A LA VÊILLE DE LA RÉVOLUTION
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les invasions anglaises, et elles ne sont nullement « des moyens d'attaque ». Leurs impositions ne paient pas les dépenses de sûreté et d'administration que la métropole fait pour ces possessions. Quant aux droits de douane assignés sur les denrées coloniales, « ils pourraient être aussi bien payés par les consommateurs nationaux, si ces denrées étaient apportés par les étrangers (1) ». Les colonies, pour les penseurs de l'école de Mirabeau, sont loin d'avoir l'importance qu'on leur a attribuée, et le pacte colonial ne se justifie plus. Cette thèse absolue et en partie paradoxale avait dans la Constituante des partisans. On le vit bien, lorsque le député de Bordeaux, Nairac, s'avisa, le 4 juillet, dans le débat sur l'admission des députés de Saint-Domingue, de rappeler les axiomes de l'ancienne économie politique coloniale. Quand il affirma que les colonies, loin d'être « une partie de la patrie, n'étaient « que des provinces qui en dépendaient », cette affirmation provoqua des interruptions (2). Mais les grands débats que soulevèrent à la fin de 1789 la formation du Comité des colonies et en 1791 la question du régime colonial devaient montrer que la majeure partie de la métropole professait
sur le monopole du
commerce français
et
sur l'indépendance économique des colonies des maximes bien différentes de celles des économistes (3). Ce désaccord déjà ancien entre les colons et la métropole devait s'aggraver du jour où les représentants des planteurs se trouvèrent aux prises avec les députations
des
ports,
des
(1) Mirabeau, Courrier de Provence (XVIe Lettre), I, pp. 347-356. — (2) Compte-rendu du Moniteur (4 juillet 1789), I, (60-61 ; — Arch. Parl., VIII, 189. — (3) Voir les débats de 1791 dont le rapport de Delattre, Arch. Parl., tomes XVI et suiv., et l'ouvrage de Deschamps, la Constituante et les Colonies, in-8, 1898.