Mémoire envoyé le 18 juin 1790, au comité des rapports de l'Assemblée

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44 c'étoit, difoit-il, pour les t r o u p e s . . . . . . Jufque là leur fubfiflance étoit expédiée de Franco en droiture , & par conféquent n'étoit point prélevée fur les befoins des C o l o n s ; mais depuis la rareté des grains en France, non-feulement M. de la Luzerne n'avoit pas pourvu à nos befoins , mais il avoit eu la cruauté de nous charger, dans notre difette, de pourvoir à ceux de nos garnifons. Nous ignorions ce nouveau malheur; n o n leulement il contribua à foutenir le haut prix des farines , mais il ouvrit la porte aux plus dangereux abus. L'Intendant , fous prétexte d'acheter pour la t r o u p e , fut foupçonné d'accaparer pour le compte du gouvernement. C e foupçon fe changea prefque en certitude, quand on vit affiché , dans un nouveau moment de détreffe , que le gouvernement vendroit pour 1 2 0 en détail, ce qu'on avoit pu fe procurer à 8 en gros. Le fouvenir des bifcuits gâtés fe retraça douloureufement dans toutes les têtes. O n obferva que le fieur de Marbois avoit chez fon beau-père à Philadelphie, des magafins de farines qu'il avoit propofé de tranfporter dans la Colonie ; 8c de cette maffe de remarques fur un monopole dont ia rareté d'un aliment néceffaire accréditoit le b r u i t , & dont la négligence du Miniftre avoit été la première caufe , il réfulta que M. de la Luzerne fut trouvé coupable de n'avoir pas furveillé un objet auffi important que la fubfiftance d'une Colonie immenfe fpécialement confiée à fes foins ; plus coupable d'avoir févi contre l'Adminiftrateur généreux qui avoit appliqué fi à propos le remède au mal ; enfin, plus coupable encore de n'avoir pas prévenu en temps utile fes coopérateurs à Saint-Domingue , de l'état de pénurie où fe trouvoit le R o y a u m e , de n'avoir pas même approvifionné les troupes dans ie moment où la difette fe faifoit reffentir à tous ies habitans, & d'avoir autorifé ou toléré de la part de l'Intendant, des accaparemens inutiles dans l'abondance, odieux dans la difette , 8 c qui, dans des circonftances critiques, deviennent tôt ou tard ie prétexte fâcheux des infurrections les plus dangereufes. t t

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C e que je viens, Meilleurs, d'avoir l'honneur de vous expofer , n'eft point un récit ; ce font les plaintes de nos Commettans dont nous ne


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