Le dernier Caraïbe

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LE D E R N I E R

CARAÏBE.

traire, virent le piége et proposèrent de se rendre immédiatement auprès du général, pour connaître ses intentions définitives. — Chargés eux-mêmes de ce soin, ils revinrent au bout de quelques minutes. Ils n'eurent pas besoin de parler ; la vérité brillait dans leurs regards. Le sacrifice était arrêté, restait l'holocauste. Et de ces malheureux colons voués aux lois républicaines, quels étaient ceux dont les noms allaient figurer sur la liste des privilégiés? — ( L a déportation un privilége ! ) Combien de citoyens ce bateau couvert, arche de salut sur des flots de sang humain, allait-il recueillir dans ses flancs, hélas! si resserrés? Ces questions couraient dans la foule des émigrés de toutes nuances. Nul ne les pouvait résoud r e , et, du reste, qu'importait cette solution ? — Elle laissait tout au désespoir, et rien à l'espérance. De là , des imprécations , des pleurs, des déchirements à la suite de querelles, de duels m ê m e ; que sais-je ! — Le camp n'était plus cet asile assuré contre les menées révolutionnaires ; c'était la confusion, le désordre, le vagabondage des récriminations de toutes sortes; c'était le chaos. Un émigré se promenait seul sous les sabliers de l'une des cours, la tête appuyée sur le poing; il regardait la terre et ne voyait pas. Tout son être


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