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Chapitre 3 Cas d’étude fictif

– Et si on donnait aussi un prix à la province ou au district qui aide le plus les « lanternes rouges » ? proposa Deny. Comme ça, tout le monde aurait des raisons de participer. – D’accord, dit Anna. Mais je viens de me rappeler un truc que j’ai lu dans le dernier « Progrès des femmes à travers le monde » de l’UNIFEM, sur le fait de se faire entendre et de demander des comptes. Est-ce qu’il ne faudrait pas aussi impliquer les femmes et les filles des communautés concernées ? Est-ce qu’on pourrait collaborer avec le bureau de planification local pour qu’il mobilise ces communautés, afin de recenser les filles non scolarisées et de déterminer quelles mesures prendre pour qu’elles aillent à l’école ? Les planificateurs sont censés utiliser des méthodes participatives, mais ils ne savent pas bien comment s’y prendre, surtout avec les femmes. Nous pourrions les aider. – Mince ! s’exclama Deny, en voilà une bonne idée ! Et on pourrait aussi offrir un prix à la communauté la plus active ! – Écoutez, dit M. Edy, si nous ciblons les communautés, nous devons réfléchir sérieusement au type de dépliants et d’indicateurs dont nous aurons besoin. Les tableaux publiés par le bureau des statistiques ne nous serviront à rien – peu de gens les comprennent. – C’est vrai, reconnut Deny. Même les planificateurs ont parfois du mal à les lire. Mais je me rappelle avoir vu un dépliant sur les statistiques de l’UNIFEM en Indonésie, il y a longtemps. C’était à la conférence de Beijing, je crois. Il était plein de diagrammes et de dessins (je crois qu’on appelle ça des pictogrammes) qui étaient franchement faciles à comprendre. Et il y a une brochure suédoise intitulée « Hommes et femmes en Suède » avec des graphiques géniaux. Peut-être qu’on pourrait essayer de faire un truc de ce genre ? – Je pense que le bureau national des statistiques pourra nous y aider, dit M. Edy. Il y a des gens là-bas qui sont très doués pour la création de graphiques par ordinateur. J’ai vu leurs présentations PowerPoint, même s’ils les utilisent rarement dans leurs publications. Je peux leur en parler. Ceci dit, continua-t-il avec un sourire moqueur, c’est quoi, cette idée de demander des comptes ? Et qu’est-ce que ça a à voir avec les statistiques et les indicateurs ? Je sais que les femmes ont souvent plein de choses à dire, mais d’habitude, elles n’utilisent pas des statistiques pour ça ! – Eh bien, expliqua Anna, il s’agit d’aider les femmes à utiliser les statistiques pour voir combien de filles sont scolarisées par rapport aux garçons, ou quelles sont les filles scolarisées ou non-scolarisées. Après, on essaye de comprendre pourquoi. Ensuite, on peut les aider à montrer ces indicateurs aux responsables de la planification et de l’enseignement public pour les convaincre, d’abord qu’il y a un problème, et ensuite que les femmes ont leur petite idée sur les causes et les solutions. C’est très difficile de convaincre quelqu’un, surtout un planificateur, si on ne dispose pas de faits concrets. Les données et indicateurs permettent aux femmes de mieux se faire entendre.

de l’éducation et de la planification – rendent compte de leur travail aux femmes et aux hommes. Nous recevons de l’argent de l’État – pas assez, mais quand même ! –et cet argent provient des impôts et des charges que paient les citoyens. Nous avons donc la responsabilité – l’obligation – de leur rendre compte de nos activités, pour leur montrer que les fonds ont été bien employés et que nous avons fait de notre mieux pour résoudre leurs problèmes. – Oui, ajouta Deny, et c’est à ça que servent les statistiques et indicateurs. D’ailleurs, si nous arrivons à obtenir des taux de scolarisation plus élevés, moins d’abandons scolaires et moins d’absentéisme chez les filles dans les districts et les provinces qui jusqu’ici obtenaient de mauvais résultats dans le domaine de l’éducation des filles, les femmes pourront voir que nous faisons du bon travail. » M. Edy n’avait pas l’air convaincu. « Mais si nos résultats ne sont pas bons, objecta-t-il, nous n’avons pas intérêt à leur fournir des statistiques et indicateurs, parce qu’elles nous en feront porter la responsabilité. – Très juste, sourit Deny. C’est bien pour ça que nous sommes censés autonomiser les femmes, pour qu’elles se mettent à exiger des indicateurs. Certains pays ont une législation sur la liberté d’information qui permet aux citoyens de réclamer ce type d‘information et les tribunaux peuvent nous forcer à la donner, que cela nous plaise ou non. – Hum, je ne suis pas sûr que l’idée me plaise, soupira M. Edy. Mais si votre plan marche, cela nous donnera bonne presse et on pourra peutêtre obtenir plus d’argent de l’État. Et moi, j’obtiendrai une promotion. Ce n’est peut-être pas une si mauvaise idée d’aider les femmes à se servir de données et d’indicateurs pour réclamer des comptes. – Eh bien, dit Anna, moi, je trouve l’idée excellente. J’aimerais aller en parler aux fonctionnaires de l’éducation et de la planification de ma province natale, pour voir s’ils aimeraient participer à un projet pilote. On verra d’abord si on peut les mettre en contact avec la province du nord, qui a de très bons niveaux de scolarisation chez les filles. Les conditions ne sont pas très différentes dans ces deux provinces, et je crois que ce qui se fait dans celle du nord pourrait très bien marcher dans la mienne. Est-ce que vous pouvez m’aider à rédiger une proposition ? – Bien sûr, dit M. Edy. – Mais oui », renchérit Deny. Anna commençait à se sentir bien plus à l’aise dans ses nouvelles fonctions, et les trois amis se rendirent dans son bureau pour échanger des idées devant l’ordinateur.

2. Deuxième jour au bureau

– D’accord, je veux bien, mais en quoi les comptables sont-ils concernés ? » M. Edy avait l’air perplexe.

Deny entra d’un air affairé, jeta son sac sur sa table et se précipita dans le bureau d’Anna, en s’arrêtant au passage pour entraîner M. Edy dans son sillage.

« Oh, répondit Anna, ça n’a rien à voir avec les comptables ! Il faut que les décideurs – des gens comme nous ou comme les fonctionnaires

« Anna, j’ai cogité toute la nuit, et je trouve ton idée vraiment géniale. Mais je pense que nous allons devoir réfléchir sérieusement aux

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