Promotio Iustitiae 104

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Promotio Iustitiae 104

2010/1

« Quand les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils. » (Ga. 4.4), au point de rencontre de l’Afrique, de l’Asie et de l’Europe. Dès lors, les flux et les reflux de l’histoire ont bien servi la diffusion de l’Évangile. L’Empire romain en a été le réceptacle jusqu’à ce que le christianisme y devienne religion d’empire sous Théodose 1er en 395. La chute définitive de l’Empire Romain d’Occident en 476 favorisa la diffusion du christianisme dans toute l’Europe où l’Église joua le rôle de matrice de la culture européenne en gestation. Les voyages des grands explorateurs de la Renaissance ouvrirent la voie aux missionnaires qui diffusèrent le christianisme jusqu’aux confins de la terre. Une nouvelle étape s’ouvre maintenant avec l’éclosion et le développement d’églises locales partout dans le monde, l’Europe sécularisée risquant d’apparaître comme une fleur fanée qui a lâché son pollen. Chaque fois, la foi chrétienne agit comme un ferment transformant les cultures de l’intérieur36, que ce soit la culture romaine, la culture européenne et maintenant les cultures mondiales37. On peut ainsi distinguer plusieurs âges dans ce processus historique que nous venons de décrire : la petite enfance romaine, l’enfance médiévale, l’adolescence moderne, et la maturité post-moderne… À chaque étape, des initiatives sont nées du sein de l’Église pour répondre aux nouveaux défis : le monachisme oriental au 3ème siècle, à la fin des grandes persécutions, lorsque le christianisme acquit droit de cité dans l’empire ; au début du 6ème siècle, le monachisme occidental qui joua un rôle essentiel dans l’évangélisation de l’Europe et la formation de la chrétienté médiévale ; la spiritualité franciscaine au début du 13ème siècle, insistant sur la pauvreté évangélique au moment de l’essor de l’économie marchande et de la bourgeoisie ; la spiritualité ignatienne au 16ème siècle, proposant l’expérience d’une relation personnelle avec Dieu, au seuil de la modernité38 ; la dévotion au Cœur de Jésus-Christ après les apparitions de 1673 à 1675 à Sainte-Marie Alacoque, contrepoint au culte moderne de la raison, moins de 30 ans après le fameux « Je pense, donc je suis » de René Descartes en 1647. Il est également difficile de ne pas voir la main de Dieu dans des événements comme la vocation de Jeanne d’Arc dont l’intervention amena la fin de la guerre de cents ans entre l’Angleterre et la France. De tels événements qui passent par la médiation d’hommes de foi39 et rouvrent un avenir qui se fermait, se sont produits aussi plus récemment : la réconciliation franco-

36La modernité qui s’est affirmée en opposition à l’Église et nie ses racines chrétiennes, n’aurait sans doute jamais existé sans l’apport du christianisme à la tradition gréco-latine. D’ailleurs, la quasi-totalité des grands noms de la modernité dans les domaines scientifique et philosophique sont de tradition judéo-chrétienne. 37Il est permis de penser, dans une perspective post-moderne, que le christianisme puisse jouer le même rôle dans d’autres cultures, suivant en cela l’exemple d’un précurseur comme Matteo Ricci. 38Les trois critiques de Kant résonnent comme en écho des termes de contemplation dans l’action, et de discernement qui caractérisent la spiritualité ignatienne. 39Intégration européenne : Robert Schuman, avec la contribution de Konrad Adenauer, Jean Monet, Alcide de Gasperi… Concile Vatican II : le pape Jean XXIII, avec la contribution des cardinaux Suenens, Döfner, Bea… et des théologiens Congar, Rahner, Murray… Chute du communisme : le pape Jean-Paul II, avec la contribution de Lech Walesa, Andrei Zakharov, Mikhaël Gorbatchev…

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