de modèles organisationnels qui, comme l’entreprise traditionnelle, se caractérisent par des objectifs et des mécanismes orchestrant les moyens mobilisés pour parvenir aux fins. Les innovations sociales au sens de Klein

20

se caractérisent par les propriétés

suivantes : 1-générent un impact 2-subviennent à un besoin social 3-apportent une solution

18 KLEIN Juan-Luis, « Rapport annuel des activités scientifiques du Crises 2008-2009 », [en ligne], Québec, p.3[samedi 22 juillet 2017]). « Http://www.crises.uqam.ca/upload /files/rapports-annuels/Rapport_annuel_0809.pdf ». 19 KLEIN Juan-Luis, Innovation sociale et territoire : convergences théoriques et pratiques, Économie sociale et territoire en contexte de mondialisation, le développement par l’initiative locale, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2011, p.175. 20 Idem

22


4-transforment le cadre d’action 5-proposent de nouvelles orientations culturelles Après avoir défini l’innovation sociale à travers la littérature, nous nous intéresserons aux enjeux des innovations sociales. 2.1.2 Enjeux des innovations sociales : racines locales et baromètre social Klein s’interroge sur le rôle de l’économie sociale dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Il soulève la capacité de ces organisations à « identifier et exprimer les besoins de la collectivité »21 , besoins parfois nouveaux et souvent encore inconnus des institutions publiques. L’innovation sociale prend racine dans la localité, à travers les ressources et les acteurs qu’elle mobilise. Du fait de cet aspect territorial, il existe selon Klein, une relation étroite qui lie la communauté à l’innovation sociale. L’entrepreneur social est alors au premier rang. À travers son projet, il témoigne des problèmes sociaux existants au niveau local, auxquels il propose une réponse innovante, un point défendu par Yunus, Moingeon et Lehmann-Ortega 22 . C’est en ce sens que ces acteurs de première ligne peuvent être présentés comme des baromètres des difficultés sociales à l’œuvre dans la communauté. Dans son étude, Klein 23démontre l’importance du leadership de l’entrepreneur social, comme facteur de clé de succès. Les racines locales et la proximité dans la communauté des entrepreneurs sociaux s’avèrent être des facteurs fondamentaux de légitimité d’action. Il ressort de cette partie que les innovations sociales regorgent d’importants enjeux. Mais on ne peut parler d’innovation sans parler des acteurs. Ces acteurs sont les entrepreneurs sociaux à l’origine des projets d’innovations sociales. 2.1.3 Les entrepreneurs sociaux à l’origine des projets d’innovations sociales Mair et Marti 24 définissent l’entrepreneur social comme « un processus impliquant une approche innovante et une combinaison de ressources permettant la quête d’opportunités afin de catalyser les changements sociaux et/ou subvenir aux besoins sociaux ». Les entrepreneurs sociaux peuvent donc, le cas échéant, être impliqués dans des initiatives 21

Ibidem p.187 YUNUS Muhammad, Bertrand MOINGEON et Laurence LEHMANN-ORTEGA, « Building social business models: Lessons from the Grameen experience », Long Range Planning, Vol 43,2010, 308-325 p. 23 Ibidem, p.184 24 Idem, p.4, 22

23


profitables ou sans but lucratif. Selon ces auteurs, ce qui les distingue principalement des entrepreneurs conventionnels « c’est la priorité donnée à la création d’un bien-être social versus la création d’un bien-être économique ». Le concept d’entrepreneur social est alors suffisamment proche de celui du SB pour que Yunus, Moingeon et LehmannOrtega 25considèrent un SB comme un sous ensemble d’entrepreneurs sociaux. En effet, ils soulignent que : « Tous ceux qui créent et dirigent des social business sont des entrepreneurs sociaux, mais tous les entrepreneurs sociaux ne sont pas engagés dans des social business ». Aujourd’hui, les initiatives sociales se multiplient, l’intérêt du public à cet égard est grandissant et en conséquence, les entrepreneurs sociaux occupent une place importante dans les médias. À l’échelle nationale, les journaux tels que Le Monde, Le Devoir, le Financial Times, s’interrogent particulièrement sur l’ampleur du phénomène, mais aussi sur son impact socioéconomique en général 26. Les entrepreneurs sociaux intriguent les milieux intellectuels et les milieux d’affaires qui cherchent à comprendre ce que révèle le développement de ces acteurs. À quels disfonctionnements sociaux répondent-ils ? Que signifie l’engouement des populations à leur égard ? Les journaux locaux, directement reliés avec la communauté, mesurent eux aussi la température du phénomène. Les portraits des entrepreneurs sociaux et des initiatives locales se multiplient. La proximité, dans toutes ses dimensions (spatiales, sociales) entre les acteurs constitue un terreau fertile pour le développement d’innovations sociales 27. La connaissance personnelle de l’individu que l’on aide facilite l’identification du problème, l’aptitude d’en saisir la trame, la complexité28 et finalement permet de proposer un mode d’action adapté. Ceci explique que les entrepreneurs sociaux aient un rôle crucial au niveau local. Leurs actions et leurs histoires parlent à la communauté et font parler d’eux. Ce sont des acteurs charnières entre la réalité économique et les problèmes sociaux. 29 Impliquées dans la

25

Ibidem « Yunus démission de la Grameen Bank », lemonde.fr, (13-05-2011). «Http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2011/05/13/yunus-demissionne-de-la-grameenbank_1521805_3216.html ». 27 KLEIN, Juan-Luis, Innovation sociale et territoire : convergences théoriques et pratiques, Économie sociale et territoire en contexte de mondialisation, le développement par l’initiative locale, op.cit. p.182 28 Idem 29 Ibidem 26

24


communauté, animée par des valeurs philanthropiques puissantes, leurs actions se structurent autour d’un bienfait communautaire. Afin de cerner le concept d’innovation sociale, il convient de présenter les modèles d’innovations sociales. 2.1.4 Les modèles d’innovations sociales Dans son étude, Klein 30conclut que : L’économie sociale contribue à la revitalisation d’un milieu et procure aux communautés des ressources sur lesquelles bâtir des projets. [Cependant], pour être efficace et durable [elle] doit être appuyée par l’économie publique et doit mobiliser des ressources de l’économie privée […].

Ceci suggère que, pour construire et supporter leurs initiatives, ces entrepreneurs peuvent s’appuyer sur différents modèles organisationnels. Les entrepreneurs sociaux les développent sur la base d’initiatives personnelles qui dépendent principalement de : leur profil individuel, leurs compétences, leur attachement à une cause, leur réseau professionnel et les problèmes sociaux de leur communauté. 31 La nature du projet d’innovation sociale, la perspective envisagée par l’entrepreneur, les ressources disponibles, sont les déterminants principaux du modèle organisationnel retenu. Aujourd’hui, les OBNL et les coopératives constituent les modèles d’innovations sociales les plus répandues à travers le monde. Présente dans des secteurs variés, de tailles et d’organisations diverses, les OSC constituent un maillage étroit de nos sociétés, de l’échelle locale au modèle transnational. 32 2.2 LES MISSIONS DE LA SOCIETE CIVILE En 1901, la France inscrit le modèle de l’association dans le droit : L'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices. Elle est régie, quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicable aux contrats et obligations 33

30

Ibidem, p. 188 FONTAN, Jean-Marc, Innovation sociale et territoire : convergences théoriques et pratiques, Développement territorial et innovation sociale », Québec, Presses de l’Université du Québec, 2011, p.34 32 Statistique Canada (2003, données révisées en 2005). « Force vital de la collectivité. Faits saillants de l’Enquête nationale auprès des organismes à but non lucratifs et bénévoles », [en ligne], Ottawa [samedi 22 juillet 2017]. « Http://www.statcan.gc.ca/bsolc/olc-cel/olc-cel?catno=61-533-XIF&lang=fra ». 33 « Le service public de la diffusion du droit », [en ligne], France [samedi 29 juillet 2017]. « Http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEX T000006069570&dateTexte=vig». 31

25


Au Québec, depuis 1920, le terme association figure dans les statuts juridiques pour désigner les groupements qui recherchent un but social, philanthropique, etc. 34. À l’époque, l’agriculture et la manufacture concernent la majorité des travailleurs, aussi bien en France qu’au Québec. C’est dans le sillage des mouvements syndicaux, dans un contexte où les travailleurs cherchent à briser leur isolement, que les mouvements associatifs prennent racine à l’échelle d’une usine, d’un groupement agricole. 35 De ces premiers mouvements associatifs vont naître ensuite les premières coopératives. Les Organisations Non Gouvernementales (ONG) peuvent être classées sous la forme associative, car elles sont régies par la loi sur les associations de 1901. 36Distinctes des infrastructures d’États, les ONG sont caractérisées par une mission que l’on peut regrouper sous deux formes : les ONG militantes, qui forment des groupes de pression (exemple : Green Peace) et les ONG humanitaires, qui interviennent dans la lutte contre la pauvreté, la faim, la santé telles que Médecins sans frontières ou la Croix rouge. 37 Le terme d’ONG entre définitivement dans le langage courant en 1945 avec la Chartre des Nations Unies 38. L’ONG se caractérise par son espace géographique d’action, dont la mission s’étend à la sphère internationale et dont l’action revêt une dimension politique. Les ONG, au-delà de leur action sur le terrain, cherchent à transformer les comportements et les logiques en influençant les sphères politiques. Cette logique diffère sensiblement de l’association dont le rayon d’action reste concentré sur la communauté, même si pour certains, l’impact peut s’étendre sur l’ensemble d’un territoire national. 39 La Fondation est créée par des fondateurs et dirigée par ceux-ci dans l’optique uniquement d’œuvrer pour l’intérêt général. Dans la fondation, ce sont des personnes physiques ou morales qui décident de l’affectation de ressources pour réaliser une œuvre d’intérêt général et sans but lucratif. 40 Ainsi, le principe de la fondation consiste avant tout

34

Institut canadien d’information juridique. « Lois sur les compagnies », [en ligne], Québec, 2011[vendredi 21 juillet 2017]. « Http://www.canlii.org/fr/qc/legis/lois/lrq-c-c-38/derniere/lrq-c-c-38.html ». 35 Brian Land, l’encyclopédie Canadienne (2011). « Associations », [en ligne], Canada [samedi 22 juillet 2017]. « Http://www.thecanadianencyclopedia.com/index. cfm ? PgNm= TCE& Params=f1ARTf0006604 ». 36 Idem 37 Wordpress (2010). « Les ONG (Organisations Non Gouvernementales) », [en ligne], [samedi 14 juillet 2017]. « Http://cpidosdices.files.wordpress.com/2010/05/ong-definition.pdf » 38 Idem 39 Statistique Canada (2003, données révisées en 2005). « Force vital de la collectivité. Faits saillants de l’Enquête nationale auprès des organismes à but non lucratifs et bénévoles », loc.cit. p. 12, 15). 40 ARLETT Allain, l’encyclopédie Canadienne (2011). « Fondations », [en ligne], Canada [samedi 14 juillet 2017]. « Http://www.thecanadianencyclopedia.com/articles/fr/fondations-canadiennes ».

26


à distribuer de l’argent privé. Les membres du conseil d’administration décident de l’allocation des ressources. La société civile est importante pour la communauté car elle contribue à la dynamique sociale à travers ses actions. Le social busines intègre aussi les missions de la société civile, surtout dans le contexte de la pauvreté. 2.3 LE CAS DU SB ET LE CONTEXTE DE PAUVRETE L’objectif de cette partie est de montrer en quoi le SB est un modèle émergent d’innovation sociale. La description du contexte (pauvreté et développement économique) et de l’historique du SB, fournit une vue particulièrement utile pour appréhender toute la complexité de ce modèle émergent. Bien comprendre qui sont les acteurs concernés et la dynamique organisationnelle des SB s’avère nécessaire pour aborder par la suite la relation SB et Société civile. 2.3.1 le contexte de pauvreté et le développement économique Pour mieux appréhender la relation social business et pauvreté, il convient de présenter le paysage de la pauvreté d’une part et d’autre part, la lutte contre la pauvreté par le développement des activités économiques. 2.3.1.1 le paysage de la pauvreté à grands traits Le concept de SB prend racine au cœur des contextes d’extrême pauvreté. La pauvreté est un fléau. Conscient de cette menace majeure qui pèse sur l’équilibre mondial, les gouvernements, en particulier à travers les institutions internationales, tentent depuis des décennies d’endiguer le phénomène (l’élimination de la pauvreté est un objectif du développement durable). Pour l’ONU 41la condition de pauvreté n’est pas réduite au critère unique du seuil de pauvreté de 1,082 dollar par jours : être pauvre c’est aussi être privé de soins médicaux, d’accès à l’éducation, c’est une mortalité infantile intense, souvent liée à la malnutrition et aux conditions de vie insalubre. La liste peut encore s’étendre, car la pauvreté s’exprime sous de nombreux visages. La multitude de ses facettes n’a d’égal que la diversité de ses causes. De ce fait, il n’existe pas un remède général à appliquer pour faire disparaître

41

ONU, « Objectif du millénaire pour le développement », 2008, p.28 [en ligne], [samedi 22 juillet 2017]. « Http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/mdg2008.pdf ».

27


ce fléau, la lutte suppose toujours pour être efficace de développer « un large éventail d’actions » 42 Le rapport de l’ONU 2008 fait état de récentes avancées en particulier dans la lutte contre le sida (contamination 3.0 millions en 2001 à 7,7 millions en 2007) et l’accès à l’eau potable (1,6 milliard de personnes en plus par rapport à 1990). Ce rapport souligne aussi l’impact du secteur privé qui a ouvert l’accès à de nombreux médicaments essentiels et qui a permis de diffuser la téléphonie mobile dans le monde en développement. Mais ces premiers résultats positifs ne s’avèrent pas suffisants pour atteindre l’objectif du millénaire. Encore un quart des enfants des pays en voie de développement est menacé par la malnutrition ; près de la moitié de la population de ces pays est touchée par des conditions de vie extrêmement difficiles et insalubres. 43 Ils sont encore 2,5 milliards à ne pas avoir accès à un système sanitaire et un tiers à vivre dans des bidonvilles. Enfin, le rapport souligne que deux tiers des femmes qui travaillent dans les pays en développement ont un emploi précaire, travaillant à leur propre compte ou pour leur famille. Cependant, elles ne touchent pas de rémunération pour leur travail. Les tendances actuelles ne pronostiquent pas des perspectives meilleures. Au contraire, la crise financière et économique, et ses politiques d’austérités successives, rendent les gouvernements réticents à l’idée de subventionner les programmes de lutte contre la pauvreté. Leurs donations ont baissé et les engagements ne sont pas honorés. En outre, la pression démographique, la croissance des pays asiatiques, l’exploitation intensive des ressources naturelles alimentent une envolée des prix des matières premières et les denrées alimentaires en premier lieu. Les pauvres, exclus du marché économique, sont les premiers touchés par la famine. Dans le même temps, les changements climatiques mondiaux menacent (aridité, inondations) des terres agricoles stratégiques dans les pays où se concentre la pauvreté. Combiné à l’instabilité politique de nombreuses régions, on assiste dès lors aux plus grands mouvements migratoires jamais connus. La situation décrite contredit la déclaration universelle des droits de l’homme ratifiée par 192 pays : Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de pertes de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. 44

42

Idem, p. 7 Ibidem 44 Article 25 de DUDH de 1948 43

28


Les dépenses des pays développés au titre de l’aide extérieure ont diminué pour la deuxième année consécutive en 2007, et les engagements pris en 2005 risquent de ne pas être tenus. 45 2.3.1.2 la lutte contre la pauvreté par le développement des activités économiques De nos jours, les courants dominants ne débattent plus pour savoir si le secteur privé doit jouer ou non un rôle dans la lutte contre la pauvreté : la question est désormais de savoir comment intervenir de manière efficace ? 46 Le monde des affaires a clairement une place dans le processus de lutte contre la pauvreté. L’approche de la Base Of Pyramid (BOP) avance l’idée que les grandes compagnies peuvent faire fortune en faisant du commerce avec les pauvres et en même temps contribuer à endiguer le fléau de la pauvreté. Karnani résume l’approche de la BOP développée par Prahalad, un des pionniers de ce mouvement. 47 En 2004, il publie son livre « The fortune at the bottom of the pyramid » qui donne à ce mouvement un écho médiatique considérable. Karnani résume alors l’approche BOP par trois propositions principales 48 : 1. Il existe un marché encore sous-estimé par les entreprises, formé par l’ensemble des personnes dont les revenus sont insuffisants pour accéder aux biens et services produits par les grandes marques. 2. La construction d’une offre adaptée à cette clientèle passe moins par une logique low cost que par l’intégration de ses besoins spécifiques, censée permettre la croissance de la demande et la rentabilité à terme du marché. 3. La rentabilité économique de ces démarches est considérée comme l’une des conditions de leur succès, tant sur le plan de l’implication des entreprises que sur celui de l’inclusion sociale des personnes pauvres. Cette approche appelle donc les entreprises multinationales à investir dans le monde de la pauvreté avec une double perspective : celle du profit et celle de la lutte contre la pauvreté. Rangan, Chu et Petkoski 49proposent une segmentation des pauvres à la base de la 45

ONU, « Objectif du millénaire pour le développement », loc.cit. p.7 EZEQUIEL Reficco et Patricia MÀRQUEZ. « Inclusive networks for building BOP markets », Business Society, Sage, 2009, 43 p. 47 KARNANI Aneel. « Misfortune at the bottom of the pyramid », Greener Management International, Vol 1, juin 2007, 99-110 p 48 Idem 49 RANGAN Kasturi, CHU Michael et PETKOSKI Djordjija (2011). « Segmenting the Base of the Pyramid », États-Unis d’Amérique, Harvard Business Review, Vol. 89 Issue 6, 2011, p113-117 46

29


pyramide : 1.4 milliard de personnes gagnent entre 3 et 5$ par jour et forment la catégorie des « faibles revenus », 1.6 milliards gagnent entre 1 et 3$ par jour constituent la catégorie de « revenus de subsistances » et enfin, la catégorie d’« extrême pauvreté » comprend le milliard de personnes qui gagent 1$ et moins par jour. Le calcul est simple, cela constitue un marché potentiel maximal de 12,8 milliards de dollars journaliers. Certains auteurs commencent toutefois à contester l’approche soutenue par Prahalad et, plus largement, la théorie de la BOP. En effet, pour Karnani

50

vendre aux pauvres n’est

pas la solution. Il faut intégrer les pauvres dans le processus de production. Il recommande d’acheter aux pauvres plutôt que de leur vendre des biens. Les pauvres doivent être vus comme des producteurs plutôt que comme des consommateurs. Augmenter leurs revenus constitue la voie à privilégier. De plus, les populations pauvres sont dispersées et culturellement hétérogènes, ce qui limite et implique des coûts importants d’accès au marché. En conséquence, les économies d’échelles sont difficiles à atteindre, alors qu’accéder à la masse est essentiel quand notre client moyen dispose de quelques dollars de revenu. Ainsi, de nombreuses compagnies échouent, car elles surestiment le pouvoir d’achat des pauvres et sous-estiment les coûts relatifs à l’introduction dans ce marché. Si la théorie de la Base de la Pyramide (BOP) suscite de nombreuses critiques, il est désormais admis que le secteur privé à un rôle central à jouer dans la lutte contre la pauvreté. Or, ce constat, combiné à la perspective de Karnani de faire des pauvres des producteurs, constitue deux principes de base au cœur du modèle de SB. Cela conduit à nous intéresser à l’histoire du social business. 2.3.2 le sb, l’histoire d’un modèle d’innovation sociale en émergence Pour mieux comprendre l’histoire du social busines, notre intérêt se portera, en premier lieu, sur le modèle dominant de social business étroitement lié à l’histoire d’un homme et, en second lieu, au social business, du concept de micro crédit au modèle d’entreprise. 2.3.2.1 le modèle dominant de sb étroitement lié à l’histoire d’un homme S’il existe des entreprises qui développent des activités dans les milieux de pauvreté depuis longtemps, Yunus va définir une approche nouvelle de cette dynamique pauvreté50

Ibidem, p.1

30


économie privée. L’histoire commence en 1974 51. Mohamad Yunus est alors un jeune directeur du département d’économie de l’université de Dhaka, dans le sud-est du Bengladesh, lorsqu’une famine virulente frappe le pays. Très rapidement, un flot ininterrompu d’affamés envahit la ville. Les morts se comptent par centaines de milliers à travers le pays. Le gouvernement ouvre des soupes populaires très vite dépassées par les évènements, les organisations ramassent les corps et les journalistes relatent les faits. Bref, les moyens mis en œuvrent sont à la fois insuffisants et inefficaces. Les morts s’étendent sur les pas de portes et « ils ne scandaient nul slogan. Ils n’attendaient rien de nous […] ils ne nous en voulaient pas [d’être bien nourris] » raconte Yunus traumatisé par la situation. Et il ajoute : On meurt de bien des façons, mais la mort par inanition est la plus inacceptable. Elle se déroule au ralenti. Seconde après seconde, l’espace entre la vie et la mort se réduit inexorablement […] l’on ne sait pas si la mère et l’enfant, prostrés là, à même le sol, sont encore parmi nous […]. Et tout cela à cause d’une poignée de nourriture […]. Le bébé pleure, puis finit par s’endormir, sans le lait dont il a besoin. Demain, peut-être, il n’aura plus la force de crier. 52

La stupeur et l’incompréhension du professeur sont totales face à ce phénomène. Les théories économiques qu’il enseigne lui semblent désormais en décalage avec la réalité. Yunus est alors saisi par l’envie d’agir « je voulais comprendre la réalité qui entoure l’existence d’un pauvre, découvrir la véritable économie, celle de la vie réelle » 53. Pour cela, Yunus se rend dans le petit village de Jobra à proximité de l’université pour tenter de comprendre les mécanismes à l’origine de la pauvreté. « Jobra serait mon université ; les gens de Jobra, mes professeurs » 54. C’est ainsi que Yunus part à la rencontre des pauvres du village de Jobra, accompagné par certains de ses collègues et étudiants. Très vite, l’équipe constate que les pauvres travaillent dur pour survivre. Souvent, ce sont des femmes, isolées par les traditions, qui travaillent dans leurs maisons. Il faut alors peu de rencontres à Yunus pour comprendre une clé fondamentale du problème. Les pauvres travaillent dans une grande misère et possèdent des habiletés techniques. Pourtant, ils ne réussissent pas à dégager des revenus de leur activité. Yunus constate que les pauvres sont maintenus dans leur condition de pauvreté par les usuriers locaux qui pratiquent des taux d’intérêt démesurés. En effet, pour produire des tabourets, Sufia doit emprunter 5 takas

51

YUNUS, Muhammad (1997). « Vers un monde sans pauvreté », en collaboration avec Alain JOLIS, France, Lattès, coll. Livre de poche, 411 p. 52 Idem, p.18 53 Ibidem, p.19 54 Ibidem, p.20

31


chaque matin à des usuriers, soit 0,22$ de l’époque. À la fin de la journée, elle doit revendre sa production à ces intermédiaires pour rembourser son emprunt. Ils fixent alors un prix d’achat très inférieur à la valeur vénale. La femme touche alors un bénéfice minimal de 0,2$... quel que soit le volume de sa production. Ainsi, l’usurier asservit le pauvre dans une situation d’extrême pauvreté immuable. Il s’assure aussi de revoir alors chaque jour les femmes qui dépendent de son crédit à un taux journalier exorbitant de 10%. Sufia vivait donc dans la détresse parce qu’il lui manquait 22$ pour démarrer son business sans être sous l’emprise des usuriers constatent Yunus. En cumulant les besoins de l’ensemble des pauvres du village, Yunus réalise que 42 familles sont plongées dans la misère la plus totale alors qu’il ne leur manque que 27 dollars en tout. Stupéfait par l’incohérence de la situation, Yunus sort de sa poche les 27 dollars et décide de les prêter collectivement aux pauvres. Ces derniers rembourseront sans intérêts lorsqu’ils le pourront. Mais Yunus ne peut se satisfaire de cette solution et décide de chercher une solution institutionnelle à ce problème spécifique. Or, le recours aux usuriers est la seule opportunité pour les pauvres d’accéder au crédit. Il n’y a pas d’alternatives possibles. Le professeur se rend alors dans les banques pour leur demander de prêter aux pauvres. Le constat est sans appel : toutes refusent de prêter aux pauvres, même des montants infimes. Yunus soulève alors un autre paradoxe du système financier : pour avoir accès au crédit, il faut déjà posséder de l’argent. Quelle incohérence pour Yunus, ceux qui ont le plus besoin d’argent ne peuvent pas recourir au crédit. 55 Cela a conduit Yunus a inventé un système de crédit accessible aux pauvres. Le social busines nait du concept de micro crédit pour atteindre le modèle d’entreprise. 2.3.2.2 le sb, du concept de micro crédit au modèle d’entreprise Sur la base de ces constats de terrain, Yunus décide de créer une institution financière destinée à répondre aux besoins des pauvres. C’est de ce projet qu’émerge le concept du micro crédit à travers la Grameen Bank fondée en 1976, dont « le seul but est de mettre fin à la pauvreté, ce fléau qui humilie l’homme au plus profond de lui-même » 56Pour son projet de micro crédit, les résultats accomplis dans la lutte contre la pauvreté, l’innovation sociale dont il a fait preuve et ses valeurs philanthropiques, Yunus et la Grameen Bank reçoivent le

55 56

Ibidem Ibidem, p.31

32


prix Nobel de la paix en 1996. Une reconnaissance internationale précieuse dans la volonté du professeur de diffuser son modèle. 57 Le concept de micro crédit est au cœur de l’activité de la Grameen Bank. L’objectif est d’octroyer des prêts collectifs à des femmes pauvres. Ce concept de micro crédit est une innovation sociale profonde. Il vise à prêter aux pauvres sans garantie et à des taux d’intérêt les plus bas possible. « Qui a dit que les pauvres ne remboursent pas ? » s’exclame Yunus. 58 Pour lui, leur estime de soi, la conscience de l’importance de ces micros prêts pour l’amélioration de leurs conditions de vie et la solidarité collective qui les lie avec le groupe d’emprunteur, sont autant de gages de solvabilité. Conséquence, la Grameen Bank annonce un taux de recouvrement de 98%. Il s’agit de petits montants pour éviter le surendettement des acteurs et faciliter leur gestion économique. Et ce modèle de prêts s’adresse aux femmes. Une révolution sociale au Bangladesh où les femmes sont cloitrées à leurs domiciles par la coutume musulmane du purdah 59. Dans le combat contre la pauvreté, Yunus s’engage au cœur d’un autre combat : « celui de donner une dignité aux femmes de son pays ». Selon lui, prêter aux femmes constitue plusieurs avantages. Il constate que les femmes s’adaptent mieux au processus d’auto-assistance que les hommes. De plus, soucieuses de l’avenir de leurs enfants, les femmes vont être plus attentives aux besoins de la famille. Les femmes montrent aussi une plus grande constance dans le travail. Pour Yunus les femmes « sont économiquement et socialement défavorisées, victimes du sous-emploi, elles forment la majorité des pauvres. Et dans la mesure où elles sont plus proches des enfants, les femmes incarnent pour nous l’avenir du Bangladesh » 60. Cette révolution des mœurs s’est accompagnée de critiques virulentes de la part des maris qui voulaient gérer l’argent, des mollahs et usuriers dont l’autorité religieuse et traditionnelle était remise en cause. Même une partie de la classe politique s’est élevée contre le travail de Yunus 61. Ainsi, voilà brièvement comment le concept de micro crédit, à travers le modèle de SB, a révolutionné à la fois le système financier dans les pays en développement, mais aussi les mœurs sociales. Seule, l’efficacité de la Grameen Bank a permis de dépasser les

57

YUNUS, Muhammad, WEBER Karl, Building social business : The new kind of capitalism that serves humanity’s most pressing needs , États-Unis d’Amérique, PublicAffairs, 2010, 226 p. 58 Ibidem, p. 49 59 Ibidem, p.22 60 Ibidem, p. 134 61 Ibidem

33


résistances et les oppositions virulentes. Le président de la Banque Mondiale, James D. Wolfensohn, a déclaré en 1996 que : « Les programmes de microcrédit ont insufflé l’énergie de l’économie de marché aux villages et aux populations les plus déshéritées de la planète. En abordant la lutte contre la pauvreté dans une optique de marché, on a permis à des millions d’individus de s’en sortir dans la dignité ». 62

Ce constat de la banque mondiale appui la thèse défendue de Karnani qui appelle les penseurs des théories de la BOP à entrevoir les pauvres comme les acteurs principaux de leur développement. Une perspective adoptée et opérationnalisée par Yunus avec le microcrédit. La Grameen Bank aujourd’hui, c’est des prêts à 7,5 millions de pauvres, dont 97% de femmes, et 68% des familles qui empruntent à la Grameen Bank ont dépassé le seuil de pauvreté. 63 Le taux de remboursement est de 98,4% ce qui permet en autre à la Grameen Bank d’être une institution financière rentable depuis 1976 à l’exception de trois années difficiles. L’ensemble de ces chiffres repose sur un modèle d’organisation atypique. Toutes les péripéties que Yunus a surmontées pendant des années pour la construction de la Grameen Bank ont amené progressivement à créer un nouveau mode d’organisation. Si la Grameen Bank se caractérise par une mission sociale comme moteur d’action, elle trouve son originalité dans la manière dont elle est structurée. La Grameen Bank constitue le premier SB 64. En somme, au regard de la Grameen Bank comme illustration de SB, il s’agit de montrer que ce modèle répond pleinement aux caractéristiques de l’innovation sociale au sens de Klein. Etant considéré comme une innovation sociale, le social business, pour s’implanter véritablement dans la communauté, doit franchir des étapes vers la formalisation d’un modèle d’organisation. 2.4 LE SB, LES PREMIERES ETAPES VERS LA FORMALISATION D’UN MODELE D’ORGANISATION Dans son livre « Vers un monde sans pauvreté », Muhammad Yunus introduit son concept de SB. Il raconte l’histoire de la Grameen Bank et décrit ses mécanismes de fonctionnement. Au fil du temps, la Grameen Bank est devenue une famille, composée de plusieurs filiales. De nouveaux SB sont apparus dans le sillage de la banque des pauvres, tels que Grameen Phone, pour faire de l’accès à la technologie un vecteur de développement

62

Ibidem, p. 52 YUNUS Muhammad, Bertrand MOINGEON et Laurence LEHMANN-ORTEGA, « Building social business models: Lessons from the Grameen experience », loc.cit. 64 Idem 63

34


économique ; Grameen Veolia pour distribuer de l’eau potable ; Grameen Danone Foods dont la production d’un yaourt enrichi en nutriments vise à combattre la malnutrition infantile. Ces exemples les plus populaires sont le produit de partenariats avec des grandes entreprises. Yunus aurait-il ainsi trouvé une alternative aux critiques formulés à l’encontre de la BOP de Prahalad ? Le professeur a-t-il trouvé un moyen d’amener les multinationales à investir dans l’économie de la pauvreté ? Désormais, l’engouement suscité autour de son concept innovant nécessite de construire un cadre plus rigoureux pour présenter le SB. Dans cette perspective, et en vue de diffuser le modèle de la « famille Grameen » à l’échelle de la planète, Yunus publie en 2010 « Building social business ». Cet ouvrage se veut promoteur du concept de SB. Des dimensions plus techniques sont introduites et l’on passe du concept de SB à un modèle plus formalisé, qui pose le cadre de l’action. Dans la même année, en association avec Yunus, Moingeon et Lehmann-Ortega 65publient un article qui prolonge, sous la forme scientifique, le travail de modélisation entamé par le professeur. Il est alors possible de présenter sur la base de ces lectures, les caractéristiques fondamentales du modèle de SB. Plus généralement, le SB s’inscrit dans un projet visionnaire. Il se caractérise alors par une mission qui doit répondre à un besoin social pour les populations située à la base de la pyramide. Si le SB n’a pas pour vocation finale de générer des profits, il opère néanmoins dans une logique commerciale. Son activité génère des coûts et des revenus. Son objectif est de recouvrir ses coûts afin d’être autonome et durable financièrement. En cas de surplus financiers, ils sont totalement réinvestis dans l’organisation ou redistribués aux membres propriétaires. Le profit est alors un levier pour l’action sociale. Selon Yunus, un SB ne verse aucun dividende. Les investisseurs peuvent récupérer leurs mises de fonds sans intérêts financiers. Il s’agit ici de la différence majeure avec le modèle d’entreprise sociale auquel nous sommes habitués. Enfin, le SB repose sur un socle de valeurs et de principes ancrés au cœur du concept : respect, tolérance, justice sociale et empathie notamment. Mais pour mieux cerner cet état de fait, rappelons les 7 questions qui forment le corps même de l’entrepreneuriat social selon ASHOKA 66 : 1- quel problème social avez-vous identifié et comment y répondez-vous ? 2- quelle est votre valeur ajoutée ?

65 66

Ibidem Le guide des 7 questions clefs qu’un entrepreneur social doit se poser, ASHOKA-France,

35


3-quelle est votre stratégie de développement ? 4-quel est votre modèle économique ? 5-comment accélérez votre développement en collaborant avec d’autres parties prenantes de la société ? 6- comment mesurez-vous votre impact social ? 7- quel est le modèle d’organisation le plus adapté à votre projet ? En se référant au « concept de modèle d’affaires », il est intéressant de présenter les caractéristiques du SB sous un angle plus formel. Dans son ouvrage de 2004, Osterwalder propose une approche schématique qui permet d’identifier les principales composantes du système de création de valeur d’une organisation. Il distingue dans les organisations neuf caractéristiques, dont la description permet d’illustrer le fonctionnement d’une entreprise et ses modalités de création de valeur 67. Cette approche développée par ces auteurs est appliquée au SB. (Voir figure 1.1)

67

OSTERWALDER, Alexander et Yves PIGNEUR, Business model generation: A handbook for visionaries, Game Changers, and Challengers , Wiley edition, 004, 288 p.

36


Figure 1.1 : Le modèle d’affaire d’un SB selon le modèle de l’Osterwalder et Pigneur (2004)

Après cette présentation du social business, notre étude abordera la relation social business et organisations de la société civile. 2.5 COMPARAISON SB ET OSC Dans son livre « Building Social Business »68, Yunus accorde beaucoup d’importance à la distinction entre le modèle de SB et celui des organismes caritatifs. Le SB opère dans la sphère commerciale. Ses activités génèrent des revenus en vue de dégager des profits redistribués dans l’organisation. À l’inverse, les OSC, telles que les organisations à base communautaire, les associations et les ONG, agissent dans le domaine de la philanthropie et ne génèrent pas de revenus. Leur existence et leur potentiel d’action dépendent des donations privées, mais aussi des gouvernements ou des institutions internationales. Il s’agit là de différences de poids qui appellent des logiques de gestions

68

YUNUS, Muhammad, Building social business: The new kind of capitalism that serves humanity’s most pressing needs, op.cit.

37


distinctes. Ainsi, Yunus, Moingeon et Lehmann-Ortega 69 mentionnent : « quand tu gères un social business, tu penses et tu travailles différemment que si tu gérais un organisme à but non lucratif, même si ton objectif est différent de celui d’une entreprise orientée vers la maximisation des profits ». Il y a des logiques opérationnelles bien différentes au cœur de ces deux modèles d’innovation sociale, malgré une mission parfois très proche. En effet, ces deux types d’organisations sont animés par des valeurs humanistes puissantes et visent à réaliser une mission sociale. Ils opèrent au cœur de la communauté et ces caractéristiques mettent en évidence un certain « génotype » commun partagé par ces deux modèles. Pour Yunus 70, le modèle de SB offre des réponses aux limites du modèle de l’OSC. Sur le plan de la structure financière, le SB offre un modèle durable et autonome à travers sa logique commerciale. Cet argument est une réponse aux difficultés, pour les OSC, à prévoir le long terme dans un contexte de dépendance aux donations. 71 La recherche de financement est une des difficultés principales vécues par les OSC. Si les SB, tout comme les entreprises traditionnelles, sont exposés aux risques de marché, il semble évident que, dans une situation de crise, les premiers postes de dépenses à être comprimés sont les donations. Les OSC sont donc plus exposés aux aléas de l’environnement. À ce propos, Yunus 72 mentionne « relying on charitable donations is not a sustainable way of running an organization. It forces NGO leaders to spend a lot of time, energy and money on fund-raising efforts ». Yunus ajoute alors que le système d’investissement et de remboursement du capital dans les SB permet un « recyclement » de l’argent. Un argument reprit dans l’article de Yunus et al. 73, « investir dans un social business est différent de la philanthropie sous plusieurs aspects, le social business est autonome et les investisseurs récupèrent leur argent : les gens qui donnent en charité ne le récupère pas ». Ce mécanisme ouvre alors, pour les SB, un potentiel d’action supérieur aux OSC. Enfin, en ce qui concerne l’aide apportée, Yunus soutient que le SB apporte une solution durable et plus complète au problème social visé. Pour lui, la charité entretient les bénéficiaires dans un cycle de dépendance. À l’inverse, le SB stimule l’esprit entrepreneurial 69 YUNUS Muhammad, Bertrand MOINGEON et Laurence LEHMANN-ORTEGA, Building social business models : Lessons from the Grameen experience, loc.cit. p.310 70 YUNUS, Muhammad, Building social business : The new kind of capitalism that serves humanity’s most pressing needs, op.cit. 71 (Statistique Canada, 2005). 72 Idem, p.10 73 Idem, p.311

38


et offre aux individus les moyens de s’en sortir par eux-mêmes. Ainsi, « le social business traite ses bénéficiaires avec plus de dignité personnelle et d’autonomie que la charité » 74. Si ces auteurs s’accordent pour plaider en faveur du modèle de SB, ils saluent aussi les efforts et le rôle crucial des OSC dans la lutte contre les problèmes sociaux et notamment pour répondre aux besoins d’urgence. Pour Yunus, le modèle de SB propose une solution plus efficace à des problèmes structurels à moyens-longs terme. Pour résumer, ils positionnent le modèle de SB entre l’entreprise conventionnelle (mode de conduite des affaires et orientation profit) et le modèle de l’organisme caritatif (finalité sociale et valeurs philanthropiques). Il est possible d’illustrer ces convergences par l’image suivante. L’ADN du SB se compose alors de deux brins : l’un hérité de l’ADN de l’entreprise conventionnelle, l’autre de l’organisme caritatif. Ce génotype hybride permet de combiner alors deux logiques de manière complémentaire. Articuler la logique opérationnelle de l’entreprise traditionnelle avec la logique philanthropique de l’OSC, est rendue compatible. Le phénotype produit est le modèle de SB. Nous avons résumé cette partie dans la figure 1.2. Figure 1. 2: comparaison entre OSC et SB

Au total, notre revue de littérature a permis de faire ressortir, d’une part, le contenu et les implications du social business et, d’autre part, le rôle et les fondements de la société

74

Ibidem, p. 6

39


civile. Concernant le contenu et les implications du social business, elle met en exergue le caractère hybride du concept. Le social business est un modèle qui emprunte ses principes tant à la sphère lucrative qu’à celle non-lucrative. Il contribue à lutter contre la pauvreté, le changement climatique, l’accès à la santé, etc. Ainsi, est-il intimement lié au développement durable. Quant aux fondements de la société civile, ils portent sur la non-lucrativité des actions des organisations de la société civile. La société civile est ancrée dans la communauté et un instrument de lutte contre la pauvreté et les divers fléaux. En somme, notre revue de littérature dévoile les rapports social business et société civile. Ce rapport est fait de convergences et de divergences, ce qui installe les deux concepts dans une certaine dynamique. Nous avons aussi pu observé que les études s’intéressant aux liens les deux concepts sont rares voire quasi-inexistantes, d’où l’originalité de cette étude. Ceci dit, pour faire aboutir notre recherche, une méthodologie s’avère nécessaire afin d’en indiquer la démarche scientifique.

3. LA METHODOLOGIE La méthodologie est un ensemble de procédés, de techniques et d’outils qui permettent au chercheur que nous sommes d’appréhender la réalité qu’il se propose d’étudier. Donc ce chapitre nous permet d’exposer les techniques et conditions d’élaboration du travail de recherche. Elle est fondamentale dans tout travail qui se veut scientifique. Dans le cas de cette étude, une démarche méthodologique a été adoptée conformément aux exigences de la recherche en sciences sociales. Nous nous sommes inscrits dans le cadre de la recherche qualitative car elle est la plus adaptée pour une recherche-action. La recherche qualitative ne s'oppose pas, en sciences sociales, à la recherche quantitative, parce qu'elle exclurait le traitement des chiffres. Tout au contraire, l'étude des acteurs porte souvent sur la manière dont eux-mêmes produisent et utilisent les chiffres. Par contre, la nature même de la recherche qualitative est d'être compréhensive, c'est-à-dire de donner à voir (description, narration) et d'analyser les acteurs pensants ; éprouvant, agissant et interagissant. Nombre de recherches qualitatives ratent leur objectif dans la mesure précisément où elles ratent cette dimension de compréhension. C'est qu'elles font agir des acteurs abstraits, des êtres de raison, au lieu d'analyser les acteurs concrets dans leurs interactions.

40


Ce type de recherche permet d’étudier les acteurs à leur contact et de mener la recherche à proximité de leurs situations de travail et d’action. Dans cette partie, nous présenterons la stratégie de collecte des données et l’analyse et la présentation des données dans le cadre d’une recherche-action. 3.1 LA STRATEGIE DE COLLECTE DES DONNEES La recherche-action est propice à cette étude car elle permet de regrouper diverses démarches théoriques, pratiques et méthodologiques relative à l’étude de ce qui est complexe pour pouvoir être abordé de façon réductionniste, et qui pose des problèmes de relations internes et externes, de structures, de lois ou de propriétés émergentes caractérisant l’entité comme telle, ou de problèmes de mode de représentation, de modélisation ou de simulation. Cette situation nous pousse à l’utilisation de procédés tels que la recherche documentaire, l’observation participante et les entrevues. Aussi, l’ancrage souvent local du Social Business, du moins dans leur phase d’émergence, est également propice à la réalisation d’enquêtes de terrain à partir d’approches qui empruntent à l’ethnométhodologie, s’appuyant sur une multiplicité de sources de données, des documents aux entrevues à caractère non-directifs et non limitatifs ainsi qu’à l’observation directe in situ. L’avancement des connaissances sur la relation Social Business et Société Civile requiert le recours à d’autres méthodes notamment comparatives. Ayant présenté la stratégie de collecte, notre intérêt se portera sur leur analyse et présentation. 3.2 L’ANALYSE ET PRESENTATION DES DONNEES. L’analyse des données repose sur la démarche itérative entreprise dans cette recherche. Le respect des étapes méthodologiques, les nombreuses relectures et les discussions avec des tiers a clairement fait évoluer les dimensions d’analyse, mais également le sens attribué aux concepts. Au préalable des entrevues, l’analyse de la documentation interne et externe permet d’anticiper certains points stratégiques pour guider la discussion. Cela permet aussi de mieux cerner l’angle avec lequel aborder l’entrevue. L’accès aux comptes rendus, aux rapports sur les projets est d’un apport indéniable. L’analyse des données doit permettre de dégager du sens des entrevues afin d’extraire les informations nécessaires pour répondre à la question de recherche. Les données traitées deviennent alors des informations, c’est-à-dire qu’elles ont un intérêt particulier pour notre recherche. 41


Ainsi, le processus d’analyse se définit en trois étapes : -

Condenser les données

-

Présenter les données

-

Formuler et vérifier les conclusions.

Ce travail propose de s’inspirer de cette démarche pour procéder à l’analyse des données. La codification des entrevues permet alors de procéder à la réduction des données, c’est-à-dire construire une synthèse ordonnée des informations. Cette étape va alors permettre de présenter les résultats. Les conclusions et les constats tirés de l’analyse font l’objet de plusieurs vérifications et de discussion. Rappelons aussi le caractère itératif de cette démarche qui implique de nombreux va et vient du chercheur sur les différentes phases du processus d’analyse. La dernière partie de l’analyse des données concerne les étapes de la présentation des résultats et de la vérification des conclusions. Cette perspective d’analyse des données tente d’identifier et définir les principaux axes de réflexions. Les données et les conclusions font l’objet de plusieurs lectures, pendant et à la fin du processus d’analyse. D’autres personnes sont impliquées dans le processus de relecture. Ceci permet de s’assurer que cette recherche peut être reproduite avec le moins de biais possible. Ainsi, la méthodologie construite pour mener cette recherche tente au mieux de limiter les biais. Toutefois, il y reste un risque d’influence du point de vue du chercheur. L’objectivité totale n’est donc pas réaliste dans le cadre d’une recherche qualitative et en particulier dans les domaines des sciences sociales. La méthodologie n’a de sens que si elle sert à recueillir des données, à présenter les résultats et à les discuter.

42


2ème PARTIE : PRESENTATION ET DISCUSSION DES RESULTATS DE L’ETUDE Cette partie a pour but d’exposer les résultats de cette étude en vue de leur discussion. Pour ce faire, elle se structure en deux (2) grands chapitres, à savoir : -

Le premier s’intéresse à la situation actuelle des OSC liée aux enjeux

organisationnels et économiques -

La deuxième traite du développement durable comme facteur de conciliation

du social business et de la société civile.

43


Les fondements méthodologiques présentés permettent de construire la base de notre réflexion. Ceci nous conduit à nous intéresser aux différents enjeux du rapport social business, société civile et développement durable. Notre étude s’intéressera à la situation actuelle des OSC liée aux enjeux organisationnels et économiques en premier lieu et en second lieu, au développement durable comme facteur de conciliation du social business et de la société civile.

CHAPITRE 1 : LA SITUATION ACTUELLE DES OSC LIEE AUX ENJEUX ORGANISATIONNELS ET ECONOMIQUES Par enjeux, nous entendons les barrières et les facilitateurs du rapprochement SBOSC et Développement durable. Nous nous intéresserons à la problématique des implications managériales, d’une part, et d’autre part, à la difficile mobilisation des fonds. Ces problèmes ont une conséquence : la mitigation des impacts.

1. LA PROBLÉMATIQUE DES IMPLICATIONS MANAGÉRIALES Cette problématique concerne la qualification et la motivation du personnel et l’attitude du manager associatif. 1.1 UN PERSONNEL PEU QUALIFIE ET PEU MOTIVE Les ressources humaines représentent le personnel de l’organisation c’est-à-dire tout ceux qui participent à la vie et à l’animation de l’organisation. Ils sont les administrateurs, les salariés et les bénévoles. Le personnel est très important dans toute organisation. Aussi, est-il affirmé : Les entreprises n’existent pas sans les hommes et les femmes qui y travaillent. Et la tâche numéro un de tout cadre consiste à obtenir de ses collaborateurs une productivité et une qualité de travail maximales. Ce qui suppose des compétences adéquates, une organisation optimale, mais avant tout, la motivation de tous. 75

Cette affirmation présente un principe : l’organisation est véritablement opérationnelle que si son personnel est compétent et motivé. Or, beaucoup d’OSC ivoiriennes n’arrivent pas à respecter ce principe. En Côte d’ivoire, les OSC souffrent du manque de personnels compétents et motivé. En effet, elles sont toutes conscientes de ce fait. Il ressort d’une étude réalisée en 2016 par

75

LEVY-LEBOYER Claude, la motivation au travail, modèles et stratégies, Paris, éditions d’organisation, coll « Références », 2006, p.13

44


l’institut Panos-Afrique de l’ouest sur l’usage des médias sociaux par les OSC ivoiriennes que : -

19% des OSC interrogés ont exprimé un besoin en personnel qualifié

-

14% un « manque de temps »76

Cette étude conclut que « la principale raison évoquée, comme frein à l’utilisation des médias sociaux par les OSC, est le manque de formation. » 77 (voir figure 2.1) Les OSC ivoiriennes se retrouvent dans une situation d’éternel recommencement en matière de renforcement de capacité et de formation. Cette remarque, nous l’avons observé lors de la convention générale de la CNSCI en 2016 78. En effet, la préoccupation de la majorité des participants était l’organisation des formations pour eux. A cette préoccupation, la coordinatrice a rappelé la récurrence de cette demande et qu’elle se rendait compte qu’aucune restitution n’était faite dans les organisations. Elle a aussi ajouté que c’était les mêmes personnes, qui représentaient leur organisation pendant toutes les formations et renforcement de capacité. Cela nous donne déjà un aperçu du système de management au sein des OSC dans notre pays.

76

Institut Panos- Afrique de l’ouest, étude sur l’usage des médias sociaux par les OSC ivoiriennes, 2016, p.11 Idem, p.15 78 Convention générale de la CNSCI à son siège le 29 septembre 2016 77

45


Figure 2.1 : Freins à l’utilisation des médias sociaux par les OSC ivoiriennes (source Institut Panos-Afrique de l’ouest)

1.2 LE SYSTEME DE MANAGEMENT Le système de management ressort de l’attitude du manager mais aussi et surtout du manque de stratégie dans le fonctionnement des OSC ivoiriennes. Le management des OSC ivoiriennes est une des causes de leur manque de crédibilité mais aussi des dysfonctionnements observés et le manque de personnel qualifié en leur sein. À ce propos, la coordinatrice du CNSCI affirme qu’elle a observé que ce sont les mêmes personnes qui viennent à chaque formation. Dans nos entretiens et nos observations, nous avons constaté que la majorité des OSC tourne autour d’une seule personne, le Président ou 46


le Directeur exécutif de l’organisation. Toutes les décisions sont frappées de son sceau car il contrôle tout. A cause de cette situation de mainmise absolue, quand il n’est pas là, les activités de l’organisation stagne. Le personnel, ne se sentant pas impliqué, est démotivé. Ce système de management est préjudiciable aux OSC car il ne permet aux salariés, aux bénévoles de mettre leur savoir-faire au profit de l’organisation.

L’omniprésence du

manager a été mis en exergue par l’étude de l’institut Panos-Afrique sur l’utilisation des médias sociaux en 2016. (Voir figure 2.2) On se retrouve dans un système de non-qualité or la non-qualité tue l’organisation. Car une organisation est « un ensemble de moyens structurés constituant une unité de coordination ayant des frontières identifiables, fonctionnant en continu en vue d’atteindre un ensemble d’objectifs partagés par les membres participants. ». 79 Nous savons aussi que « une gouvernance de qualité constitue un outil réellement stratégique pour l’entreprise. »80 Il s’avère ainsi que la plupart des OSC ivoiriennes fonctionnent sans stratégie et ne font que subsister. La stratégie est le choix d'orientation à long terme de l'organisation et des options qui lui permettent de s'insérer dans son environnement. Elle constitue donc l'art de diriger l'organisation et les hommes de l'entreprise d'un point de vue long terme et extérieur. Définir une stratégie consiste à déterminer les buts et objectifs qui seront poursuivis, à choisir les actions à mettre en œuvre ainsi que les ressources à mobiliser. La prise de décision est précédée par une phase de diagnostic et suivie par une phase de mise en œuvre. La stratégie peut être envisagée selon deux niveaux : la formulation stratégique et le management stratégique. La formulation stratégique a pour objet de structurer la démarche de réflexion des dirigeants pour arriver à des choix stratégiques. Le management concerne les conditions de mise en œuvre de ces choix et l'organisation des actions collectives qui permettront d'obtenir la performance attendue. Ainsi, « la stratégie consiste en la détermination des buts et des objectifs à long terme d'une entreprise, l'adoption des moyens d'action et d'allocation des ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs » 81Se fondant sur cette stratégie, les problèmes doivent être résolus « durablement », c'est-à-dire de positionner l'organisation dans des conditions où une performance accrue a plus de chance d'apparaître. D'où l'importance de la stratégie qui peut assurer la capacité d'anticipation de l'organisation. Dans

79

CHARRON Jean-Luc, SEPARI Sabine, BERTRAND Françoise, Management, l’essentiel en fiches, Paris, Dunod, 2014, p.2 80 BOURIGEAUD Bernard, BRUN Jacques, Management, les idées les plus simples sont souvent les meilleurs, paris, Eyrolles, p.13 81 Idem, p.133

47


la pratique, la stratégie donne généralement lieu à la planification d'actions pour atteindre des objectifs précis sur une période donnée. Tous les outils de la gestion courante vont permettre au manager d'atteindre les objectifs définis dans le cadre de la vision stratégique de l'organisation. Chaque petite décision prise fait partie d'un ensemble plus large que l'on nommera management opérationnel. Le manager devra rester conscient des limites du pouvoir prédictif de la stratégie relative à toutes prises de décision. C’est pourquoi, on dit que : La mission du manager est essentiellement centrée sur la mobilisation et la coordination des forces d’intervention que représentent les acteurs au service d’une politique et d’une stratégie. Le manager est confronté au moins autant à la contingence des problèmes d’ordre relationnels qu’aux problèmes techniques et organisationnels. 82

L’ignorance de ces principes a des conséquences économiques indéniables.

2. La difficile mobilisation des fonds La mobilisation des fonds est devenue très difficile et cette difficulté trouve sa justification dans la rareté du financement, d’une part, et, d’autre part, dans le manque de fonds propres des OSC.

82

ARCOS-SCHMIDT Sylvia, ARCOS Lucien, Le grand livre du management, pour mieux incarner votre métier de manager, Paris, AFNOR éditions,2015, p.9

48


Figure 2.2 : Ressources ayant en charge la gestion de la prĂŠsence des OSC sur les mĂŠdias sociaux

49


2.1 LA RARETE DU FINANCEMENT La société civile ivoirienne souffre du manque de financement. La crise économique a provoqué le retrait ou la diminution des ressources alloués aux projets humanitaires et de développement dans le monde. Cela se fait plus ressentir en Afrique en général et en Côte d’Ivoire en particulier car la société civile y trouve sa principale source de financement. Cette situation de crise a profondément transformé la sphère d’intervention de la société civile. Face au manque ou à la pénurie de fonds, les règles pour l’obtention de financement se sont durcies et la concurrence est de mise. Cette concurrence entraîne les OSC ivoirienne dans des situations de confrontation et de négation de l’autre. Tous les coups sont permis et les alliances pour le bien-être des populations deviennent impossible. Ceci conduit à des crises et à la perte de crédibilité des OSC. À cela, il faut ajouter la soumission aux ONG internationales et aux systèmes de sous-traitance. Bien vrai que le SB a aussi des problèmes de financement comme l’a montré la revue de littérature, nous voyons dans l’alliance OSC-SB une solution pour sortir de l’impasse de la recherche de financement. Cela permettra la mise en œuvre des projets pour l’atteinte des Objectifs du Développement Durable. Car aujourd’hui, la communauté internationale est décidée à trouver des solutions aux problèmes de déficit de développement mondial. Cet engagement ressort de la préface du Rapport sur le développement humain 2016 intitulé le développement humain pour tous. Ainsi, ressort -il du rapport que « Les dirigeants et dirigeantes du monde, en 2015, se sont engagés à un développement qui ne laisse personne pour compte. Tel est le principe fondamental du Programme de Développement Durable à l’horizon 2030. » 83. Aussi des fonds sont-ils disponibles pour l’atteinte de cet objectif et les OSC sont les principales bénéficiaires. Mais le rapport précise que « Le développement humain doit être soutenu et durable ; il doit enrichir chaque vie humaine afin que notre monde soit un monde de paix et de prospérité pour tous. ». 84 Il faudra donc que les OSC en général et les OSC ivoiriennes en particulier trouve des alternatives afin d’assurer la durabilité des impacts. Et nous voyons là l’occasion d’innover en intégrant les principes du SB dans l’élaboration et la mise en œuvre de ces projets. Un seul investissement pour une action durable et la récupération de la mise initiale. Cette mise récupérée permet à l’OSC de mettre en œuvre un autre projet et du coup, il acquiert une certaine autonomie financière,

83 84

Préface du Rapport sur le développement humain 2016 du PNUD. Idem

50


donc une autonomie d’action. Ainsi, afin d’approfondir cet état des faits, nous nous pencherons sur le cas de l’absence de fonds propres. 2.2 L’ABSENCE DE FONDS PROPRES La majorité des OSC ne fonctionnent que grâce aux fonds des bailleurs nationaux et internationaux. L’existence de fonds propres est devenue une gageure. Ce constat est alarmant quand on sait que les OSC étaient censées avoir des AGR et que même des formations avaient été organisées dans ce sens. Cette absence de fonds propres ne permet pas à nos organisations d’être autonomes et de se sortir de l’emprise des bailleurs. La situation se présente de la manière suivante : Quand les OSC ne bénéficient pas de financement, leurs activités s’arrêtent et la crise survient. Le plus éloquent, c’est que des OSC bénéficient de financement pouvant atteindre le milliard de francs et qu’au lendemain de la fin du projet, elles n’ont plus le sous pour payer leurs salariés et pour rembourser les frais de transport des bénévoles. Cette situation nous l’avons observé lors de notre immersion au M.E.SA.D.. Cette organisation a bénéficié de quatre financements pour des projets durant deux années, de 2015 à 2017 et à la fin des projets, soit en juin 2017, elle se trouve en déficit et dans l’impossibilité d’honorer ses engagements, allant du payement des salaires au règlement des factures. Mais nous avons vraiment compris l’ampleur du problème lors de nos entretiens, notamment au PAIPS. En effet, durant cet entretien avec le Président Exécutif de cette organisation, en parlant de l’autonomisation financière des OSC, ce dernier ne fut pas d’accord avec nous. Car, pour lui, les OSC ne peuvent pas être autonomes et cela à cause de leur statut. Pourtant la loi ivoirienne n’interdit nullement aux OSC de faire des bénéfices mais c’est le partage desdits bénéfices qui est interdit. Donc de quel statut parle-t-on ? Nous l’ignorons et réaffirmons que les OSC, pour être vraiment efficace sur le terrain, elles ont besoin d’être autonome financièrement car cela concourt à l’obtention de l’autonomie d’action. Et encore plus important, elles éviteront que les travailleurs sociaux, leurs salariés deviennent des cas sociaux. Cette situation a des répercussions sur les résultats de leurs actions.

51


3. DES IMPACTS MITIGES On ne peut pas comprendre la situation de la société civile ivoirienne sans s’intéresser aux retombés de leurs actions. En parlant de retombés, nous voyons les résultats, les impacts ou encore les atteintes des objectifs à court et long terme. Cela nous pousse alors à parler en termes de performance. Qu’est-ce que la performance ? Dans l’acception française, la performance est le résultat d’une action, voir le succès ou l’exploit. Dans le domaine de la gestion, la performance a toujours été une notion ambiguë utilisée en contrôle de gestion par transposition du sens anglais. Par extension, est considéré comme performant celui ou celle qui atteint ses objectifs. L’organisation est constituée d’hommes et de femmes qui prennent des décisions, travaillent ensemble, conçoivent, fabriquent, trouvent des solutions, recherchent des améliorations. La mesure de la performance d’une organisation est une question toujours d'actualité pour toute équipe dirigeante. Il apparait que le résultat à atteindre doit s’évaluer selon les moyens mis en œuvre mais aussi la cohérence avec les objectifs initiaux. Toutes ces composantes doivent trouver une satisfaction dans leur association, elles doivent travailler en symbiose autour de l’objet social et y trouver, toutes, un avantage important. C’est une sorte de contrat social incarné par l’organisation qui signifie aussi que tout le monde est dans le même bateau et en supporte les conséquences. Aussi, pour mieux comprendre la notion de performance dans le cadre de la société civile ivoirienne, il faut saisir leurs modalités d’action. Les OSC ont une place importante à tenir sur l’échiquier social en Côte d’ivoire mais elles souffrent de beaucoup de limitations. Elles fonctionnent sur le principe « pas de financement, pas d’action ». Cette modalité d’action est un frein à la performance de la société civile ivoirienne et cela a pour corrélative la mise en sommeil voire la fermeture de plusieurs OSC en Côte d’ivoire. Ce constat est fait par la coordinatrice général de la CNSCI lors de la convention générale de 2016 de ladite faîtière. Et c’est cette situation que vit des OSC telles que le M.E.SA. D durant cette année car aucune stratégie n’est pensée pour amortir le choc des moments de disette en termes de financement. Pourtant, certaines OSC réussissent à s’en sortir avec des AGR. On peut citer le PAIPS et l’ONG AKEKENESSE qui créent des AGR pour lutter contre la pauvreté et depuis le 12 juillet 2015, la mutuelle d’épargne et de crédit dénommée Mutuelle de Solidarité AKEKENESSE (MUSA) a été créée afin de soutenir les populations défavorisées de la commune de Yopougon. Quant au 52


PAIPS, elle fait partie du Réseau Ivoirien de l’Economie Sociale et Solidaire (RIESS).

85

Ainsi, les OSC ivoiriennes amorcent-elles tant bien que mal une mutation stratégique et opérationnelle

CHAPITRE

2:

LE DEVELOPPEMENT DURABLE, FACTEUR DE CONCILIATION DU SOCIAL BUSINESS ET DE LA SOCIETE CIVILE

Cette partie s’articulera autour de deux idées principalement, à savoir, d’une part, la société civile au cœur de développement durable en Côte d’ivoire et, d’autre part, le Social Business, une stratégie économique du développement durable.

1. LA SOCIÉTÉ CIVILE AU CŒUR DU DÉVELOPPEMENT DURABLE En Côte d’ivoire, la société civile est au centre de la lutte pour un changement de mentalité dans le cadre du développement durable. Cela passe par l’analyse de la nature et de leur domaine d’intervention. Pour mieux appréhender ce fait, nous construirons notre démarche de compréhension sur les enjeux fondamentaux des actions des OSC, à l’occurrence tiraillées entre logique de besoin et logique de profit. 1.1 LES ENJEUX FONDAMENTAUX DES ACTIONS DES OSC Nous nous intéresserons entre autres à la promotion et protection des droits de l’homme et de l’environnement et aussi du plaidoyer. 1.1.1 La promotion et protection des droits de l’homme et de l’environnement C’est dans la promotion des droits que les OSC ivoiriennes plantent des jalons pour explorer de nouveaux champs d’action. Le concept de promotion des droits s’entend ici dans un sens élargi : il s’agit du droit pour les êtres humains à vivre une vie décente, jouir d’une citoyenneté active quelle que soit son appartenance (liberté d’expression, égalité de traitement, etc.), à être protégé. Enfin, et comme condition préliminaire à tout ceci, la possibilité pour chacun de vivre dans un État de droit, facteur nécessaire pour un développement à long terme. Réguler les tensions et promouvoir la paix, font partie des objectifs et des projets qui cherchent à concilier les parties précédemment en conflit, par un 85

Le RIESS a été créé en 2011 à Bouaké pour la promotion de l’ESS en Côte d’ivoire.

53


retour au dialogue ; d’autres mettent en avant la culture comme facteur de cohésion, d’autres encore tentent de forger une culture de paix par la formation de médiateurs. Traiter des droits de l’homme, revient à parler d’éducation. Prendre soin de l’éducation et de l’égal accès à l’éducation sans se soucier d’environnement et de ressources naturelles, est inefficace à long terme. Les ménages pauvres sont les plus vulnérables aux changements adverses quant à l’accès aux biens premiers comme l’eau, la santé, l’éducation, l’énergie : par conséquent, lutter contre la pauvreté suppose une gestion durable des ressources de base et une politique favorisant leur accès ainsi qu’un usage raisonné. 1.1.2 le plaidoyer Le dernier champ d’intervention, celui du plaidoyer : il s’agit de peser sur les choix politiques et sociétaux. Vouloir modifier les règles du jeu des relations entre gouvernants et populations vulnérables implique un changement de niveau et de nature des actions par un passage à l’action politique : elles sont ainsi amenées à participer aux travaux des agences spécialisées de l’Union Africaine, ou bien aux Conférences Internationales (sommet de la terre à Rio, sommet du développement social à Copenhague, etc.). Elles se lancent, maintenant à grande échelle, dans des campagnes d’information citoyennes, dans la lutte contre les échanges de nature criminelle ou illicite (vente d’armes, mines antipersonnel, drogues), et ajoutent à leur rôle de dénonciation politique, la promotion de formes de commerce équitable. Plusieurs projets ont été mis en œuvre dans ce sens. 86 Il convient de faire ressortir que les domaines d’interventions ressortent du développement durable à travers les 17 ODD de 2015, qui vont de la promotion à la protection des droits de l’homme et de la nature en passant par la bonne gouvernance. Malgré cette nécessité d’action, les OSC ivoiriennes sont victimes de la logique financière qui les fait osciller entre logique de besoin et logique de profit. 1.2 LA SCI : ENTRE LOGIQUE DE BESOIN ET LOGIQUE DE PROFIT La logique du besoin provient de la définition du sous-développement de Philippe VILLEMUS : « Le sous-développement, à ne pas confondre avec la pauvreté, est l’état où

86

Le projet « Agnintié » de l’ONG M.E.SA.D de 2015 à 2017

54


les besoins primaires ou fondamentaux de l’homme ne sont pas satisfaits (alimentation, santé, logement, etc.) et où les besoins d’éducation, très souvent, ne le sont pas non plus. 87 » Le besoin s’exprime en termes de manque ou de non-satisfaction d’éléments vitaux à l’existence de l’homme. Les OSC doivent chercher les moyens soit de combler ou d’atténuer les effets du manque. Ce qui les plonge dans la recherche de fonds. Pourtant avec la crise financière que le monde vit actuellement, les OSC du sud en général et celles de la Côte d’ivoire en particulier peinent pour trouver les fonds nécessaires aux financements de leurs actions. Ainsi, les OSC, pour combler le déficit de financement, doivent s’adapter à la nouvelle réalité : la logique du profit. Ayant pris conscience de cette situation, certaines OSC ivoiriennes ont optées pour les AGR. C’est le cas de l’ONG GAJA (Groupement Agropastoral des Jeunes Actifs) accompagnée par le PAIPS pour l’installation d’AGR agricole. 88Quant à l’ONG AKEKENESSE, elle a financé 65 AGR (en octroyant des prêts) dans divers domaines d’activités pour un coût total de 1 300 000 FCFA. Les bénéficiaires avaient remboursé 1 075 OOO FCFA et il restait encore 225 000 FCFA.

89

En 2016, elle a

amplifié son action de micro-crédit. Ces actions sont de moindre envergure et ne bénéficient d’un encadrement à long terme de la part de l’organisation. Pourtant par les finalités qu’elles poursuivent, les OSC ivoiriennes ont un avantage comparatif net par rapport aux entreprises classiques lorsqu’il s’agit de développement durable. Mais restons modestes et réalistes, les obstacles et difficultés existent aussi pour les OSC et une majorité d’entre elles, en Côte d’ivoire, sont encore peu familiarisées avec la gestion environnementale et socio-économique. Elles ont pourtant tout intérêt à utiliser le potentiel qui est le leur pour donner une cohérence globale à leur action et renforcer leur rôle de moteur de changement. Cette société civile se doit de trouver les moyens et les voies pour innover afin de s’autonomiser et atteindre les ODD. Pour cela, elle doit expérimenter de nouvelles voies, surtout de nouvelles alternatives économiques. Dans cette recherche de solutions pour une emprise d’actions réelle, nous avons le SB comme une stratégie économique du développement durable.

87

VILLEMUS Philippe, Qui est riche ? la vérité sur les riches, les pauvres et les autres…, Paris, Eyrolles,2008, p.18 88 Rapport d’activités du PAIPS 2015 ET 2016 89 Rapport d’activités du PAIPS 2015

55


2. LE SOCIAL BUSINESS, UNE STRATÉGIE ÉCONOMIQUE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE Le Social Business, pensé comme une stratégie économique du développement durable, s’observe à travers le développement durable comme un cadre institutionnel, qui ont une influence sur ses principes. 2.1 LE DEVELOPPEMENT DURABLE, UN CADRE INSTITUTIONNEL Le développement durable se présente comme un ensemble de politique destiné à recadrer le système économie.

L’intégration de nouvelles valeurs dans le système

économique permet de le renouveler, de le régénérer. Aussi, en intégrant le social, l’économie et l’environnement dans l’échiquier économique, une nouvelle voie alternative se dessine et elle vient répondre à la question : Comment faire du capitalisme, un système plus humain ? Cette question nous pousse à entrevoir un changement de modèle et d’adaptation conceptuelle. Aussi, le Social Business se présente comme cette alternative économique qui tient compte de la réalité du développement durable. Cette approche favorise l’émergence de nouveaux acteurs. A ce titre, les OSC constituent la nouvelle base institutionnelle pour le développement de cette alternative. Le rapport SB-OSC et DD permettront d’atteindre les ODD. Ainsi, la société civile ivoirienne, comme toutes les autres sociétés civiles africaines, doit s’approprier ce système afin d’élaborer des projets de développement tenant compte des réalités sociales ivoiriennes. Car le Développement durable est rentable et pourrait rapporter plus de 12000 milliards de dollar pour 60 opportunités d’ici 2030. Cela est jugé raisonnable par le Business Sustainable Development Commission (BSDC) lancée en 2016, à la suite du World Economic de Davos. Ces opportunités sont divisées en quatre axes fondamentaux (voir figure 2.1) 90

90

Harvard Business Review de décembre-janvier 2018, p.22

56


Figure 2.3 : La rentabilité et les opportunités du Développement Durable

Mais pour que la société civile ivoirienne soit efficace, il faut un accompagnement des pouvoirs publics. Dans ce cadre, l’Etat ivoirien a pris la loi N°2014-390 du 20 juin 2014 d’orientation sur le développement durable. Cette loi, dans son article 8, définit l’acteur du développement durable en ces termes « Est acteur du développement durable toute personne physique et/ou morale qui participe à la promotion du développement durable. » Dans l’énumération, l’Etat est le premier acteur du développement durable et à ce titre, l’Etat doit favoriser la mise en place de modèles inhérent à la Côte d’ivoire. Aussi « ces modèles spécifiques à des contextes différenciés, supposent des réformes macro-économiques conduisant à une fiscalité réductrice des inégalités et à une croissance économique inclusive et soutenable. » 91Cette situation influence forcément le concept de SB dans ses principes fondamentaux.

91

HUGAN Philippe, L’Afrique. Défis, enjeux et perspectives en 40 fiches pour comprendre l’actualité, op.cit. p.142

57


2.2 LE SOCIAL BUSINESS, UNE APPROCHE DE LA SOLIDARITE ECONOMIQUE Dans notre revue de littérature, nous avons pu observer que les fondements du SB ressortissent tous des principes du développement durable. Elles intègrent la durabilité, la bonne gouvernance, l’éducation fondamentale et l’intégration des populations défavorisées dans l’économie afin de lutter contre la pauvreté des masses. Un SB s’intéresse donc aux populations les plus défavorisées et permet de favoriser leur stabilité économique et leur réinsertion sociale. Il permet ainsi de lutter contre la pauvreté et développer l’économie locale. La société civile ivoirienne, en intégrant les ODD dans leur stratégie de lutte, doit penser à générer des fonds afin d’installer leur action dans la durabilité. Mais bien qu’étant au cœur du combat du développement durable, cette société civile peine à trouver des fonds et à mettre en place des actions durables. Pourtant les liens étroits entre le SB et les OSC produiraient des changements profitables et durables des deux côtés. De ce fait, l’association SB et OSC, dans le cadre du développement durable, doit permettre aux populations d’obtenir une meilleure éducation, une qualité d’environnement supérieure et une espérance de vie plus longue. Cette idée ressort du rapport Faber-Naïdoo 92 pour une nouvelle approche de l’aide au développement. Dans ce rapport, les auteurs mettent en exergue l’apport du SB dans les actions de développement durable en ces termes : Cet élan général s’explique par le fait que chaque acteur impliqué voit dans le SB une nouvelle frontière : il permettrait de pérenniser des projets financés jusque par des ONG ou des agences de développement, de résoudre des problèmes sociaux en limitant le financement public et de tester des innovations technologiques et organisationnelles dans de nouveaux modèles de production ou de distribution.

Dans le cadre de notre étude, nous avons intégré le M.E.SA. D et avons pu remarquer que malgré la bonne volonté des OSC, elles restent limitées dans leur action à cause du manque de financement mais aussi du fait qu’elles n’innovent pas fondamentalement dans leur approche. Cela concourt à les maintenir le plus souvent dans une position de soustraitant. Pourtant, aujourd’hui les actions des OSC tournées vers le développement durable visent à protéger l’environnement et à éliminer la pauvreté. Elles doivent pour cela innover et trouver de nouvelles sources de financement.

92

FABER Emmanuel, NAIDOO Jay, Innover par la mobilisation des acteurs : 10 propositions pour une nouvelle approche de l’aide au développement, Paris, Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, 2014 www.diplomatie.gouv.fr/fr/photos-videos-etpublications/ publications/enjeux-planetairescooperation/ rapports

58


Au vu de cela, les principes de Social Business sont une source de durabilité des impacts des actions des OSC ivoiriennes et aussi un moyen de s’autonomiser mais aussi et surtout un moyen de financement du développement durable. Pour atteindre ces objectifs, les OSC ont besoin de l’aide de l’Etat. A cet effet, « les Etats doivent inclure dans leur SNDD des éléments propres à leur réalité, mais qui favorisent également de bonnes pratiques. » 93 La présentation des résultats ne saurait s’achever sans une séance de discussion et de mise en perspective.

3. DISCUSSION ET PERSPECTIVES Le manque de données sur le social business en Côte d’ivoire et la non-maitrise du concept par les acteurs que sont les OSC a beaucoup compliqué notre recherche. Le plus marquant des problèmes rencontrés reste que plusieurs OSC n’existent que de nom et n’ont aucune existence sur le terrain. Cette absence est liée le plus souvent au manque de financement et de fonds pour pouvoir mener des actions et cela conduit les bénévoles et les salariés au découragement et à l’abandon. Tout cela a montré la nécessité de notre étude et a contribué à renforcer notre thèse selon laquelle les OSC ivoiriennes ont besoin d’intégrer les principes SB afin de s’autonomiser et permettre à la Côte d’ivoire d’atteindre les ODD de 2015. Notre recherche nous l’avons tant bien que mal menée à terme. Les hommes sont plus favorables au changement lorsque celui-ci, malgré ses aspects neufs et déviants, ne remet pas en cause fondamentalement leur cadre de référence ou leur système de système de représentation, mais y insuffle des éléments redynamisant. En cela, le SB, même s’il garde un potentiel alternatif, n’en reste pas moins soumis à une dynamique régulatrice souvent instrumentalisé par le système existant. La Côte d’ivoire n’échappe pas à cette situation. La recherche d’une alternative au système économique implique une compréhension de la situation réelle des pays en développement comme la Côte d’ivoire. Il faut donc repenser le développement, car « les modèles de développement ne peuvent être toutefois copiés. Ils sont à inventer et à construire différemment selon les sociétés. » 94

93

MORIN Sophie, développement durable : le difficile passage de la théorie à la pratique, Paris, ENAP, vol. n°2, Avril 2009, p.9 94 HUGAN Philippe, L’Afrique. Défis, enjeux et perspectives en 40 fiches pour comprendre l’actualité, op.cit. p.140

59


Nous pensons que les projets de social business exécutés par les OSC dans le cadre du développement durable sont une solution pour amorcer une nouvelle ère économique. On pourra placer l’homme au centre de l’économie : il est acteur et bénéficiaire. Mais pour cela, il faut comprendre le développement et savoir que le développement est un concept plurimodal c’est-à-dire que « le développement économique africain ne peut être traité en termes de retard ou de convergence vis-à-vis des pays avancés. » 95 Le développement durable regorge de potentialité pour les pays en développement.

Les pays africains

devraient, donc, saisir ces opportunités afin d’amorcer un développement véritable. Pour mieux appréhender ces potentialités, nous allons nous servir de la figure intitulée une aubaine pour les pays en développement du Harvard Business Review. 96 (Voir figure 2.2) Pourtant, l’Etat ivoirien n’arrive pas à amorcer ce changement et reste cantonné dans un système économique saturé et qui a atteint son apogée. Les pouvoirs publics ivoiriens ont un rôle indéniable à jouer dans cette évolution de la société civile afin de la rendre plus performante et participer concrètement à l’émergence du pays. La voie actuelle ne peut pas porter la société civile vers un véritable changement et leur permettre d’être des acteurs incontournables du développement durable, car « il ne peut y avoir de réelle avancée sur les objectifs du développement durable sans mise en place de régulation du capitalisme financier, ne serait-ce que pour disposer des ressources financières permettant de les financer. » 97 Le développement durable implique l’abandon des principes destructeurs de l’économie actuelle. Il faut amorcer une nouvelle ère pour laquelle l’Etat ivoirien doit prendre des mesures rigoureuses afin que le développement durable soit une réalité. Nous pensons que cela est possible mais les pouvoirs publics ivoiriens doivent être courageux et comprendre, comme le dit l’adage, qu’on ne peut faire d’omelette sans casser les œufs. Toute politique de développement implique des mesures tant institutionnelles que juridiques de la part de l’Etat mais il faut aussi des acteurs bien formés et informés. Le SB-le développement durable et OSC offre un espace de réflexion et mise en œuvre de nouveaux paradigmes que chacun doit pouvoir comprendre et consentir aux sacrifices qu’il faut afin que notre pays sorte de la propagande développementaliste. Le développement ne s’obtient pas à coup de slogan mais de politiques et d’actions bien pensées et bien menées. Certains pays en

95

Idem, p.140 Harvard Business Review, op.cit. p.5 97 Ibidem, p.145 96

60


développement l’ont compris et leurs OSC arrivent à mettre en place des projets de social business très performants. On peut citer : - Grameen shakti qui réalise un chiffre d’affaire annuel de plus de 100 millions de dollar et qui a équipé plus d’un million de foyers au Bangladesh avec des systèmes photovoltaïques ; - BRAC est une des plus grandes ONG du monde basée au Bangladesh. Elle finance 80% de son budget annuel, soit 500 millions d’euros, grâce aux revenus d’un réseau d’entreprises sociales (magasins d’artisanat local, production de produits laitiers, vente de médicaments par un réseau de 95 000 agents de santé, etc.) ; - NUTRI’ZAZA est une société anonyme malgache créée en 2012 par le GRET 98 et quatre autres actionnaires. Elle participe à la lutte contre la malnutrition infantile en distribuant des repas au sein des « restaurants pour bébé » développés par le GRET à Tananarive depuis 1998. Elle coordonne le réseau de restaurants, sensibilise les familles par des animations de quartier et produit le complément alimentaire vendu dans les restaurants et en port en porte. - En Inde, Naandi Foundation a développé un réseau de plus de 400 mini-usines villageoises de traitement d’eau proposant des formules d’abonnement mensuel. Elle assure ainsi l’accès à l’eau potable pour 600 000 consommateurs indiens ; - CARE a créé JITA, une entreprise sociale de distribution aux populations très pauvres des produits essentiels en matière d’hygiène, de santé ou d’alimentation. Le projet emploie d’ores et déjà ;12000 femmes. - Au Kenya et au Rwanda, la Sustainable Healthcare Foundation a créé des pharmacies et dispensaire afin d’améliorer l’accès aux médicaments des populations des bidonvilles. Elles, fonctionnent selon un système de franchises, proposent des soins abordables et génèrent suffisamment de bénéfices pour offrir aux infirmiers franchisés et aux salariés une rémunération compétitive. 99 Au vu de tous ces projets réussis, les OSC ivoiriennes doivent comprendre que le changement est possible en allant plus loin dans leurs projets AGR.

98

Le GRET est une ONG française de développement, qui agit depuis 38 ans pour lutter contre la pauvreté et les inégalités. Ses professionnels interviennent sur une palette de thématiques afin d’apporter des réponses durables et innovantes pour le développement solidaire. 99 Tous les projets présentés proviennent du rapport d’orientation de FABER Emmanuel, NAIDOO Jay, Innover par la mobilisation des acteurs : 10 propositions pour une nouvelle approche de l’aide au développement de 2014.

61


Figure 2.4 : le dĂŠveloppement durable, une aubaine pour les pays en dĂŠveloppement.

62


CONCLUSION

Cette étude a pour objectif d’analyser l’impact de la relation social business et société civile sur le développement durable en Côte d’Ivoire. Plus spécifiquement, l’objectif de cette étude est de promouvoir l’entrepreneuriat social comme une solution à l’autonomisation des OSC et à l’atteinte des ODD en Côte d’Ivoire. Cet objectif s’opérationnalise en trois objectifs secondaires. Premièrement, il s’agit d’identifier les principes du social business pouvant servir de base aux actions des OSC ivoiriennes. Le deuxième objectif est d’analyser les domaines d’actions des OSC impactés par le social business. Enfin, le troisième vise, dans une perspective exploratoire, de déterminer les conditions dans lesquelles la société civile peut favoriser l’émergence du social business en Côte d’Ivoire. Les résultats, que nous avons exposés dans cette étude, en lien avec nos trois (3) objectifs opérationnels, permettent plusieurs éclairages nouveaux en ce qui concerne nos hypothèses de recherche. De ce fait, nous avons pu observer que le fait d’engager ou de s’adapter aux réalités du contexte économique actuel n’entrave pas, à priori, cette capacité de réconcilier dynamique économique et dynamique sociale et environnementale. Au contraire, la relation social business et société civile donne aux OSC les plus innovantes les moyens de leurs ambitions, en ce qui concerne leurs implications sociales et environnementales. De plus, la performance économique des OSC permet à celles-ci de valider, aux yeux de leurs membres et de la communauté, la pertinence de leurs objectifs. Ces considérations nous amènent inévitablement à nous prononcer sur la relation qui, selon nos résultats, existent entre social business et société civile, ou plus largement avec le développement durable. Les interrogations fondamentales, voire la quiddité de la relation entre social business et société civile, puisent leurs sources dans la dialectique. Cette dialectique anime les interactions entre les deux (2) concepts. Cela nous ramène à notre interrogation fondamentale de départ : Comment la relation social business et société civile peut-elle contribuer au développement durable en Côte d’Ivoire ?

63


Les premières pistes de connaissances appellent à une meilleure définition du Social Business et à une compréhension plus poussée de ses mécanismes de fonctionnement. Cette étude démontre aussi la pertinence de s’intéresser à la relation Social Business et Société civile pour tenter de saisir les caractéristiques de la démarche pour le développement durable. De l’autre côté, il semble que cette étude pose les premières bases pratiques pour appréhender l’émergence du Social Business en Côte d’ivoire. Un apport fondamental qui répond aux besoins des OSC d’anticiper les défis à surmonter et de connaître le contexte dans lequel elles interviennent. A travers, l’identification des enjeux et les pistes de solutions proposées, ce travail paraît également approprié pour tous les gestionnaires qui dirigent ou souhaitent démarrer un Social Business. Si ce travail soulève autant de questions qu’il apporte de réponses, sa portée tend aussi à susciter l’intérêt des chercheurs pour ces thématiques de développement économiques. Au cœur d’un contexte géopolitique instable, où les inégalités dans le monde s’accentuent, l’engagement de nombreux acteurs, sur ce terrain, représente alors un message d’espoir. La portée de cette étude s’adresse aux chercheurs appelés à approfondir les questionnements sur ce modèle au potentiel de développement considérable.

64


BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages 525p.

AFITEP, Dictionnaire de Management des Projets, Paris, Afnor, 2000,

ALAMI Sophie, DESJEUX Dominique, MOUSSAOUI-GARABUAU Isabelle, Les méthodes qualitatives, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2013, 94p. ATD Quart Monde, En finir avec les idées fausses sur les pauvres et la pauvreté, Paris, les éditions de l’Atelier Ouvrière/Editions Quart Monde, 2013, 138 p. BARTHELEMY Amandine, SLITINE Romain, Entrepreneuriat social : Innover au service de l’intérêt général, Paris, Vuibert, 2011, 208 p. BOURIGEAUD Bernard, BRUN Jacques, Management, les idées les plus simples sont souvent les meilleurs, Paris, Eyrolles, 2016, 198p CHARRON Jean-Luc, SEPARI Sabine, BERTRAND Management, l’essentiel en fiches, Paris, Dunod, 2014, 155p

Françoise,

DEVILLARD Olivier, La dynamique des équipes et l’intelligence collective, Paris, Eyrolles,2017, 312p. DUBOIS Jean, MITTERAND Henri, DAUZAT Albert, Dictionnaire Etymologique des mots, Larousse, 2007, 894p. ERNOUL Roger, Le grand livre de la qualité : Management par la qualité dans l’industrie, une affaire de méthodes, Paris, Afnor, 2010, 450p. EZEQUIEL Reficco, MÀRQUEZ Patricia, Inclusive networks for building BOP markets, Business Society, Sage, 2009, 43 p. GARDON Alain, Le manager et son équipe, Paris, Les éditions d’organisation, 1986, 117p. GIRAUD Pierre-Noel, L’homme inutile : du bon usage de l’économie, Paris, Odile Jacob économie, 2015, 542p. GRISON François, Les sciences autrement, éléments de philosophie à l’usage des chercheurs curieux, Paris, éditions QUAE, 2011, 168p. HUGAN Philippe, L’Afrique. Défis, enjeux et perspectives en 40 fiches pour comprendre l’actualité, Paris, Eyrolles, coll. « Eyrolles Pratiques », 2017, 176p. 65


JORION Paul, Se débarrasser du capitalisme est une question de survie, Paris, Fayard, 2017, 224p. KEEN Steve, L’imposture économique, Paris, Les Éditions de l'Atelier/Éditions Ouvrières, 2014, 675p. KLEIN Naomi, Tout peut changer, capitalisme et changement climatique, Paris, 2015, 645p. LATOUCHE Serge, L’occidentalisation du monde, Essai sur la signification, la portée et les limites de l’uniformisation planétaire, Paris, La découverte, 2005, 178p. LATOUCHE Serge, Les dangers du marché planétaire, Paris, Presses de Sciences Po, coll. « La bibliothèque du citoyen, 1998, 136p. LEBRIAN Yves, Le leader positif, Paris, Eyrolles, 2016, 200p. LEVY-LEBOYER Claude, La motivation au travail : Modèles et stratégies, Paris, éditions d’Organisations, coll. Références, 2006, 239p. LUGAN Jean-Claude, La systémique sociale, paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2009, 177p. MACE Gordon, PETRY François, Guide d’élaboration d’un projet de recherche, Québec, Presses Universitaires de Laval, 3e édition, 2017, 170p. MADERS Henri-Pierre, MASSELIN Jean-Luc, Piloter les risques d’un projet, Paris, Les éditions d’organisation, coll. « Gestion de Projets », 2009, 302 p. MAITRE Bernard, ALADJIDI Grégoire, Le Business model de la nouvelle économie, Paris, Edition Dunod, coll. Stratégie et management, 1999, 248 p. MAISONNEUVE Jean, La dynamique de groupe, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2014, 91p. MARCHESNAY Michel, Management stratégique, Paris, Les éditions de l’ADREG,2004, 283p. MARTIN Boris, l’adieu à l’humanitaire : les ONG au défi de l’offensive néolibérale, Paris, Editions Charles Léopold Mayer, 2016, 132p. MEYER Michel, La problématologie, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2010, 94p. MORIN Edgar, Où vas le monde ? Paris, Herne, 2007, 53p. OSTERWALDER Alexander, PIGNEUR Yves, Business model generation : A handbook for visionaries, Game Changers, and Challengers, Wiley edition, 2004, 288 p. 66


PACHE A. et al., L’économie sociale de A à Z, Alternatives Economiques Hors-série pratique n°38 bis, mars 2009, 232p. 94p.

PAUGAM Serge, Le lien social, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2013,

PAUGAM Serge, Les 100 mots de la sociologie, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2010, 112p. PLANCHE Jeanne, Société civile : un acteur historique de la gouvernance, Paris, C.L Mayer, coll. « dossier pour un débat », 2007, p.142p. RENARD Jacques, Théorie et Pratique de l’audit interne, Paris, Eyrolles, coll. « Références », 2010, 472p. RITTAUD Benoit, Ils s’imaginaient sauver le monde : Chroniques sceptique de la COP21, Paris, Books éditions,2016, 259p. VILLEMUS Philippe, Qui est riche ? la vérité sur les riches, les pauvres et les autres…, Paris, Eyrolles,2008,263p. WORMS Marion, Qu’est-ce qu’une théorie scientifique ? Paris, Vuibert, 2011, 218p. YUNUS M., Vers un nouveau capitalisme, Paris, J.C Lattès, 2009, coll. « Le livre de poche, » 384p. YUNUS, Muhammad, Vers un monde sans pauvreté, en collaboration avec Alain JOLIS, France, Lattès, 1997, coll. « Livre de poche », 411 p. Articles de périodiques BROUARD François, LARRIVET Sophie, SAKKA Ouapa, « Entrepreneuriat social et participation citoyenne », Revue canadienne de recherche sur les OBSL et l’économie sociale, vol.1, n°1, Automne/Fall 2010, p.46 -64 MORIN Sophie, développement durable : le difficile passage de la théorie à la pratique, Paris, ENAP, vol. n°2, Avril 2009, 26p. TARDIF Carole, Complémentarité, convergence et transversalité : La conceptualisation de l’innovation sociale, Paris, Les cahiers du crises, no.ET0513, 25p. KARNANI Aneel, « Misfortune at the bottom of the pyramid », Greener Management International, Vol 1, juin 2007, 99-110 p YUNUS Muhammad, Bertrand MOINGEON et Laurence LEHMANNORTEGA, « Building social business models: Lessons from the Grameen experience », Long Range Planning, Vol 43,2010, pp.308-325 67


Articles d’ouvrages collectifs BARTHELEMY Amandine et al., « Entrepreneuriat social : De nouvelles solutions pour sortir de la crise », Rapport mondial sur l’argent dans le monde 2013, Paris, Association d’économie financière, pp.1-16 CANFIN Pascal, « Les nouvelles conditions de la prospérité », Atlas du développement durable et responsable, PENNEQUIN Gilles, MOCILNIKAR Antoine-Tristan(dir.), Paris, Eyrolles, 2011, pp.236-239 DUBOIS Jean-Luc, MAHIEU François-Régis, « La dimension sociale du développement durable : réduction de la pauvreté ou durabilité sociale », Développement durable ? Doctrines, pratiques, évaluations. ? MARTIN JeanYves (dir), Paris, IRD éditions, 2002, pp.73-94 FONTAN, Jean-Marc, « Développement territorial et innovation sociale », Innovation sociale et territoire : convergences théoriques et pratiques, Juan- luis Klein, Bellemare Guy (dir), Québec, Presses de l’Université du Québec, 2011, pp.20-42 HUSSON-TRAORE Anne-Catherine, « Finance responsable », Atlas du développement durable et responsable, PENNEQUIN Gilles, MOCILNIKAR Antoine-Tristan(dir.), Paris, Eyrolles, 2011, pp.377-380 KLEIN Juan-Luis. « Économie sociale et territoire en contexte de mondialisation, le développement par l’initiative locale » Innovation sociale et territoire : convergences théoriques et pratiques, Juan- luis Klein, Bellemare Guy (dir), Québec, Presses de l’Université du Québec, 2011, pp.175-190 MEHAIGNERIE Laurence, SEGRESTIN Blanche, « Soutenir l’émergence des entreprises à impact social : La proposition de la société à objet étendu », Rapport moral sur l’argent dans le monde 2015, Paris, Association d’économie financière, 2015, pp.263-272 Thèses et mémoires BROSSARD Juliette, Le défi de l’entrepreneuriat social : Comment construire un Business Model à la fois pérenne et créateur de valeur, Mémoire de fins d’étude, Majeure Entrepreneuriat, Business Model et Entrepreneuriat social, Rouen Business School, 2010, 84p. (sous la direction de KLAPPER Rita) GINGRAS Patrick, Entre innovation économique et cohésion sociale : Les coopératives forestières et le développement des régions périphériques du Québec, Thèse de Doctorat, Aménagement, d’architecture et des Arts visuels, Aménagement du territoire et développement local, Faculté 68


d’Aménagement, d’architecture et des Arts visuels, Ecole supérieure d’Aménagement du territoire et du développement, novembre 2007, 197 p. (sous la direction de CARRIER Mario) PATUREAU Clémence, Innover pour répondre aux besoins sociaux, Thèse professionnelle, Mastère spécialisé HEC-Entrepreneurs, décembre 2010,97p. (sous la direction de GHEZALI Tarik) REY-SUHARD Ophélia, La maximisation de l’inclusion dans un modèle de Social Business, Mémoire de maitrise, Affaires Internationales, HEC, Montréal, Août 2014, 176 p. (sous la direction de POZZEBON Marlei) Rapports Beyond, Reform & Development, La dynamisation de l’entrepreneuriat social en Tunisie, 2013, 31p. Centre d’analyse stratégique, L’entrepreneuriat social en France : Réflexions et bonnes pratiques, Paris, La documentation française, 2013, 160 p. (travaux coordonnés par CHAUFFAUT Delphine, LENSING-HEBBEN Caroline et NOYA Antonella) Comité Français sur l’Investissement à impact social, Comment et pourquoi favoriser des investissements à impact social ? Paris, Rapport, Septembre 2014, 141p. Institut PANOS-Afrique de l’ouest, Etude sur l’utilisation des médias sociaux par les OSC ivoiriennes, 2016, ONG PAIPS, Rapports annuels 2014, 2015 et 2016 PNUD, investissements d’impact en Afrique : tendances, contraintes et opportunités, New York, Rapport, novembre 2015, 112p. PNUD, révéler les richesses cachées de l’Afrique : créer des entreprises inclusives pour une prospérité partagée, New York, Rapport, 2008, 110p. 43p.

PNUD, le développement humain pour tous, New York, Rapport, 2016,

69


REVUES SPECIALISEES Alternatives septembre 2017

économiques,

Les

dossiers,

revue

trimestrielle,

Baromètre 2014 de l’entrepreneuriat social, 1ère édition Baromètre 2015 de l’entrepreneuriat social, 2e édition Baromètre 2016 de l’entrepreneuriat social, 3e édition Baromètre 2017 de l’entrepreneuriat social, 4e édition HARVARD BUSINESS REVIEW, édition française, décembre 2016janvier 2017 HARVARD BUSINESS REVIEW, édition française, décembre 2017janvier 2018 Webographie AFRIQUE DURABLE 2O30 : Tous les numéros de la revue et des publications précédentes sont disponibles sur le site Internet de l’association : http://www.africa21.org ARLETT Allain, l’encyclopédie Canadienne. « Fondations », [en ligne], Canada,2011, Disponible sur : Http://www.thecanadianencyclopedia.com/articles/fr/fondationscanadiennes BACQ, S. et JANSSEN, F., Définition de l’Entrepreneuriat Social : Revue de la Littérature selon les critères Géographique et Thématique, Communication in 9ème congrès de l’AIREPME, Louvain-la-Neuve (Belgique), 29-31 Octobre. 2008 disponible sur : www.web.hec.ca/airepme/images/File/2008/C13.pdf Brian Land, l’encyclopédie Canadienne (2011). « Associations », [en ligne], Canada. Disponible sur : Http://www.thecanadianencyclopedia.com/index.cfmPgNm=TCE&P arams=f1ARTf0006604. BRODHAG Christian, GONDRAN Natacha, HUSSEINI Renate, BREUIL Florent, Glossaire pour le développement durable, (en ligne), Paris, Agora21 2001, disponible sur : www.agora21.org/dd/glossaire-dd.pdf

FABER Emmanuel, NAIDOO Jay, Innover par la mobilisation des acteurs : 10 propositions pour une nouvelle approche de l’aide au développement, Paris, Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, 2014, Disponible sur : 70


www.diplomatie.gouv.fr/fr/photos-videosetpublications/publications/enjeux-planetairescooperation/rapports Faridah DJELLAL, Faïz GALLOUJ, Innovation dans les services et entrepreneuriat : au-delà des conceptions industrialistes et technologistes du développement durable, Innovations 2009/1 (n° 29), DOI 10.3917/inno.029.0059 http://www.cairn.info/revue-innovations-2009-1-page-59.htm Institut canadien d’information juridique. « Lois sur les compagnies », [en ligne], Québec, 2011, Disponible sur : Http://www.canlii.org/fr/qc/legis/lois/lrq-c-c-38/derniere/lrq-c-c38.html KLEIN Juan-Luis, Rapport annuel des activités scientifiques du Crises 2008-2009, [en ligne], Québec, Disponible sur : Http://www.crises.uqam.ca/upload/files/rapportsannuels/Rapport _annuel_08-09.pdf Le guide des 7 questions clefs qu’un entrepreneur social doit se poser, ASHOKA-France, France, 2015, Disponible sur : www.ashoka.fr « Le service public de la diffusion du droit », [en ligne], France ? Disponible sur : Http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006 069570&dateTexte=vig MAIR, J ; MARTÍ, I., Social entrepreneurship : what are we talking about? A framework for future research, Working Paper, IESE Business School – University of Navarra,2004, disponible sur : http://www.iese.edu/research/pdfs/DI-0546-E.pdf 76 MOUVES, L’entrepreneuriat social, une chance pour l’économie sociale.,2010 Disponible sur : http://www.recma.org/sites/default/files/L_entrepreneuriat_socia_ une-chance_.pdf ONU, Objectif du millénaire pour le développement, 2008, [en ligne], Disponible sur : Http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/mdg2008.pdf Statistique Canada (2003, données révisées en 2005). Force vitale de la collectivité. Faits saillants de l’Enquête nationale auprès des organismes à but non lucratifs et bénévoles, [en ligne], Ottawa, Disponible sur :

71


Http://www.statcan.gc.ca/bsolc/olc-cel/olc-cel?catno=61-533XIF&lang=fra Le Monde, Yunus démission de la Grameen Bank, lemonde.fr, 13-052011. Disponible sur : Http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2011/05/13/yunusdemissionne-de-la-grameen-bank_1521805_3216.html VERTRAETE, T. et FAYOLLE, A. (2005), Paradigmes et entrepreneuriat, Revue de l’entrepreneuriat, vol 4, n°1, 2005, disponible sur : http://asso.nordnet.fr/adreg/RE0401tv_af.pdf Rapport de Brundtland. « Rapport de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU. Notre avenir à tous. », 1987, [en ligne], Disponible sur : http://fr.wikisource.org/wiki/Notreavenir%C3%A0tousRapport_Brundtland Wordpress, Les ONG (Organisations Non Gouvernementales) ,2010 [en ligne], Disponible sur : Http://cpidosdices.files.wordpress.com/2010/05/ong-definition.pdf

72


ANNEXES

ANNEXE 1 Exemples et études de cas du rôle de la société civile EXEMPLES ET ÉTUDES DE CAS DU RÔLE DES ONG  BRAC, une des plus grandes ONG du monde basée au Bangladesh, finance par exemple 80 % de son budget annuel de 500 millions d’euros grâce aux revenus d’un réseau d’entreprises sociales (magasins d’artisanat local, production de produits laitiers, vente de médicaments par un réseau de 95 000 agents de santé, etc.).  Grameen Shakti, réalise un chiffre d’affaires annuel de plus de 100 millions de dollars, et a équipé plus d’un million de foyers au Bangladesh avec des systèmes photovoltaïques.  En Inde, Naandi Foundation a développé un réseau de plus de 400 mini-usines villageoises de traitement d’eau proposant des formules d’abonnement mensuel. Elle assure ainsi l’accès à l’eau potable pour 600 000 consommateurs indiens.  L’ONG française GRET a créé Nutri'zaza, une entreprise sociale ayant pour mission l’alimentation des jeunes enfants à Madagascar (étude de cas ci-dessous).  L’ONG 1 001 Fontaines développe pour sa part un modèle d’accès à l’eau potable dans les zones rurales du Cambodge basé sur des entrepreneurs locaux et visant l’équilibre économique (étude de cas ci-dessous).  CARE a créé JITA, une entreprise sociale de distribution aux populations rurales très pauvres du Bangladesh des produits essentiels en matière d’hygiène, de santé ou d’alimentation. Le projet emploie d’ores et déjà 12 000 femmes.

73


ANNEXE 2 ETUDE DE CAS- « NUTRI’ZAZA » - LE SOCIAL BUSINESS CONTRE LA MALNUTRITION À MADAGASCAR. Le porteur de projet Le GRET est une ONG française de développement, qui agit depuis 35 ans pour lutter contre la pauvreté et les inégalités. Ses professionnels interviennent sur une palette de thématiques afin d’apporter des réponses durables et innovantes pour le développement solidaire. Problème social ou environnemental ciblé Alimentation des nourrissons et jeunes enfants, des enfants d’âge préscolaire et scolaire ainsi que des femmes enceintes et allaitantes dans une optique de développement durable. Historique du projet « Nutrimad » est la composante Malgache du programme de nutrition « Nutridev » initié dans 8 pays d’Afrique et d’Asie par l’Institut pour la Recherche et le Développement (IRD) et le GRET. Lancé en 1994, Nutrimad s’est d’abord concentré sur le milieu rural en dirigeant des programmes d’éducation nutritionnelle. L’action de Nutrimad en milieu urbain a démarré en 1998, et a pris un tournant décisif en 2002 avec l’ouverture du premier HotelinJazakely (restaurant pour enfants) à Antananarivo. L’Hotelin est un point de vente de proximité où des « animatrices » préparent et vendent de la « Koba Aina », une bouillie infantile fortifiée produite localement et destinée aux enfants de plus de six mois. Celle-ci est rentrée dans les moeurs de la population grâce aux tournées quotidiennes de vente au porte-à-porte des animatrices, proposant la bouillie « prête à consommer ». La « Koba Aina » est également disponible en sachets individuels (à préparer) vendus à l’Hotelin. Dans les quartiers où il n’y pas d’Hotelin ces sachets sont vendus par les épiceries. Alors que la notoriété de la « Koba Aina » se limitait initialement aux quartiers couverts par les Hotelins, celle-ci s’est progressivement répandue, si bien qu’aujourd’hui 63 % des ventes sont réalisées par les épiceries. Description du modèle d’entreprise Les Hotelins sont gérés depuis septembre 2012 par Nutri’Zaza un « social business » composé de 5 actionnaires, à savoir le GRET, TAF (Le producteur de la Koba Aina), l’APEM (Association pour la Promotion de l’Entreprise à Madagascar), ainsi que la Sidi et l’I&P (deux fonds d’investissement). Nutri’Zaza a en outre reçu des fonds de l’AFD (900 k€). Nutri’Zaza est une société anonyme de droit Malgache dirigée par une Direction, un Conseil d’administration et l’Assemblé générale des actionnaires. Pour éviter que la gestion de son mandat social ne soit laissée aux seuls actionnaires, un comité d’éthique et de surveillance sociale a été mis en place avec le soutien de FIND (Fonds d’innovation pour le développement).

74


Partenaires / Co-création Bien que la mission sociale de l’entreprise soit la raison principale de l’investissement pour tous les actionnaires, les profils différents des actionnaires peuvent impliquer des variations en matière d’objectifs. Plusieurs garde-fous ont donc été mis en place afin d’éviter que Nutri’Zaza ne dévie de son objectif initial. Le GRET (34% du capital) dispose d’une minorité de blocage lui assurant un contrôle sur l’arrivée éventuelle de nouveaux investisseurs et sur la portée sociale de l’entreprise. En outre, un comité d’éthique composé de différents acteurs publics a été monté pour s’assurer du respect des objectifs sociaux - La SIDI (Solidarité Internationale pour le Développement et l’Investissement, 24% du capital) est une société anonyme solidaire créée en 1983 par une ONG de développement, le CCFD-Terre Solidaire (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement). Elle contribue à la promotion d’une économie sociale et solidaire par la consolidation d’activités économiques individuelles ou collectives initiées localement dans les pays du Sud et de l’Est. - L’I&P (22% du Capital) a pour ambition de contribuer à l’émergence d’un secteur privé dynamique et pérenne en Afrique. Son action procède à la fois d’une vision sociétale et d’une exigence d’efficacité économique. En dix ans, I&P Développement a investi plus de 10 millions d’euros dans 30 sociétés, dont 7 institutions de microfinance, dans une douzaine de pays africains. L’entreprise TAF (18% du capital) est un acteur industriel malgache au chiffre d’affaires estimé à 10 millions d’euros qui travaille avec l’équipe Nutrimad depuis le lancement de la Koba Aina (2002). TAF assure l’approvisionnement en matières premières, la fabrication dans son unité de production située à Tananarive, le conditionnement du produit et sa distribution directe dans les épiceries. - L’APEM (Association pour la Promotion de l’Entreprise à Madagascar, 2% du capital) a été créée en novembre 1987 par le Groupement des Entreprises de Madagascar (GEM). Elle a pour but d’appuyer les entreprises grâce au micro-crédit, de promouvoir les IMF, de développer des micros et petites entreprises. Elle a lancé en 1990 la Société d'Investissement pour la Promotion des Entreprises à Madagascar conjointement avec SIDI. Au début du projet, Blédina a fourni à Nutrimad – au travers de danone communities – des prestations d’assistance technique destinées à optimiser son modèle économique de production / promotion / vente de la farine Koba Aina. Blédina y trouvait plusieurs axes de motivation : motiver ses salariés en les impliquant sur le projet, apprendre à mettre au point des stratégies adaptées aux populations du BoP, crédibiliser Blédina auprès des acteurs de la santé et de la nutrition dans le cadre de sa mission et contribuer au développement économique et social. Plans de développement Aujourd’hui 60 animatrices s’occupent des 40 Hotelins. Plus de 1,6 million de repas à base de Koba Aina sont vendus chaque année à environ 25 000 enfants. Deux acteurs ont énoncé des objectifs clairs pour Nutri’Zaza à l’horizon 2018. Le GRET entend :  Construire 60 nouveaux Hotelins en 3 ans dans des quartiers pauvres ;  S’installer dans 25 nouvelles communes ;  Etendre la commercialisation de la Koba Aina à d’autres circuits de distribution ;  Fournir une alimentation de complément à plus de 150 000 enfants (notamment ceux issus de familles défavorisées) ; 75


Créer 200 postes d’animatrices.

Impact social Les seuls objectifs chiffrés du programme concernent donc l’activité de l’entreprise et non pas son impact sur la santé de la population. Nutri’Zaza utilise des produits répondant aux normes de l'OMS, réputées produire des effets positifs, et 16 % des utilisateurs sont réguliers (déclaratif) et consomment donc suffisamment de Koba Aina pour produire un impact sur leur santé. Cependant, l'impact santé est conditionné par bien d'autres facteurs. Viabilité économique Nutri’Zaza et l’ensemble de ses actionnaires espèrent atteindre l’équilibre financier sous 5 ans, tout en respectant la visée sociale de l’entreprise : offrir un service accessible aux familles à faibles revenus, tout en gardant un produit aux standards internationaux de qualité. Réplicabilité Nutri’Zaza pourrait sans doute devenir un des très rares succès commerciaux de bouillies fortifiées à condition de revoir son sourcing (dépendance excessive de TAF qui est aussi actionnaire), sa formulation produit (instantané, plusieurs parfums), son prix, son approche commerciale (micro marketing) ou encore sa gamme de produit (sachet en aluminium pour les classes moyennes). Ce modèle pourrait alors être répliqué dans des pays à plus fort potentiel et attirer d'autres types d'investisseurs comme GAIN ou CIFF qui n'ont évidemment pas placé Madagascar dans leur liste de pays prioritaires. Challenges / Enseignements Nutri’Zaza a probablement un potentiel d'amélioration opérationnelle suffisant pour atteindre une rentabilité satisfaisante mais nécessiterait un investissement significatif dans l'équipe de management et d'autres investisseurs. En outre, Nutri’Zaza a encore une structure et style de management "ONG" et un conseil d'administration qui semble être plus soucieux d'éviter des pertes que de monter un véritable business.

ANNEXE 3 ETUDE DE CAS - « 1001 FONTAINES » - RENDRE ACCESSIBLE UNE EAU DE BOISSON SAINE AU PLUS GRAND NOMBRE. Le porteur de projet Le projet a été lancé par l’ONG « 1001 Fontaines », créée en 2004 à la suite de la rencontre entre Chay Lo, à l’époque encore étudiant, François Jaquenoud, ancien associé au sein de la société Accenture et Virginie Legrand, ancienne collaboratrice des Enfants du Mékong. L’ONG s’est donné pour mission de rendre accessible une eau de boisson saine au plus grand nombre. Elle est soutenue par de nombreux partenaires institutionnels et privés Problème social ou environnemental ciblé Selon les dernières données de l’OMS et l’UNICEF, sur les 2,1 milliards de personnes n’ayant toujours pas accès à l’eau potable, 900 millions n’ont pas même accès à une source 76


d’eau. Plus de 60 % d’entre elles vivent en Afrique subsaharienne ou en Asie du Sud et 83 % en zone rurale. De plus, les contraintes de collecte d’eau pèsent sur les femmes et les enfants, et le temps passé à collecter l’eau (ou le bois pour la bouillir) est autant de temps distrait d’activités productives ou éducatives. Les conséquences sanitaires sont désastreuses puisque 80 % des maladies, notamment infantiles, sont d’origine hydrique. La diarrhée continue à tuer environ 2 millions de personnes chaque année, en majorité des enfants de moins de 5 ans. Historique du projet Lancée en 2004 au Cambodge, UV+ Solaire se définit comme un social business spécialisé dans le traitement et la distribution d’eau potable à des communautés rurales au travers de petites unités confiées à des entrepreneurs locaux, suivant un modèle de franchise sociale. «1001 Fontaines », a sollicité la Fondation Grameen Crédit Agricole pour investir à son capital, aux côtés de 1001 Fontaines et de danone communities. Description du modèle d’entreprise « 1001 Fontaines », est une franchise sociale permettant aux habitants des zones rurales d’avoir un accès simple, peu coûteux et pérenne à l’eau potable. Elle créée des stations autonomes de potabilisation d'eau et en confie la gestion à des micro-entrepreneurs villageois en franchise. Elle est basée sur 3 innovations : • Une innovation industrielle permettant la potabilisation à bas prix de l’eau de proximité. Ce procédé s'appuie sur une purification par ultra-violet alimentée par énergie solaire. Il permet de produire 800 litres par heure. L’eau est ensuite conditionnée en bombonnes de 20 litres. La qualité de l’eau répond aux normes nationales et internationales et est régulièrement contrôlée ; • Innovation économique : le dispositif est très peu coûteux à mettre en œuvre, et adaptée aux villageois que « 1001 Fontaines », accompagne pour en faire des entrepreneurs. Vendue à bas prix et livrée à domicile, l’eau est accessible aux populations démunies et isolées. Ainsi, au Cambodge, une bombonne de 20 litres coûte 14 centimes d’euro à la livraison contre 50 centimes d’euro sur le marché. • Innovation organisationnelle en franchise sociale : « 1001 Fontaines », (tête de réseau de la franchise), les franchisés nationaux (« Teuk Saat » au Cambodge, Saint Gabriel à Madagascar) et les franchisés villageois. Le modèle économique est hybride : l’équipement et la formation initiale sont financés par des dons collectés par l’ONG. Une fois lancée, la station locale est économiquement autonome par les revenus dégagés. Partenaires / Co-création La franchise « 1001 Fontaines », Solaire regroupe 3 actionnaires / partenaires : L’ONG « 1001 Fontaines » est l’actionnaire majoritaire d’UV+ Solaire, danone communities, et la Fondation Grameen Crédit Agricole. Elle développe aussi un partenariat avec Accenture afin de mieux former et accompagner les petits entrepreneurs villageois. Un partenariat avec Auchan a également été mis en œuvre.

77


Plans de développement Le but « 1001 Fontaines », est de passer d’un prototype réussi à une solution durable pour la santé des populations rurales (500 000 à 1 million de bénéficiaires) via un développement autofinancé. Impact social La franchise a aujourd’hui plus de 110 000 bénéficiaires au Cambodge et à Madagascar. Au Cambodge, une bombonne de 20 litres suffit en moyenne pour subvenir aux besoins en eau de boisson d’une famille pendant 3 jours. Ces actions sont complétées par le parrainage d’écoliers : l’ONG « 1001 Fontaines » finance la livraison d’eau potable à l’école. En outre, la franchise met en place des actions d’éducation et de marketing social pour sensibiliser la population locale aux bienfaits de l’eau potable. Viabilité économique Le prix est suffisamment bas pour que les bénéficiaires les plus vulnérables aient accès à cette eau de boisson, mais la pérennité économique de « 1001 Fontaines », est assurée en raison de faibles coûts de structure. Comme dans toute franchise sociale, une association (ici l’ONG « 1001 Fontaines ») assure un soutien financier pour financer les coûts d’installation des stations de potabilisation. Les micro-entreprises sont rentables rapidement : elles doivent toucher 200 familles (et vendre environ 1 200 l/jour) pour atteindre le point mort. Impact environnemental La solution apportée a un impact positif sur l’environnement puisqu’elle permet aux villageois de ne pas utiliser de bouteilles en plastique.

Réplicabilité « 1001 Fontaines », peut adapter son modèle de franchise sociale à de nouvelles géographies, la connaissance du pays et du tissu social étant apportée par les franchisés locaux. L’entreprise sociale est au Cambodge et au Madagascar et en test en Inde. Impact pour l’entreprise « 1001 Fontaines », a aujourd’hui une très bonne réputation et ses dirigeants ont reçu de nombreux prix (Schwab Foundation notamment). Leur motivation est basée sur la mission sociale de l’entreprise, et l’opportunité de développement. Challenges / Enseignements La leçon principale de « 1001 Fontaines », tient dans l’identification des entrepreneurs ruraux comme étant le maillon vulnérable de la chaîne. C’est à eux que revient la tâche de développer la clientèle et la mission sociale. « 1001 Fontaines », a donc capitalisé sur l’identification des entrepreneurs et leur accompagnement technique, commercial et financier.

78


ANNEXE 4 EXEMPLES ET ÉTUDES DE CAS DU RÔLE DES FONDATIONS PRIVÉES  La Fondation Shell a développé le principe d’« ADN du business » selon lequel le secteur du développement doit s’inspirer des meilleures pratiques du secteur privé pour créer de la croissance et de l’emploi dans l’optique de faire reculer la pauvreté et de protéger l’environnement357.  Au Kenya et au Rwanda, la Sustainable Healthcare Foundation a créé des pharmacies et dispensaires afin d'améliorer l’accès aux médicaments des populations des bidonvilles. Elles, fonctionnent selon un système de franchises, proposent des soins abordables et générent suffisamment de bénéfices pour offrir aux infirmiers franchisés et aux salariés une rémunération compétitive358.  La Fondation Rockefeller finance des études sur l’impact investing dans plusieurs pays d’Afrique. Ce projet vise à mieux comprendre les obstacles politiques et à recommander des politiques nationales susceptibles de favoriser la croissance de ce secteur.  En Afrique, l’émergence de grandes fortunes privées, donne naissance à une nouvelle génération de philanthropes. La fondation Tony Elumelu359 vise par exemple à promouvoir l’excellence en matière d’entreprenariat et de leadership commercial à l’échelle de l’Afrique. Elle investit dans des entreprises africaines innovantes ayant un impact financier, social et environnemental positif sur des secteurs clés du développement.

79


TABLE DES MATIÈRES LISTE DES ABREVIATIONS ....................................................................................................................... 5 SOMMAIRE .................................................................................................................................................... 7 INTRODUCTION ........................................................................................................................................... 8 PREMIERE PARTIE : CADRE DE REFERENCE ET THEORIQUE DE L’ETUDE .................................. 11 CHAPITRE 1 : DEFINITION DES TERMES ET JUSTIFICATION DU SUJET ......................................... 12 1. DEFINITION DES TERMES ..................................................................................................................... 12 1.1 LE SOCIAL BUSINESS ........................................................................................................................... 12 1.2 LA SOCIETE CIVILE .............................................................................................................................. 14 1.3 INCIDENCE ............................................................................................................................................. 15 1.4 DEVELOPPEMENT DURABLE ............................................................................................................. 16 2. JUSTIFICATION ET PERTINENCE DU SUJET ...................................................................................... 17 2.1 JUSTIFICATION ...................................................................................................................................... 17 2.2 LA PERTINENCE .................................................................................................................................... 18 CHAPITRE 2 : LA PROBLEMATIQUE........................................................................................................ 18 CHAPITRE 3 : CADRE THEORIQUE .......................................................................................................... 20 1. LES OBJECTIFS ET HYPOTHESES DE LA RECHERCHE ................................................................. 20 1.1. LES OBJECTIFS DE LA RECHERCHE ................................................................................................ 20 1.1.1 L’objectif général ................................................................................................................................... 20 1.1.2 Les objectifs opérationnels ..................................................................................................................... 21 1.2.1 l’hypothèse centrale ................................................................................................................................ 21 1.2.2 les hypothèses secondaires ..................................................................................................................... 21 2. LA REVUE DE LITTERATURE ............................................................................................................... 21 2.1 LE SB COMME INNOVATION SOCIALE ............................................................................................ 22 2.1.1 Les innovations sociales : définitions, enjeux, acteurs ........................................................................... 22 2.1.2 Enjeux des innovations sociales : racines locales et baromètre social .................................................... 23 2.1.3 Les entrepreneurs sociaux à l’origine des projets d’innovations sociales............................................... 23 2.3 LE CAS DU SB ET LE CONTEXTE DE PAUVRETE ........................................................................... 27 2.3.1 le contexte de pauvreté et le développement économique ...................................................................... 27 2.3.1.1 le paysage de la pauvreté à grands traits .............................................................................................. 27 2.3.1.2 la lutte contre la pauvreté par le développement des activités économiques ....................................... 29 2.3.2 le sb, l’histoire d’un modèle d’innovation sociale en émergence ........................................................... 30 2.3.2.1 le modèle dominant de sb étroitement lié à l’histoire d’un homme ..................................................... 30 2.3.2.2 le sb, du concept de micro crédit au modèle d’entreprise .................................................................... 32

80


2.4 LE SB, LES PREMIERES ETAPES VERS LA FORMALISATION D’UN MODELE D’ORGANISATION....................................................................................................................................... 34 2.5 COMPARAISON SB ET OSC.................................................................................................................. 37 3. LA METHODOLOGIE ............................................................................................................................... 40 3.1 LA STRATEGIE DE COLLECTE DES DONNEES ............................................................................... 41 3.2 L’ANALYSE ET PRESENTATION DES DONNEES. ........................................................................... 41 2ème PARTIE : PRESENTATION ET DISCUSSION DES RESULTATS DE L’ETUDE ...................... 43 CHAPITRE 1 : LA SITUATION ACTUELLE DES OSC LIEE AUX ENJEUX ORGANISATIONNELS ET ECONOMIQUES ............................................................................................................................................ 44 1. LA PROBLÉMATIQUE DES IMPLICATIONS MANAGÉRIALES ....................................................... 44 1.1 UN PERSONNEL PEU QUALIFIE ET PEU MOTIVE........................................................................... 44

1.2. LE SYSTEME DE MANAGEMENT ..................................................................................................... 46 2.1 LA RARETE DU FINANCEMENT ......................................................................................................... 50 2.2 L’ABSENCE DE FONDS PROPRES....................................................................................................... 51 3. DES IMPACTS MITIGES .......................................................................................................................... 52 CHAPITRE 2 : LE DEVELOPPEMENT DURABLE, FACTEUR DE CONCILIATION DU SOCIAL BUSINESS ET DE LA SOCIETE CIVILE .................................................................................................... 53 1. LA SOCIÉTÉ CIVILE AU CŒUR DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ............................................... 53 1.1 LES ENJEUX FONDAMENTAUX DES ACTIONS DES OSC ............................................................. 53 1.1.1 La promotion et protection des droits de l’homme et de l’environnement ............................................. 53 1.1.2 le plaidoyer ............................................................................................................................................. 54 1.2 LA SCI : ENTRE LOGIQUE DE BESOIN ET LOGIQUE DE PROFIT ................................................. 54 2. LE SOCIAL BUSINESS, UNE STRATÉGIE ÉCONOMIQUE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ... 56 2.1 LE DEVELOPPEMENT DURABLE, UN CADRE INSTITUTIONNEL................................................ 56 2.2 LE SOCIAL BUSINESS, UNE APPROCHE DE LA SOLIDARITE ECONOMIQUE .......................... 58 3. DISCUSSION ET PERSPECTIVES........................................................................................................... 59 CONCLUSION .............................................................................................................................................. 63 BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................................ 65 ANNEXES ...................................................................................................................................................... 73 TABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................................ 80

81


RESUME Le financement du développement durable est un problème pour les États africains en général et la Côte d'Ivoire en particulier. Les conséquences qui en découlent sont très nombreuses. Quand on sait qu'en Côte d'Ivoire les objectifs du développement durable sont portés par les organisations de la société civile, il est primordial de repenser la recherche de financement. Ainsi, la relation social business et société civile s'avère être une solution pour le financement du développement durable en Côte d'Ivoire. Il faut donc comprendre son fonctionnement afin de l'utiliser. Bien maîtriser, cette relation permettra aux organisations de la société civile d'être autonomes. Aussi, pourront-ils mettre en œuvre des projets à impacts durables et contribueront au développement durable de notre pays. Mots-clés : développement durable, états, financement, impact, objectif, organisation, projet, social business, solution.

ABSTRACT Financing sustainable development is a problem for African states in general and Côte d'Ivoire in particular. The resulting consequences are very numerous. When we know that in Côte d'Ivoire the objectives of sustainable development are borne by civil society organizations, it is essential to rethink the search for funding. Thus, the social relationship business and civil society proves to be a solution for the financing of sustainable development in Côte d'Ivoire. It is therefore necessary to understand how it works in order to use it. Well mastered, this relationship will allow civil society organizations to be autonomous. Also, they will be able to implement projects with lasting impacts and contribute to the sustainable development of our country. Keywords: sustainable development, states, financing, impact, goal, organization, project, social business, solution.

82


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.