CINQ ANNÉES DE MA V I E .
65
quelle lourde responsabilité incombe à ceux qui firent
ainsi supplicier u n homme, q u i a b u s è r e n t
tout un peuple ! Je parvins enfin à l a voiture q u i devait m'emmener et, a p r è s une course m o u v e m e n t é e , nous a r r i vâmes au port de la Palice où je fus e m b a r q u é sur une chaloupe. Le froid était atroce ; j'avais le corps engourdi, l a tête en feu, les mains gelées et brisées par les menottes.
Le trajet
dura
près
d'une heureI A mon a r r i v é e à l'île de R é , à la nuit noire, je dus marcher dans la neige pour arriver au Dépôt ; je fus reçu durement par le directeur et conduit au greffe où l'on me déshabilla e n t i è r e m e n t pour me fouiller. Enfin, vers neuf heures du soir, b r i s é de corps et d ' â m e , je fus m e n é dans l a cellule que je devais habiter. A côté de cette cellule se trouvait le poste des gardiens. Il communiquait avec ma cellule par une large ouverture grillée placée audessus de ma couchette. Nuit et j o u r , deux sur veillants, relevés de deux heures en deux heures, étaient de garde à cette ouverture et ne devaient pas perdre de vue u n seul de mes mouvements. Le directeur du d é p ô t me prévint le jour m ê m e que lorsque j'aurais des entrevues avec ma femme, elles auraient lieu au greffe, en sa p r é s e n c e , qu'il