Playsound #18

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FÉVRIER 2014 #18

AGAINST ME! THE DEAR HUNTER FAUVE YOU ME AT SIX BLITZ KIDS ALCEST NECK DEEP WARPAINT STEVEN WILSON BURNING HOUSE HAVERFORD THE WORLD IS A BEAUTIFUL PLACE & I AM NO LONGER AFRAID TO DIE STILL PARADE ET PLUS ENCORE...


_PS MAG _Playsound est une plateforme créative de découverte, d’actualité et de chroniques couvrant les différentes facettes de la culture rock au sens le plus général du terme. Le projet comprend un site riche de son flux de news multi-genres, d’un espace de critiques complet ainsi qu’un laboratoire numérique via une plateforme dédiée à la promotion de jeunes talents.

_FÉVRIER 2014 #18 _RÉDACTEUR EN CHEF Yannis Mouhoun

_DIRECTEUR DE PUBLICATION Matthias Meunier

_RÉDACTION MAG

Sami Elfakir Emmanuel Van Elslande Martin Van Boxsom Elie Dib Bazil Hamard Marie-Audrey Esposito Maximilien de Boyer Alexis Dutrieux

_CONCEPTION GRAPHIQUE Matthias Meunier

_CONTACT

mag@playsound.fr

_SITE WEB

www.playsound.fr

_UN PROJET DE :

www.medias-culture.fr

_PLAYSOUND

Playsound est une plateforme culturelle dédiée aux cultures rock. Elle est dotée d’un site d’actualité réactif et moderne, où brèves côtoient chroniques de qualité. Playsound est également un lieu de découverte à l’heure du numérique. Notre démarche s’inscrit dans une volonté de promotion des talents peu connus et de mise en valeur de toutes les formes de créativité. L’équipe de rédacteurs de Playsound forme un ensemble de passionnés tous poussés par la même ambition : partager leur amour de la musique. Nous couvrons l’essentiel de l’actualité musicale dans les styles rock (commerciaux ou non, la bonne musique reste de la bonne musique) : pop, alternatif, punk, heavy, électronique… Nous nous autorisons cependant quelques écarts : aucun dogme concernant les limites (qui sont très subjectives) de Playsound n’est instauré. Nous n’avons en aucun cas la prétention d’être les dictateurs légitimes du goût musical et artistique ; notre seul but est de vous conseiller car nous avons la conviction que la musique est un des grands plaisirs de la vie, forme d’expression de la pensée riche et complexe. Nous avons également à coeur de rendre hommage aux grands groupes et artistes qui ont contribué à la construction de la musique « contemporaine », et de décrypter certains phénomènes musicaux à travers dossiers improbables et éditos décapants.


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_NEWS _l'actu en 140 caractères _TALENTS _ZOOM : Steven Wilson _focus : Butch walker _Dossier : les grammy awards _ILS L'ONT DIT _rétro : against me! _chronique : transgender dysphoria blues _selection ps : the dear hunter × migrant _chroniques en bref


_Playsound × _Février 2014 × _News en bref × _04

_NEWS EN BREF + DE NEWS SUR PLAYSOUND.FR/NEWS

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_Des infos sur le nouveau Skip The Use

Après nous avoir donné un aperçu de leur nouveau son avec le titre Nameless World, les Français dévoilent la date de sortie, le nom ainsi que l'artwork de leur second opus. Intitulée Little Armageddon, la galette débarquera le 24 février prochain. Pour les plus impatients, les pré-commandes sont d'ores et déjà ouvertes.

_Le retour de Foster The People se précise

Début d'année chargée pour le trio ! Les Américains sont sortis de leur silence avec un court teaser annonçant un retour imminent avant de partager, quelques jours plus tard, les détails concernant leur second album ainsi qu'un premier extrait, Coming Of Age. Supermodel, dont la tracklist et l'artwork sont à découvrir sur playsound.fr, sortira le 18 mars.

_Le nouveau Taking Back Sunday débarquera en mars

Suite à sa signature sur Hopeless Records en 2013, le quintet a annoncé la sortie de son sixième album, Happiness Is, pour le 18 mars prochain. À cette occasion, le combo a également mis en ligne la version studio de Flicker, Fade, premier extrait du nouvel opus. Différentes offres de pré-commandes ainsi que la tracklist et l'artwork sont également disponibles.

_C'est terminé pour Anberlin !

2014 sera l'année de la séparation pour le quintet. Le combo annonce néanmoins la sortie d'un ultime album ainsi qu'une tournée d'adieu pour cette année. « Nous voulons terminer l’aventure avec des accolades et célébrer la vie que représentait Anberlin et non être déprimés par cette séparation », a déclaré le groupe. Ce septième et dernier album sortira sur Tooth & Nails Records, label sur lequel les Américains avaient déjà sorti leurs trois premiers albums.

_Damon Albarn sort son premier album solo

Notamment connu pour ses contributions au sein de Blur et de Gorillaz, l’Anglais s’apprête désormais à sortir son premier album solo. Intitulé Everyday Robots, il débarquera le 28 avril prochain via Warner Music. Un premier extrait du même nom donne d’ores et déjà une idée des sonorités qui seront présentes sur la galette dont la tracklist et l’artwork ont également été dévoilés.


_NEWS EN FIL ROUGE + DE NEWS SUR PLAYSOUND.FR/NEWS Les quatre punk-rockeurs sont de retour avec un troisième album intitulé Wolverines. Celui-ci sera disponible dès le 18 mars prochain via Rude Records. En attendant, le combo en a déjà présenté un premier extrait, The Shape I'm In. La tracklist ainsi que l'artwork de ce nouvel opus sont disponibles sur playsound.fr.

_Le nouveau Twin Forks en détails

Après avoir sorti leur premier EP en septembre dernier, les Américains ont récemment dévoilé tous les détails concernant la sortie de leur tout premier album. Simplement intitulé Twin Forks, il sortira le 25 février via Dine Alone Records.

_Le Rock Dans Tous Ses États : premiers noms

Les différents festivals français continuent de dévoiler les premiers noms de leur programmation 2014. C'est au tour du festival Le Rock Dans Tous Ses États de s'y mettre avec l'annonce de trois premiers noms. MGMT, Kasabian et Dub Inc. seront donc de la partie ! Les billets pour l'événement, qui se tiendra les 27 et 28 juin, sont disponibles sur le site du festival.

_Bientôt un nouvel EP pour Frank Turner

Suite à la sortie de son album Tape Deck Heart en avril dernier, l'artiste s'apprête à sortir un nouvel EP intitulé Polaroid Picture. Celui-ci sera donc composé du titre du même nom, présent sur le cinquième album du chanteur, mais aussi d'un inédit (Sweet Albion Blues) ainsi que de trois reprises (Frightened Rabbit, The Weakerthans et Biffy Clyro). Le tout sera disponible dès le 3 février.

_Un nouveau titre pour Elbow

Le retour des Anglais se concrétise ! En effet, le combo a récemment partagé Fly Boy / Lunette, premier extrait de son nouvel album. Cette sixième galette, qui se nomme The Take Off And Landing Of Everything, est d'ores et déjà annoncée pour le 3 mars prochain. Elle succédera à Dead In The Boot, sorti en 2012.

_Beck lève le voile sur son nouvel album

Après avoir fait patienter ses fans avec la sortie de plusieurs singles indépendants, l’Américain est de retour avec un douzième album et en profite pour en présenter un premier extrait intitulé Blue Moon. Son nouvel opus, Morning Phase, sortira le 24 février prochain via Capitol.

_Rat Attack revient avec un nouveau single

Les Anglais, qui étaient restés silencieux depuis la sortie de leur EP en mars dernier, ont récemment dévoilé leur nouveau single, ainsi que son clip vidéo. Saturday Night Feeling est d’ores et déjà disponible à l’écoute et au téléchargement sur la page Bandcamp du combo. Plus d’informations concernant la sortie du premier album devraient très prochainement voir le jour.

_The Used de retour en avril

Le quatuor sera de retour le 1er avril avec son sixième album, Imaginary Enemy. Un premier extrait, Cry, ainsi que la tracklist et l’artwork de la galette sont disponibles sur playsound.fr. De nombreuses offres de pré-commandes sont également à découvrir sur le site officiel du groupe.

_ On en a parlé _Skip The Use sera en tournée dans toute la France en avril prochain et a annoncé une date supplémentaire au Zénith de Paris pour le mois d'octobre. _Après un premier passage en juin dernier, Our Last Night sera de retour au Batofar le 16 février aux côtés de Secrets et Empires Fade. _ City and Colour, projet solo de Dallas Green, se produira dans la capitale, sur la scène du Trabendo, le 5 février prochain. _Marie-Audrey Esposito

_Playsound × _Février 2014 × _News en fil rouge × _05

_Un troisième album pour I Am The Avalanche


_l'actu en 140 caractères X _04 Janvier 2014

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_sigur rós (@sigurros) Il y a 20 ans aujourd’hui, nous formions un groupe appelé Sigur Rós. Un grand merci à tous d’écouter tout ça... http://ift.tt/1e56kLE

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_Playsound × _Février 2014 × _L'actu en 140 caractères × _06

_09 JANVIER 2014

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_Circa Waves (@CircaWaves) On enregistre... mais on joue surtout au ping pong... http://pic.twitter.com/tW2eB5QPd8

X _13 JANVIER 2014

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_Outkast (@Outkast) Retourner sur scène ensemble est le meilleur moyen pour nous de remercier tout le monde pour ces 20 années de soutien à Outkast. -Andre 3000 #Outkast20

X _14 JANVIER 2014

_Twin Peaks (@TwinPeaksDudes) Premier jour au studio terminé. Plutôt crevés, mais ce prochain LP va être quelque chose ! #teampeaks on ne va pas vous décevoir.

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X _20 JANVIER 2014

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_THE SUBS (@THESUBS) Notre nouvelle vidéo pour Concorde ft. Jean-Pierre Castaldi !!! Réalisé par Wim Reygaert, produit par Caviar... Yeayyy ! http://fb.me/6ielmCOX0

X _20 JANVIER 2014

X _Playsound × _Février 2014 × _L'actu en 140 caractères × _07

_Damon Albarn (@DamonAlbarn) Nouvel album #EverydayRobots, sortie le 28 Avril. La vidéo du morceau éponyme Everyday Robots en avant-première demain. http://pic.twitter.com/84qCihcbbd

_20 JANVIER 2014

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_Blood Red Shoes (@Blood Red Shoes) Il est temps de vous révéler le prochain titre de notre nouvel album BLOOD RED SHOES. Ça s’appelle AN ANIMAL et c’est l’un de nos préférés. https://soundcloud.com/bloodredshoes/

X _21 JANVIER 2014

_Trent Reznor (@Trent_Reznor) Oui, Atticus (Ross) et moi signons la bande son du prochain David Fincher, Gone Girl !

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lllllllllllllllllllllllllllllllllllll TALENT #1 llllllllllllllllllllllllllllllll TALENT #2

_Playsound × _Février 2014 × _Talents × _08

_TALENTS

+ DE TALENTS à découvrir sur www.sabotage-radio.com

lllllllllllllllll burning house llllllllllllllllllllllllll HAVERFORD Talent : Disposition, aptitude ou capacité acquise dans un domaine ou une activité. Positionner Burning House dans cette rubrique de notre magazine est finalement peu adéquate car, bien au-delà du talent, on peut qualifier les créateurs de Burning House de génies tant ils possèdent une vocation innée pour la création de sonorités nouvelles. Side-project déroutant initié par Hervé Salters (tête pensante de General Elektriks) et Chief Xcel (leader de Blackalicious), Burning House se veut un mélange de genre bien ficelé, comme si le duo venait de créer un nouveau style musical mettant tout le monde d'accord! Empruntant au rock, au hiphop à l'électro et au jazz pour un cocktail détonant de 40 minutes, le premier album impressionne. L'auditoire danse sur les formidables Post Party Stress Disorder et Whispers in your Headphones, puis s'extasie en voyant que les deux comparses cassent littéralement les codes habituels sur Emergency Exit et Copy That. Le génie des claviers et le roi des samples trouvent ainsi l'alchimie parfaite entre leurs univers respectifs, donnant naissance à une expérience incroyable pour les oreilles. _Genre Électro, funk, rock, hip-hop _Label 3C Tour _Pays France, USA _Site Officiel

http://burninghouseofficial.com

Une sensation de tranquillité, d'apaisement : c'est ce que l'on ressent à l'écoute des compositions d'Haverford. Formé en 2012, ce quintet originaire de New-York vient de sortir son premier album, intitulé Spirit Bear. Celui-ci est composé de treize morceaux portés par la voix reposante de Connor Ramert, parfois à peine murmurée, et possède des mélodies inspirées ainsi qu'un son brut. Havenford est un groupe spontané, sans grandes prétentions. En effet, les cinq Américains font ce qui les rend heureux et leur permet de s'épanouir, sans vraiment se soucier de ce que peuvent penser les autres. Une simplicité qui se ressent pleinement dans les créations du combo, loin d'être impeccables mais pleines d'émotions. En seulement un an et demi d'existence, Havenford a sorti un EP, deux splits et un album. 2014 promet donc d'apporter son lot de nouveautés pour cette formation très productive. En attendant, Spirit Bear est en écoute intégrale et en téléchargement sur Bandcamp. Fermez les yeux et laissez-vous transporter...

_Genre Indie, émo _Label Indépendant _Pays États-Unis _Site Officiel

http://haverfordband.com


llllllllllllllllllllllllllllllllllllllllll TALENT #3 llllllllllllllllllllllllllllllll TALENT #4 llllllllllllllllllllllllllllllll TALENT #5 Issu des tréfonds du black métal (Peste Noire, Mortifera), le jeune multi-instrumentaliste Neige laissait déjà apercevoir un goût prononcé pour les mélodies et les envolées de guitare à la My Bloody Valentine avec son projet Amesoeurs. Mais c’est surtout au sein d'Alcest que le shoegaze prend toute sa part dans les compositions. Formé en l’an 2000 et après une démo black en 2001 Tristesse Hivernale, Alcest entame une lente reconversion musicale. Au fil des albums, le « post- » s’insinue d’avantage. Post-black, post-metal, post-rock… L’évolution de sa discographie pourrait bien se résumer ainsi. Après plusieurs tournées mondiales depuis 2010 et des passages sur les scènes des plus grands festivals, Alcest revient avec son album le plus lumineux, et le plus accessible, Shelter (2014). Enregistré au Sundlaugin Studio en Islande et produit par Birgir Jón Birgisson, le groupe y abandonne définitivement toute sonorité black restante pour s’affirmer comme un groupe shoegaze à part entière.

a Beautiful Place & I Am No Longer Afraid to Die

Actors. Une chanson, une véritable merveille. Un succès viral comparable à Atlas Genius, Paradise Fears ou Rogue Wave. Des artistes qui inondent aujourd’hui les bandes sons originales et les éditions annuelles de FIFA. Imaginez un jumeau de Bon Iver, qui produit une musique plus électronique, mais avec ce même timbre de voix si caractéristique de Justin Vernon. Le jeu de guitare océanique et millimétré semble fondre les glaciers, et nous fait chaleureusement patienter avant la sortie d’un premier album composé au fil de trois années de réunions et d’écriture. Comme le décrit si bien Dennis Van Leeuwen d’IndieXL, Still Parade c’est bien plus qu’un simple rassemblement de musiciens, c’est une échappée solitaire avec vos rêves et vos idéaux. Le seul autre titre révélé, Health, ne fait que confirmer l’arrivée de cette vague dorée qui nous envahira au printemps. Entre Charlie Simpson, S. Carey et José Gonzalez, Still Parade a encore beaucoup à prouver. Cependant, si les choses suivent leurs cours, un certain album risque d’émouvoir bien des amoureux de la belle musique.

_Genre Post-metal, shoegaze, post-rock

Lundi 14 avril 2014. Retenez bien cette date. L’ovni The World Is a Beautiful Place & I Am No Longer Afraid to Die viendra envahir la Flèche d’Or, pour un moment qui se veut d’ores et déjà unique. Le groupe de post-rock / indie rock originaire de Cincinnati est né en 2009 et a traversé de multiples changements de line up au fil des années. Désormais, il est constitué de huit membres qui composent ensemble au quotidien, dont quatre partagent les pistes de voix. Avec du synthétiseur, de la trompette ou encore du violon, les Américains créent quelque chose de nouveau, rendant divinement agréable un fouillis prismique. Ainsi, l’album Whenever, If Ever est la première véritable réalisation de l’ensemble, et offre une texture si dense et complète que de multiples détails fabuleux semblent nous échapper. Tandis que personne n’avait anticipé le succès du groupe, ce premier opus figure dans un océan de tops 2013, dont Pitchfork et AbsolutePunk. Mariage entre le mystère et la vérité, le son du groupe rappelle parfois Brand New ou Volcano Choir, et transporte sans jamais lasser.

_Label Prophecy Productions

_Genre Indie Rock

_Genre Folk Rock, Acoustique

_Pays France

_Label Topshelf Records

_Label Akira Records

_Site Officiel http://www.alcest-music.com

_Pays États-Unis

_Pays Australia

_Site Officiel

_Site Officiel

http://theworldis.bandcamp.com/

PARADE

http://www.stillparade.com/

_Playsound × _Février 2014 × _Talent × _09

llllllllllllllllllllllllllllllll Alcest llllllllllllllllllllll The World Is lllllllllllllllllllllll STILL


_TALENT ZOOM Steven wilson

_Playsound × _Février 2014 × _Talents zoom × _10

Les personnalités qui marquent la musique contemporaine se font si rares que rédiger leur éloge devient une nécessité. Et s'il y a bien un homme qui a révolutionné la musique et dont le monde s'est gardé de parler, il s'agit bien de Steven Wilson. La quarantaine passée, ses éternelles lunettes toujours au bout du nez, cet Anglais si discret fait pourtant partie des piliers du rock progressif depuis l'avènement d'un de ses premiers groupes : Porcupine Tree. Inspiré de Pink Floyd, Yes et autres légendes des années 70, la musique de Porcupine Tree oscille entre rock psychédélique, pop rock et métal progressif. Depuis près de 30 ans, le premier groupe mené par Wilson est à l'origine de titres interplanétaires, comme le bouleversant Trains dont l'introduction reste encore dans nos mémoires, mais aussi de sons singuliers tels que ces nappes de synthétiseur encensées par la voix douce, presque hypnotisante du chanteur qui font l'identité de la bande et qu'on reconnaît entre mille. Apprenant la guitare en autodidacte dès 11 ans, l'Anglais est toujours avide de nouveautés et s'initie ainsi au piano ainsi qu'au chant puis passe derrière les platines en s'improvisant brillamment producteur. C'est cette volonté d'être toujours en quête de nouveaux horizons musicaux à explorer qui poussera l'Anglais à mettre un terme à Porcupine Tree sans hésitation aucune dès que le groupe rencontrera enfin le succès escompté. En s'initiant à l'exercice de l'album solo avec Insurgentes en 2008 puis sur l'incroyable Grace for Drowning en 2011, deux albums radicalement différents sur lesquels planaient une atmosphère d'une pure obscurité, Wilson apporte un souffle nouveau au rock progressif. Toutefois, si sa carrière solo avait déjà été maintes fois félicitée, c'est surtout avec son dernier opus, The Raven That Refused To Sing que le natif d'Hemel Hempstead apporte sa plus belle pierre à l'édifice musical. Encensé par les critiques internationales mais aussi par tous les artistes de la scène progressive (notamment les membres de Dream Theater qui l'ont désigné comme leur nouveau favori), cet album est un réel concentré d'émotions, de sagesse et de génie.Changeant radicalement ses habitudes en créant pour la première fois un album "track by track", c'est à dire sans réelle progression logique entre chaque chanson, l'exégète virtuose surprend. Dès la première écoute on reconnaît la patte d'Alan Parsons, l'homme à qui on doit tout de même le monument du rock progressif : Dark Side Of The Moon, aux commandes du mixage qui délivre ici un son frissonnant en tous points. Une sonorité résolument 70's qui emprunte aussi bien à Jethro Tull qu'à Yes et King Crimson... mais aussi à Radiohead ! Pour ce troisième opus, le Britannique s'entoure du parfait quintet : on retrouve ainsi l'indispensable Marco Minnemann officiant derrière les fûts, la guitare très technique de Guthrie Govan, le charismatique Nick Beggs dont les lignes de basses sont aussi incroyables que sa coiffure, mais aussi Theo Travis et Adam Holzman, reconnu pour sa collaboration avec Miles Davis, aux claviers. Plus encore qu'avec Porcupine tree, Wilson obtient ici le sextet parfait. On sent plus que jamais une osmose musicale, pour un disque frappé par l'excellence équilibriste de ces virtuoses. L'album démarre sur les chapeaux de roue grâce à la ligne de basse dévastatrice de Beggs qui rend l'introduction de Luminol démentielle. Les solis de piano, de guitare et de flûte traversière (splendide clin d'oeil à Ian Anderson) qui s'en suivent ne dérogent d'ailleurs pas au plaisir... bien au contraire ! Lui succède le déchirant Drive Home puisant dans les plus profonds sentiments du chanteur. The Raven That Refused to Sing émet enfin son dernier souffle sur le titre du même nom. Contrepoint mélancolique de l'album qui n'est pas sans rappeler les plus belles compositions de Thom Yorke, cette chanson ancre en mémoire 4 notes de piano

répétées avec obsession, sur lesquelles viennent s'ajouter avec poésie des nappes de cordes encensées par la performance vocale du Britannique. C'est sur ce final majestueux, dont on ressort larme à l'œil que se termine un voyage dans l'esprit du grand Steven Wilson. Malgré des influences majeures, dont l'Anglais ne se cache pas, l'album garde cette patte "wilsonienne" qu'on attendait tant. Et si le corbeau refuse de chanter, l'Anglais, lui, n'a décidément pas fini de nous faire rêver. _Bazil Hamard _Genre Rock psychédélique, rock progressif _Label Kscope _Pays Royaume-Unis _Site Officiel http://stevenwilsonhq.com


Butch Walker Après une carrière musicale anecdotique, Butch Walker s'est imposé comme un producteur de premier plan. Un choix de carrière judicieux qui a permis à ce musicien moyen de trouver sa place dans la grande industrie de la musique pop.

Badd Boyz, SouthGang, Floyd's Funk Revival, Marvelous 3. Quatre groupes qui ne laisseront pas une grande marque dans l'histoire du rock mais qui ont tous quelqu'un en commun : Butch Walker. Marvelous 3 reste sa plus grande réussite et lui a permis de mettre un pied à l'étrier de sa carrière de producteur. Le guitariste s'est en effet chargé de superviser l'enregistrement des trois opus de M3. Un déclic. Une ouverture vers une autre façon de créer. Fort de son expérience musicale, Butch Walker passe un véritable cap grâce aux enregistrements de Sevendust (Seasons, 2003) ainsi que de la nouvelle perle de la pop nord-américaine du moment : Avril Lavigne (Under My Skin, 2004). Un premier pas dans le fourre-tout de la musique « populaire ».

Mélange de styles Dans le Numéro 10 de Playsound, nous vous présentions Rick Rubin, qui est aujourd'hui le producteur référence dans l'industrie du disque. Cette popularité, ce grand barbu de Rubin l'a acquise en se construisant une expérience solide dans deux styles précis (rap et trash), avant d'avoir un champ de travail plus éclectique. Il en va de même pour Walker. Alors qu'il avait produit les trois disques de Marvelous 3, il s'est fait les dents, par la suite, sur plusieurs groupes du monde rock et indépendant. Il travaille avec Injected, Bowling for Soup ou encore SR-71. En deux ans (2002, 2003) il produit 8 albums de 8 groupes différents – dont Sevendust. Puis, l'ancien guitariste de SouthGang pénètre dans le nébuleux cadre musical de la « pop » – ce qui a pris un peu plus de temps à Rick Rubin.

Tout commence avec Avril Lavigne et la machine One of the Boys de Katy Perry (2008) certifié de plusieurs disques de platine à travers le monde, et notamment deux en France. Le succès est au rendez-vous. Et la rencontre entre l'artiste quasi punk qu'est Walker et la pop musique font fureur. Il contribue également à la production d'un album de Pink en 2006. Il retourne de temps à autre vers ses racines punks avec All Time Low, Weezer (2009), les prometteurs Panic! at the Disco (Vices & Vertues, Too Weird to Live, Too Rare to Die!) et les revenants de Fall Out Boy l'an dernier. Entre ces groupes et la très country Taylor Swift, il est finalement bien difficile de placer Butch Walker dans une case musicale précise.

Pop l'éponge Le premier concerné a d'ailleurs lui-même du mal à définir quel style (pop, rock, alternatif) le définit parfaitement. « On pourrait dire que c'est le rock and roll, précise le musicien. Mais tout le monde a sa propre définition du rock and roll. Du coup, je ne sais pas trop comment l'appeler, mais je suspecte qu'il s'agisse d'une forme globale de pop musique ». Il faut bien avouer que les artistes collaborant avec Walker sont des gros vendeurs dont la musique est loin d'être expérimentale et plutôt facile d'accès. Ce qui est, par définition, la nature même de la pop, outre le fait d'aspirer, telle une éponge, les innovations musicales des autres styles. Fort de ses origines rock, Walker arrive donc à participer à la parfaite distribution de la musique pop qu'il produit avec qualité. Car ce petit mot, qualité, est au centre de ses préoccupations, lui qui dénonce les « mauvais » morceaux qui sont diffusés à la radio. Le producteur rock sauvera-t-il la pop de qualité ? La réponse appartient à Mister Walker. _Maximilien de Boyer

_Playsound × _Février 2014 × _Focus  × _11

_FOCUS


_Playsound × _Février 2014 × _Dossier × _12

_DOSSIER

LES GRAMMY AWARDS Dimanche 26 janvier. 3h de show, 82 récompenses, plus de 400 nominations. Les Grammy Awards ont vu les choses en grand. La fameuse cérémonie américaine était au centre de toutes les attentions ce soir-là : 28.5 millions de téléspectateurs, et plus de 15 millions de tweets pour cette 56e édition. Les résultats ont déjà été très commentés, mais petit rappel des grands vainqueurs de cette année : Daft Punk (enregistrement de l’année, album de l’année, meilleur performance pop en duo/groupe, meilleur album dance/electronica, album le mieux masterisé), Lorde (chanson de l’année, meilleure prestation pop en solo), Macklemore & Ryan Lewis (meilleur nouvel artiste, meilleure performance rap, meilleure chanson de rap, meilleur album de rap). Quelles surprises... Il suffisait, au final, de zapper sur la bande FM entre les radios les plus commerciales pour élaborer la liste des nominés. Même – triste – constat chez les NRJ Music Awards, les MTV Europe Music Awards, les Victoires de la Musique, et la plupart des autres cérémonies d’ailleurs.

Les mécaniques du vote Le panel de votants n’est pas, pour les Grammys, constitué du public ou des téléspectateurs, mais bien des « professionnels de la musique ». Toute personne inscrite à la National Academy of Recording Arts and Science (NARAS) – aussi connue sous le nom plus court de Recording Academy – est en droit de voter pour cette fameuse cérémonie. Peut s’y inscrire tout musicien, chanteur, ingénieur, compositeur,

producteur, arrangeur, directeur artistique, auteur de texte sur les jaquettes, du moment qu’il est crédité sur au moins six sorties musicales (vidéos comme audios).1 Sont d’abord votés les nominés parmi une foule de disques et d’artistes principalement fournis par les labels eux-mêmes. Le problème d’un vote par catégorie (meilleur album pop, meilleur album rock, meilleur album metal...) est qu’il exclut les groupes trop éclectiques, ou bien minimise leur musique. Enfin, chaque votant est appelé à choisir parmi les nominés. Un artiste pourra donc voter pour lui-même, ou pour un ami. Avec une trentaine de participants à leur album, les Daft Punk avaient donc, théoriquement, déjà une trentaine de votes acquis pour leur Random Access Memories. Autre faille : le vote « au hasard ». Chaque votant est sensé s’en tenir à sa catégorie d’expertise, mais peut, s’il le souhaite, voter dans 9 catégories maximum (+ les quatre nominations suprêmes : album de l’année, enregistrement de l’année, chanson de l’année, et meilleur nouvel artiste) lors du choix des nominés. Au moment de départager les nominés, la liberté de vote s’étend à 20 catégories (+ les 4 précitées). Et c’est ici que toute la démarche commerciale d’un groupe, son succès populaire, sa diffusion de masse, entreront en jeu. Si le nom résonne dans l’esprit du votant, il y a de fortes chances pour qu’il soit tenté de faire une petite croix de plus, plutôt que de s’abstenir. C’est ainsi que Macklemore a raflé autant de catégories face à des rappeurs jugés plus talentueux par les réels connaisseurs du milieu hip-hop (comme Kendrick Lamar, nouvel enfant chéri du rap).


Enfin, encore plus troublant, Michael Greene – président de la Recording Academy – a fait créer un comité anonyme ayant un droit de regard – et de modification – sur les nominés (la rumeur voudrait qu’il nous ait épargné une nomination pour La Macarena2). Les remplaçants ? Des artistes plus « bankable ». Il ne faut pas oublier que la cérémonie des Grammy Awards est télévisée. C’est pourquoi les gagnants n’ont rien de surprenant, et que la Recording Academy a mis les petits plats dans les grands pour plaire à ses spectateurs, avec des spectacles XXL et des featurings de stars à gogo : Daft Punk et la clique de Get Lucky ft. Stevie Wonder ; Macklemore & Ryan Lewis ft. Madonna ; Paul McCartney ft. Ringo Starr (« semi-Beatles, OMG ! ») ; Trent Reznor (NIN) ft. Josh Homme (QOTSA) ft. Dave Grohl (FF) ft. Lindsay Buckingham (Fleetwood Mac) ; etc. La cérémonie ne s’est d’ailleurs pas cachée de ses ambitions commerciales, en diffusant les spots de ses partenaires financiers... en plein pendant le concert final de ce super-groupe de rockeurs, point d’orgue de la soirée.

ce soit la Recording Academy ou tout autre organisateur) distribuent des « awards » pour féliciter un artiste d’avoir – disons le franchement désormais – bien vendu un album. Les artistes se voient alors poussés dans un ring, forcés à s’affronter pour mettre la main sur une babiole, et rajouter une ligne de plus à son CV. L’industrie musicale organise ainsi des galas titanesques pour... s’auto-congratuler. Il est également à noter l’incroyable décalage entre l’exubérance affichée, et la réalité de la situation. L’économie mondiale est en crise, notre période est une période dite de rigueur, l’industrie musicale se plaint elle-même de ses mauvais chiffres de vente faute aux vilains pirates, et pourtant, elle aligne les décors monstres et les artistes à gros cachets. Le groupe canadien Godspeed You ! Black Emperor en avait fait le constat lors de son discours d’acceptation du prix de musique Polaris pour Allelujah! Don't Bend! Ascend!3 Ce type de cérémonie n’est donc en rien un hommage au labeur des artistes ou la reconnaissance d’un réel talent. Ces grands galas ne sont que la glorification d’une logique purement commerciale et n’auréolent que des artistes dont on a déjà marre.

Le combat des chefs Il devient alors difficile d’accorder une quelconque crédibilité à ce type d’évènement. Mais au-delà de cet aspect financier, forcément omniprésent dans le show-business, reste l’intérêt de distribuer des récompenses. Comme un instituteur donnera des « bons points » aux élèves, les institutions musicales (que

_Martin Van Boxsom

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https://grammy365.com/join/membership-types http://slate.com/articles/arts/music_box/2011/02/why_i_hate_the_grammys.html http://cstrecords.com/statement-from-godspeed-you-black-emperor-on-polaris/

_Playsound × _Février 2014 × _Dossier  × _13

L’audimat : le roi des électeurs


_Playsound × _Février 2014 × _Souvenir  × _14

_SOUVENIR

MUSE : 15/07/201O Jeudi 15 juillet 2010. Premier jour du festival des Vieilles Charrues. Mais aussi le tout premier jour, non pas du reste de ma vie (quoi que), mais où je foule le sol du site de Kerampuilh. Excité et à la fois curieux de savoir ce qui m’attend, je découvre un festival. Un lieu. Une ambiance. Et pour ce faire, j’ai eu la bonne idée d’y aller le jour où un certain groupe nommé Muse y jouait. Entamant une longue attente de plusieurs heures devant les barrières, animé par un fanatisme innocent comme tout bon ado écervelé qui se respecte, je subis avec difficulté la purge francophone Revolver avant d’arriver au moment tant attendu. Seulement voilà, alors que le volcan semblait si proche de l’explosion, un torrent de flotte nous tombe dessus, retardant ainsi la prestation des trois Britanniques. La rumeur circule même dans la foule que le groupe serait sur le point d’annuler. Je ne vous cache pas qu’à cet instant précis, tout le monde se faisait dessus. Mais dans l’excitation générale, le groupe finit par débarquer, et presque à l’heure messieurs dames. Surgissent alors les membres dans un accoutrement improbable, mêlant K-way ridicules, lunettes improbables et épaulettes velues. Le trio ne se fait pas prier pour lancer dans l’obscurité totale un Plug in Baby infernal. Tous les classiques y passent, entrecoupés par les nouveautés issues de Resistance, alors que la pluie continue de tremper les quelques parties de nos vêtements encore sèches. Mais peu importe. Et en même temps c'est mieux, au fond. Toute la ville de Carhaix a tremblé l’espace d’un soir. Les averses rajoutant un côté épique et unique au contexte chaotique du live, toute la masse de gens présente se déchaînait dans un seul et unique but ce soir là : profiter d’un live exceptionnel dans un contexte exceptionnel. Le genre de moment que l'on n’oublie pas.

_Sami Elfakir


“Parfois, c’est difficile de jouer certains de ces vieux titres en live. L’état d’esprit n’est plus le même qu’avant.”  Daily Star

_Sami Elfakir

_Playsound × _Février 2014 × _Ils l'ont dit × _15

sur une possible écriture de ses mémoires

Alex Turner

àà propos de Miley Cyrus

Serge Pizzorno

à propos des anciens titres des Arctic Monkeys

“Je préférerais plutôt faire de nouveaux films, écrire de nouveaux titres ou partir en tournée. […] Si quelqu’un veut savoir ce que j’ai fait en 1965, il peut directement aller sur Wikipedia. ”  The Hollywood Reporter

“Ca déchire ! […] On est sur quelque chose de totalement inédit. On enregistre bientôt et ça va être d’une manière inédite” Rolling Stone

“Elle n’est rien de plus qu’une putain d’accumulation du porno internet, du putain d’hip-hop et de ce putain d’univers Disney. Elle est juste un putain de cauchemar du XXIème siècle.”  NME

Mick Jagger

Dave grohl

à propos du nouvel album des Foo Fighters

_Ils l'ont dit


_RÉTRO

AGAINST ME!


Trois ans après Total Clarity, Against Me! sort le bien nommé Transgender Dysphoria Blues. Une nouvelle fois ce groupe très particulier revient pour nous injecter une bonne dose de punk emmené par l'incroyable Laura Jane Grace, autrefois nommé Tom Gabel. Explications.

Punk sur MTV ? Against Me! sort son troisième opus, Searching For A Former Clarity enseptembre 2005. Plus rock que le précédent, il apparaît ainsi plus audible pour un plus grand nombre. Le single Don't Lose Touch en vient même à être diffusé par MTV. Sid Vicious a de quoi se retourner dans sa tombe. Mais peu importe après tout puisque la qualité est de mise. Une qualité d'ailleurs reconnue par Sire Records – un label affilié à Warner – qui signe le groupe de Tom Gabel à la fin de la même année. Dire que Against Me! est un groupe star connu de tous serait mensonger, mais le groupe parvient peu à peu à devenir un petit porte-étendard d'un style en légère baisse de régime. Désormais tête d'affiche du genre, affilé à un « major », le groupe, et surtout Tom Gabel, commence à ressentir le poids de la pression. Le chanteur tombe même dans l'alcool et la drogue à cette époque. Touché par le stress d'avoir une « expérience ratée avec une grosse maison de disque et la grossesse de Heather (la femme de Tom, ndr) », Gabel se sent incapable d'écrire et de composer quoique ce soit. Cette prise de tête artistique, plutôt banale pour un rocker qui « s'évade » grâce aux liqueurs et autres opiacés, lui permet surtout d'avoir une prise de conscience plus importante. L'homme père de famille décide d'assumer un sentiment qui l'habite depuis l'enfance : il se sent femme.

Bien dans sa peau Si ce changement radical, tant mental que médical, paraît hors de propos, il a au contraire une énorme influence sur Against Me!. À 31 ans, Tom Gabel devient donc Laura Jane Grace. Si sa voix ne bouge pas d'un ton, son physique change grâce à la prise d'œstrogènes. Devenu officiellement transsexuelle* en mai 2012, Laura est donc la nouvelle leader d'un groupe qui, à l'image de sa femme, a parfaitement bien accepté ce changement et retourne efficacement en studio pour enregistrer ce nouveau Transgender Dysphoria Blues qui porte bien son nom. Et si l'acte de Tom-Laura était finalement l'acte le plus punk qui soit ? Écouter son instinct et faire fi de l'avis général. *Transsexualisme : manifestation d'un trouble de la construction de l'identité chez l'enfant (...) le sujet considérant son sexe biologique comme une injustice, une erreur qu'il recherche à réparer en adoptant le comportement et l'aspect du sexe opposé. Cela peut aboutir à une demande d'intervention médicale (Source : Larousse médical) _Maximilien de Boyer

_Playsound × _Février 2014 × _Rétro × _17

Où est donc passé ce bon vieux punk ? Dominé par les groupes plus « mélodiques » pour adolescents, comme Blink 182 ou The Offspring, le vrai punk a plus de mal à se faire une petite place au soleil. Ce qui semble plutôt logique vu l'esprit rebelle et anti-conformiste qui habite ce style si particulier. Or, pour émerger au milieu de tout ce fatras musical occidental qui cherche désespérément à pousser l'auditeur à la consommation numérique ou solide, l'aide d'une maison de disque est fortement conseillée. Et là : patatra. Comment assumer la signature de son groupe dans une grande maison de disque capitaliste, tout en continuant à mener – sans aucune gêne morale – la lutte artistique contre le système ? Difficile sur le papier mais souvent réalisé dans la réalité. Comme l'a fait Against Me! en 2003 en rejoignant les rangs de Fat Wreck Chords, une grande maison de disque punk. Une signature qui déclenche une réaction habituelle : mécontentement des fans radicaux anti-capitalistes et reconnaissance dudit groupe par un plus grand nombre. L'anticonformisme est parfois souvent difficile à suivre. Quoiqu'il en soit, Against Me!, après un petit album aux jolies sonorités agressives (Reinventing Axl Rose, 2002) accède à une petite notoriété avec As the Eternal Cowboy l'année suivante.


Against Me!

_ChroniQUE

Transgender Dysphoria Blues _Genre

Punk rock

_Producteur

Laura Jane Grace

_Label

Total Treble Music

21_ 01_ 14_

_Tracklist 01_ Transgender Dysphoria Blues 02_ True Trans Soul Rebel 03_ Unconditional Love 04_ Drinking with the Jocks 05_ Osama bin Laden as the Crucified Christ 06_ FUCKMYLIFE666 07_ Dead Friend 08_ Two Coffins 09_ Paralytic States 10_ Black Me Out


Soyons francs. Le retour d’Against Me!, groupe phare de la scène punk américaine mené par l’exceptionnel Tom Gabel depuis 1999, fait partie des plus imprévisibles qu’il nous ait été donné de chroniquer, pour ne pas dire le plus extraordinaire. Au sens propre du terme. En effet, ce n’est plus la voix rauque de notre bien-aimé prince Tom qui magnifie cet excellent (n’ayons pas peur des mots) Transgender Dysphoria Blues, mais celle toute aussi habitée et troublante de Laura Jane Grace.

_Emmanuel Van Elslande

_ Orchestrations 4/5 _ Créativité 3/5 _ Intérêt 4/4 _ Lyrics 2/3 _ Cohérence 2/2 _ Artwork 1/1 _ Note globale 16/20

DICT

En bref, Transgender Dysphoria Blues est un uppercut précis, concis et rageur. Dans l’attente (très peu soutenable) d’un passage dans la capitale avec un line up aux petits oignons, c’est un pamphlet contre l’indifférence qui rythmera bien des allers retours habités par nos plus belles et enfouies aspirations. Une telle affirmation pourrait rebuter ou mentir une adoration non dissimulée, mais elle n’est que le résultat logique et sans appel d’un album plus que parfait, qui tombe à pic en ce début d’année bien terne.

DICT

VER

Loin d’être la nouvelle vocaliste du quartet, Laura n’est autre que Tom, qui a pris la décision de changer d’identité en 2011, par le biais d’une opération. Dans une interview exclusive accordée à Rolling Stone au moment de cette annonce, Laura confiait que cette nouvelle vie ne changerait rien à sa façon d’écrire et de composer, et que le prochain album d’Against Me! serait celui d’un renouveau longuement façonné au fil des départs successifs des membres de longue date Andrew Seward, bassiste du groupe depuis 2002, et Warren Oakes, batteur fou à la barbe traditionnelle soviétique des plus appréciées et reproduites par les aficionados. Chose assez peu commune pour être notée, rares sont les leaders pouvant annoncer une « certitude » si discutable avec une sincérité et une inquiétude symétriquement palpables. La chanson titre introductrice de l’album offre tout ce que l’on peut espérer d’un titre d’Against Me! : énergie débordante, maîtrise affolante, puissance fédératrice saisissante. Le timbre de Laura Jane Grace ferait presque oublier les récentes nouvelles tant l’âme d’Against Me! est sublimée au fil des martèlements parfaits d’Atom Willard (derrière les fûts pour The Offspring, Rocket from the Crypt et Angels & Airwaves au cours de la dernière décennie). Les chansons FuckMyLife666 et Paralystic States, probablement les plus accrocheuses du disque, renouent instinctivement avec les mélodies de White Crosses, dernier effort du groupe sorti en 2009, pendant que True Trans Soul Rebel ou encore Black Out, conclusion parfaite à l’album, rappelle les débuts du groupe, et notamment As the Eternal Cowboy, qui date de 2003. Visiblement, la qualité des performances du groupe n’a fait qu’augmenter au cours des derniers mois, et notamment depuis que l’alter ego féminin de Gabel a pris les devants. Et les éclats révolutionnaires et dynamités qui jonchent cet album le démontrent sans même le besoin d’un concert : une telle fougue animale, une nouvelle vague issue des remouds éternels du cœur des géants du punk. Un véritable régal qui n’a de décevant que sa durée : 29 petites minutes, à peine suffisantes à ôter le t-shirt et à hisser les étendards. De quoi faire taire les centaines d’audiophiles (qui ont été tétanisés ou amusés par ce passage de la chrysalide au papillon) pour quelques années. Certes, on pourra reprocher aux Floridiens de ne pas avoir innové et d’être restés sagement sur leurs bases sur la plupart des morceaux. Or, qui oserait renier de telles fondations, si soigneusement établies et longuement agrandies que celles sur lesquelles trône désormais le fauteuil doré de la reine du punk ?

VER



The dear hunter

Migrant

_Musiciens

Casey Crescenzo × Nick Crescenzo × Maxwell Tousseau × Connor Doyle

_Label

Rude Records

_Date de sortie 18/02/2014

_Tracklist

07_ Girl 08_ Cycles 09_ Sweet Naiveté 10_ Let Go 11_ This Vicious Place 12_ Don't Look Back

Déroutant. À l'image de son leader, The Dear Hunter est ce sorte d'ovni musical sur lequel il est impossible de mettre une étiquette. Rappelons tout de même que son fondateur, Casey Crescenzo a tout de l'artiste de génie. Ouvert à tous les styles et inspiré par des histoires personnelles, le frontman s'est habitué à nous sortir des albums-concepts relatant la vie d'un personnage fictif (The Dear Hunter) ou à composer plusieurs EP autour d'un thème central (les couleurs). Intarissable, il enregistra même en novembre dernier une symphonie où le personnage central se trouva être... le piano! Si ces quelques lignes ne vous attirent toujours pas, alors venez découvrir Migrant. Premier opus sans concept, mais non sans introspections, il représente tout le travail du groupe depuis ses débuts. Entre les envolées symphoniques, les morceaux plus pêchus à la Girl, les ballades où piano, cordes et guitare se mêlent pour nous transporter dans un univers unique (le céleste Sweet Naïveté), Crescenzo nous offre encore une fois une panoplie des styles qu'il affectionne. Et, alors qu'on pourrait penser à un problème de cohérence, on se rend bien compte au contraire que c'est ce joli désordre qui rend le contenu de l'album fort. Insaisissable, Crescenzo nous fait passer du rire aux larmes avec une facilité déconcertante. Plus accessible que ses prédécesseurs par sa logique de conception et ses mélodies plus convenues, Migrant est un diamant brut qu'il est nécessaire de lustrer régulièrement pour en faire ressortir toutes les richesses. Un effort juste. On aime : Cycles, Whisper, Bring You Down.

_Elie Dib

DICT

DICT

VER

_ Orchestrations 4/5 _ Créativité 3/5 _ Intérêt 2/4 _ Lyrics 2/3 _ Cohérence 2/2 _ Artwork 1/1 _ Note globale 14/20

VER

_Playsound × _Février 2014 × _Séléction PS × _21

01_ Bring You Down 02_ Whisper 03_Shame 04_ An Escape 05_ Shouting at the Rain 06_ The Kiss of Life


_chroniques en bref Neck Deep

Wishful Thinking Neck Deep avait déjà fait une entrée très remarquée sur la scène pop-punk made in UK avec ses deux premiers EP. Wishful Thinking creuse dans la même direction mais avec plus de maîtrise et de professionnalisme, un très bon point pour un groupe qui n'existe que depuis deux ans. Le son impeccable et les mélodies accrocheuses sont dignes des plus aguerris. L'ensemble reste tout de même répétitif, si bien que même après quelques écoutes, il est toujours difficile de différencier certains titres. Si les cinq Anglais ne proposent rien de bien original, ils ont tout de même le mérite de délivrer un premier album de qualité qui séduira les fans du genre dès la première écoute.

_Playsound × _Février 2014 × _Chroniques × _22

_On aime : Zoltar Speaks, Mileage

_Marie-Audrey Esposito

ALCEST SHELTER

Alcest(e) n’est plus misanthrope ! Après des débuts post-black et une lente évolution plus shoegaze au fil des albums, le projet de Neige s’affirme ici, une fois pour toute, purement post-rock. Pour se faire, Neige et son batteur Winterhalter sont donc partis au cœur de la nature sauvage et merveilleuse d’Islande, afin d’enregistrer au fameux Sundlaugin Studio de Sigur Rós. Alcest y abandonne définitivement les oripeaux du métal pour un album radicalement plus lumineux. Shelter, l’abri, se pose comme un refuge, un lieu d’introspection calme et rassurant, où se ressourcer. La plage, la montagne, la cheminée, le jardin... Chacun aura le sien. Et chacun aura désormais l’album pour l’y accompagner. _On aime : Opale, Voix Sereines, Shelter

_Martin Van Boxsom

Blitz Kids The Good Youth

Ayant déjà ravi les critiques avec la sortie de Vagrants & Vagabonds (2011), les Blitz Kids étaient attendus au tournant. Force est de constater que la difficile étape du second album a été réussie avec brio. Sans se reposer sur ses lauriers, le quatuor délivre un très bon second opus, ne commettant pas l'erreur de faire deux fois le même album, ni celle de déboussoler ses fans. Malgré le départ en 2012 de deux des membres fondateurs du groupe, les Anglais ont réussi à retomber sur leurs pattes, délivrant un son plus lumineux. Il semblerait bien que The Good Youth soit l'album de la maturité pour Blitz Kids. _On aime : Perfect, On My Own _Marie-Audrey Esposito


YOU ME AT SIX CAVALIER YOUTH

Seulement deux ans après avoir fait trembler un Wembley plein à craquer pour une dernière nuit de péchés, les Anglais de You Me At Six reviennent avec le conquérant et chevaleresque Cavalier Youth, un bijou d’authenticité et de maturité. En dépit de quelques titres parfois redondants (Room to Breathe, Love Me Like You Used to), jamais Josh Franscechi et sa bande n’auront été aussi pointus et convaincants que sur cet opus, incontestablement au-dessus du reste de leur discographie, pourtant déjà brillante. Ce quatrième album est un petit miracle, et confirme le statut olympique d’un groupe qui ne fait que grandir sans jamais trébucher.

warpaint

warpaint

Oui les demoiselles de Warpaint sont sensuelles, voire sexuelles ; mais elles sont bien plus que cela. Ce deuxième opus, éponyme, est un de ces disques qu’il faut écouter plusieurs fois pour l’apprécier : d’abord on entend des gémissements, des titres qui se ressemblent mais jamais ne s’assemblent. Alors il faut se forcer pour finalement s’éblouir et laisser ces enchanteresses nous envelopper avec leur pop psyché cristalline, parfaitement rythmée par la batterie omniprésente et la basse. Lorsque l’on écoute ce disque, digne successeur du précédent, on se sent comme un voyageur seul en mer, soumis aux vagues mélodiques, au chant des sirènes, aux quatre filles dans le vent. _On aime : Love is to die, Biggy, Feeling alright

_Alexis Dutrieux

Fauve

Vieux frères C’est avec les bras levés vers le ciel, l’âme en peine et le poing serré que le collectif FAUVE nous captive (ou nous insupporte) depuis des mois. Après avoir suscité un buzz titanesque lors de la sortie d’un premier EP plus que réussi, et rempli une quinzaine de Bataclans sans le moindre effort, les Parisiens nous laissent avec VIEUX FRÈRES une impression de déjà vu mêlée à une certaine admiration, bouleversant nos sens et nos opinions. Dès lors, difficile de savoir si la poésie labyrinthique et torturée qui hante cet album nous fatigue ou nous fascine. Quoi qu’il en soit, les aficionados aduleront modérément, et les hérétiques crieront à nouveau au scandale, pour cet avoeu d’impuissance au doux goût de victoire. _On aime : Loterie, Voyous, Lettre À Zoé

_Emmanuel Van Elslande

_Playsound × _Février 2014 × _Chroniques × _23

_On aime : Too Young to Feel This Old, Cold Night, Carpe Diem _Emmanuel Van Elslande


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