Vaudou : roman de mœurs martiniquaises

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VAUDOU

ture de coton, l'examina, h o c h a la tête, l'étala à terre. Cela servirait à porter le linge, et la c o u verture c o m m e n ç a i t à être crasseuse, elle aussi. Puis Zéline enfila la blouse qui lui servait de robe, se regarda dans un miroir cassé, passa la main dans ses cheveux, se tira la langue, se sourit, soupira. Elle revint à la couverture, en noua les coins deux par deux sur les nippes, posa le ballot en équilibre sur sa tête, ouvrit doucement la porte. L e soleil entra à flots, illuminant d'un seul c o u p toute la case. Il réveilla à son tour Souloune. L a petite sauta du lit, courut embrasser sa mère. — Tu t'occuperas de tes frères, m u r m u r a Z é line; j e n'en ai pas p o u r longtemps. Et, droite, malgré sa charge, un gros savon dans la main, elle se hâta vers la rivière. Il n'y avait encore personne à cette heure matinale. Zéline se débarrassa de sa blouse, tâta l'eau du pied. Elle était si fraîche que la négresse ferma les y e u x . Peu à peu, elle s'habitua, sourit encore, entra dans le courant. Toutes les sensations de l'ardente créature étaient prétexte à aiguiser son plaisir; qu'elle savourât un breuvage o u rafraîchît ses pieds lassés, chacun des gestes de Zéline trahissait un instinct voluptueux qui ne demandait qu'à se satisfaire. A u milieu du torrent, la grosse r o c h e plate qui lui servait habituellement de lavoir avait


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