Lettres de Saint-Thomas : Etudes sociologiques, historiques et littéraires

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LETTRES DE

SAINT-THOMAS

n'est accompagné d'aucun autre progrès de nature à constituer une harmonisation sociologique entre cette profusion d'êtres humains et les ressources nécessaires à leur perfectionnement moral et à leur bien-être matériel. Bien au contraire, il semblerait que l'accroissement de la population soit en raison directe de la dégénération sociale du peuple haïtien. On pourrait même inférer que cet accroissement est le résultat de cette dégénération. Virchow, d'après M. F. Niti, a fait remarquer que les classes populaires, quand elles n'ont point l'espoir de monter, « n'ont aucun plaisir en dehors de ceux que peuvent leur donner les relations sexuelles et l'excitation alcoolique. » M. Niti en a tiré une règle qu'il formule de la façon suivante: « Plus est grand l'abaissement du peuple, moins il a de chances d'améliorer sa position, plus aussi son imprévoyance est grande et abondante sa prolifération. » C'est, par le tour et la justesse de l'observation, comme un axiome démographique. Plus loin, le savant publiciste en fait un corollaire de la loi des relations de la population avec les conditions économiques en y faisant entrer la remarque de Virchow. « Plus la situation économique et les sentiments moraux des classes populaires sont bas, écrit-il, plus elles sont portées à n'avoir d'autres jouissances que celles des sens et plus la prolifération est abondante et désordonnée » (1). Cette déduction scientifique est particulièrement compréhensible en Haïti, où la richesse de la faune maritime et terrestre et la fertilité exubérante du sol offrent 1. F. Niti, La Population et le Système social. Paris, 1897, p. 222.


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