Poémes 2001-2004. Bastian

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Bastian Textes lus dans le cadre des soirées poétiques des ‘‘ Mardis de la Treille ’’ 2001-2004 Lille


Écrire comme l'on respire c'est facile à dire Le temps désespère dans les repaires de brigadier chef Le menu larcin se fait rare dans les églises peu d'orthodoxes l'homme résiste ou il pleut. Les nouvelles mon frère, les nouvelles tronquées dans un cône pochette surprise acide Ah cette brume encornée Cocu de l'in déformation À qui réussit les guerres ? Pas de pétrole Anne Pas d'idée Gégé Ouvrons le journal à la rubrique faire un feu La porte de mon voisin est plus petite que le jardin de ma tante La besace si lourde au miséreux La misère pittoresque (voir la page en quadri) Celle de la publicité a droite de l'article L'article a combien le signe ? Je compte mes mots Je murmure l'impossible Croire encore en l'homme et oublier ses dieux


Jeux. L’enfant jouait avec des cubes, Des petits bouts de cartons Avec des animaux en plastiques Jouait à monter sur les chaises Au marchand de fruits et légumes Avec une patinette en bois Un train en fer blanc peint de couleurs vives Avec ses mains ses pieds Parfois il ne jouait plus S’asseyait sur son cul et Longuement restait là à fixer Les parois fissurées À ces jeux l’enfant grandit Abandonnant pinceaux cerceaux À ses oreilles sifflaient des mots de haine À présent il courait dans les ruelles Pan ! pan ! tiens t’es mort Tenant dans ses mains la pale copie en bois d’un revolver …………………Dans le lointain sifflaient les balles de haine À ces jeux l’enfant grandit. Hier encore il jouait à la bombe.


Les Vacances C’est fini Fermer les yeux sur les pavés gris, s’y tordre les chevilles en rêvant d’herbes grasses, pivoter le cou, chercher un coin de ciel bleu. Les cahiers neuf ne changeront rien, nous les commencerons toujours avec application. Le monde s’ébroue dans les contradictions, nous reprenons nos places où nous les avons laissées quand nous les retrouvons… Mais cela n’arrive qu’aux autres… J’ai ce matin vu sur le parvis d’une banque dite populaire un homme assis vêtu d’un costume gris, un trait d’union blanc entre le pli de son pantalon et les chaussures noire bien cirées Une main tendue, le regard baissé, Un chien dormait à ses cotés. Lâchement je suis passé. Tout au long de la journée j’ai songé à cette silhouette découpée, J’ai construit mille histoires grises et invisibles Le soir en repassant j’ai glissé discrètement une pièce dans la paume de l’homme toujours assis Avec en tête un merci-pour la rage de vivreEt l’envie de ne rester assis


11 septembre 2001 Dans les décombres de la vie Un homme attend la fin de sa journée Avant même de l’avoir commencée Pendant huit heures Il comptera des chiffres Et quelques lettres Puis s’en ira La tête vide de multiplications Retrouver ses tiroirs Aux lettres jaunies En pensant à tous ces avions Qu’il n’aura pas pris.


Mettre en place, à leur place les choses à faire d’urgence ! Sortir le nez de l’ordinateur qui est un faux camarade. Le mettre à la rue(le nez), et respirer l’air du jour, ça clarifie les neurones et met à jour les applications. En cas de problème, ré initier toutes les commandes avant le disque dur, ce qui serait fatal pour les données. Vérifier les conflits d’extension et passer sur le trottoir d’en face en regardant bien à gauche, en France. Ne pas se soucier du flot de bogues urbains, bien sauver sa peau, mettre les mains dans les poches, se sentir léger, passer entre les virus sans avoir à vider la poubelle, ne pas se cogner dans les balises. Passer devant les menus sans avoir l’eau à la bouche, et constater qu’au fond des poches, il n’y a que ses doigts. Se connecter sur la souris d’en face, retraverser en prenant gare au bus, la vie est dangereuse, vraiment, puis évaluer le volume externe, et se détourner avec application, à la vitesse de déconnexion, enfin, ouvrir une fenêtre sur la vie, jeter dossiers et documents, pointer un œil vif sur son amour, et double cliquer pour ouvrir.


Bonne Année. Attention fragile La bite ne fait pas le moine Le châle pas le Briand Anatole à la colle Aristide dans son slip Jeux de mots`Jeux d’idiots Autour de mon écharpe blanche Je flanche La vérité éclabousse T’inquiète mousse Le capitaine est à la barre Ce que l’espoir est au bordel L’année prochaine ne voguera Guerre mieux que la précédente La réalité n’est pas virtuelle Les camisoles électroniques N’y changeront rien -Alors t’es Euro ?


Ballade Après débourrage, dressage, des tours de manèges,des galopades elle lui à susurré des mots doux comme tout fourrage. Sans cravache, en cadence au rythmes de son indépendance, assise en amazone, regard tendu à l’horizon d’une monte sur, sans éperons elle trône sans façon cet animal avec aplomb pour parcourir l’hexagone en silence et sans dérobade. Ils arpenterons ensemble de longs chemins sans croc-en-jambe; puis fatigués des syllabes, des vers, de compter les pieds sur les doigts, de ces rencontre d’hommes sans fois, ils rentrerons enfin. Las de tout ces voyages Elle le bouchonnera, le bichonnera ce fidèle cheval de bar ...ce tabouret !


Elle Elle passe et repasse devant eux. Le regard se pose sur l’échine Le dos d’abord, elle se dévisse la tête Légèrement, comme ça près du cœur Elle repasse encore Tend la main et en tire doucement un à elle Puis le repousse fermement Ils sont plusieurs là à attendre Un geste une caresse Certains n’attendent qu’un regard D’autres frémissent à son passage Celui-ci par exemple habillé de cristal D’autre vêtus de cuir galonné d’or Font les Fiers avec arrogance Toute la soirée elle repasse et repassera Sans cesse devant eux Ne sachant lequel choisir pour sa faim Sa fin de soirée. Eux bien serrés les un contre les autres Ne diront rien, suggéreront au mieux Par leurs couleurs pâles tendres L’envie d’être pris Elle n’en fera rien, Palpera le derrière de celui-ci Frôlera la face de son voisin Puis finalement en sortira un du rang Le tirera à elle avec décision L'écartera doucement Avec affection Puis le dévorera enfin ! ... Ce livre.


J’aurais voulu être celui qui ne nuit Dans l’ombre de l’arbre qui pleure, Etre un jour sans heures J’aurais voulu Etre sur cette branche de l’oubli Sans tomber du nid. J’aurais voulu Tirer la vie par les deux bouts, Mais où sont les bouts ? Ne pas effeuiller mon cœur Aux vinaigrettes acides Des désillusions, Prendre le vent en croupe Sans perdre ma cape d’enfance, Celle qui me servait à voler vraiment. Chanter juste et frapper fort Aux portes du désir, Ne jamais mentir à mes parents, Ni à mes amis, ni à mes amours. Pourtant, nous avons fait de beaux voyages, Mes mensonges et moi, Mais, Combien de fois as-tu raconté ta vie ? Combien de fois ai-je raconté ma vie ? Et nous nous rencontrons aujourd’hui. N’est-ce pas suffisant pour nous construire Un avenir maintenant Je n’écouterai plus Séraphine. Je ne crois plus à ses images. Tarot menteur, Le chien précède le fou, vraiment. Les tours s’écroulent Avant que le roi n’en sorte. La réalité vraiment. Séraphine a vendu ses enfants Aux bons demeurants. JEUX ne Jeux plus de ces jeux-là. Dire vrai aux détours d’une urgence, Savoir de quel côté tu penches. A l’heure du mercure, Ne plus sombrer en mer Par surcharge excessive dûe à la tempête. Babord tribord Tribut d’une rue vide-gousset, Vide-mémoire, vide de sentiments.


Bon an, Mal an, Nous continuons à respirer Notre mètre cube d'air A la seconde En constatant Que rien ne change En ce monde. Une année chasse l'autre Sans autre sentiment. Les cartes postales jauniront, Les textos laisseront la place Aux futurs textos de même Que les messages sur le répondeur. Et la vie continue avec Ses colonnes de chiens écrasés, De bateaux éventrés, de marées immondes, De gangrènes cérébrales, De céréales transgéniques, De clones et de clowns. Le père Pinocchio et la fée bleue Emballeront encore Des pantins désarticulés Que les doigts agiles des politiciens Mouvront avec dextérité. (c'est qu'aujourd'hui, ils ne sont plus de bois, mais bien de chair et de sang). Certains ont la foi, D'autres s'en fichent. Ce monde est déjà en friche. Bon an, Mal an, Je n'ai plus mal aux dents, Et pour cause ! J'ai mal aux tripes, Du vent ! Du large ! Des vérités premières, Des espaces circulaires Pour jouer aux quatre coins D'un monde sans passeport, Sans salles d'attente, Sans queue leu leu, Ni R.M.I . R.M.A. C.A. .... en frac Sans équivoque, Équilibriste d'équinoxe, Funambule en vrac, Je rêve que je ne rêve pas, Chimères désillusions, illusionniste en perdition, Vite, un taxi pour l'an neuf !


Jacadi Dans le silence, Visages masqués d’oubli. Le temps, sablier de vie Filtre la mort. Rester aveugle aux images mensongères Mille fois répétées. Couleur de sable, Couleur de feu, Bistre des albums de famille Brumes des matins irrespirables. Charles Fourier a dit : Nous vaincrons le monstre Avec une légion d’enfants. Fourier est mort. Wilhelm Reich a dit : Si mon histoire est juste Elle se répandra seule. Reich est mort. Karl Marx a dit : Si l’histoire se répète, C’est pour mieux se caricaturer. Marx est mort. Arthur Cravan a dit : L’amour va plus vite que la poste. Cravan est mort. Charles Baudelaire a dit : Plus l’homme cultive l’art, Moins il bande. Baudelaire est mort. Raymond Queneau a dit : Quand on a vu des guerres, Alors on commence à philosopher. Queneau est mort. Paul Eluard a dit : Il y a toujours un rêve qui veille. Eluard est mort. André Breton a dit : Vache du pauvre, fils du riche, Tous deux sont mortels. Breton est mort.


Mikhaïl Bakounine a dit : Rien n’est aussi stupide Que l’intelligence orgueilleuse D’elle-même. Bakounine est mort. Paul Valéry a dit : La guerre, un massacre de gens Qui ne se connaissent pas Au profit des gens qui se connaissent Mais ne se massacrent pas. Valéry est mort. Robert Desnos a dit : Le journal est un ogre qui tue Ceux grâce auxquels il vit. Desnos est mort. Federico Garcia Lorca a dit : La terre est probablement Paradis perdu. Lorca est mort. Romain Gary a dit : C’est pas nécessaire d’avoir Des raisons pour avoir peur. Gary est mort. Fernando Pessoa a dit : C’est l’amour qui es essentiel, Le sexe n’est qu’un accident. Pessoa est mort. Pablo Picasso a dit : Pourquoi je suis communiste ? C’est bien simple : Je possède un milliard Et je veux le garder. Picasso est mort. Emile Zola a dit : Des jeunes gens antisémites, Ça existe donc encore cela ? Il y a donc des cerveaux neufs, Des âmes neuves Que cet imbécile poison A déjà déséquilibrés ? Quelle tristesse, quelle inquiétude Pour le vingt-et-unième siècle Qui va s’ouvrir. Zola est mort.


Arthur Rimbaud a dit : Allons ! la marche, le fardeau, Le désert, l’ennui et la colère ! Rimbaud est mort. Aujourd’hui, Se taire et fermer les yeux Devant ce miroir, Honte de l’impuissance Devant cette puissance élaborée Au seuil des déserts. Face contre terre, Sable en bouche, Un berger est mort Sans avoir rien à dire.


Écrire couchés sur un petit nuage rose, écrire en alexandrins, en prose en langueur, en longueur en vers et contre tout les vérités ordinaires parfois moroses quitte à passer pour un fou effleurer du pied sa voisine Chanter ensemble des comptines, susurrer des mots d'amour Jusqu'à la tombée du jour Puis rêver d'un monde unique Sans préservatifs ni haine ni trique. Le mal est fait, les amours mortes. Les pharmaciens jubilent dans l'arrière boutique Pardon je m'emporte! Je passe du COQ à l’âne (Je préfère l’âne, moins chauvin) j’oublie la rime barbelée la prose comme consolation La prose comme constellation. Écrire, en se raclant la gorge Écrire sans sulfure ni histrions des mots encore à découvrir sans blesser le passé. Avec le savoir des lumières l'exigence des chaumières A tout feu toutes flammes que la tempête nous a léguées Sur papier hygiénique Sur papier nostalgique Sur papier sulfurique Ecrire au bord des voies ferrées Un sac à malice à ses pieds Bourré d’alexandrins d’ alexandrie En regardant le train passer ÊTRE dans ses petits souliers Sans quitter ses papiers. Ce n'est pas un état juste c'est juste un état policier. Mais pardon je m'emporte! Je dépasse les bornes d’un terrain piégé


Nous avons voyagé de tendresses en détresses, entre ciel et mer. À jouer la belle de l'air nous avons vu - entre vu misères et lagunes fleuries. Dans les paroles des chants populaires, l'épine du pouvoir, sans rimes ni déchoir. Il fallait tenir n'est-ce pas ? Cuba île dans l'île oublier des sortilèges faciles où laStudbaker roule en Volga où 403 roule en Lada. Paciencia amigo, paciencia. Critiquer Castro c'est facile, critiquer l'homo c'est surfait. Chanter la chanson latente des tourments en toutes attentes, briser la parole entre deux mensonges; pardon, personne ne ment, juste un silence composé entre vérité et murmure. C'est fou ce que l'homme peut supporter pour avoir un frigidaire plein, et ce n'est pas fini, et ce n'est pas fini. Faisons les comptes : les ashkénazes au nord, les séfarades au sud, Israël sur son île et la Palestine dans ses barbelés, le monde jugulé entre ciel et mer entre pouvoir et dollars. J'écris, tu écris nous vivons dans l'espoir de los compañeros Rester debout encore au seuil des contradictions. Je suis juif, oui. Tu es arabe en vrai à l'aube des médinas. Finalement, tu sais, aujourd'hui je suis athée de vivre vraiment, avec les mots de la musique, avec les sons sous-entendus. Et vous voudriez que j'écrive des poèmes?


Le temps du lilas C’était le temps du lilas. Le bédouin l’a dit Avec un grand sourire. - Cela ne changera rien pour moi, Ce ne sera pas pire. C’était le temps du lilas, A coups de chars, Des soldats défonçaient des portes de bois Que d’autres hommes avaient sculptées De leurs mains d’artisans. C’était le temps du lilas. Un père pleurait sa famille perdue Dans les décombres d’une maison, Gémissant et hurlant à perdre la raison. C’était le temps du lilas. Des enfants mutilés Attendaient dans les couloirs l’amputation, Le regard perdu dans les murs blancs. Du sang, du sang, D’une guerre chirurgicale. C’était le temps du lilas. Le visage des prisonniers empaqueté Dans un sac de papier kraft Identique à ceux des drugstores Pour emballer les bouteilles d’alcool. C’était le temps du lilas. Les femmes tendaient les bras Vers des causes perdues. Des femmes en noir, en deuil déjà. C’était le temps du lilas. Le bouquet à dix-sept millions de dollars, Vase et renouvellement d’eau compris. Une guerre propre en quelque sorte ! Aujourd’hui, c’est le temps du muguet, Un Euro le brin... Ça valait la peine d’attendre. Porte-bonheur clochette A porter à la boutonnière, Fête du travail... Mais qui a vraiment envie De fêter le travail ?


Que dire sur l’horizon des assis ? Paysages en dedans, Rivages d’algues et de plastique, Les poubelles sont pleines, camarade. Le regard par-dessus les vagues à l’âme, La proximité infuse, Le proxénète en cavale, La fille de joie n’en mène pas large. La morale au carcan d’or cisaille Le cou du pauvre penseur. - Alors, comme ça, Tes bourses s’effondrent ? Que dire sur la perspective fuyante ? Vallée de l’impossible, Falaise de granit et de plastique, Le flipper fera tilt, camarade. Les yeux dans le brouillard, Les carambolages carambolent Sur la 10, la 11, la 13. Les auto-mobiles cercueils d’enfance. Rodin en perdrait son latin. Pauvre penseur. - Alors, comme ça, tu rêves à gauche ? Que dire sur la fuyante des lignes? Panorama des illusions, Littoral de nos entrailles De chair et de plastique. Les hôpitaux grésillent d’attente, L’oreille au dos du mur, J’entends susurrer la patience. Le bal des lits blancs commence. Retourne le disque, camarade. Passe du blues aux roches, Accroche ton sourire à tes bretelles Et tend tes bras à l’infini. - Alors, comme ça, t’écris? - Que dire... - Mais, t’écris quoi ? - J’écris Tchétchéne !


Les mots ne sont pas musique, Vous ne les entendrez jamais chanter. Ils restent couchés sur le papier Coincés entre une virgule Et trois points de suspension. Ne prennent naissance Qu’avec la voix. Les mots n’ont pas de saveur Citron acide, pomme tendre Banane, oh ! banane, L’eau à la bouche vient, Le fruit aux lèvres. Les mots ne sont point tactiles, Ils ne sautent aux yeux des enfants, Accent aigu, chapeau de gendarme Restent sagement Accrochés aux voyelles. Les mots n’ont pas de couleur : Bleu, c’est bleu, Bleu clair, bleu foncé, bleu turquoise, Bleu infini des mers. Les mots n’ont pas d’odeur (sauf mauvaise haleine) D’ailleurs c’est simple, Tout ce que n’ont pas les mots,l’argent l’a. Faîtes vos courses!


Mesdames et Messieurs, Voici les sujets que nous allons développer Dans notre édition du soir: L’attentat du pilier nord de la Tour Eiffel Qui a fait trois cent dix morts et quarante-cinq blessés A été revendiqué par Le Groupe des Chiens en Laisse. Cette information de la S.F.P. Rest à vérifier; Le gouvernement, Vu le déficit budgétaire Des trois derniers jours, A décidé de taxer l’air pur De dix pour cent. L’air vicié reste inchangé. La Tchétchénie a envahi la Russie Et n’est plus qu’à sept kilomètres de Moscou. L’armée américaine s’est repliée en Sibérie. Drame en Provence : manque de morphine. Soixante P.A. (Personnes Agées) Ne peuvent mourir décemment à l’hôpital du Joli Rêve. Une manifestation est prévue devant La préfecture de Nice. Jugement du Préfet Gilbert : Non-lieu. Le Mérite Crapuleux lui a été décerné Par l’Assemblée Nationale. Chômage : toute personne relevant Du statut des Artistes sera Définitivement rayé de la carte de France.


Je suis un mauvais élève. Je n’ai pas appris mes leçons. Le tableau restera vierge Et tant pis pour la récitation. J’ai séché l’ennui, Je cours sur les margelles. Crever mon regard A l’infini, Faire la révérence Aux nuages. Regarder bien haut Pour éviter toute tromperie; Eteindre la radio Et chanter même faux “Le temps des cerises”. Pardon de déserter l’impossible, Lucidité tue plus que cigarette.

Petit yankee, Reste assis Là, sur ton sac. Mâche ta gomme Et pense à tout ce rien, Ce désert de sentiments, Rumine encore Ce silence. Goût d’Hollywood, Non, tu ne marcheras pas Sur les étoiles. L’absurde les a recouvertes De sang.


Demain tu vas te relire Trouver tout cela ridicule La vie des mots s'achève Au seuil des lamentations Il faut de bons poumons Pour respirer à l'aube des versifications En vers et contre tout Tousse tes cigarettes Joyeusement fumées A l'ombre des soubrettes Non apprivoisées. Tout résiste, le vent Les tremblements sur l'échelle Richter Tout çà... Au fait à quoi ça sert ? Des mots D'oubli, de nostalgies Ou si simplement de vies. Je conterai la misère D'une feuille blanche Pliée en quatre pour vous ! Les mots en tête Sur ce vide d'espace immaculé Respect Des mots A dire pour mémoire Y'a urgence ! Pirater l'imprévu Bévue des loisirs en campagne Vue belle de la ville en oisif.


On ne vous a pas attendus La vie n'est pas un wagon que l'on prend en marche D'ailleurs la mort d'un homme n'arrête pas un train Le temps fait fureur comme le rouge à tes joues Ne pas être reconnu mais vous reconnaître C'était la règle si règle il y avait Pourquoi cette activisme ? pour agiter les dimensions ? Pour dire je fais ? je fais faire. Je me plais à faire Dans la respiration des mots On n'attend rien Ni le vent pour gonfler les voiles Ni les voiles pour cacher le mensonge Ni les mensonges pour faire une guerre On attend la bonne nouvelle Non, pas le messie, ni le jugement dernier C'est tous les jours La poursuite de l'infini Qui se cache dans la grande rigolade J'aimerais... Ce mot à lui seul nous fait voyager.


Demain tu vas te relire (1) Et trouver tout cela ridicule La vie des mots s’achève Au seuil des lamentations Et il faut beaucoup de poumons Pour respirer à l’aube des versations En vers et contre tout Tousse tes cigarettes joyeusement fumées Dans l’ombre des soubrettes mal apprivoisées Tout résiste, le vent, les tremblements sur l’échelle de Richter. Tout ça Au fait A quoi ça sert ? Des mots D’oubli Ou si simplement de vie Ce soir bazar-bizarre-hasard Bref beaucoup de H aspirés De la musique des mots Reste la musique de la rencontre Restent les yeux humides, l’amitié élastique Silence L’habitude, une maladie d’assis


Le nom des villes qui chantent Ne me fait plus rêver Le hasard mal rasé vient frapper Au seuil de l’enfance La terre cède sous les pas En linceul d’incertitude L’aube ne ment pas : c’est le désespoir Le monde transpire ses nouvelles Politiciens en quête d’absolu Salle des pas perdus Juges vendus Banque route autoroute Guerres des uns et des vises égaux Et coup de gong pour oublier tout ça Le nom des villes qui chantent Ne me fait plus danser Les jours de pluie je reste assis Un livre sur les genoux Lu en transparence L’atlas des sentiments Et parfois me mets à pleurer Le monde transpire ses nouvelles Jouets en plastique bon marché Froid au delà des tentures Bises pour les mal logés Nourritures coloriées Jeux de l’oie pour société Mais qui sautera la douairière ? Le nom des villes qui chantent Ne me fait plus valser L’amour et la mémoire Pour tout armement La rage et l’espoir Pour tout changement Le monde d’en bas va se réveiller !


Icare Quand je serai vieux Je fabriquerai un planeur En papier mâché Avec tous les mots d’amour Mâché dans ma jeunesse Le cachet de la poste faisant foi Je pourrai croire en ces mots bleus Aux ailles de velours M'envoler enfin entre nuages et terre Voir le monde sans retour Je planerai longtemps Entre vents et sentiments Au plus haut de mon cœur Sans autre émotion Que salive sèche La mémoire me reviendra Les yeux de ma mère La fureur le mon père Les dimanches perdus Le rire des mes enfants Les migrateurs m’accompagneront Sans passer de frontière Le tapis argenté de l’océan Tracera ma route Plus loin chantera le vent L’aéroplane prendra de la hauteur Le soleil jaunira les ailes de souvenirs Les feuillets se détacheront En mille lamelles de regrets éternels Et je tomberons Tomberons Quand je serai vieux Je fabriquerai un planeur En papier mâché Avec tous les billets d’amour Digérés dans ma jeunesse


Tévé Midi quinze Certains à table D’autres aux gamelles Le présentateur annonce la couleur Infos virtuelles en arpège Collage sarcastique Jeux de dentelles Attention certaines images Peuvent choquer Commentaire :... violence à Haïti. Visuel : un homme carbonisé sur le trottoir Entre deux pubs Loin de la petite Viet’ Courant sous les bombes de napalm Combien de pubs Crèmes de jour Parfum de soirée Chemise de nuit Café corsé Quatre-quatre tout terrain Entre ces deux images Attention une image Peut en cacher une autre La banalisation de la terreur L’accoutumance à la peur L’indifférence de l’autre L’enfer c’est les autres Vivre c’est les autres C’est cela...c’est cela Des phrases en sourdine Sardines en boîte Tout est en place Sur les rayons Carrefour Des inquiétudes et mensonges De certitudes. L’histoire dans les livres Fermés rangés En bibliothèques d’oubli. La grande canicule Réveille les statistiques Chacun compte ses morts Sur les doigts de la foule Finalement “les vieux” Ça sert pas à grand-chose... Point de suspension sur-pension. Traînons dans les bistrots Il y fait chaud. Désertons les guerres froides Dansons au son accordéon Tous à la queue leu leu de l’impossible liberté.


Dans les boîtes à chaussures il y a des photos Lire dans les jambages des jours heureux L’insouciance jeunesse au sourire carnivore. Les clichés jaunis de celui-ci, celle-là Se revoir en culotte courte, cheveux en brosse Penser au temps passé en conjuguant l’avenir Traces de bromures mortelles aux sentiments Un regard et c’est déjà trop tard, La tendresse se fige sur papier glacé. Le monde traîne son album souvenirs, Mais personne pour l’ouvrir. Personne pour voir les images, Ni lire les mots du grand cahier de vie Toujours recommencer. Les guerres, les famines, les maladies, Le tremblement de la terre, les morts. Mais que font les vivants ? Ils laissent des traces pour guider le suivant, Des traces inscrites dans le marbre, Dans l’ivoire des parchemins, Des traces de sang. Et l’homme s’en lave les mains. Dans les boîtes à chaussures il y a des photos. Celles d’une vie : La mienne. Ma route serait désert sans le tracé des autres.


1 Avril Sans blague... Nous rions toujours des poissons plantés dans le dos. Nous rions jaune si, en nous approchant nous pouvons lire les nouvelles imprimées dans le papier découpé, que d’arêtes ! Queues de poissons mensonges nageant dans les contradictions, malheurs des uns, ricanements des autres, une vieille histoire déjà. Alors, rions ! Rions d’un rien, l’humour fait la force. Plus de poèmes pleurnichards, de textes revanchards, de déclarations d’intention, de manifestes infestés, d’infectes couleurs délavées - le rouge devient rose dans la grande lessive, plus de bien sûr évidemment, de marche arrière, de créneaux languissants, plus de pétitions aux mille signatures, de livres réclamations, plus d’acclamations du peuple dans son jardin d’acclimatation, plus d’animaux sauvages en cage, tiens, même plus de cages ! Plus rien Un grand rire à l’unisson, une fusion désopilante, un jour neuf sans dessus-dessous, ni devantderrière, sans le sou, tout sur le champ, tant mieux, et tant pis pour eux : les tristes


Le train de l’aube (Madrid 11/03//2004) Le train de l’aube n'interrompra pas sa course. Les paysages, les gens défileront. J’aimerais pourtant m’arrêter à chaque gare Aussi simple soit-elle Pour y compter les oiseaux rares. A peine ai-je le temps De fermer les yeux Qu’une nouvelle saison s’annonce, Qu’un neuf cheveu blanc me pousse en tête. J’aimerais pouvoir Contempler tous les quais Les trains qui ralentissent en grincements musicaux Admirer l’herbe qui pousse entre parallèles Et deviner le crépuscule Du soleil couchant. Sans penser qu’un train peut en cacher un autre


A Etienne Roda-Gil S’agit-il de passer le temps ? De laisser le temps passer ? D’attraper le temps au passage ? De le paysager ? De tricoter avec des aiguilles quelques chaussettes invisibles ? L’instant, l’instant, celui où la pensée vagabonde, rapide, se fige dans le souvenir (passé) s'échafaude dans l’avenir. Les fondations sont faites d’erreurs, de réussites du temps passé. Du vécu dépend la solidité de nos constructions. Quand il faut trouver le chemin, la nuit a ses cris et sa vie. Parfois le ch’ti poème du mardi m’ennuie. Encore un message murmuré au vent, encore des mots acides dilués par la pluies, mot amer sans rivage, sans bitte d’amarrage autre que ce bar. S’accrocher à la continuité entre deux bières, dire et rêver ce monde égalitaire, puis retomber par terre, brisé par les contradictions et la bêtise sub-urbaine. Etienne Roda-Gil est parti une veille de Treille, ce faiseur de mots simples comme l’on respire disait : “On est toujours là on l’on veut aller. Ça s’appelle le destin. Ce n’est pas une question de talent, c’est une question d’être sensible aux choses qui vous ont touchés quand on est enfant, des choses qu’on a lues, des tableaux qu’on a vus. La couleur, le bitume. Les odeurs de la pluie”. Ce soir, il pleut dans mon coeur comme il pleut sur Lille, mais ce sont des larmes de devenir, la tendresse transpire. Je crois encore au chapelet de paroles d’étoiles.


Conte colorié Il était une fois... Un homme en gris traînant sa mélancolie dans une ville inconnue, cherchant un bouquet de couleurs à offrir à sa belle. Un bout de ciel bleu pour emballer du rose, une feuille verte dentelle d’affection, une souris jaune nonchalante, un rouge à mettre aux lèvres, du brun douleur profonde, du violet baba -cool, du blanc pureté des glaces, une orange d’Aîfa à peau grainée, du mauve barbe à papa, un brin de lilas pour les narines, une touche de noir jour de tristesse, du marine justement pour elle, et, de l’or opulente richesse. Ha ! j’oubliais: le mimosa annonce de printemps ! Mais il n’a rien trouvé de cela : Il était “marron”.


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