Les Colonies françaises

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LES COLONIES

FRANÇAISES

le serrant dans ses bras, le fit asseoir à ses côtés; puis, quand eut défilé le long cortège des princes et des fonctionnaires admis à présenter leurs hommages et leurs présents, le nouveau soubadhar, au nom du Grand Mogol, proclama Dupleix nabab de toutes les provinces depuis le sud de la Kistnah jusqu'au cap Comorin, ce qui comprenait, avec le sud du Dekkan, un pays plus grand que la France. Les espérances es plus hardies devenaient une réalité, L'Hindoustan reconnaissait la supériorité européenne et s'inclinait devant la France. Dupleix était trop habile pour exciter les soupçons et la jalousie. Pourvu qu'il l'exerçât, il tenait peu aux apparences du pouvoir. Son premier acte, comme nabab du Carnatic, fut de déléguer à un vieil ami de la Fiance, Chunda-Sahib, les privilèges et les émoluments de sa dignité. Cet acte de désintéressement, bien que politique, produisit une vive impression et contribua, plus encore peut-être que les victoires de la Fiance, à établir notre prépondérance. Les princes hindous, charmés de voir que Dupleix, au faîte de la puissance, se souvenait de ses amis et les récompensait de leur fidélité, se promirent de conserver cette précieuse alliance. Quand il sortit de la tente, Dupleix était le supérieur et le vrai maître du souverain auquel obéissait l'Hindoustan méridional. Dans ce drame gigantesque, les péripéties se succèdent avec une étourdissante rapidité. Après les négociations, les combats. Un certain Ghazdiouzin avait arraché au simulacre d'empereur qui portait, à Delhi, le titre de Grand Mogol, une nomination de soubadhar du Dekkan. Il prétendait traiter en usurpateur notre protégé, Mozuffer-Yung, et, soutenu par les Mahrattes, lui avait enlevé la vieille capitale du Dekkan, Aureng-Abad, et le menaçait dans la possession de ses provinces méridionales. Dupleix, qui avait reconnu dans Bussy le seul homme capable de le comprendre et de le seconder, lui confia la tâche redoutable et la glorieuse mission de faire dans le centre de la péninsule ce qu'il faisait lui-même dans le midi. Il ne lui donna que 300 Français, 2000 cipayes et 10 canons. Bien qu'il dût, avec cette poignée d'hommes, s'enfoncer dans un pays à peine exploré, sans moyens assurés de communication, et sans autre allié qu'un prétendant dénué lui-même de toute protection efficace, Bussy accepta avec joie et entra tout de


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