SK02-2013-F

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VeNte aU NUméro Fr. 4.90 aboNNemeNt aNNUeL (12 NUméros) Fr. 39.–

Février 2013 • www.saison.ch

Le magazine culinaire de bon goût

20 ans avec vous! Une tourte d’anni­ versaire magistrale Cuisiner avec le plus fidèle des lecteurs

Une cuisine rustique et copieuse pour braver la rudesse des hivers scandinaves

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La puissance du Nord

D e À pe s in G A an rso vit G N n n n at E C u i ve e s i o n R : i rs a s Sa sin ai u r po i s e d re e p u r on e de a s

Le top 20 des villes pour fins gourmets


SOMMAIRE |

02/13 

Sous le signe du serpent: des délices pour célébrer le Nouvel An chinois.

50

4 ÉDITORIAL La table est mise, la rédaction se présente.

6 

6 20 ANS DÉJÀ Une tourte exceptionnelle créée spécialement pour Cuisine de Saison.

Sous le signe des douceurs: la tourte d’anniversaire de Les Gourmandises de Miyuko.

18 RÉTROSPECTIVE Coup d’œil sur le menu des 20 dernières années et avant-goût des tendances.

Sous le signe du vin: interview de Beat Caduff, cuisinier primé et connaisseur émérite en vins.

36 STAR DE LA GASTRONOMIE Beat Caduff, un amoureux du bon vin qui regrette chaque bouteille vendue. 42 LA CUISINE DE MAMAN Tout grand chef qu’il est, Ralph aime retrouver les bons plats de son enfance. 58 UNE ÂME FIDÈLE Rencontre avec un lecteur qui s’inspire de Cuisine de Saison depuis 20 ans.

Sous le signe de la continuité: en cuisine avec le plus fidèle de nos lecteurs.

36 

Sous le signe du temps: les tendances culinaires sous la loupe.

64 LES MEILLEURES ADRESSES Les 20 villes qui comptent le plus d’étoiles dans le ciel de la gastronomie.

ET AUSSI… 11

58

12 14 34

18

40 49 50 56 72 74

Sous le signe du goût: la cuisine nordique dévoile ses arômes.

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Concours / Solutions et gagnantes du mois de décembre Concours anniversaire: 2 places pour le dîner anniversaire à gagner Sur le feu Chocolat Frey Migros: une sauce à fondre de plaisir Sélection Migros: pâtes de rêve Offre aux lecteurs: moulin à légumes Asie Migros: menu du Nouvel An chinois Bio Migros: jambon et lard Impressum / Avant-goût A dévorer des yeux: Part de tourte de Ralph Fleck

72 Service lecteurs et abonnés

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PHOTOS: CLAUDIA LINSI, CORINNE KRAMER, TOM HALLER, LUKAS LIENHARD, CORINNA STAFFE, PIA GRIMBÜHLER; COUVERTURE: LUKAS LIENHARD

22 LA CUISINE DES VIKINGS Rustique et forte, à l’image des paysages sauvages à l’extrême nord de l’Europe.

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Un toast au 20 anniversaire de e

Chère lectrice, cher lecteur,

qui ont défrayé la chronique au cours des vingt dernières

Aujourd’hui, nous sommes très fiers (jugez-en

années. Il se demande, entre autres, pourquoi certains ont

par vous-même sur cette photo!) de célébrer avec

sauté le pas vers leurs propres fourneaux tandis que d’autres

vous les vingt ans de notre magazine de cuisine.

sont restés fidèles aux cuisines des restaurants. Quant à la

Nous avons décidé de saisir cette belle occasion pour vous

tendance culinaire du moment, elle n’est un mystère pour

offrir une lecture un peu différente, entièrement dédiée au

personne: les mets nordiques sont à l’honneur. Mon confrère

nombre 20. Entre rétrospective et perspective, Christian

Daniel Tinembart en a sélectionnés six, merveilleusement

Seiler, chroniqueur au «Das Magazin» du «Tages-Anzeiger»

mis en scène par le photographe Lukas Lienhard. Nous avons

et de la «Basler Zeitung», revient sur les courants culinaires

également conversé avec le célèbre restaurateur grisonnais

La rédaction

PHOTO: DANIEL CERMAK

C

e numéro de Cuisine de Saison n’a rien d’ordinaire.


ÉDITORIAL |

Cuisine de Saison! et expert en vin Beat Caduff, pour qui ces vingt années sont

Quant à moi, je tiens à remercier une nouvelle fois très

aussi symboliques: en 1993, alors jeune trentenaire, il avait

personnellement chacun de vous pour sa fidélité.

été élu sommelier de l’année par le Gault Millau Suisse.

Cordialement,

Notre cuisinier au quotidien Ralph Schelling a eu la bonne idée de suivre sa mère en cuisine où elle lui a mitonné cinq de ses plats favoris. Mais ne dévoilons pas les innombrables

Christine Kunovits

secrets de ce numéro spécial jubilé! Feuilletez-le à votre guise et laissez-vous surprendre: à tout anniversaire son lot

P.-S.: La liste des recettes 2012 est désormais disponible

de surprises.

sur www.saison.ch

DERRIÈRE, DE GAUCHE À DROITE: Janine Neininger Anette Thielert Annina Ciocco Dagmar Madelung Diana Casartelli Roland Linder Eliane Stettler Christine Kunovits (rédactrice en chef) Christine Ramseyer Susanna Heim Denise Ferrarese Nicole Huwyler Daniel Tinembart Katia Tarantino DEVANT: Nicole Rodoni Lina Projer René Schleuniger Margaretha Junker Flavia Zarro ABSENTES: Cora Gianolla Alda Viviani

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Sara Hochuli dans son café, Les Gourmandises de Miyuko, à Zurich. Elle a confectionné cette tourte pommes-caramel pour l’anniversaire de Cuisine de Saison.


Happy

20 ANS

BIRTHDAY!

CUCINA DI STAGIONE CUISINE DE SAISON SAISONKÜCHE TEXTE: MICHAEL LÜTSCHER | PHOTOS: CORINNE KRAMER | ADAPTATION DES RECETTES: JANINE NEININGER

Artiste pâtissière, Sara Hochuli crée des délices colorées et finement ouvragées. Pour les 20 ans de Cuisine de Saison, elle a imaginé une surprise pleine de douceur.

N

appage vert clair, nœuds bleus, fleurs roses ou un gourmand crocodile placé au sommet: les tourtes exposées dans la vitrine de Les Gourmandises de Miyuko à Zurich sont bigarrées et ont un petit côté délirant. Un peu comme Sara Hochuli, la créatrice de ces douces tentations. Cheveux blonds oxygénés domestiqués par une raie, ombre à paupières bleue, pantalon de golf bleu et chaussettes de marche vertes. «J’aime prendre des éléments disparates et les combiner entre eux», confie la jeune femme de 31 ans, graphiste de formation. Sara a déjà signé une collection de mode, une ligne de perruques à base de cheveux synthétiques – et craque pour tout ce qui est doux. La pâtisserie, non elle n’est pas tombée dedans quand elle était petite. Elle a fait ses premiers pas dans le monde des tourtes en tant qu’amateur et a pris quelques cours ici et là avant de s’inscrire à une formation pour professionnels – deux semaines de cours en accéléré qui lui ont donné du fil à retordre, mais qui ne l’ont pas détournée de son objectif: ouvrir une enseigne avec son partenaire, Dominik Grenzler, spécialiste en relations publiques. Et voilà qu’au printemps 2011, Les Gourmandises de Miyuko accueillait ses premiers clients dans une maisonnette datant de 1823 du quartier d’Unterstrass. Le nom évoque, à lui seul déjà, la passion de Sara pour les douceurs françaises ainsi que sa fascination pour la culture du thé japonaise et l’univers des mangas. La décoration intérieure prend

le relais, mêlant le charme de ces deux mondes. Ici des proverbes japonais, des petites lampes, des bougies, et là une table en bois ancienne et deux chaises Louis Toujours. Un article publié dans le Neue Zürcher Zeitung juste après l’inauguration lui valut un succès inattendu. Le café ne désemplissait plus. Si bien que Sara Hochuli peina à satisfaire la demande. La cuisine se révéla trop étroite. Elle transféra donc la production dans un bâtiment de la zone industrielle de Rümlang où, avec l’aide de deux confiseuses, elle confectionne des tourtes, des pralinés et des macarons à base de matcha, une poudre de thé vert japonais. Ainsi que des pâtisseries végétaliennes et sans gluten ni lactose. Parmi les ingrédients, issus d’une production durable, pas d’exhausteurs de goût ni d’agents conservateurs. Tout est fait maison, tout est de première fraîcheur. Celui qui désire une tourte entière est donc bien avisé de la commander à l’avance. Et doit être prêt à payer. Une tourte Miyuko à deux étages pour 20 personnes, somptueusement décorée comme celle réalisée pour Cuisine de Saison, coûte 300 francs. «Les pièces que nous confectionnons symbolisent un art de vivre – personne ne les mange par simple faim», explique Sara. Mais elle insiste, «une tourte ne doit pas uniquement charmer le regard, mais aussi séduire les papilles». Ses créations y parviennent – et comment! Il y a juste un tout petit problème: couper une tourte Miyuko équivaut à détruire une œuvre d’art.

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Fruit Mama, www.alessi.ch, Fr. 232.–

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«Jusqu’à St-Moritz avec 1,2 tonne d’argenterie» Reto Mathis est l’un des cofondateurs du Gourmet Festival de St-Moritz qui a signé sa 20e édition cette année.

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Comment l’idée du festival vous estelle venue? A l’époque, St-Moritz était tout sauf une destination de fins gourmets. J’ai voulu y remédier car les hôtels regorgeaient de clients intéressés par la haute gastronomie. En conviant des chefs étoilés du monde entier dans les Grisons, nous permettons aux touristes de profiter tous les soirs d’un cadre différent et d’un dîner d’un niveau culinaire des plus élevés. Aussi, l’événement offre aux chefs de cuisine locaux l’occasion de s’orienter et de se former auprès des grandes toques que nous invitons.

Quels souvenirs marquants gardezvous des éditions précédentes? Une fois, un chef de Singapour fit le déplacement jusqu’à St-Moritz avec 1,2 tonne d’argenterie. La douane ne voulait pas croire qu’il en avait besoin pour son travail. Ce n’est qu’après m’avoir contacté que les autorités lui permirent de continuer son voyage. Lors du tout premier festival, la police m’appela à quatre heures du matin. Plusieurs chefs vidaient le bar d’un restaurateur qui avait peur qu’ils ne règlent pas la note. Heureusement, j’ai pu arranger la situation.

TEXTES: MICHAEL LÜTSCHER, PHILIPP SCHWANDER, ANETTE THIELERT; PHOTOS: LEE JAKOB, CLAUDIA LINSI, MATHIS FOOD AFFAIRS, ISTOCKPHOTO, DR (5)

Il y a 20 ans, l’esprit du siècle se reflétait déjà dans le chrome de cette coupe de fruits signée Alessi. Fruit Mama a été créée en 1993 dans les ateliers de la marque italienne.


La sélection 20

Nous avons sélectionné les meilleurs livres de cuisine. Dix d’entre eux sont présentés sur cette page, les dix autres sur www.saison.ch/fr/livresdecuisine

Le Grand Larousse gastronomique. Edition 2012, Fr. 121.90* L’encyclopédie gourmande par excellence: plus de 1000 pages, 4000 entrées, 1700 photos et 2500 recettes. Epais, large et clairement présenté, cet ouvrage est indispensable, même à l’ère d’Internet, pour tous ceux qui aiment cuisiner.

Harumi Kurihara: Aujourd’hui, je cuisine Japonais. Hachette Pratique, Fr. 25.90* Comme chacun sait, la cuisine japonaise ne se cantonne pas aux sushis. Ce livre contient une vaste sélection de recettes et des techniques de base comme la cuisson du riz ou la préparation du fumet de poisson, le dashi.

Betty Bossi: Gâteaux, cakes et tourtes. Fr. 27.35* Tout ce qu’il faut savoir sur la pâtisserie en 93 recettes: rien d’étonnant à ce que ce classique signe sa 17e édition.

Paul Bocuse: La Cuisine du marché. Flammarion, Fr. 42.45* Considéré comme le fondateur de la Nouvelle Cuisine, Bocuse s’est détourné de la cuisine classique et des sauces d’Escoffier. Quiconque prend son livre en main, initialement intitulé Cuisine du marché, constate rapidement qu’il n’est pas question de cuisine maigre.

Thierry Marx: Planète Marx. Minerva, Fr. 200.40* «Prendre une bonne louche de la sensibilité d’un enfant solitaire. La rouler dans la gourmandise. Laisser macérer quelques années en ajoutant régulièrement des épices variées, une dose généreuse de vécu, des souvenirs de voyage et beaucoup de créativité.» Un livre à déguster avec ses yeux, son cœur et... ses papilles. Auguste Escoffier: L’Aide-Mémoire culinaire. Flammarion, Fr. 26.65* Publié pour la première fois en 1903, le recueil de règles du grand innovateur de la cuisine française a marqué des décennies de haute gastronomie. Ce guide concis et bien étoffé s’adresse aux professionnels mais est aussi un ouvrage de référence pour les amateurs. Green Gourmet. Uniquement dans les magasins Migros, Fr. 29.– Un ouvrage qui rassemble des recettes pour une cuisine saine et de saison. Structuré avec goût. Annexe pratique avec préparations de base, tableaux des saisons et de nutrition. La Cuillère d’argent. Phaidon, Fr. 62.60* La bible de la cuisine italienne: 1500 pages d’informations sur les ustensiles de cuisine, 2000 recettes traditionnelles et des suggestions de menus de plus de 20 grands chefs.

Joël Robuchon: Tout Robuchon. Perrin, Fr. 44.30* Plus de 800 recettes du plus grand de tous les chefs. Un livre qui décortique l’art et la manière de Robuchon pour tous les apprentis maîtresqueux et tous les amateurs. Un ouvrage pointilleux et pédagogue qui met la cuisine façon Robuchon à la portée de tous. Jamie Oliver: Tout le monde peut cuisiner. Hachette Pratique, Fr. 51.90* Dans ce livre richement illustré, les mets hauts en couleur inspirés par la cuisine méditerranéenne sont aussi agréables à admirer. Les recettes peu académiques du chef vedette du petit écran donnent envie de passer derrière les fourneaux. * Chez Ex Libris


Le retour des saucisses TexTe: ChrisTian seiler | illusTraTions: Corinna sTaffe

Nouvelle cuisine, spécialités asiatiques ou cuisine moléculaire, divers courants dernières années. Nous ont traversé notre culture culinaire au cours des continuons toutefois à préférer la cuisine de grand-mère. Mais pourquoi donc?

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TEnDAnCES |

L

a première fois que j’ai été invité dans un bar à sushis, c’était pour moi comme le débarquement sur la lune. Mais dans l’autre sens: un petit pas pour l’humanité et un grand pas pour moi. Jusqu’à ce jour, j’ignorais que l’on pouvait manger du poisson sans l’avoir fait bien saisir de chaque côté auparavant ou, encore mieux, enveloppé de chapelure et arrosé de tellement de citron que l’on aurait aussi bien pu manger du poulet pané, voire un morceau de carton. Ainsi, je me suis retrouvé assis à un étrange comptoir, où un Asiatique, avec un bandeau sur le front, fabriquait de petites torpilles de riz collantes, sur lesquelles une substance verte et très piquante était passée au pinceau, puis un petit morceau de poisson était déposé. Impossible d’y échapper… J’ai alors suivi l’exemple de mon compagnon, visiblement à l’aise dans toutes les situations, et j’ai porté la chose à la bouche. Ce que j’aurais fermement refusé de faire si on me l’avait demandé une heure plus tôt. C’est alors que j’ai eu une deuxième surprise, encore plus grosse. Le curieux

mariage du riz, du poisson et du truc vert était délicieux. Le mystérieux sushi avait un goût frais, relevé, soyeux et doux. Des saveurs si intéressantes que le quantum de répulsion que j’avais ressenti à la vue du poisson cru a disparu comme par magie. Intrigué, j’ai demandé comment se nommait cette substance verte et piquante. Alors, la bouche en cul-de-poule, j’ai prononcé ce mot pour la première fois: «wasabi». La cuisine asiatique adoptée Aujourd’hui, le tube de raifort japonais côtoie naturellement la moutarde de Dijon et la sauce soja dans mon réfrigérateur. Il m’est même difficile de me souvenir comment je faisais avant, sans lui. Que cuisinait-on avant, quand on n’avait pas le temps, si ce n’était pas un curry de légumes vite fait au wok comme on le fait aujourd’hui? Comment relevait-on le poulet rôti autrement qu’à la thaïlandaise? Si je compte bien, il ne s’est même pas écoulé 20 ans entre les premières rumeurs de l’existence d’une cuisine asiatique et le moment où celle-ci s’est

imposée comme une évidence dans nos cuisines, soit dans les années 1990. Aujourd’hui, la cuisine asiatique, c’est comme la pop musique internationale. Tout le monde la comprend. Elle est partout. Les supermarchés font des sushis et les fabricants de plats tout prêts vantent leurs spécialités asiatiques. Dans les années 1980, les Européens se sont mis à consommer du poisson cru, de la sauce soja, du gingembre mariné et à utiliser quantité de baguettes. Et cette tendance n’a plus faibli depuis. Parfois, par plaisir, on mange même de la compote avec des baguettes. Tant et si bien que, lorsque nous sommes en Asie, notre maîtrise des chopsticks nous attire des louanges. La nouveLLe cuisine trop chère Divers courants ont régné sur notre univers culinaire depuis les années 1970, qui ont marqué l’arrivée d’une nouvelle vague venue de France et auréolée de mystère. Une antithèse moderne de la cuisine bourgeoise. De cette cuisine familière, à base de pommes de terre, de sauces épaisses, de viande et d’une multitude de plats sucrés, dont l’objectif

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A l’abordage de la cuisine viking recettes: daniel tinembart | photos: lukas lienhard

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Ces dernières années, nous nous sommes orientés vers la cuisine du sud de l’Europe et de l’Asie. Aujourd’hui, cap au Nord où les chefs scandinaves travaillent des produits locaux au plus haut niveau, comme au Noma, luxueux restaurant copenhaguois de René Redzepi. Nos recettes s’inspirent de la cuisine rustique et sauvage de la Scandinavie.


cuisine nordique |

VeloutĂŠ de pommes de terre et de poireaux avec saumon marinĂŠ Page 30

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À TABLE ! |

«Le bouchon à vis n’est pas très sexy» Beat Caduff se sépare difficilement de ses vins, ne veut pas de lichen dans son assiette et prédit la fin de la culture sushi. IntervIew: ChrIstIane BInder | photos: tom haLLer

Beat Caduff né en 1959 à arosa, Beat Caduff a appris le métier de cuisinier dans l’hôtel de ses parents et celui de sommelier à wädenswil (Zh). en 2008, alors que le Gault millau lui attribue 15 points, il est également remarqué par le michelin. depuis 2012, il anime Menu Surprise, une émission consacrée à la cuisine sur sat1. Ce passionné de chasse vit actuellement à Zurich.

En plus d’un nez pour le vin, le sommelier de l’année 1993 a également du flair pour les tendances. Quand il a ouvert son «Caduff’s Wineloft» dans une ancienne usine de machines de la Kanzleistrasse à Zurich, il y a près de quinze ans, les lieux industriels réinvestis faisaient figure de nec plus ultra de l’art de vivre contemporain. Aujourd’hui, son Wineloft est une institution – grâce notamment à sa carte, à sa cave comptant pas moins de 2000 bouteilles et à son chef. C’est dans son propre restaurant qu’il a choisi de dîner avec nous. Caduff n’y va pas par quatre chemins: une solide poignée de main, un accueil chaleureux, «Heureux de te rencontrer» et nous voilà déjà installés à table. Cuisine de Saison: Tutoies-tu tout le monde? En principe, oui. J’évite cependant de tutoyer les personnes âgées, mon médecin et tous ceux que cela pourrait déranger. Avec ta tenue décontractée, tu passes un peu pour un hurluberlu au milieu de tous ces costumes-cravate. Veux-tu faire passer un message? Non, pourquoi? Ceci est un dîner privé et quand je suis en privé, je m’habille comme ça. J’ai suffisamment d’assurance pour me passer d’un costume. Beat Caduff se met d’accord avec les responsables de la cuisine. Quotidiennement réinventé, le menu est fixé vers 10 h 30 en fonction des produits frais du jour. Saison oblige, c’est du gibier qui nous attend aujourd’hui. Caduff est chasseur. Parfois, on sert ici la viande d’une bête qu’il a tuée de ses propres mains. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, mais nous n’avons pas de regret: en tant que spécialiste, il connaît les meilleurs fournisseurs. Pourquoi as-tu voulu que cet entretien ait lieu dans ton propre restaurant? Cela m’épargne le temps du trajet. Je travaille tellement! Et j’aime prendre le temps de manger.

Certains chefs aiment dîner ailleurs pour tester la concurrence. Cela ne t’intéresse-t-il pas? J’aime beaucoup sortir avec des amis le week-end, toujours dans de très bons restaurants. Je déteste la malbouffe. Mais je n’y vais pas pour dénicher les faiblesses de mes confrères, cela me gâcherait le plaisir de manger. Est-ce que tu t’informes sur ce que font les autres? Bien sûr. Je suis allé au El Bulli, par exemple. S’il y a beaucoup de choses très originales dans la cuisine moléculaire, ce n’est pas mon truc. J’ai vu qu’on servait maintenant des fourmis vivantes sur de la crème fraîche. Si j’avais envie de manger des fourmis, je m’inscrirais à Koh Lanta pour gagner 100 000 francs. Je préfère la cuisine traditionnelle. Pour moi, le produit passe avant tout. Dans mon alpage de Fondei, j’élève quatre porcs qui sont exclusivement nourris d’orties bouillies, d’orge et de pain. Leur viande est tellement savoureuse, pourquoi la saupoudrer de lichen grillé, ou que sais-je? Il se fait porter une bouteille de bourgogne rouge, un Nuits-Saint-Georges. Une fois la bouteille débouchée, le chef s’en sert une gorgée pour goûter et hoche la tête d’un air approbateur. Selon l’année, ce nectar coûte ici entre 180 et 220 francs. Tu accompagnes ton dîner d’un vin onéreux! Quand j’aime beaucoup un vin, ça me fend le cœur de le vendre. Ce bourgogne est extraordinaire – pas trop chargé, et son acidité est merveilleuse. Il se marie parfaitement avec la saveur parfois légèrement aigre du gibier. Le gibier s’accompagne-t-il forcément d’un vin rouge? Aujourd’hui, on est un peu plus tolérant à ce sujet. Un vin blanc très mûr, dépourvu de sucres résiduels et provenant d’un très bon producteur

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Ralph et sa mère, Christina Schelling, ont toujours passé beaucoup de temps ensemble en cuisine. Enfant, Ralph aimait aider sa mère à préparer les repas et ne pouvait s'empêcher de jeter un œil dans toutes les marmites. Aujourd'hui, bien qu'il apprécie toujours la bonne cuisine de sa mère, il lui donne moins souvent un coup de main. Par contre, il ne manque jamais de lui donner des conseils.

n a m a m e d e n i s i u La c RECETTES:

HLE | PHOTOS: PIA GRIMBÜ CHRISTINA SCHELLING

R (PORTRAIT), CLAUDI

ANETTE THIELE A LINSI (FOOD) | TEXTE:

lph, recettes que son fils Ra s le re liv ng lli he Sc a Christin ours. brique, adore depuis touj ru tte ce de ef ch ux ue le talent

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RT


CUISINER AU QUOTIDIEN |

Soupe Célestine Page 48

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| en visite chez un lecteur

Quelle aisance: après 20 ans d’expérience avec Cuisine de Saison, Reto Lässer fait sauter les croûtons grillés en toute décontraction.

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Une collaboration de plus de ans et 1000 idées TexTe: ChrisTine KunoviTs | phoTos: pia Grimbühler | reCeTTes: Cuisine de saison | FoodsTylinG: daniel TinembarT

Reto Lässer est abonné et collectionne Cuisine de Saison depuis 20 ans. Il a célébré l’anniversaire du magazine avec la rédactrice en chef Christine Kunovits.

Paupiettes farcies au lard et aux pruneaux: retrouvez cette recette sur www.saison.ch


| VILLES ÉTOILÉES

E T Ê T A L , S T E M R U S O G E L S I O LE T SÉ

E L S DA N

IDE U G U A ILÉES O T É S I L E S, O U L T P É S S NT LE LES LE E L I H C V U 0 TO T S. G S I I LES 2 O A D N O S T DE S JA P U E O L B . N U I D SENT MICHEL S E R A LES C S E G L LES BE


PARIS Nous TOKyO vous avons mis 323àKYOTO l’eau la bouche?

114

135 Plus d’idées gourmandes dans 14*** 53** 175*

Le ciel étoilé de la bible gastronomique française ­illumine la ville: avec un nombre astronomique de 242 restaurants étoilés, ­Tokyo atteint le firmament. La cuisine asiatique ouvre un tout nouveau chapitre dans le guide qui fut édité pour la première fois à ­Tokyo il y a cinq ans. D’emblée la capitale japonaise détrôna Paris de sa souveraineté établie depuis si longtemps, affichant un record de 191 étoiles. L’envolée de l’Extrême-Orient dans la voûte étoilée du ­Michelin n’étonne guère: au Japon, la cuisine et la table sont une véritable richesse culturelle. Chaque année, la métropole de neuf millions d’âmes et plus de 160 000 enseignes défie les testeurs qui n’ont que l’embarras du choix. Qui plus est, les bonnes tables proposent souvent peu de plats, à la pointe du raffinement.

10*** 17** 50*

5*** 24** 72*

Le cœur culturel du Japon bat à Kyoto. Ancien fief de la famille impériale, Kyoto est le berceau du théâtre Kabuki, abrite des centaines de temples bouddhistes et de sanctuaires shinto et ­invite à flâner dans ses ­innombrables jardins. Elle a la réputation de proposer la meilleure cuisine du Japon. Les connaisseurs s’émerveillent de la diversité des plats, de la richesse des produits et de leur préparation incroyablement variée. La deuxième place de Kyoto n’est donc pas une surprise. Comme pour Tokyo, les testeurs ont visité des restaurants de cuisine traditionnelle et expérimenté le ­fugu, mets à base de chair de poisson-globe réputé pour sa toxicité. Sa préparation réservée aux maîtres fugu nécessite une formation pouvant durer jusqu’à dix ans.

Texte: Claudia Langenegger; photos: Fotolia, getty images, Panthermedia (2), Istockphoto (17)

le nouveau

ABONNEZ-VOUS: Osaka

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Souveraine indétrônable du guide des gourmets ­pendant plus d’un siècle, patrie de la grande cuisine française, la métropole doit ­aujourd’hui se contenter d’une ingrate quatrième place. Elle le fait avec ­beaucoup de dignité et ­demeure la capitale culinaire du monde occidental. En effet, aucune autre ville européenne ou américaine ne dénombre autant de 3 étoiles. Paris est toujours et encore le berceau des grands chefs légendaires. En témoigne Alain Ducasse qui, outre son siège en France, dirige d’une main de maître des tables étoilées à Monaco et New York. Proportionnellement au nombre total de restaurants, Paris devance nettement le Japon: un établissement sur cent est étoilé. Respect!

http://www.saison.ch/fr/shop-abonnement 4*** 14** 81*

Ville portuaire surnommée «cuisine de la nation», ­Osaka est réputée pour sa gastronomie d’influence ­régionale. La spécialité, le takoyaki, est un plat de ­boulettes de pâte farcies au poulpe. Autre délice ­typique de la troisième ville du Japon, l’okonomiyaki ou pizza japonaise est une omelette au chou agrémentée à souhait de poisson, de légumes ou de viande.

En écriture dorée: nombre ­total d’étoiles par ville.

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