L' Abolition de l'esclavage, tome 1

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COLONIES FRANÇAISES.

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population métisse; elle s'accroissait par les bâtards. Parmi les esclaves, peu de mariages, peu de naissances, beaucoup de décès. Faut-il attribuer ces résultats à la loi? Nullement; la loi, au moins dans les derniers temps, encourageait les mariages par tous les moyens et empêchait de vendre séparément la femme et le mari. Aux maîtres? Nullement; ils favorisaient les mariages, et les esclaves mariés étaient l'objet de leur prédilection. M. de Tocqueville nous dira dans son beau langage la raison véritable 1. « Il existe une antipathie profonde et naturelle entre l'institution du mariage et celle de l'esclavage. Un homme ne se marie point quand il est dans sa condition de ne pouvoir jamais exercer l'autorité conjugale, quand ses fils doivent naître ses égaux et qu'ils sont irrévocablement destiNÉS aux mêmes misères que leur père; quand, ne pouvant rien sur leur sort, il ne saurait connaître ni

les devoirs, ni les droits, ni les espérances, ni les soucis dont la paternité est accompagnée. Il est facile de voir que presque tout ce qui initie l'homme libre à consentir une union légitime manque à l'esclave par le seul fail de l'esclavage. Les moyens particuliers dont peut se servir e

l législateur ou le maître pour l'exciter à faire ce qu'il

' empêche de désirer seront donc toujours inutiles. » II. Depuis l'abolition de l'esclavage, ces faits douloureux se

sont-ils modifiés?

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Rapport sur la proposition de M. de Tracy, Procès-verbaux de la Charnbre dès députés, session de 1840, p. 39. Voir aussi le Rapport de M. de Broglie, p. 155. I.

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