La perte d'une colonie : La Révolution de Saint-Domingue

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— 10 — comme un abîme les péninsulaires et les créoles dans les colonies espagnoles, était inconnue à Saint-Domingue, et se bornait à quelques critiques de part et d'autre. La situation des petits blancs n'avait aucune analogie avec ce qui existait a u x États-Unis, avant la guerre de sécession et encore aujourd'hui. Dans notre colonie, les planteurs ne regardaient pas avec dédain, ceux de leurs compatriotes qui étaient de condition inférieure et par suite obligés de reconnaître leur supériorité. Toutes les diverses catégories de blancs vivaient en bonne intelligence. Elles avaient un intérêt commun qui les unissait, l'esclavage, et réservaient leur mépris pour les gens de couleur. Les affranchis, les gens de couleur comme on les appelait, formaient la classe intermédiaire entre les blancs et les esclaves. Ils étaient presque aussi nombreux que les b l a n c s ; on en comptait seulement 15,000 en 1750 et en 1788, 37 à 38,000. Le gouvernement colonial avait été effrayé de leur accroissement et avait voulu y mettre obstacle. En 1709, une ordonnance avait décidé qu'un affranchissement ne serait valable, que s'il avait reçu l'assentiment du gouverneur et de l'intendant. L'antipathie qui séparait les blancs et les gens de couleur, était au-dessus de tout ce que l'on peut imaginer. L'opinion publique distinguait minutieusement les gens de couleur, et. suivant qu'ils se rapprochaient ou s'éloignaient des blancs par un teint plus ou moins foncé, on les appelait mulâtres, quarterons, métis, mameloucks, griffes, etc. L'on reconnaissait treize catégories et leurs dénominations formaient une véritable langue. La loi confirmait ces préjugés. Il était défendu aux affranchis


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