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EQUATEUR / Un petit belge dans la jungle

Équateur

UN PETIT BELGE DANS LA JUNGLE

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Rivière, bananiers, cabanes, bambous d’une dizaine de mètres, immersion totale à l'image de Tarzan ou encore langue indigène. Voici quelques mots qui résument mes 3 semaines de folle expérience en plein milieu de la jungle amazonienne en Équateur au sein de la communauté Shuar, pour le projet Selva y Vida avec le SCI.

Mes débuts…

Après 15 heures de vol et 8 heures de bus à travers les beaux paysages d’Équateur, je suis arrivé dans la ville de Macas. J’y ai rencontré César, très calme, passionné, amical, mais surtout fondateur du projet dans lequel j’allais passer les 3 prochaines semaines. Je m’attendais à une immersion totale dans un milieu naturel inconnu, et j’ai été plus que servi. C’est au milieu de la jungle que j’ai découvert son lieu de vie : un regroupement de 8 cabanes le long d’un fleuve mouvementé, qui allait me servir à la fois de lave-vaisselle, de douche et de piscine naturelle. César vit seul quand il n’y a pas de volontaire (ce qui est rare). Les infrastructures sur place sont donc faites pour accueillir des jeunes et moins jeunes du monde entier. La flore est ce qui m’a le plus impressionné, majestueuse et haute en couleurs. J’étais seul dans cet environnement avec César pendant deux semaines, puis un autre volontaire nous a rejoint pour ma troisième et dernière semaine.

© Pierre Boone Nos activités principales étaient la réparation de cabanes, le ramassage de feuillages pour les toits ou encore la coupe des arbres pour les structures. Grâce à cela, j’ai notamment appris à manier la machette. Concernant la nourriture, César se rendait toutes les fins de semaine à Macas pour faire des courses. Cependant, nous variions nos repas en allant pêcher à la ligne et au filet, en ramassant des chenilles (qui, une fois grillées, sont comestibles) ou encore en chassant, à l’aide de son piège pour animaux. Un jour, j’ai participé au processus d’abatage et de dégustation d’un cochon. C’est quelque chose de peu commun, car ça a un certain coût d’acheter une telle bête. C’était pour nourrir une dizaine de personnes qui avaient aidé à remplacer la lourde structure d’une cabane. Ce genre de tâche communautaire est évidente là-bas, car au sein de la communauté règne un sentiment de fraternité. C’est pour cette raison que, de temps en temps, nous nous rendions chez d’autres habitant·es pour proposer notre aide. Les divertissements durant le week-end ou après les journées étaient variés : balade dans l’immense jungle, partie hebdomadaire d’ECU-volley (volleyball à 3 contre 3, sport typique d’Équateur) ou sessions d’explications sur les vertus des plantes qui nous entouraient.

Des découvertes

J’ai vécu deux rencontres marquantes lors de mon projet : la première est César, le membre de la communauté Shuar qui possède le projet Selva y Vida. J’ai eu la chance d’avoir de longues conversations en sa compagnie, sur sa vision du monde et de la vie, qui m’ont ouvert les yeux sur beaucoup de thématiques. On communiquait en espagnol (langue principale en Équateur), mais il parle aussi sa langue, le shuar, ainsi que l’anglais. Au début de ma troisième semaine, j’ai également rencontré Samuel, d’origine angloallemande. Nous nous sommes naturellement bien entendus, par le biais de nombreux points communs : notre âge, l’amour pour la nature et même le goût pour l’aventure. Il m’a fait découvrir sa passion des champignons, ce qui m’a fasciné.

LA RECOMMANDATION DE PIERRE

Le livre La sobriété heureuse de Pierre Rabhi

© Pierre Boone

J’ai été surpris quand j’ai découvert leur moyen de locomotion. Quand nous voulions rencontrer des membres de la communauté plus éloigné·es, nous attendions qu’un véhicule croise notre chemin. En effet, contrairement à ce qu’on pourrait croire, la jungle possède des voies carrossables. Plus ou moins toutes les heures, un bus traverse la communauté, mais nous avions plutôt l’habitude de faire du « stop payant ». Ce n’est pas très cher, pour une heure de trajet c’est maximum 5$. Je suis donc monté à l’arrière de quelques pick-up traversant la jungle à vive allure. La sensation était indescriptible. J’ai découvert de nouvelles sensations à travers mes cinq sens : goûter des fruits invraisemblables, voir des animaux que je n’avais vus que sur internet, écouter une langue unique, sentir quotidiennement l’odeur indéfinissable de cette jungle ou toucher à l’artisanat local. Cette expérience m’a aussi ouvert les yeux sur le fait que la société capitaliste nous incite toujours à consommer plus pour être heureux. C’est la première fois que j’expérimente une sobriété heureuse. Ainsi, j’ai pu me concentrer sur les plaisirs simples de la vie et me débarrasser des choses superficielles.

Une autre culture

J’ai eu la chance, pendant mon expérience, de découvrir la croyance chamanique. En effet, César a un cousin qui est lui-même chaman. Il pratique des rituels pour toutes sortes de raisons spirituelles et médicales, en utilisant l’ayahuasca (un mélange de lianes et de feuilles, préparation typique de la jungle d’Amérique Latine). Parlant couramment espagnol, je ne m’attendais pas à être confronté à la barrière de la langue. Je pensais que la population parlerait la langue natale et l’espagnol, au vu de la géolocalisation. Ce n’était pas le cas. L’envie de sympathiser avec les personnes locales était plus forte que cette barrière. Je me suis senti, certes, un peu à l’écart des conversations au début, mais j’ai fait en sorte de m’adapter. J’ai cependant partagé des moments de jeux et de joie avec les enfants, qui ne prêtaient pas attention à mon origine.

La gestion du territoire sur place est assez particulière. Chaque famille/membre possède une parcelle de terrain d’environ 50 hectares. Ce territoire est divisé en deux parties : une pour chasser, pêcher, cultiver ou exploiter, et une autre qu’ils et elles laissent vierge pour protéger l’écosystème. Cette manière de procéder m’a beaucoup plu, car cela rentre dans mes valeurs de protection environnementale. Si tu aimes la nature, apprendre de nouvelles choses sur des faunes et flores introuvables en Occident, découvrir une autre culture (habitudes de vie, croyances chamaniques, modes de transport ou encore divertissements), alors ce projet est fait pour toi. Personnellement, il m’a permis de me ressourcer aux racines de notre existence, la Nature.

Pierre Boone

Volontaire au SCI

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