Lettres politiques sur les colonies sur l'esclavage et sur les questions qui s'y attachent

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leur fermeté et leur indépendance, et non pas de ces hommes qui y vont chercher fortune, et qui se dévouent et se vendent au parti privilégié, au prix d'un cadeau ou d'un prêt d'argent, comme cela s'est vu et comme je le pourrais citer. 3° En réorganisant le personnel de l'administration de la justice, par l'élimination de ces magistrats parasites qui vendent leur conscience, soit au poids de l'or, soit en obéissant à un préjugé de caste dont ils ne peuvent se dépouiller. En mettant à la réforme ces magistrats amovibles qui osent se proclamer « Créoles avant tout, » qui injurient le gouvernement dans leurs discours imprimés, et qui ne savent pas même garder les convenances, la pudeur et la dignité que commande leur caractère. 4° Et enfin, comme vous Ta déjà dit M. le comte de Montalembert, « en consolidant l'autorité ecclésiastique, « en rétablissant l'organisation du clergé sur des bases « légitimes et naturelles, c'est à dire sur l'épiscopat, » par la nomination d'évêques pour nos colonies, à résidence sur les lieux mêmes, en guise de ces préfets apostoliques exerçant leur ministère sous la juridiction des gouverneurs et des administrateurs qui sont, eux, sous la dépendance des conseils coloniaux, composés en majorité de colons obérés, qui n'ont d'existence politique, comme nous l'avons dit ailleurs, qu'à l'aide d'une fiction immorale. Du choix des hauts fontionnaires ecclésiastiques peut dépendre encore la réussite de l'œuvre de la suppression de l'esclavage dans les conditions d'ordre et de travail; et, sur ce point, les sujets ne manqueront pas au gouvernement, car, Dieu m e r c i , les diocèses du royaume comptent assez de pasteurs recommandables, à l'abri de l'influence immédiate des colons et de leurs délégués, pour qu'il puisse exercer son choix dans l'intérêt des colonies et de la religion elle-même. A ces conditions, et à ces conditions seules, Monsieur le Ministre, le gouvernement arrivera à accomplir le grand œuvre humanitaire de l'abolition de l'esclavage, à faire refleurir la religion et à assurer l'empire de la justice et des lois aux colonies. Je suis avec un profond respect, Monsieur le Ministre, Votre très humble et obéissant serviteur, BISSETTE.


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