XXIII LE DERNIER VOYAGE DU « SAN PABLO »
Avant de reprendre la mer. je me donnai de longues vacances que je passai, le gousset bien garni, au milieu de mes vieux amis de Regla et de la Havane. Je pensais que le fait d’habiter Cuba pendant une saison, à l’écart des trafiquants et de leurs transactions, réussirait peut-être à me détacher de l’Afrique mais trois mois à peine avaient passé lorsqu’un beau jour je me retrouvai quittant le port de Santiago et en route pour la Jamaïque où j’allais chercher une cargaison de marchandises destinées à la Côte, avant de revenir à Cuba pour y équiper le navire en vue du transport d’esclaves. Mon voyage débuta par une tempête qui, trois jours durant, nous poussa dans une direction assez voisine de celle que nous suivions mais, la troisième nuit, après avoir vu mon grand mât se briser près d’une plage sous le vent, je dus échouer la goélette pour sauver nos vies et la cargaison. Fort heureusement, l’atterrissage s’effectua le mieux du monde et, à l’aube, je constatai que mon bateau n’était plus qu’une épave sur un îlot désert. Une vaste tente, rapidement improvisée à l’aide de voiles, d’avirons et de ce qui nous restait d’espars, abrita 212