Monument Édition 1 FR

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micha laury

Né en Israël en 1946. Vit et travaille à Paris. Micha Laury constate que malgré les progrès scientifiques et technologiques qui ont libéré l’homme d’un certain nombre de taches laborieuses et dangereuses, les formes d’aliénation du corps humain n’ont pas disparu. Le corps humain est devenu une chose au service d’idéologies. L’artiste matérialise un certain nombre d’insultes proférées dans l’armée pour dénoncer ce processus d’humiliation et de conditionnement militaires : « Eating Straw, Shiting Cubes, Hard Life » ou « Don’t be a chocolate Soldier » induisant qu’un combattant, un vrai, ne « les a pas » en chocolat. Il voulut même diffuser ces petits soldats de chocolat dans des boulangeries… Le travail de Micha Laury est hanté par le bunker. Soldat israélien, il a passé de longues heures à l’intérieur de ces constructions si nombreuses dans le pays. Il est devenu l’image de l’abri de survie. Cette distribution de l’espace réduite au minimum se retrouve dans les dessins abstraits où l’artiste simplifie par la géométrie bancs, chaises et murs de l’espace vital du bunker ou de l’atelier. « À travers ces bunkers, qui se referment sur eux-mêmes, Micha Laury dénonce ouvertement l’incommunicabilité du monde. (…). Les nouvelles technologies ont développé cet isolement de l’homme contemporain. Depuis son appartement l’homme peut dorénavant être connecté avec le monde sans en sortir. L’artiste parle de cette société individualiste qui se développe sous la forme de bulle. De bunker. De l’habitat à la voiture en passant par la télévision et l’ordinateur. Des bulles qui permettent de se déplacer virtuellement, de communiquer sans se toucher, sans se voir, sans bouger. L’ère du réseau. » Jérôme Sans, p. 20 Micha Laury, Sculptures, installations et œuvres sur papier, 1967-1994, Catalogue collectif, 1994.

wolf vostell

Né en 1932 à Leverkusen en 1932, décédé à Berlin en 1998. Au sein de Fluxus, Vostell ne cesse de fustiger le société de consommation par des mises en scène dramatiques. Si une de ses installations, Heuschrecken (Sautrelles) évoque le bombardement de Hambourg, l’artiste s’attache surtout à critiquer le présent à travers deux symboles que sont la voiture et la télévision. Il donne une vision accélérée du vieillissement qui dérègle le monde technologique. La notion de « décollage » que Vostell pose dès 1954 l’incite à utiliser directement les véritables objets. Le béton, matériau prisé par l’artiste et dont la masse évoque inévitablement le bunker, pend ici la valeur

de ruine éternelle : aucune usure et a fortiori aucune poétique ne sont à attendre d’une société où seul le béton résiste à l’obsolescence des objets.

john cornu

Né en 1976 à Seclin. Vit et travaille entre Paris et Rennes. John Cornu aime diversifier ses matériaux et ses techniques (sculpture en bois, marbre, béton, photographie, greffe architecturale, tatouage, néon, aquarelle). Beaucoup de ses productions métissent une attitude moderniste (monochromie, sérialité, froideur, modularité...) et une tendance plus romantique, davantage de l’ordre de la ruine, de la cécité, de l’effacement. Ses gestes aiment à dérégler les archétypes d’un modernisme aussi fascinant qu’idéaliste et les conditionnements à teneur paranoïaque de certains matériaux ou de certains dispositifs (meurtrière, chausse-trappes, barrières anti-char, panoptiques). La mort dans l’âme est une série de « ready-mades » romantiques, anciens billots de boucher noircis, achetés à des professionnels en fin de carrière ou décédés. Vanités aussi palpables que fantomatiques, ces pièces - dont la surface s’est comme vallonnée au fil du temps donnent à voir, simplement et directement, les traces et les stigmates des coups de lames reçus. Cette violence trouve bien évidemment un écho dans les guerres et conflits. On parle en effet souvent de la Première Guerre mondiale comme d’une véritable « boucherie » et d’un carnage au vu du terrible bilan humain. Cette surface noire, creusée par l’accident et les coups de couteau répétitifs, traduit l’idée d’un territoire désolé, érodé, abîmé et usé. Ces billots deviennent des paysages dévastés, ceux d’un champ de bataille ou d’une guerre de tranchées.

laurent sfar

Né en 1969 à Paris. Vit et travaille à Paris et Grenoble Laurent Sfar s’intéresse particulièrement à l’architecture et à l’espace public. Nombre de ses œuvres et réalisations sont souvent des réponses à un contexte particulier et à une appréhension spécifique de l’espace. Dans Excavation, il a enterré sous des couches de sédimentation la maison réalisée par le Corbusier à la cité de Frugès à Pessac près de Bordeaux. Parmi les 50 habitations de cette cité jardin construite en 1925, une seule maison a en effet disparu pendant les bombardements de la seconde guerre mondiale. Aucune image précise ne semble avoir survécu. Par cette fossilisation


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