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à l'autre avec fracas & fi précipitamment, que perfonne n'ofoit ni ne pouvoit les arrêter. Ce grand roulis que nous éprouvons & fa vivacité proviennent fans doute de la pelanteur de notre cargaifon , du mauvais arrimage, & plus encore de la furcharge du navire , qui établit le plan de flottaifon au-deffus de fa plus grande largeur. Notre bâtiment, à caufe de fa conftruction en fapin, eft auffi fujet à des craquemens continuels. C'eft principalement dans la fainte-barbe , que l'on jouit de cette mufique lugubre , au fon de laquelle il faut s'endormir. Il femblè, à chaque mouvement, que les membres défunis vont fe féparer pour jamais ; véritablement ils font bien des efforts pour y parvenir. La nuit du
16 au 17 commence à nous
envelopper de fes ombres. Les amans des villes & ceux des campagnes profitent fouvent de fon obfcurité dans des rendez- vous délicieux: les uns fous des lambris dorés , les autres fous de fimples chaumieres. Le plaifir eft le même pour tous , & la lumiere revient toujours trop tôt leur donner le fignal de la féparation. Sur mer, rien n'eft plus trifte qu'une nuit obfcure, parce qu'elle multiplie les dangers. Et nous qui