Mémoires de Malouet. T. 2 (2)

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LES MORAS.

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ral fut ce qu'elle pouvait être dans un temps où la guerre exigeait beaucoup. Les impôts de guerre furent continués; le premier vingtième; le dixième, accru des deux sols pour livre, centimes additionnels du temps; le vingtième militaire; le dixième prolongé : telles furent les mesures contenues dans les trois édits bursaùx du S juillet 1756. Les parlements protestèrent; la cour des aides lit des remontrances par l'organe de Malesherbes, et le roi répondit à cette opposition parle lit de justice du 14 décembre 1756, et par la suppression de deux chambres des enquêtes et de soixante charges de judicature. Ces mesures étaient un avant-coureur du coup d'Etat Maupeou, et s'il faut en croire Barbier, M. de Moras n'y aurait pas été étranger. (VI, 403.) L'attentat de Damiens suspendit bientôt ces querelles (5 janvier 1757), et amena la chute du comte d'Argenson, ministre de la guerre, et du ministre de la marine Machault; c'est à ce dernier que Moras succéda. (1er février 1757.) Le fardeau d'un double ministère était au-dessus de ses forces, et le 25' août suivant il céda le contrôle à M. de Boullongne. Les quinze mois pendant lesquels M. de Moras administra exclusivement la marine ne furent marqués que par un défaut de résultats militaires, mais qui mécontenta l'opinion presque autant que des revers. Le souvenir de la victoire de la Galissonnière et de la prise de Mahon, qui l'année précédente avaient illustré les derniers moments du ministère de Machault, occupait encore les esprits, et les funestes revers de Louisbourg et de Lagos, qui suivirent la retraite de M. de Moras, lui furent rétroactivement imputés. Moins ferme que son prédécesseur, son tort le plus grave avait été de laisser grandir cet esprit d'insubordination qui allait êtresi funeste à nos escadres. Le 26 mai 1658, il fut remplacé par le marquis de Massiac. La retraite de M. de Moras fut volontaire, elle roi le nomma président à vie du Conseil, fonctions supprimées depuis vingt ans. Celte nomination, qui d'une commission temporaire faisait un office viager, fut mal accueillie du grand Conseil et des parlements; par un refus désintéressé, M. de Moras mit fin à des difficultés qui n'auraient pas manqué de compromettre l'autorité royale.


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