Histoire du Dix-huit fructidor : deuxième partie

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DU DIX-HUIT FRUCTIDOR.

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grande rivière. C'étoit le Maroni par le travers duquel nous nous trouvâmes vers les midi. On nous avoit prévenu que ce passage étoit le plus dangereux de la côte à cause des bas-fonds , des récifs et des courans. On ne nous avoit pas trompés. Ce ne fut qu'avec les plus grandes difficultés que nous traversâmes celle large embouchure , et il fallut toute l'habileté , toute l'expérience de Barrick pour échapper aux écueils qui sembloient se multiplier devant notre esquif : alors nous reconnûmes que M.de Marbois étoit bien fondé à nous dire que nous courions à la mort : sans un guide aussi expérimenté, elle étoit inévitable. Cependant de plus grands périls encore devoient éprouver notre courage. Nous voguâmes assez heureusement le reste de la journée ; mais le soir nous fûmes encore retenus par un calme dont néanmoins nous n'eûmes qu'à nous féliciter. Nous lui dûmes une nuit plus tranquille, et il cessa dès que le jour parut. Nous continuâmes notre route, cherchant le fort d'Orange, comme un des principaux points de reconnoissance. Nous l'atteignîmes enfin, et nous en lûmes avertis par un coup de canon qui nous étonna beaucoup. Notre surprise devint bien autre , quand nous entendîmes siffler autour de nous trois boulets qui nous furent successivement envoyés , et nous forcèrent à prendre le large. Nous nous crûmes attaqués. Nous ne pouvions pas soupçonner que cet acte d'hostilité de la part des bons Hollandais , n'avoit d'autre but que de nous faire arborer pavillon ; ce qui nous étoit impossible, puisque nous n'en avions point.


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