Un Parisien dans les Antilles

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TROISIÈME PARTIE. — DANS L'INTERIEUR DE L’ILE.

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Ceux-là sont encore les moins confiants dans l’avenir. Ils prévoient naturellement une catastrophe, à laquelle ils concourent, et se hâtent de mettre le plus possible en lieu sûr. Chacun prépare sa malle et n’est que plus âpre à s’enrichir. » Profitant d’un temps d’arrêt pendant lequel notre hôte rallumait un nouveau cigare, don Felipe se tourna vers moi et me dit : « Je vous demande pardon, cher monsieur, pour toutes ces exagérations. Don Ignacio fait défiler devant vous tout le cortège des rengaines pessimistes. Vous n’aurez pas besoin de parcourir longtemps notre pays pour être rassuré. A l’entendre, Cuba serait une auberge que l’on pille et à laquelle on va mettre le feu. — Vous l’avez dit, mon cher ami ; voilà bien fidèlement la situation. — Peut-on qualifier ainsi ce pays sans égal! — Je ne critique pas l’œuvre divine, au contraire; mais le Créateur n’a pris aucune part, que je sache, à notre organisation politique et administrative. S’il y a collaboré, permettez-moi de trouver qu’il a furieusement baissé depuis l’origine du monde. — Peut-on insulter ainsi ce ciel si pur, si bleu!... •— Mais nous n’habitons pas le ciel, tant s’en faut. Et d’ailleurs, qui l’attaque? — Comment faire courir un vent de haine sous ce soleil qui nous sourit ? — Tout cela est très poétiquement dit, mais vous oubliez l’ouragan de 1851, qui a surgi à l’improviste.


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