La Guadeloupe. Renseignements sur l'Histoire, la Flore, la Faune [...]. Tome II-1 : 1625-1715

Page 13

— 7 — viennent de race espagnole, c’est-à-dire, distinguer. Ceux qui de ces premiers que les Espagnols y mirent dans les commencemens de leurs découvertes, sont courts et ramassez; ils ont la tête grosse et le groüin court. Leurs défenses sont fort longues ; ils ont les jambes de devant plus courtes presque d’un tiers que celles de derrière. Leur poil est long, rude et tout noir. Ils courent bien mieux dans les plaines et en montant qu’en descendant. Ils se défendent vigoureusement et avec fureur contre les chasseurs et les chiens, et ils sont extrêmement dangereux, quand ils sont blessez. « Avant que j’eusse été en Espagne, je ne sçavois d’où étoit venue la race de ces cochons ; mais j’ai reconnu, étant à Cadix, et aux environs, que les premiers qu’on avoit portez en Amérique avoient été pris en ce pays-là, parce que tous ceux qu’on y voit encore aujourd’hui leur ressemblent entièrement. « La seconde espèce vient des cochons domestiques qui se sont échappez des parcs où on les nourrisoit. Ils ne diffèrent en rien de ceux de France, d’où leurs ancêtres ont été apportez, et il ne paroit pas que les deux espèces se soient mêlées. » L’espèce venant de Tabago et des îles voisines et provenant de la côte Ferme est le pécari, Coinkê des Caraïbes, dont le nom latin dicotyles signifie double nombril, et lui a été donné à cause d’une ouverture semblable à un second nombril, laquelle est placée sur son dos et laisse suinter une humeur fétide. C’est cette ouverture que le père du Tertre appelle évent. L’extermination de ces cochons marrons fut opérée en peu d’années et le père du Tertre ne peut s’empêcher de s’écrier : « Il faut avouer ingenuëment qu’ils (les Esgagnols) sont autant recommandables dans la prévoyance et le soin qu’ils ont eu de remplir chacune de ces isles, selon la capacité, des animaux qu’elles pouvaient nourrir, que nous sommes blasmables dans le degast que nous en faisons tous les jours, qui est tel qu’en 15 ou 16 années, une petite poignée de François dans la Guadeloupe, a destruit ce qui a servy aux Espagnols, presque l’espace de deux siècles, pour rafraichir tous les ans une très-puissante armée, sans qu’il y ait paru aucune diminution, jusqu’à notre arrivée. »

XIV. Des myriades d’oiseaux égayaient les belles solitudes des bois, les villages caraïbes, les rivages de la mer. Dans ces savanes luxuriantes, sur ces mornes élevés, dans ces montagnes superbes, les oiseaux chantaient, sans crainte, leur hymne au Créateur des splendeurs dont ils étaient l’ornement vivant et


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.