Le livre de Philip Plisson "Contre vents et Marées"

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Peintre de la Marine

CONTR E V ENTS & M A R ÉES 40 ANS DE PASSION D’UN MARIN-PHOTOGRAPHE


La photographie, crachotait Charles Baudelaire: « est un art mineur qui ne durera pas... »

INTRODUCTION

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D’abord la mer

É D I TO

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Toujours la mer

LES ICÔNES

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Loin des clichés, une mémoire photographique

L A M E R DA N S TO U S S E S É TAT S

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Contre vents & marées

LUMIÈRES DE PHARES

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Il faudra se rappeler que ce fut Un coup de crayon, une signature Je suis invité à courir la Nioulargue en 1991 à bord de Gitana VI en présence du baron Edmond de Rothschild. Marc Berthier, Peintre Officiel de la Marine, est un proche du baron et court depuis longtemps sur ses bateaux. Sur les longs bords de près, nous sommes assis côte à côte, les jambes pendantes, quand Marc sort son carnet de croquis. Mon statut de marin photographe l’inspire, et c’est là qu’il imagine la sangle d’un appareil photo se transformant en vague déferlante sur laquelle surfe un 12m JI sous spi. De retour dans son atelier, Marc déclinera ce qui deviendra mon logo, avec un phare, un dauphin, un palmier, un croiseur. Il m’a confié son carnet de croquis pour nous faire partager son travail. Depuis 40 ans, son coup de crayon illustre sans aucune erreur, l’ambiance qui règne sur les plans d’eau durant les régates de Cowes, Newport, Saint-Malo, Saint-Tropez, Cannes, Monaco, La Trinité et bien d’autres... Merci Marc pour tes cadeaux et ton humour.

PA S S I O N D E L A VO I L E

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La vocation, c’est d’avoir pour métier sa passion

RENCONTRES EN MERS INCONNUES

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Si la terre sépare les hommes, la mer les rapproche

U N M A R I N - P H OTO G R A P H E « C’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme » @S\OcR

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Contre vents & marées Texte de Patrick Mahé À l’heure où les ados branchent l’électrophone à twist et découpent les photos des « idoles » dans les pages de Salut les Copains, le jeune Philippe Plisson fait main basse sur les collections de Bateaux ou Le Yacht, des revues spécialisées, flatteuses à l’œil, qui s’empilent dans le bureau de son père. Pas d’Elvis ou peu, un zeste de Johnny, une œillade romantique de Françoise Hardy, quelques batailles de Chaussettes Noires versus Chats Sauvages, l’esquisse du match Beatles-Rolling Stones au mur de sa chambre… Guère plus. Lui privilégie plutôt les « portraits » de voiliers de course racés. Ils portent la signature du Britannique Keith Beken ou de Rosenfeld, le « Gatsby magnifique » de Newport, capitale de la voile nord-américaine dans le petit État si chic du Rhode Island. Dès lors, la signature de Beken of Cowes, gentlemen du Royal Yacht Squadron, gravait son empreinte dans le Bleu horizon du jeune homme, préfigurant sa vocation de marin photographe. Philippe, devenu Philip — griffe oblige — et Keith se reverront pour la dernière fois en 2001, lors du jubilé de la Coupe de l’America. Plisson longeait l’île de Wight entre deux navigations en mer d’Irlande. De sa fenêtre, au premier étage d’un cottage sur The Parade, un haut lieu baignant, quasiment les pieds dans l’eau, Beken lui fit signe de le rejoindre au jardin, un éden floral bordé de végétaux rares grandis à l’orée des courants du Gulf Stream. Tous deux allaient mettre en scène une exposition hommage titrée « Beken of Cowes », qui sera le clou du premier festival international de la Photo de mer, à Vannes, en Bretagne. Pour l’occasion, Philip s’était immergé dans ses archives sans prix, sinon celui de trésors d’émotion. Un must pour ce festival pérenne, initié par Philip, créé par la volonté du maire de l’époque, François Goulard, marin lui aussi et perpétué par son successeur, David Robo. Assis face à la mer qu’ils fixent d’une infinie tendresse, ils revisitent les faits d’armes de la Coupe de l’America, déroulant les clichés oubliés de régatiers se défiant, pour l’honneur, autour de trois bouées ! Le premier challenge entre goélettes eut l’île de Wight pour théâtre. Toutes voiles gonflées d’orgueil, America répondit à l’invitation du très sélect Royal Yacht Squadron, ouvrant son cercle élitiste aux autres nations. Elle avait traversé l’Atlantique pour le relever. Plus moderne et mieux gréée, elle l’emporta avec dix-huit minutes d’avance sur le suivant, un yacht britannique, dont le nom fut instantanément rayé de l ‘Histoire. On se délecte encore à Cowes de la réplique qui cingla la reine Victoria, suivant la course depuis son château d’Osborne : « Qui est le second ? – Il n’y a pas de second, majesté ! » En trois mots, la messe était dite : tapis rouge pour le vainqueur et requiem pour le perdant !

4 Contre vents & marées

Introduction

Beken photographia tous les challengers virant entre les bouées du Solent, ce bras de mer séparant l’île de Wight du Sud-Angleterre. Il était un puits de science sur l’épreuve de prestige des classes « J » (de 35 à 40 m de longueur) puis des « JI » (23 m maximum), nées lors de la reprise du grand défi, en 1957. Plisson avait dix ans alors. L’époque balbutiait encore la télévision et la Coupe de l’America, relancée aux prémisses des « trente glorieuses » ne faisait pas encore la couverture de Paris Match. Dès cet âge pourtant, éveillé à l’émotion provoquée par le match racing en majesté, il en attrapa le virus. Aussi, quand le baron Bich éveilla l’hexagone à cette compétition hors norme, lançant son France, barré par Bruno Troublé à l’assaut des « defenders » et des « challengers » à Newport, il était paré pour en saisir toutes les grâces. Il n’était qu’aux marches de sa quête photographique quand il assista, en 1970, au baptême de ce France à coque azur, dans le port de La Trinité-sur-Mer. Éric Tabarly, auréolé de sa victoire dans la transat, en 1964, était là. Philip rêva longtemps d’être de la partie, mais au joli fantasme d’éventuel équipier, il préféra se coiffer du bachi de marin de la « Royale ». Aujourd’hui, Plisson continue d’admirer le France dans le port de La Trinité, où une bande de copains, Bruno Bich et Bruno Troublé en tête, viennent de lui redonner vie alors qu’il s’étiolait, depuis 20 ans, sur un ber à l’École Navale. C’est avec ravissement qu’il confie : « Marin, mon petit-fils est souvent à bord. Et même, parfois, numéro 1 »… À cette confidence près, trop actuelle pour être alors contée, on imagine la richesse des échanges entre Beken et Plisson à Cowes. Pour un peu, Sir Lipton (l’homme des Tea parties de ce temps-là), taxé « épicier du roi », cinq fois lancé à la conquête de ce Graal marin, se serait invité à leur table à l’heure du sacro-saint Five o’clock tea… Soudain, un Chartreux au poil argent sauta dans les bras de son maître… La dernière image que Plisson garde de Beken, son inspirateur et ami. Bien avant d’intégrer le corps des Peintres de la Marine, en 1990, une institution inspirée par Richelieu pour témoigner, par les toiles d’artistes de l’état d’avancement des travaux dans les ports, la plus belle commande étant celle de Colbert à Vernet. La photo s’émancipant de la peinture – Plisson a obtenu la reconnaissance de ses pairs. Avec la Seine de sa petite enfance et ses inondations, il y avait aussi la Loire. Un fleuve intimidant serpentant en majesté, mais non sans danger, entre tourbillons et sables mouvants, au-delà des étangs de Sologne, son berceau familial. S’il est né à… Montmartre, il ne s’est pas fait poulbot de la Butte pour quelque

peintre à touriste, mais rapidement moussaillon de la première heure. S’il apprit la navigation lacustre en Sologne, la capture des brochets et des carpes en Loire, attirant ses prises au fond de pièges sommaires, il ne tourna pas Raboliot pour autant. Gamin, il rêvait d’émotions « iodées ». Il balbutia ses gammes marines « à la godille », à travers les mouillages de La Trinité-sur-Mer qui s’évanouissent vers le chenal de Crac’h, via les parcs à huîtres hérissés de piquets. Un vaste terrain de jeu découvert dès l’âge de quatre ans. Atteindre ce Graal passait par une inoubliable odyssée routière menant à la magnifique escale portuaire. Départ à l’aube ou presque, arrivée à l’heure du goûter, au soleil couchant, parfois, en cas de gros retard à l’allumage. En 1951, la 4 CV de papa, conseiller en lectures chez Gibert (il avait l’oreille de Sacha Guitry), à deux foulées du pont Saint-Michel, mettait dix heures, l’été, pour rallier Orléans, point d’ancrage familial, à son amarre de saison. Plisson père n’est encore qu’un « estivant » ébloui par l’infini d’une mer aux mystères et reflets d’argent où tout est à découvrir. Plus tard, le trajet se fera en « Aronde », « 403 » ou « DS19 », une montée en gamme routière régulière, signe extérieur d’un meilleur standing. Si l’aller n’en « finissait plus », mais s’égayait toujours des promesses de vacances « sur l’eau », le retour tournait au cruel purgatoire annonçant l’interminable marathon scolaire enchâssé dans un univers clos, car tristement et uniformément citadin. Onze mois à tenir loin des flots, forcément bleus, sauf quand les parents fêteront plus tardivement Pâques à La Trinité. En souvenir de ses lointaines années de pensionnat, il fera sien le problème d’arithmétique élémentaire posé par le poète Jacques Prévert : « On est assis toute la journée. On n’a pas le droit de bouger. On guette les heures. On les écoute sonner. Problème donc : un élève entre en classe à huit heures trente, en sort à onze heures trente, revient à une heure, s’en va à quatre heures. Combien de minutes s’est-il ennuyé ? »… Il en rigole aujourd’hui, loin des blouses grises remisées au clou en leur temps, de l’encre violette qui maculait les doigts, des buvards tapissés de taches et du tableau noir à craie qui crissait sous les ongles. Son premier livre de chevet – Le Grand Meaulnes - est un remède à l’ennui du potache, une bouée de sauvetage. Outre les héros de « La Bibliothèque Verte », sésame d’adolescence, quelque Prince Éric et autres scouts à totem et Bracelets de Vermeil, il se réfugie, à perte de pages fortement illustrées, dans L’Almanach du marin breton. Plisson y apprend le phénomène des marées et des courants… Les premières le laissaient sans voix, quand en une poignée d’heures, sa plage du Men Du, un écrin sur la route de Carnac, rapetissait à vue d’œil ! La marée basse découvre d’invisibles buissons rocheux par mer pleine où s’embusquent

les crustacés traqués par la pêche côtière. Magies et sortilèges de la nature : rien de plus beau que ces étendues sablonneuses dévêtues à heure précise ; un rituel, rythmé sur le cycle de la lune pour le bonheur des yeux. À raison de deux spectacles par jour, rien que ça ! Ça « déchale » sec lors des marées d’équinoxe à fort coefficient : 118, 119… 120 ! La mer, c’est aussi des maths, commence à potasser le jeune Plisson ! Où s’évanouit la ligne d’horizon ? Quelles sont les limites du trait de côte ? À l’âge de l’algèbre, il calculera les distances, déployant des cartes marines plus grandes que lui pour en mesurer les fonds. Mieux que de recopier cent fois les lignes que le maître impose aux cancres du fond de la classe, il réécrira à plaisir et d’une plume ronde et penchée, la fameuse ordonnance de Colbert : « Sera réputé bord et rivage de la mer tout ce qu’elle couvre et découvre pendant les nouvelles et pleines lunes et jusques où le grand flot de mars se peut étendre sur les grèves ». Philippe a découvert la « vraie » bleue à quatre ans, puis la navigation familiale, à 10 ans, à bord de Télémaque, en 1956, un petit sloop en bois verni de 8 mètres. Il prend alors le pas de vrais « voileux » à la Kersauson, son copain des quais et du Café de la rade, apprivoise aussi la photo et ce, dès sa première communion. Revêtu de la pure aube blanche, il n’arbore pas qu’une croix de bois autour du col. Sa grandmère paternelle, en fine observatrice, lui passe aussi les sangles d’un appareil en bakélite. Elle avait remarqué son attirance pour le dessin, le trait bien léché, le sens des perspectives, de la « chose vue » à croquer, vite reproduite. La photo, pourquoi pas ? À défaut d’avoir l’oreille musicale – la famille aimait à passer par la case Conservatoire de Paris – Philippe développait cette autre sensibilité artistique. Le cadeau fera mouche. Il n’en oubliera jamais le numéro matricule swinguant à son oreille comme un hymne à l’amour et, bientôt à la mer : l’UltraFex Rol 120 à boîtier réalisait des négatifs 6 x 9… Nul besoin de sortir de Polytechnique pour le débutant avide de connaissances techniques, mais pas loin ! Élève standard au collège, loin de flirter avec les mentions, Plisson potasse au jugé, à l’instinct, le fonctionnement d’appareils de toutes marques (il n’y avait pas de mode d’emploi !), tout autant, ou presque, que les lourdes pages de l’Almanach du marin breton. De celui-ci, il fait moisson d’instructions nautiques dont le vocable commande le détour obligé par la case Dico. Ainsi recopie-t-il, comme à l’école, les premières leçons d’amarinage et, notamment, vu la navigation en rade trinitaine, souligne-t-il consciencieusement, au crayon de bois, combien « il est recommandé de “chenaler” le vent avec le courant… de se présenter au port à “mi-marée de jusant”… » Il apprend par cœur l’enseignement prodigué par de petits livres illustrés : « Embarque garçon et l’art de ne pas cafouiller »…

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S’il ne met pas encore son premier savoir d’apprenti « ciré jaune » (le fameux Guy Cotten) en musique, il le capture déjà en photo… Rapidement, l’ado qui pousse en lui, se fait un petit nom. Malin, améliorant de jour en jour sa pêche aux premières images, tirant lui-même ses négatifs selon une technique apprise dans le labo d’un ami de son père, il offre ses premières productions aux propriétaires de voiliers qui voient en La Trinité-sur-Mer un futur Newport armoricain… Et dans leurs voiliers, de possibles œuvres d’art à placer au mur des villas, pointe de Kervillen, par exemple. Ce n’est pas un hasard si, bientôt, Tabarly, Kersauson, Florence (Arthaud), Caradec, Gahinet, Poupon, Riguidel, Bourgnon et les autres, y poseront leur sac pour s’en évader toutes voiles au vent vers le grand large. Pas un hasard, non plus, que des chantiers navals, tel l’emblématique Costantini, pionnier de la navigation de plaisance dans les années soixante, quand une poignée de voiliers se découpait au mouillage, y feront fleurir tant de mâts et polir de fringantes coques pour chevaucher l’océan, en breton Mor Braz, la grande mer… Éric Tabarly venait d’hériter du cotre de son père, le fameux Pen Duick. Fort de son savoir glané à l’École Navale, il eut l’idée, ici, d’en retourner la coque fatiguée, de la délester et d’en mouler la matière alourdie pour du plastique. D’un coursier vieillissant il fit un sloop léger. Dessiné et construit chez Gilles et Marc Costantini, Pen Duick II révolutionne l’industrie de plaisance, tel le groupe Bénéteau, aujourd’hui leader mondial, dont Plisson devient le témoin passionné. Sa vocation est née dans leur sillage. D’abord en godillant sur sa plate, puis en slalomant sur son voilier dans le chenal de La Trinité. C’est là qu’il a travaillé son regard. On dit d’un musicien qu’il a l’oreille musicale et d’un photographe, non seulement qu’il a un œil, mais qu’il est l’œil. Pour faire ce métier là, il est une force intérieure qui n’est pas à portée du premier détenteur de smart phone et collectionneur de pixels venu.

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Introduction

Au Q.I. de référence, s’ajoute ici un plus rare Q.E. ou quotient émotionnel. Autrement dit, être sensible aux scènes les plus banales, capturer la moindre vision des choses de la vie avec l’œil du photographe en éveil permanent. Ainsi définit-on « l’œil ». Si Beken est son maître absolu, côté mer, Robert Doisneau est son modèle pour ce qui est de la maîtrise de l’image. Plisson est un contemplatif, pas un baroudeur du photojournalisme et, moins encore, un paparazzo pour magazines jetables. La mer devient son terrain de jeu. Il la respecte avec la gravité et le sérieux qu’on lui doit. Il voit en elle un cadeau photogénique permanent, par tous les temps, de la « tempête de ciel bleu » au grain qui menace dans de noirs nuages et bouche « à ravir » son champ de vision. Il se donne la peine d’en traquer l’intensité, empruntant à Mac Orlan, barde d’escales portuaires et de comptoirs, ce constat du pêcheur d’images : « Il faut chercher pendant des heures la seconde, unique, où la vie, en quelque sorte, est prise sur le fait… » Des hommes de mer, il partage les gestes et les rites, la patience qui couronne leur action, surtout dans les zones de pêche. Il interprète la force et la direction du vent comme autant de signes l’incitant à se mettre en alerte. Cet éveil permanent le conduit là où il pressent devoir jeter son filet à images. Les nuages, la couleur changeante de l’eau, le ciel en habit de tempête, le jeu des marées, guident ou confortent son inspiration. Il signera bientôt Bretagne, pays de mer, autour du patrimoine maritime armoricain. Il le bichonne avec le soin qu’un Breton d’adoption met à chérir sa terre d’accueil. Sans le savoir, il fait déjà sienne la maxime de Xavier Graal, barde de braise et de Breizh : « Si on ne naît pas breton, on le devient à l’écoute du vent, du chant des branches, du chant des hommes et de la mer »… Ce livre vogue comme un hymne à l’Armor. Il en est à soixante dix, aujourd’hui, dont certains – La Mer – édité par Hervé de La Martinière sur une idée de Yann Arthus-Bertrand (après La Terre vue du Ciel) sont devenus des monuments, tant en pagination somptueuse, traductions (treize langues) qu’en diffusion record. Au pied de cette pyramide d’ouvrages, il y a aussi Rencontrer la Mer. L’ouvrage vaut symbole. Philip a choisi la photo, la Bretagne, l’Océan… Le monde ! Après avoir tant louvoyé dans la rade de son enfance, il finit aussi par jeter son regard depuis l’hélicoptère, tel l’oiseau de mer, traquant l’émotion vibrante et la beauté insolite des infinis côtiers. Un soir d’été, en 1998, une société de production l’avait embarqué pour filmer et photographier une séquence de « Zone Interdite » (M6). Dans un virage serré, le caméraman s’accrocha, à l’aveugle, à la poignée d’admission coupant net la turbine. L’hélico tomba de cent mètres, comme une pierre, dans le chenal de La Trinité… Pas de victime, mais de graves blessures. Plisson en réchappa, plongeant pour ramener le caméraman coulé avec la machine, au bord de la noyade. Une sorte de miracle. Avant d’arriver au sommet de son art, il a dû souquer ferme pour prendre le vent des magazines à la page.

Tout commença vraiment en 1984 avec « Cinq filles sur un bateau » ; une idée de Robert Hersant, patron du Fig-Mag, un supplément chic sur papier glacé du Figaro, loin du « choc des photos », la griffe de Paris Match. Mais comment se retrouve-t-il à Tahiti, sillonnant les îles hollywoodiennes au milieu de naïades au look de top-models, Tina, Léna, une blonde, une brune, une rousse ? La réponse s’appelle Florence Arthaud. Ces filles à podiums bronzées sous les sunlights avaient aussi le pied marin. Florence voulait bien prendre la barre et poser pour de vrai, pas pour la frime. La mer n’est pas un studio photo. Alors elle suggéra Plisson. À peine posa-t-il le pied en Polynésie qu’il entreprit de « refaire la garde-robe », de réparer la voile. Et voguent les belles ! Ce n’est pas seulement parce qu’il était le petit dernier de « la bande de La Trinité », que Florence obtint de Robert Hersant, propriétaire du Figaro d’embarquer « son »photographe. Sous le bachi de La « Royale », à bord de La Jeanne il avait posé le pompon rouge à Papeete, d’où il rentra par la route des Indes. L’achat, sur place, d’un appareil Edixa y avait renforcé son goût de la photo. Rendu à la vie civile, fier époux d’une jolie Marie-Brigitte, bientôt père de trois enfants, Anne, Frank et Guillaume, il se fait Philip (à la britannique) et embrasse la photo pour métier, après une courte escale dans le monde des VRP en… lingerie ! Orléans est encore son port d’attache. Il y ouvre un studio, fonce tête baissée dans la création graphique et la photo publicitaire. Dès lors, rigueur oblige – la Pub est sans merci – il se fait rapidement un nom, avant d’imposer un prénom bien à lui. Pour Florence Arthaud, il y a mieux encore. Non seulement le chantier naval Jeanneau, confie à Philip sa mise en images, mais les autres, Kirié, Gipsy, etc, se disputent sa technique. Son credo est en route : « Je suis un marin photographe qui photographie pour naviguer et navigue pour photographier ». Qui connaît mieux la mer qu’un marin, en effet ? Plisson prend la barre pour de bon. Avec ses partenaires, le skipper Guy Delage, et un ami médecin, François Girod, il avait attaqué l’Atlantique, rien que ça, en mai 1982 ! Leur prao, premier en classe II, est troisième au général (sur 72 bateaux) de la course La Rochelle -La Nouvelle-Orléans, à une étrave, ou presque, de la voile de Marc Pajot ! Bref, Philip n’est pas que le « photographe » qui monte, il est aussi « marin », adoubé par les siens. L’ouverture de sa première galerie à La Trinité (11m2) vaut Fest Noz. Le reste s’enchaîne à la vitesse d’un vent de force 8. Dès 1991, il accumule les distinctions (Peintre Officiel de la Marine, Mérite maritime, Légion d’honneur, Prix de l’Académie de Marine, etc.) titres, livres, expos s’enchaînent. Les plus grands auteurs ( Jean-François Deniau, Bertrand PoirotDelpech, Irène Frain, Yann Queffélec) lui prêtent leur plume.

Il est bientôt nommé Peintre titulaire de la Marine et son ancre se fait griffe. Sa route des « Phares Ouest », des Hébrides d’Écosse à la Galice celtique, rend hommage aux vigiles de la mer embrasant les flots de leurs feux de sauvegarde. Il publie l’inventaire de chefs-d’œuvre architecturaux en péril. Au contraire de Cordouan, roi des phares, « phare des rois » tous ne sont pas classés « monuments historiques ». Certains, comme Tévennec, entre l’île de Sein et la Pointe du Raz, forment calvaire à quelques milles de la baie des Trépassés, dont la légende porte « l’âme errante » des naufragés. Alors se multiplient les œuvres qualifiées d’iconiques. En langue bretonne, Beg er Pollen signifie « pointe des rochers perdus »… Sur cette pointe de Belle-Ile-enMer, battue par la tempête (le vent soufflant à 130 km/h), Philip réalisa, à la date du 24 novembre 1996, le best-seller de la photo de mer. De Banda Aceh, en Indonésie, ravagé par le tsunami, en 2005, à l’apostolat du sauvetage en mer (la SNSM), du Belem, ce trois-mâts aux cinq vies, aux voiles rouges des Sinagots du Golfe du Morbihan, des backwaters du Kerala au ballet de survie des jangadas brésiliennes, ou des pêcheurs de crevettes à Madagascar, en passant par la chevauchée des vagues en mer d’Iroise, Philip est partout chez lui, jusqu’au jardin des lumières de Venise et de sa lagune où il réside, sur l’île de Certosa. Ses photos d’esthète, uniques, ont force de témoignage. N’a-t-il pas saisi, inouïe providence, l’une des dernières ruades du Bugaled Breizh, symbole des chalutiers naufragés ? C’était au pied même du phare chapelle de Tévennec ! L’œuvre d’un pêcheur d’images ne conduit pas qu’à la vie d’artiste. Loin s’en faut. Quand il s’est fait entrepreneur, en 1987, avec Marie-Brigitte, son épouse, Philip crée le plus grand showroom et atelier d’images à Crac’h (3 200 m2), à une portée de bottes de La Trinité-sur-Mer, embarquant un équipage d’une trentaine d’employés. Alors qu’ils visitaient une galerie à Anvers (19 septembre 2010) soudain, un appel de détresse : « Le bâtiment a brûlé ». 30 ans d’une vie de photographe emportés. Seulement 50 % de la photothèque argentique sont sauvés ! Ils repartiront avec une équipée plus légère. Contre vents et marées !

Patrick Mahé, Membre de l’Institut Culturel de Bretagne (Skol-Uhel Ar Vro). Co-auteur (texte) d’une douzaine de livres avec Philip Plisson

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Introduction

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spectacle lui paraît encore plus saisissant. Il n’y a que 7 nautiques à franchir, soit 4 minutes de vol pour nous retrouver de nouveau sur une terre d’accueil. La panne moteur au-dessus de l’eau doit s’anticiper, aussi Daniel prend de l’altitude au cas où…

Édito

La photographie, c’est un art ; c’est mieux qu’un art, c’est le phénomène solaire où l’artiste collabore avec le soleil. (2)

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ULTRA-FEX

FOCA SPORT 2

CANON PELLIX

La tâche la plus importante et sans doute la plus difficile qui incombe à un photographe n’est ni d’apprendre à utiliser son appareil, ni à développer, ni à tirer des épreuves. C’est d’apprendre à voir avec un œil de photographe. (1) Il est 10 h 30 ce 24 novembre 1996. Depuis hier, une sérieuse dépression se précise sur notre trait de côte. Après un bref coup de fil aux prévisionnistes marine à Toulouse qui me confirment qu’à la pleine mer, en fin de matinée, les rafales pourront atteindre 130 km/h, j’appelle Héli Bretagne. Mon ami pilote, Daniel Manoury, complice et deuxième œil depuis l’automne 1989, est en stand by depuis hier, après que nous avons échangé sur les prévisions météo. Je lui confirme que toutes les conditions sont réunies pour voler au plus fort de la dépression. Daniel décolle de Vannes pour venir se mettre en place au chantier ostréicole de mon gendre Younick, sur la rivière de Crac’h. Midi. Le vent s’est établi nord-ouest, les rafales sont de plus en plus soutenues, le ciel est totalement dégagé, la situation est conforme aux prévisions au moment où nous décollons. La baie de Quiberon est totalement blanche d’embruns qui courent sur une mer vert émeraude. À trois minutes de là, nous apercevons déjà, sur la côte sauvage, des vagues démesurées couvrir le littoral. Premier stationnaire sur Portivy où l’on ne distingue plus le port. À cet instant, nous prenons conscience que nous avons le privilège de survoler un spectacle rarissime. Dans l’aventure, j’ai embarqué mon fils Guillaume qui, depuis son retour de la Marine où il a été formé à la photo, partage mes aventures. Guillaume travaille au 24 x 36 Canon, alors que moi, dans ces conditions, je me concentre sur ma chambre panoramique Fuji qui ne m’autorise que quatre photos avant un changement long et complexe du film. En vol, après un quart d’heure de prises de vue sur cette côte particulièrement sollicitée, Daniel propose de faire route sur Belle-Île, plus précisément sur la pointe des Poulains, à l’extrême nord-ouest de la plus belle de nos îles, où le

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Édito d’un marin-photographe

En changeant de niveau, nous changeons de spectacle. À cette latitude et à cette saison, le soleil ne monte pas très haut dans le ciel, et la lumière est rasante, même à midi, ce qui donne encore plus de modelé à la côte. Sous le vent de l’île, dans l’extrême sud-est, j’aperçois des bâtiments de notre Royale au mouillage. Ils attendent sûrement la fin du coup de tabac pour reprendre leur mission. À moins de deux nautiques des Poulains, Daniel débute sa descente avec en point de mire, le petit phare, une chapelle blanche qui balise la pointe. Construit en 1899 et automatisé en 1987, son feu domine la mer à 34 mètres et porte à 23 milles par temps clair. Aujourd’hui, il est dans un gigantesque brumisateur formé par les grandes houles de l’Atlantique qui viennent déferler sur une muraille de granit de 17 mètres, insensible aux coups. Elles projettent les embruns à 40 mètres, avant qu’ils soient rabattus par les rafales de 130 km/h. À un demi-mille de ce théâtre, Daniel positionne sa machine en stationnaire, 300 pieds au-dessus des vagues. La photo est là, il ne reste plus qu’à la prendre, la nature a mis en scène le spectacle, nous sommes au rendez-vous. Alors que Guillaume use du film Velvia, j’arme instinctivement l’obturateur de ma chambre, je cale à l’estime le diaphragme sur 1/500e de seconde, je contrôle que mon télémètre est bien à l’infini avant de cadrer et attendre LA vague qui illustrera que ce fut. Je ne fais que deux images, deux plaques diraient les anciens, mais quelles plaques ! Plus tard, Daniel me confirmera que j’ai bien crié dans mon casque au moment du shoot : « Putain que c’est beau ! ».

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Une photographie, c’est un arrêt du cœur d’une fraction de seconde. (3) Après être passé par le phare de la Teignouse recouvert en permanence par des vagues énormes, nous nous reposons au chantier de Younick, mon gendre. Rotor coupé, nous nous retrouvons tous les trois au pied de la machine, très troublés par le spectacle inoubliable et conscients que nous venons d’être les témoins privilégiés d’une colère exceptionnelle de l’océan. Pour apprécier pleinement cet événement, nous devrons attendre le verdict du laboratoire de Rennes où sont traités nos films. Enfin, toutes les images sont étalées sur la table lumineuse chez Pêcheur d’images. Elles sont là, bien là, et nous pouvons savourer notre bonheur. Fiers, car la pêche est conforme à ce que nous avons mémorisé et techniquement à la hauteur de

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Une enfance bercée par la mer 1/Mon Moth, 1er bateau de la famille - 2/Télémaque. Dès 15 ans, mon père me laisse naviguer avec mes amis - 3/Étang du Puits en Sologne. La flotte de 5O5 - 4/Mon père sur Télémaque II - 5/Le Caneton Pénard en 1956, une de mes 1ères photos - 6/Télémaque II. J’ai racheté le spi de Pen Duick II à Éric Tabarly dans les années 70 7/L’appel du large sur Télémaque - 8/En régate avec mon frère sur notre 5O5 - 9/Marie entourée de nos enfants sur le Rush « Celtina » - 10/Ma sœur Brigitte et mon frère Frédéric en régate en 5O5 à l’étang du Puits - 11/1ère croisière de Franck - 12/À bord du Rush. Marie à la grand voile, Franck à la barre. Anne et Guillaume observent. Édito d’un marin-photographe ฀Contre vents & marées 11


l’événement. Malgré l’euphorie qui règne à la photothèque, personne à cet instant ne peut imaginer que sur la table lumineuse est posée « l’image » qui va bouleverser le destin d’un Peintre de la Marine. Nous sommes à une semaine du Salon nautique de Paris où, pour la première fois, je suis invité à exposer dans la longue passerelle qui relie le hall 1 au hall 2. Pour moi, une photo existe seulement quand elle est mise en page ou exposée. Les Caisses Régionales Bretonnes du Crédit Agricole ont financé plus de 50 tirages géants sur le thème du patrimoine maritime breton. Tous les tirages sur plexi et encadrés sont prêts à prendre la route pour la porte de Versailles. Mais à cette heure, Marie insiste pour que nous ajoutions un tirage panoramique de 2 mètres de large avec la légende :

De belles histoires iodées, j’en ai rempli mes carnets de voyages. Elles sont ponctuées de rencontres exceptionnelles avec des femmes et des hommes de mer. Après 40 ans d’images autour de la planète bleue, je pourrais vous en conter durant des nuits.

légende voudrait que ma maman ait eu ses premières contractions un dimanche de janvier sur les bords de l’Étang du Puits, à deux lieues de la ferme de mon grandpère. Cette inconnue, la Mer, je la découvrirais l’été 1951. Alors que nous habitons encore Montmartre où j’ai vu le jour, la Renault 4 chevaux flambant neuve des parents nous mènera jusqu’à la Trinité-sur-Mer, retrouver mes grands-parents qui ont loué pour la famille une maison de l’autre côté du chenal. Il n’y a plus de pont depuis 6 ans, les occupants l’ont fait sauter avant la débâcle, le pont Eiffel, trait d’union entre la Trinité et Saint-Philibert, ne sera remplacé qu’en 1957. Voilà, la liaison est faite entre mes deux pôles révélateurs d’émotions : la Sologne et la Bretagne. La première va m’ouvrir les yeux sur la terre et la culture, l’autre sur la mer et la navigation. L’hiver, mon père construit ses bateaux (je dis « ses » car il en aura construit 3 en 10 ans). Des 5O5 en bois moulé, véritables chefs-d’œuvre de marqueterie vernis. Au printemps, à l’été, comme à l’automne, tous les dimanches, nous naviguons en famille au Cercle de la Voile du Centre, un club de voile que mon père a créé avec des amis passionnés et qu’il présidera durant 30 ans. Le CVC comptera jusqu’à 200 bateaux et 600 membres au cœur de la Sologne, sur l’Étang du Puits, un réservoir d’eau de 200 hectares construit par Napoléon III pour alimenter le canal de la Sologne entre le Berry et Lamotte-Beuvron des demoiselles Tatin. Ici, on régate entre trois bouées avec des risées capricieuses. Une très bonne école pour apprendre à lire sur l’eau. La Mer, la vraie, j’en rêve durant 11 mois, n’ayant droit qu’au mois de juillet ou d’août, avant de m’émanciper vers l’âge de 17 ans. Jusqu’en 1956, nous naviguons sur les bateaux des autres avec des escapades à Royan et Dinard. L’été 1957, Télémaque arrive dans le paysage. C’est un petit sloop tout vernis, construit chez Bombal à Mortagne-sur-Gironde, un des premiers chantiers après-guerre à concevoir et réaliser des monotypes de série : Estuaire, Super-Estuaire, Grand-Estuaire. Le Super-Estuaire est devant le café de la Rade de la Grande Marie. Sanglé sous la vieille grue manuelle, nous attendons la marée montante pour que Télémaque, arrivé le matin de Royan, soit mis à l’eau. C’est au quai des pêcheurs, le seul à l’époque, que nous allons, avec l’aide précieuse de mon oncle Jacques, mâter et armer notre beau yacht avant qu’il rejoigne son mouillage au milieu d’une vingtaine d’autres unités plus grandes et pour la plupart construites avant la guerre.

Dans cet ouvrage en forme de biographie, je vais me limiter à seulement 162 images légendées pour vous raconter mes campagnes au long cours. C’est une première, un exercice à l’initiative de mon éditeur et ami Hervé de La Martinière, qui a accepté cet ouvrage à la condition que je sois aussi l’auteur des textes. Lourde tâche, moi qui ai toujours affirmé qu’« une image vaut mieux que mille mots… » (Confucius). Comme je l’ai lu un jour dans Paris Match, je suis « né de mer inconnue ». J’ai grandi et appris à naviguer sur des plans d’eau fermés, les étangs de Sologne. La

Ma sœur Brigitte et moi sommes en âge de naviguer avec notre père. Nous pratiquons la voile sur notre étang depuis plusieurs années, papa et Brigitte sur le 5O5, moi sur un Moth hérité de papa, avant d’avoir un 505 avec mon frère Didier. Les étés précédents, nous avons tiré quelques bords sur les bateaux des autres. Aussi, à la veille de notre première sortie en baie de Quiberon, nous sommes conscients que nous avons tout à apprendre. Je dis « nous », car nous sommes tous les trois du même niveau, aucun ne peut prétendre apprendre aux deux autres. Dans ces conditions, il va se créer entre nous une vraie complicité ;

Avis de coup de vent sur la pointe des Poulains. Belle-Isle en Mer. La veille au soir de l’ouverture, nous finissons d’accrocher cette imposante exposition. Il ne nous reste plus qu’à trouver une place pour la « Pointe des Poulains » qui ne figure pas dans notre mise en scène. Nous resserrons quelques tirages pour trouver les 2 mètres 50 où placer ce tirage réalisé dans l’urgence et que nous venons de recevoir par transport-express de Rennes. Alors que nous sommes en équilibre sur nos escabeaux et que la photo n’est pas encore au mur, un homme s’arrête devant cette image et pose la question : « C’est où ? » et conclut : « Je la prends ! » avant même de demander le prix, prix que nous sommes incapables de lui donner n’ayant pas encore imaginé établir de tarifs pour cette exposition. Nous nous mettons d’accord pour que cet amateur (celui qui aime) passe en fin de salon récupérer son œuvre. Cet homme ne saura probablement jamais qu’il vient de s’offrir le premier tirage d’« Avis de coup de vent sur la pointe des Poulains », le tout premier d’une très longue série qui dépasse aujourd’hui les trois millions d’impressions…

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La famille « dans le même bateau » 1/Pixou, notre IMX, skippé par Franck - 2/Un petit cotre du Golfe que nous avons fait revivre pour le plus grand plaisir de nos enfants - 3/Guillaume et Franck sur Celtina 4/Franck et Guillaume s’éclatent - 5/Marin tire des bords dans le port sur notre Cat Boat du Massachussetts - 6/Malo au trapèze en régate - 7/Marin N° 1 sur France 8/Adrian, toujours heureux - 9/Arthur, le surdoué - 10/Younick, Franck et Anne sur Flapjack, notre dragon acheté pendant la Semaine de Cowes - 11/Apprentissage de la pêche au casier pour Marin et Malo - 12/La princesse Chloé prend la barre - 13/Marin et Arthur au championnat de France de caravelles - 14/Mariage d’Anne et Younick 15/1re navigation de Chloé à 8 jours, dans les bras de Guillaume et Marina - 16/Le dragon, un pur plaisir - 17/Younick drague ses huitres - 18/Mariage de Franck et Sophie Édito d’un marin-photographe ฀Contre vents & marées 13


d’un côté il y a papa et ses deux aînés sur Télémaque, de l’autre maman et mes deux frères Didier et Frédéric, sur la plage, trop jeunes encore pour embarquer. C’est à la même époque que, régulièrement, je prends ma petite plate blanche pour aller, à la godille, me positionner dans le chenal pour photographier, en fin de journée, les beaux yachts qui rentrent à la voile jusqu’au mouillage. À cette époque, tous les bateaux ont leur mouillage personnel, et il n’y a pas encore de services de rade comme en Angleterre. Ici, chacun a son annexe, on les entasse le soir sur la cale avec les avirons, jamais de vol. Il est très fréquent que lors de mes virées à la godille, je me fasse interpeller par les plaisanciers qui cherchent à rejoindre leur bord ou désirent descendre à terre. Ce sont de belles opportunités pour faire connaissance et aussi pour recevoir une petite pièce pour le service. Ayant découvert le filon, il n’était pas rare que l’on me trouve, comme par hasard, du coté de la cale aux heures d’appareillages et de retour des yachts… Pour dépenser ce petit pécule, j’avais le choix entre le bar de la rade où je retrouvais mes amis pour un diabolo menthe ou la pâtisserie de Lucienne et Marcel Petit ou encore chez cette chère et tendre madame Lecuyer, le Shipchandler du port aux odeurs enivrantes de chanvre où papa avait aussi un compte. Quelle belle idée pour compléter discrètement ma garde-robe de voileux ou ma boîte de pêche… Attention danger ! Madame Lecuyer avait la très mauvaise habitude d’envoyer ses factures de l’été à mon père la veille de Noël… Nous avions le droit alors à un interrogatoire tendu avec le « paternel » et comme par hasard, notre mémoire nous abandonnait… Pendant 10 ans, notre mois de vacances, toujours trop court et toujours nus pieds, se passait ainsi jusqu’à ce qu’apparaissent la mobylette et le solex du brevet, les dériveurs modernes et les surprises parties. Autres évolutions marquantes : la métamorphose de mes « amies » pour lesquelles je n’avais plus le même regard. La beauté est dans l’âme de celui qui regarde… (4) Passons sur mes années de pensionnat où je cumule les bonnes notes en discipline, en sport et en dessin et de moins bonnes dans les autres matières avec, à la clef, les mêmes appréciations de trimestre en trimestre : « élève agréable mais toujours ailleurs »… Mon meilleur souvenir de pension est l’année où les parents avaient opté pour un établissement au fin fond de l’Indre, spécialisé dans l’équitation. Que du bonheur ! Je peux y vivre ma deuxième passion, je monte tous les jours et surtout, je m’occupais au quotidien de quatre juments, belles et dociles. Je monte comme « un garçon de ferme », disait de moi mon père, officier de cavalerie. J’ai un lien particulier avec les chevaux, et le travail dans les boxes ne m’a jamais ennuyé, bien au contraire. Mon plus mauvais souvenir de scolarité : la dernière année, une première à l’Institut Jean-Jacques Rousseau, une boîte à bac dans le 8e arrondissement de la capitale. Mon père imaginant encore que je pouvais réus-

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Édito d’un marin-photographe

sir l’entrée à la Bail (l’École Navale), s’est laissé influencer par des proches, malgré le coup exorbitant d’un établissement chic et bon genre réservé aux familles aisées. Une erreur de casting qui m’a éjecté sans aucun regret du système scolaire. Sans en parler à mon père, j’ai intégré un centre de formation professionnelle pour adultes (AFPA) pour retrouver le plaisir d’apprendre un métier : électricien en bâtiment. Mon brevet en poche, je suis engagé à la Compagnie Générale d’Électricité, une usine moderne de 2 000 salariés, spécialisée dans la production d’immenses ponts roulants pour l’industrie. Je découvre le travail à la chaîne, le chef d’atelier, les chefs de service, l’embauche à 7 h 30 après le café-calva au bar enfumé face à l’entrée de l’usine. Ce cauchemar ne dure que 9 mois en attendant mon incorporation dans la Marine, après avoir devancé l’appel.

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Une décision pas facile à prendre cet engagement ! À l’époque, le bruit court sur le quai de La Trinité, que des garçons de ma génération peuvent rejoindre le défi du baron Bich dans le cadre de leur service militaire. Je rêve… Je reviens à la raison le jour où mon père me donne à réfléchir : « Écoute, de la voile, de la compétition, tu pourras en faire toute ta vie si c’est vraiment ta vocation, mais faire le tour du monde sur un bâtiment de la Royale, ça ne se présentera à toi qu’une fois… ».

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Deviens ce que tu es. Fais ce que toi seul peut faire. Suis la voix de ton cœur. (5) Toujours en manque de mer, je vais enfin pouvoir combler cette anomalie durant les 24 mois suivants. Après 9 semaines au centre de formation de la Marine sur le lac d’Hourtin, je rejoins l’unité où je suis affecté sur le BDC Trieux en escale à Papeete. Ce bâtiment est au cœur du dispositif qui doit ravitailler les bases de tirs atomiques dans le Pacifique. Nous assurons le soutien logistique entre les atolls d’Hao, Mururoa, Fangataufa, ainsi que les atolls habités proches des champs de tirs. Ce long service sous les drapeaux, très loin du cocon familial, sera le tournant de ma vie. À 18 ans, je n’étais sorti de nos frontières qu’une seule fois pour aller courir en 5O5 sur des plans d’eau allemands durant 3 semaines. Dans la Marine, je vais découvrir le monde. Après des mois entre Papeete, des dizaines d’atolls, les îles sous le vent, les Marquises et les 8 premiers tirs sur Mururoa et Fangataufa, le Trieux prendra la route des Indes le 11 novembre 1966 pour rentrer sur Cherbourg. 4 mois de navigation sur les trois océans : Pacifique, Indien et Atlantique, ponctués de nombreuses escales. De quoi vous remplir les yeux et le cœur. Avant de quitter la métropole, mon cher père m’a fait cadeau d’un appareil photo Foca Sport 2F, un boîtier moderne de fabrication française qui se voulait être en

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Mes outils de travail 1/L’épave repêchée de l’hélico après le crash du 28 juillet 1998 - 2/Mai 68 : Ma 1re photo publiée, Pen-Duick IV, quitte La Trinité pour le départ de la transat anglaise 3/Pêcheur d’Images I, 1er bateau armé pour la photo - 4/Pêcheur d’Images IV dans mon livre La France vue de la mer - 5/Photographe du « Tour de France à la Voile » 6/Pêcheur d’Images II entre l’Écosse et l’Irlande - 7/Marin à 7 ans à bord de Pêcheur d’Images III, déjà assistant de son Papou - 8/L’Égypte vue du ciel à bord d’un hélicoptère russe de l’armée de l’air - 9/Nos outils de travail en baie de Quiberon - 10/Le Tsunami à Banda Aceh, un Peintre de la Marine témoigne. Édito d’un marin-photographe ฀Contre vents & marées 15


1965 le rival du Leica M, viseur télémétrique, sans cellule… Une très bonne école pour se former à l’étude de la lumière, afin de mettre en accord l’ouverture avec la vitesse d’obturation. À bord du Trieux, ma passion de la photo va décupler, les sujets se multipliant au quotidien. Dans la vitrine du magasin de photo de Papeete, je suis tombé en arrêt sur un des premiers boîtiers reflex : l’Edixa. À chaque escale, je vais rêver de nouvelles images devant ce qui deviendra une obsession : un boîtier reflex. Sur le Trieux, il n’y a que deux appelés : le « midship » Patrice (qui en mars 1970 sera mon témoin de mariage) et moi, le matelot sans « spé » et heureux de l’être. À l’embarquement, je suis affecté comme maître d’hôtel des officiers mariniers (sous-officiers). À cette époque encore, ces hommes en campagne avaient tendance à charger un peu trop sur la bibine… Très rapidement, après quelques tensions, j’ai demandé à changer d’affectation auprès du commandant en second Alain Demotes-Mesnard. Ce jeune Lieutenant de vaisseau, embarqué en même temps que moi, m’a changé la vie en me confiant, petit à petit, la plonge, la gestion du magasin général, le bar et surtout la buanderie qui assurait l’éclat des uniformes blancs et la propreté des tenues de travail kaki. C’est à ce poste que je vais m’épanouir. Je dispose d’une table à repasser et d’un fer (sans vapeur). L’idée me vient de monter un service de repassage car, à l’exception des officiers, chacun à bord repasse ses effets. Le commandant en second m’autorise à me faire rémunérer pour ce travail. Voilà, j’ai trouvé ma source de revenus pour espérer réaliser mon rêve, toujours en vitrine dans la boutique de Papeete. Les marins engagés ont des primes quand ils sont affectés outre-mer mais aussi des primes de risque pour chaque tir, plus d’autres petits pécules pour éloignement familial, etc... Voilà un équipage bien rémunéré et qui déteste repasser ses tenues. À la veille de quitter la Polynésie française, j’ai assez travaillé jour et nuit pour me payer, en franc Pacifique, mon Edixa et quelques pellicules pour la route. L’Edixa, je le revendrai à bord avant l’escale de Djibouti car j’ai une autre idée en tête : m’offrir mon premier Canon, le tout dernier bijou de la marque : le Canon Pellix. Je n’ai pas lâché ma buanderie et vendu l’Edixa à un second-maître avec un petit bénéfice pour service après-vente… Djibouti est à l’époque un comptoir sans taxe, une aubaine pour faire l’acquisition d’un appareil photo réservé à un amateur (celui qui aime). Je devrais me souvenir toute ma vie de la phrase d’un de mes maîtres, Peter Adams :

Le 3 décembre 1967, nous sommes invités, avec mon frère Didier, par ma petite amie de l’époque, à l’apéritif dans une famille de choletais fraîchement débarquée à Orléans. Nous sommes servis par deux ravissantes jeunes filles, et je tombe instantanément sous le charme de l’aînée, Brigitte. En sortant de ce pot, je demande à Didier d’organiser un dîner le week-end suivant afin de revoir cette princesse. Le samedi suivant, de retour d’Angers avec ma 2CV jaune, nous avons rendez-vous à Meung-sur-Loire à l’Auberge Saint-Jacques, un dîner organisé par mon frère où je dois retrouver, comme par hasard, cette jeune femme qui, depuis une semaine, a bouleversé ma vie. Elle est bien là, je suis placé à ses cotés. Depuis, nous ne nous sommes jamais quittés. Deux ans plus tard, elle portera mon nom, et je changerai le prénom, ayant découvert que sur son livret de famille, ses parents l’avaient déclarée, 15 août oblige, Marie-Brigitte. Nous allons écrire une histoire où l’on aide la chance pour arriver au bonheur.

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Les femmes sont comme le suspense. Plus elles éveillent l’imagination, plus elles suscitent d’émotions. (6) 6

(1) Edward Weston - (2) Alphonse Lamartine (3) Pierre Movila (4) Ava Olafsdottir (5) Frédéric Lenoir - L’Âme du monde (6) Alfred Hitchcock

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« Un appareil photo n’a jamais fait une grande image, pas plus qu’une machine à écrire n’a jamais fait un grand roman ». De retour en Métropole pour me rapprocher de La Trinité, je suis embauché dans une entreprise de bâtiment et travaux publics à Angers, chez Monsieur et Madame Friess, un couple exceptionnel auprès duquel je vais vivre une année inoubliable. Je serai formé au métier de boiseur coffreur. Ce couple a 4 enfants, dont Gérard, resté un de mes proches amis.

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Un cadeau de Bernard Giraudeau avec la complicité de Christian Cailleaux.

Souvenir, souvenirs... 1/Mes amis photographes, Erwann Quéméré et Gilles Martin-Raget - 2/Ma dernière photo de Keith Beken - 3/Kennet Beken me met en main la fameuse chambre photographique de son père - 4/À 75 ans, Keith Beken photographiait encore la Semaine de Cowes - 5/Le matelot sans spé Plisson et le Quartier-maître Chef Bernard Giraudeau - 6/Mon fidèle ami Yann Arthus-Bertrand - 7/Éric Tabarly se lâche au Musée de la Marine - 8/À bord de Jet Services (photo Christian Février) - 9/Florence, skipper de charme - 10/ Éric à la barre de mon 5O5 à l’Étang du Puits - 11/Bernard Decré signe et persiste - 12/Sur Pen-Duick à la Nioulargue, Éric et Jean-François Deniau - 13/J’accompagne Éric à la première de son film en avril 1965 - 14/Le BDC Trieux , souvenirs, souvenirs... Édito d’un marin-photographe ฀Contre vents & marées 17


Plage du Men-Dû - La Trinité-sur-Mer 1951, petit bonhomme de 4 ans, je débarque à La Trinité-sur-Mer. Je ne sais pas qu’en Bretagne sud, on regarde toujours la mer en contre jour. La petite plage bleue pleine de soleil est celle où, pour la première fois, entre mes orteils tétanisés, la mer s’est infiltrée avec une sensation glacée qui me fait battre en retrait. Après quelques sauts de cabri, nous faisons connaissance. Les cheveux mouillés, les premières gouttes de mer coulent sur mon visage jusqu’aux lèvres. C’est alors que je découvre le vrai goût de la mer. Je suis baptisé. 18 Contre vents & marées

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Prao Lestra Sport

La Rochelle - La Nouvelle-Orléans Pour la première fois et en course, je traverse l’Atlantique à la voile entre La Rochelle et La Nouvelle-Orléans. J’ai trouvé le sponsor, fait repeindre le bateau et préparer le dossier presse. Avec mes deux complices, Guy Delage et François Girod, nous allons créer la surprise en animant la course en tête avec notre engin de funambule, un prao, auquel peu de personnes croyaient. Pendant les essais à La Trinité, j’avais embarqué mon ami Éric Tabarly un jour de brise. De retour à terre, Éric m’avait glissé à l’oreille : « Traverser l’Atlantique là-dessus, très peu pour moi ! ». 1er des petits bateaux, 3e au général sur 72 bateaux, dix minutes après Marc Pajot, dans cette aventure de 31 jours, j’ai perdu 14 kilos. Après cette course, j’ai pu être reconnu dans le cercle fermé des coureurs au large. Sans y penser, j’avais réussi mon examen d’entrée pour la suite de ma vie de marin photographe.

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LES IC Ô NES Lo in d e s cli ch é s , un e m é m o ire p h oto g ra p hi q u e

Croire qu’une photo, c’est le simple produit d’un système optique, d’une

aS[PZS ZSa W[OUSa _cW S\ ! O\a ]\b Sc ZS ^Zca RS acQQ|a

ouverture de diaphragme, d’une émulsion, d’un temps de pose, erreur.

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Une photo, ça se fait aussi avec des sentiments, une certaine idée de

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la vie. Une bonne photo, ça peut être un hasard, un coup de chance.

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Mais cent belles photos, c’est le portrait d’un homme.

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ª PSa]W\ RS [S` « R]\b ^O`ZS b`|a PWS\ 8]V\ 4WbhUS`OZR 9S\\SRg, ]T¿QWS` RS Z¸CA <Odg (

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Je ne sais pas pourquoi nous sommes tous autant liés

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à la mer. Au-delà du fait qu’elle change, que la lumière

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change, que les bateaux changent, je pense que nous

Z¸Ocb`S _cW d]ca ^]`bS Oc `O\U R¸O`bWabS ^]^cZOW`S /^^`{QWS`

venons tous de la mer. C’est un phénomène biologique

ZS acQQ|a RS []\ O[W /ZOW\ A]cQV]\ Sab ^Zca aW[^ZS Oc

étonnant de réaliser que coule dans nos veines, dans

`SUO`R Rc \][P`S R¸OZPc[a dS\Rca Sb RS aO QO^OQWb{

notre sang, le même pourcentage de sel que dans

u `S[^ZW` ZSa aOZZSa >]c` c\S ^V]b] RSdS\cS ^]^cZOW`S

l’océan. Nous avons du sel dans notre sang, dans notre

WZ \¸g O \W RWa_cS R¸]` ]c RS ^ZObW\S OcaaW XS \S ^]cdOWa

sueur et dans nos larmes. Nous sommes tous liés à la

W[OUW\S` _cS RSa [WZZW]\a RS TS[[Sa Sb R¸V][[Sa

mer. Et quand nous revenons vers elle, pour naviguer

R{QWRS\b c\ X]c` RS dWd`S Oc _c]bWRWS\ OdSQ c\S d]W`S

ou la contempler, nous ne faisons que retourner d’où

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nous venons.

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Canot tous temps Patron François Morin Novembre 1989, Jean-Michel Malgorn, fils de gardien de phare en mer d’Iroise, me téléphone pour m’inviter à Ouessant. Dans les jours qui suivent, une dépression sérieuse s’annonce à la pointe de Bretagne. Avec mon ami Daniel Manoury qui deviendra mon complice durant 17 ans, nous décidons d’aller nous mettre en place à Ouessant avant la dépression. Alors que nous faisons connaissance avec Jean-Michel Malgorn autour d’un café, dans la boulangerie-bar de Philippe, arrive tout l’équipage de la station de sauvetage, présidé par le docteur Gonin. Ils viennent d’accompagner un des canotiers dans sa dernière demeure au cimetière de Lampaul. Jean-Michel nous présente à l’équipage et s’en suit une discussion sur les raisons de notre présence. C’est alors qu’un canotier propose de profiter du coup de vent et de l’hélicoptère pour une sortie musclée et photogénique. Cette image appartient autant à l’équipage du Patron François Morin qu’aux auteurs de la photo.

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Phare du Four Nous sommes en hiver 1992. Mon futur gendre, qui vient de finir son service militaire dans la Marine, m’assiste pendant quelques mois pour réaliser un gros livre : Le Patrimoine Maritime Breton commandé par le Groupe Hachette. En pleine nuit, j’entends souffler la tempête qui était annoncée. Je sais que la pleine mer en Iroise est autour de 8 heures du matin. C’est peut-être enfin le jour pour moi de faire cette image dont je rêve : de grosses vagues qui passent par-dessus le phare du Four… À 3 heures du matin, je vais réveiller mon ostréiculteur de futur gendre pour lui dire : « On fonce sur Brest pour être au rendez-vous avec la pleine mer avant 8 heures. » Il fait encore nuit noire lorsque nous arrivons au petit village d’Argenton, face au phare du Four. Nous ne distinguons que le pinceau de lumière du feu quand nous recherchons la Pointe, le rocher le plus proche du phare. Dans un premier temps, nous faisons un repérage entre chien et loup et sans matériel. Étant donné le train de l’énorme houle, il faut trouver une place pour poser notre trépied à l’abri des embruns. À la pointe extrême nord d’Argenton, il y a un petit plateau devant une roche derrière laquelle nous pourrons nous abriter entre deux belles vagues. C’est la pleine mer, nous sommes au rendez-vous, il faut attendre maintenant « LA vague », le sopalin à la main. Nous n’aurons que deux vagues photogéniques durant notre heure d’affût. Cette photo qui a toujours autant de succès fera le tour de la planète.

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Velsheda Nous sommes fin juillet 1988, mon fils aîné, Franck, m’accompagne depuis un mois. Il va avoir 18 ans. Nous allons assister, pour la première fois, aux Fêtes de Douarnenez, fêtes qui deviendront le grand rassemblement de Brest 92 avec Douarnenez comme point d’orgue. Nous avons mis notre zodiac à l’eau avec la grue du port de Morgat. En traversant la baie, nous croisons une flotte hétéroclite de bateaux de travail, de transports à voile et de yachts classiques. Au près serré, arrive sous notre vent ce que nous sommes venus chercher : le beau Class J Velsheda. Cette merveille croupissait dans la vasière de la Hamble. Il vient de ressusciter après 50 ans d’abandon et après avoir été squatté depuis les années 1930. Une bande de fous sans beaucoup de moyens, a réussi ce challenge de sortir le bateau de la vase, le rendre navigable et l’armer d’un gréement d’origine. Velsheda a été, à la grande époque, l’un des plus beaux sujets photographiques de la famille Beken à Cowes, l’île de Wight étant depuis 1851 le théâtre qui a vu naître la Coupe de l’America. Douarnenez et son rassemblement est la première sortie de Velsheda, en dehors du Solent. Le vent s’est levé et le ciel passe en traîne sous le coup de midi. Velsheda est bord à bord avec un beau 8m JI, barré par Éric Tabarly. Franck est à la barre du zodiac. Nous nous présentons sous le vent de ce bord à bord, alors que le vent de terre est rentré avec des rafales à 25/30 nœuds. Impossible de travailler sous le vent de ces deux bateaux, tellement ils brassent d’eau et font voler des embruns. Nous passons alors derrière Velsheda. Franck tient le nez du zodiac dans le «Red Flag». Soudain, une risée plus forte surprend le barreur et l’équipage. Le beau Class J part au lof, Franck accélère et colle au plus près le zodiac alors que Velsheda continue à prendre de la gîte. Je suis au grand angle de 24 mm, un petit peu sous le vent. Un vrai portrait à la Beken ! Merci Franck, car cette image n’a pas vieilli et a participé à la toute première reconnaissance de mon travail.

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Dauphin pilote (Ci-contre) Avis de coup de vent en mer d’Iroise. Malgré un budget limité, nous sommes en place à Ouessant avec l’hélico au cas où. Depuis le phare du Créac’h, nous pouvons observer les cargos qui remontent le rail dans une mer particulièrement grosse. Nous remarquons un vraquier allège (à vide) qui roule bord sur bord. Ses mouvements sont spectaculaires, aussi, nous décidons de décoller pour illustrer un navire dans ces conditions. Arrivés au-dessus, Daniel me fait remarquer qu’une famille de dauphins joue devant l’étrave. Nous commençons par des images de face en espérant arrêter le saut d’un dauphin. Malheureusement, dans une mer aussi formée, l’image n’est pas esthétique. Nous nous plaçons ensuite par le travers de l’étrave en espérant avoir un dauphin seul devant cette étrave. Cette scène ne s’est présentée qu’une seule fois en 20 minutes de vol, et cette image a fait le tour du monde.

(Double-page suivante) Pêcheur de bars dans le Raz de Sein Le ciel est bas, l’horizon bouché par un crachin bien breton. Nous passons par le travers de la pointe du Raz pour nous rendre à Brest. Dans les déferlantes, vent contre courants du Raz, j’aperçois un minuscule ligneur au milieu de ce capharnaüm d’écumes. En stationnaire, au-dessus de ce spectacle, j’ouvre la porte de l’hélico pour voler quelques images, sans grande illusion étant donné le peu de lumière. Je pense plus à témoigner des conditions dans lesquelles travaillent ces hommes, le métier qui fait le plus de morts sur la planète. Cette image fera la couverture de mon plus grand succès La Mer et sera régulièrement reprise par les médias pour illustrer la mer nourricière.

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Philippe Poupon

Un homme, un bateau, l’océan Mai 1988 – Depuis un mois, Philippe Poupon prépare son Fleury Michon IX à La Trinité-sur-Mer pour la légendaire transat anglaise Plymouth/Newport. Un puissant anticyclone s’est installé sur la Bretagne sud. Impossible dans ces conditions de faire des images pour tenter d’illustrer cette nouvelle aventure. Quand Philou quitte La Trinité pour rejoindre Plymouth, la mer est désespérément plate et le vent pratiquement nul. C’est la première fois, et peut-être la seule, qu’autour de ces machines de course, je vais mettre en scène une image. Je demande à Philou de se mettre sur son flotteur tribord puis, avec mon zodiac, j’entame une série de cercles autour du trimaran afin de profiter de ma vague d’étrave et donner l’illusion d’une mer formée et d’un bateau qui se déplace à grande vitesse. Cette image a fait, entre autres, la couverture du livre qui raconte les 30 ans de Thalassa.

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Idebis sit et odiat dolore Explatiam delitat hit, corentenis asperor rovit, utetur solo officil inus eum quiaept ataquibus sa quiant officip idiore sum quias cone coruptatur moluptate parum am, volecto odipsa cus aut es dolluptatur sanihilique optio odit res nimolo et, sit idunt. Danto volorec totatur? Axim res persperum, qui dis aborpor simus. Orrum accuptation reptia inciatur.

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Des images loin des clichés

Port-Rhu Nous sommes en juillet 1992, dans le cadre du grand rassemblement de Brest 92. La veille, nous avons suivi la grande régate qui mène toute la flotte de Brest à Douarnenez pour finir en beauté cette semaine de fêtes populaires autour de notre patrimoine national de bateaux de travail. La ville de Douarnenez a décidé d’inaugurer ce jour-là son port-musée, ce qui devait devenir le Mystic Sea Port (musée de l’Amérique et de la mer) à la française, une institution remarquable créé en 1929 sur la côte est des USA entre New York et Boston. Douarnenez, la Bretagne et les associations ont investi beaucoup d’argent et sur plusieurs années pour réaliser ce port dans la ria de Port-Rhu, un bras de mer qui rentre au cœur de Douarnenez avec le port de Tréboul, sur sa rive gauche. L’arrivée de toute la flotte, Belem compris, a été une des plus belles fêtes que j’aie vécu sur notre littoral. Alors que la journée avait été particulièrement chaude et ensoleillée en fin de soirée, un front pluvieux est venu recouvrir la belle fête mais vu de Pêcheur d’Images au mouillage devant le seuil d’entrée du port, l’ambiance était, à mon goût, devenue plus photogénique. Au petit matin, un crachin brumeux accompagnait la sortie de la flotte. Toujours au mouillage, j’ai eu le bonheur de vivre ces ambiances, sorties tout droit de Pêcheur d’Islande. Très longtemps, cette yole, armée de 6 rameurs canadiens, a été une des icônes préférées de ma production photographique. J’ai toujours beaucoup de tendresse pour l’histoire de cette photo. Mon assistant de l’époque, breton bretonnant, m’avait fait remarquer que dans ces conditions météorologiques, un photographe local n’aurait certainement pas sorti son matériel, mais pour moi, qui suis un breton d’adoption, la Bretagne, c’est d’abord çà. Tout comme la brume dans le grand canal à Venise. Depuis, cet assistant, troisième génération d’ostréiculteur, est devenu mon gendre et mon plus proche ami. Il m’a donné deux petitsfils (12 et 19 ans aujourd’hui) qui m’accompagnent et m’assistent. Port-Rhu n’a été qu’un énorme gâchis avec tous les investissements financiers engloutis. Ce qui aurait dû devenir le musée à flot de notre patrimoine maritime est aujourd’hui une petite marina particulièrement accueillante où des pontons accueillent des yachts modernes.

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Le Belem Nous sommes en octobre 1995. Je prépare le livre du Centenaire du Belem que m’a confié la Fondation Belem 1896-1996. Depuis un an, je navigue régulièrement à bord pour réaliser mes images. Cet été 1995, Belem est en Méditerranée. La tournée s’achève fin septembre avec une dernière escale à Port-Vendres où j’embarque pour le tour de la Péninsule Ibérique. Nous faisons escale à Cadix après une semaine de navigation pour embarquer les derniers stagiaires de la saison. Je laisse ma place à mon fils Guillaume qui va poursuivre l’aventure jusqu’à Nantes. Fin octobre, j’ai rendez-vous avec Belem en fin d’après-midi entre les îles de Groix et de Belle-Île pour réaliser la dernière séance photo en hélico. Dans la journée, le temps est particulièrement pourri : crachin breton, vent nul, mer plate. Comme convenu, nous décollons de La Trinité à 17 heures pour faire route sur la pointe des Poulains à Belle-Île et attendre Belem. Une très belle surprise nous y attend ! Le vent s’est levé, le ciel est passé en traîne avec la pleine mer mais surtout un très beau train de houle accompagne ce changement de météo. Belem se présente avec quelques voiles carguées et serrées mais avec encore assez de toile pour garder le bateau vivant. Je pense que c’est la plus belle séance de photo qu’il m’a été donné de faire sur ce bateau. Je suis Belem depuis qu’il a été racheté par la Caisse d’Épargne et qu’il a quitté l’île de San Giorgio Maggiore à Venise pour commencer une nouvelle vie, amarré sous la Tour Eiffel. À l’avant bâbord, on aperçoit un homme en ciré jaune, c’est Guillaume qui fait des images en évitant les embruns. À cette époque, j’avais encore l’habitude de travailler régulièrement des sujets avec lui. Pendant 15 ans, nous avons pratiquement tout partagé jusqu’au jour où, absorbé par ses clients, son talent lui a permis alors de voler de ses propres ailes.

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La Nioulargue - Saint-Tropez 1992 Depuis 1984, je couvre régulièrement cette très belle manifestation créée par Patrice de Colmont après une régate historique entre les yachts Swan et Ikra. Ce jour là, ils s’étaient lancé un défi entre la tour du Portalet et la bouée de la Nioulargue avec retour à Saint-Tropez. Pour l’épisode 92, j’ai fait transporter notre vedette et outil de travail Pêcheur d’Images de La Trinité à Saint-Tropez afin d’être autonome et ne pas dépendre des bateaux de presse. Ce jour-là, j’ai embarqué avec Guillaume et une équipe de Thalassa. Nous sommes à la sortie de la baie de Saint-Tropez face à Saint-Raphaël où le comité de course a placé une bouée à virer. Je remarque sur la route du retour que deux Class J remontent au vent bord à bord. Un « loffing match », très chaud, se déroule devant nous. Arrivés à leur hauteur, nous nous plaçons sous le vent d’Astra et Candida pour illustrer ce bord à bord de légende. En effet, cette image également tournée par Thalassa sera reprise longtemps dans le générique de leur émission. Pour Guillaume et moi, c’est une compétition, à qui sortira la meilleure image de ce duel.

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L A MER D A NS TO US SES ÉTATS Co nt re v e nt s & m a rÊ e s

Tout à coup, je m’arrêtai, je ne pus plus bouger, comme il arrive quand

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une vision ne s’adresse pas seulement Ă nos regards, mais requièrent

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Passage du Fromveur entre les îles de Ouessant et de Molène (Double page précédente) C’est avec le Raz Blanchard, le site où l’on relève les plus forts courants de notre littoral. Les jours de marées d’équinoxe et de dépressions, lorsque le vent remonte le courant, il se forme alors une série de vagues monstrueuses que seuls l’Abeille Bourbon et les canots tous temps de la SNSM (Société nationale de sauvetage en mer) peuvent emprunter dans ces conditions. Sachons qu’à la sortie du Fromveur, sous la pointe de Pern à Ouessant, git le plus grand nombre d’épaves du littoral français. 46 Contre vents & marées

La mer dans tous ses états

Quiberon - Pointe du Percho En hiver, certains jours de vraie tempête, où le vent dépasse force 11 à l’échelle de Beaufort, la côte sauvage nous offre un spectacle apocalyptique. C’est surprenant de constater le pouvoir attractif qu’elle procure sur les populations du littoral. Ces journées-là, il y a, à n’importe quelle heure du jour, des bouchons sur la route côtière. Autre constatation, dans nos collections de reproductions, ce sont, depuis 30 ans, les images de tempête ou de coups de vent qui ont toujours autant de succès. La mer dans tous ses états ฀Contre vents & marées 47


Une nouvelle « île » - Le Mont-Saint-Michel

(Ci-contre et double-page suivante) Le Mont-Saint-Michel À 160 mètres au-dessus de l’eau, l’Archange domine cette merveille depuis le xiiie siècle. Il y a, sur notre planète mer, seulement deux sites où le marnage (hauteur d’eau entre la basse mer et la pleine mer) est exceptionnel. La Baie de Fundy au Québec bat tous les records avec 17 mètres, vient en second, la Baie du Mont-Saint-Michel avec 14,20 mètres, lors d’une marée de 119. Ces chiffres restent en effet aléatoires. Les hauteurs de marée de pleine mer comme de basse mer dépendent de deux autres phénomènes : la pression atmosphérique et la direction du vent.

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Saint-Malo - La plage du Sillon Pour nous, Bretons du sud, la lumière du nord est une surprise. En effet, dans le sud, nous regardons la mer du matin au soir en contre-jour. Lorsqu’on arrive à Saint-Malo, nous avons une impression de limpidité et de saturation de la lumière. La raison est simple : en Bretagne nord, nous regardons la mer avec le soleil dans le dos, ce qui change tout. La merveilleuse plage du Sillon en est un des plus beaux exemples à marée basse. 52 Contre vents & marées

La mer dans tous ses états

La mer d’Iroise (Double page suivante) Il y a des lumières en mer qui ressemblent à des paroles.

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Saint-Guénolé Plus fort qu’à Ouessant, c’est à Saint-Guénolé que la houle du large vient s’écraser avec le plus de violence. Les jours de tempête, les vagues monstrueuses se transforment en déferlantes aériennes.

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Irlande - Donegal Quand l’avis de coup de vent vire au nord-ouest et se transforme en tempête, en automne, les fronts orageux en provenance de l’Atlantique se succèdent à la vitesse du vent et laissent passer en alternance, des faisceaux de lumière éphémères. C’est une région où il n’y a pas assez de bois pour pendre un homme et pas assez de terre pour l’enterrer. Olivier Cronwell 58 Contre vents & marées

La mer dans tous ses états

Écosse - Les Orcades (Double-page suivante) L’œuvre d’art est là pour nous apprendre que nous n’avons pas vu ce que nous avons vu, disait Paul Valéry. Il est aussi des tableaux magiques et fugaces, créés par les jeux de l’eau et de la lumière, des brumes et des nuages. J’ai choisi cette image pour la couverture de mon livre Carnet de bord d’un Pêcheur d’Images en Écosse.

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(Double-page précédente) Irlande - Connemara Dans un petit port de Gorumna Island, près de Rossaveel dans le Connemara, la flotte de Hookers attend d’être désarmée en cette fin de saison. J’aime particulièrement ces lumières un quart d’heure après le coucher du soleil.

Mer d’Iroise - Bugaled Breizh 12 novembre 2001, un cargo de 150 mètres en route à 17 nœuds pour Rotterdam, s’échoue sur une plage de Molène. Il est 7 heures du matin, la mer est calme, l’homme de quart à la passerelle s’est endormi. À l’annonce de ce qui pourrait être une catastrophe, je décide de décoller. Arrivé sur zone, le porte-conteneurs est pris en charge par le remorqueur de haute mer, l’Abeille Flandre et la Marine continuent à hélitreuiller le personnel. Alors que le bateau est passé à grande vitesse dans une zone particulièrement mal pavée, incroyable, il n’y a aucune voie d’eau. Il sera remorqué jusqu’à Brest. De retour à La Trinité, en passant au-dessus du phare de Tévennec, je remarque un chalutier sur fond d’un grain particulièrement sombre. En 2004, j’offre un grand tirage de cette photo à mon amie Brigitte pour décorer son bar restaurant de l’île de Sein. Instantanément, elle me fait remarquer que le chalutier qui passe au pied de Tévennec est le Bugaled Breizh qui vient de couler mystérieusement (raison d’État oblige) au large du Cap Lizard envoyant par le fond les 5 membres d’équipage.

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Islande - Archipel des îles Vestmann L’archipel des Vestmann, sont des îles volcaniques récentes. Aujourd’hui, c’est un port de pêche très actif avec de grosses unités de plus de 50 mètres et de nombreuses usines de transformation. Nous sommes à la veille d’une des campagnes de pêche les plus spectaculaires de l’année, la pêche au capelan, un petit poisson de 20 à 25 cm dont les œufs sont très prisés. Ils sont transformés sur place pour le marché japonais qui le mélange avec du Wasabi. Nous avons le privilège d’être embarqués à bord d’un senneur de 60 mètres pour une marée de 2 à 3 jours. En plein hiver, ici, l’Atlantique est particulièrement redoutable. Nous appareillons en fin d’après-midi pour une zone de pêche dans le sud-ouest de la grande terre. Arrivés de nuit sur zone, impossible de mouiller la senne vu l’état de la mer. Il faudra attendre la fin de matinée pour la première tentative de la saison. Je ne quitte pas la timonerie depuis l’appareillage, je ne veux rien manquer de cette aventure. Je regarde attentivement comment le Patron aborde les bancs de capelans. Soudain, le sonar qui indique la densité des bancs devient tout noir. L’ordre est donné de lancer la senne tournante. Nous encerclons le banc qui fait plus de 60 mètres d’épaisseur sur un quart de milles. Incroyable, nous relevons 50 tonnes au premier coup de senne. Les deux autres coups de senne au milieu des baleines suffiront à remplir les cales de 1500 tonnes. Sur la route du retour, force 10 sur le pont, mais le bateau est particulièrement bien lesté. Une expérience inoubliable.

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Port des Minimes, La Rochelle

(Double-page précédente) Port-Maria - Quiberon La continuité territoriale, définition : c’est un principe de service public qui se donne pour objectif de renforcer la cohésion entre différents territoires d’un même État, en compensant les handicaps liés à leur éloignement, un enclavement ou un accès difficile. Le courrier des îles répond quotidiennement à cet engagement de l’État. Par tous les temps ou presque, les bateaux gérés par le département du Morbihan assurent les liaisons entre le continent et les îles. À Port-Maria, les jours de gros temps, pour éviter de surfer sur la vague et de finir sur la plage, les courriers sont dans l’obligation de prendre leur virage à une vitesse élevée pour rentrer dans le port. Tempête des 26 et 27 décembre 1999 Cette tempête rarissime, dite tempête du siècle, a ravagé la façade atlantique. Dans les ports de plaisance, les bateaux se sont retrouvé enchevêtrés par centaines, une partie de la flotte de pêche et de conchyliculture étaient au milieu des terres, un raz-de-marée a envahi les villes, les villages et les îles. Au petit matin, en reportage pour un « coup de gueule » dans Paris Match, entre Quimper et Bayonne, tout était ravagé sous mes pieds. Cette colère monstrueuse venait s’ajouter au naufrage de l’Erika, victime d’une tempête mémorable 15 jours auparavant. De ces deux événements consécutifs, la France mettra des années à se remettre.

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Vraquier allège

CMA-CGM Jules Verne - Marseille Le conteneur a été inventé par l’armée américaine en 1956 avec la guerre du Vietnam. C’est une des grandes inventions du xxe siècle. 8 milliards de tonnes sont transportées chaque année par des porteconteneurs de plus en plus gigantesques. Le tout nouveau Jules Verne, lancé ici en mai 2013, mesure 396 mètres de long pour 54 mètres de large et 67 mètres de haut. Il peut transporter jusqu’à 16 000 boîtes. En 2015, la famille Saadé, 3e armateur mondial, a réceptionné le CMACGM Kerguelen pouvant transporter 17 722 boites et a commandé, pour 2017, 3 monstres de plus de 400 mètres pouvant transporter 20 600 conteneurs. Aujourd’hui, 92% des échanges commerciaux se font par la mer. Chaque embarquement sur une unité de cet armement est un privilège. Merci Tanya.

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Desmer La images dansloin tousdes sesclichés états

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LUMI Ăˆ R ES DE PH A R ES Ch efs - d ’ o e u v re e n p ĂŠ ril

Il y a deux choses dans l’ÊdiďŹ ce : son usage et sa beautĂŠ. Son usage

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appartient à son propriÊtaire, sa beautÊ à tout le monde. C’est donc

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dĂŠpasser son droit que de le dĂŠtruire.

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Victor Hugo

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74 Contre vents & marĂŠes

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Lanterne de Kéréon

Phare de l’île Vierge (Ci-contre) Pour obtenir une portée de 27 milles, la tour devait avoir plus de 80 mètres de hauteur. C’est le phare le plus haut d’Europe avec 400 marches pour atteindre la lanterne. L’édifice est habillé à l’intérieur de 12 500 carreaux d’opaline bleu fabriquée par la manufacture de Saint-Gobain. Classé phare en mer, il a été le dernier phare automatisé en 2010. Cet événement a été illustré par Guillaume pour Paris-Match.

(Pages 78, 79 et 90, 91) Phare de la Jument C’est l’un des trois phares, avec Kéréon et Eckmühl, à avoir été édifié grâce à de généreux donateurs. Construit trop vite afin de respecter un contrat, il dût être éteint et abandonné par ses gardiens quelques mois après son allumage. Sa consolidation demandera 15 ans de travaux, le double de temps de sa construction. Son feu à 3 éclats rouges marque l’entrée ouest du passage du Fromveur. C’est toujours un édifice fragile. Automatisé en 1991, il pourrait être le premier phare dévasté par la mer dans les prochaines années.

(Pages 80 et 81) Raz de Sein Entre la pointe du Raz et l’île de Sein, le chenal du Raz de Sein peut être redoutable. On enregistre des courants de plus de 8 nœuds les jours de vives eaux, aussi, faut-il éviter de l’emprunter les heures où le vent, contre le courant, le transforme en une énorme marmite. Il est balisé par deux marques : un phare, la Vieille et une tourelle cardinale ouest, la Plate. Ici, la mer nous apprend à entretenir le doute.

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Phare d’Ar-Men - Chaussée de Sein L’enfer de l’enfer. Construit sur une roche à l’ouest de la Chaussée de Sein, là où les courants sont les plus forts, il a fallu 14 années pour le bâtir en fonction des possibilités d’accostage. Petit, exigu, humide et froid, ce phare fragile est un gouffre financier. Il coûta deux fois le prix du phare d’Eckmühl. Aujourd’hui, pour assurer la maintenance, le personnel doit être hélitreuillé sur une plateforme au bord de la lanterne. À chaque grande tempête, je fais un détour par Ar-Men, un pèlerinage pour rendre hommage aux hommes qui ont vécu l’enfer pour allumer ce feu chaque soir.

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Phare du Four

Phare de Nividic - Ouessant Construit sur la roche la plus occidentale des côtes françaises, au large de la pointe de Pern à Ouessant, ce phare n’a jamais été habité. Sa construction, tout en béton, a nécessité 24 ans d’efforts. C’est le premier phare automatique de l’histoire de notre pharologie.

(Double page suivante) Phare de Tévennec - Mer d’Iroise Tévennec semble être une chapelle juchée sur un caillou. 23 gardiens se sont succédé durant 35 ans. C’était l’enfer. Légendes et drames se sont mêlés sur ce rocher. Il a été décidé de l’automatiser dès 1896. Phare symbole, c’est pour moi un des plus photogéniques.

(Pages 88 et 89) Phare de la Vieille - Raz de Sein Sa renommée vient d’un énorme malentendu : deux mutilés de guerre se sont vu chargés, en 1925, de la garde du phare dans le cadre d’un poste réservé aux gueules cassées de la Grande Guerre. Pendant l’hiver, une tempête d’une rare violence les a bloqués dans la tour sans aucun ravitaillement durant 88 jours, au milieu des éléments déchaînés. La presse de l’époque estimait que l’administration était aveugle et tuait les anciens soldats. Les deux mutilés venaient de Corse et avaient compris trop tard que les phares de Bretagne ne sont pas aussi viables que ceux de l’île de Beauté.

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Skellig Michael, comté de Kerry

(Ci-contre) Tory Island, comté de Donegal - Irlande Durant mon travail sur l’inventaire des phares de l’arc Atlantique, j’ai pu accompagner régulièrement les kippers lors de leur tournée mensuelle dans les phares automatisés. John Joseph Doherty, gardien à la retraite, était accompagné, ce jour là, par un jeune technicien de l’Irish Lighthouses. En effet, dans le monde anglo-saxon, les gardiens ne sont pas débarqués du jour au lendemain sans avoir transmis, pendant des années, la mémoire de leur phare. De retour à terre, autour d’une tasse de thé, John m’a fait cadeau de son uniforme et de sa casquette… émouvant.

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Phare de Kéréon - Fromveur Un petit coin de paradis au milieu de l’enfer. Vaste, agréable, et confortable, Kéréon a été construit grâce au don de la famille Le Dall de Kéréon. Les murs sont richement lambrissés de chêne de Hongrie et le sol de la salle d’honneur en ébène et en acajou. Automatisé le 29 janvier 2004, on se demande toujours ce que deviendra le luxe surréaliste de son intérieur. J’ai mis 4 ans pour obtenir une autorisation de monter à bord de Kéréon, l’administration n’appréciant pas toujours que l’on mette son nez dans ses chefs-d’œuvre en péril. Lumières de phares ฀Contre vents & marées 95


Cordouan - Le roi des phares À l’embouchure de la Gironde, c’est le plus ancien phare de France, construit pour honorer la puissance du roi Henri IV. Aller à Cordouan, c’est comme rendre visite à une vieille dame que l’on connaît depuis toujours. J’ai eu le bonheur de vivre à deux reprises à bord de ce monument historique classé la même année que NotreDame de Paris. Aujourd’hui, ce phare est toujours habité, les trois derniers gardiens officiels des Phares & Balises ont été remplacés par du personnel de l’administration territoriale pour surveiller et faire visiter ce monument. Cordouan restera le phare de tous les superlatifs.

(Double-page suivante) Marshall Point light - Maine, USA Après l’inventaire des phares français et de l’arc Atlantique, j’ai fait le tour des phares de la Nouvelle-Angleterre entre les États du Nouveau-Brunswick et New York, des phares aujourd’hui, merveilleusement entretenus par des associations privées qui ont à cœur de mettre en valeur ce patrimoine. Marschall Point, à l’entrée de Port-Clyde, ravissant port de pêche spécialisé dans le homard. C’est là que vit mon ancienne assistante, Antonia Small, dite « Tony », aujourd’hui photographe. Jean-Paul, Dominique et Serge, les 3 derniers gardiens de phare de Cordouan

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Entrée de la chapelle royale

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PA SSION DE L A VOILE La v o c a t i o n , c ’ e s t d ’ a v o ir p o ur m é t i e r s a p a s s i o n

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Vendée Globe - L’Everest des mers Octobre 1989. C’est à Philippe Jeantot que nous devons la création de cette course autour du monde en solitaire et sans escale, réservée aux monocoques de moins de 60 pieds. C’est sous un très beau ciel de traîne que nous avons rendez-vous avec Philippe qui s’entraîne au large de la Bretagne. Avec mon ami Dominique Pipat, producteur, nous avons la charge de réaliser la banque d’images à la demande de la Caisse Nationale de Crédit Agricole, partenaire historique de Philippe. Ce vol est le tout premier avec le lieutenant colonel Daniel Manoury, pilote qui deviendra très vite « Manou » mon ami et complice.

(Pages 104-105 et 106-107) La bouée sous le vent - Saint-Barth De plus en plus démesurés, les grands yachts de course ont des voiles de portant gigantesques. Sur un parcours, la bouée sous le vent où ces voiles sont affalées, est la place idéale pour assister à un spectacle en général très photogénique, comme ici durant Les Voiles de St-Barth.

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Mariquita & Mariette (Double-page précédente) Reconnu et considéré après avoir fréquenté durant des années les pontons et les yacht clubs de la planète voile, j’ai le bonheur d’être invité par les propriétaires des plus belles unités, comme à Monaco, sur Mariquita, le plus beau des yachts classiques qui laisse ici la priorité à la goélette Mariette, une autre merveille.

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Tuiga - Yacht Club de Monaco En 2003, j’ai eu le privilège de recevoir des mains du prince Albert, le prix de l’homme de mer de l’année, un prix remis tous les 4 ans par le yacht Club de Monaco à une personnalité de la mer comme Juan Carlos, le prince Aga Khan, Éric Tabarly ou Jean-Louis Étienne. Devenu, depuis, membre sociétaire du Yacht Club, j’ai pu naviguer sur Tuiga (un plan Fife), le yacht de la Principauté qui a fêté ses 100 ans en 2009. Passion de la voile ฀Contre vents & marées 111


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La classe dans un écrin de lumière (Double-page précédente) La goélette Elena mouillée un soir devant Saint-Tropez, illustre pour moi parfaitement l’ambiance qui règne tous les automnes lors des grands rassemblements de yachts classiques : à Cannes (Régates Royales), Saint-Tropez (Les Voiles de Saint-Tropez), Monaco (Monaco Classic Week) ou Imperia (Panerai Classic Yacht). Ces rassemblements sont de véritables cadeaux pour les photographes. Bientôt, il y aura plus de photographes pour couvrir ces régates que de bateaux sur la ligne de départ.

«Les Voiles de Saint-Barth» (Ci-contre et double-page suivante) 4 jours de régates qui rencontrent de plus en plus de succès auprès des propriétaires de belles machines de course. Tout est réuni ici pour faire un plein de belles images sous le soleil des tropiques. Soleil, vent, lumière, même les grains sont photogéniques. J’en redemande ! Merci à François Tolède et Luc Poupon qui ont imaginé cette semaine de bonheur.

6m JI World Cup - La Trinité-sur-Mer (Pages 118-119) Les rassemblements de classes métriques 5,5m JI, 6m JI, 12m JI, Class J sont à mes yeux les flottes les plus esthétiques en régate. Notre plan d’eau à La Trinité démontre à chaque saison qu’il a vocation à devenir olympique dans les prochaines décennies.

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Classic Week - Monaco Tous les deux ans, le Yacht Club de Monaco rassemble la plus belle flotte de voiliers classiques de Méditerranée. Une semaine de confrontation au pied du rocher où le maître mot est : « La Classe ». Art de vivre et tradition sur mer comme à terre.

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En attendant le vent (Double-page précédente) Les jours de « pétole » sont aussi des jours photogéniques quand les bateaux attendent sur la ligne, la risée de 5 nœuds qui lancera la procédure de départ.

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Paradis de la voile - La Trinité-sur-Mer (Ci-dessus et pages 126 à 129) 500 bateaux au Spi, 500 bateaux autour de Belle-Île, 200 bateaux à l’Armen Race et bien d’autres manifestations. Notre baie est aujourd’hui le plan d’eau le plus actif de France. À elle seule, la Société Nautique de La Trinité-sur-Mer (mon club depuis 1957) organise chaque année, près de 80 jours de régates pour plus de 8 000 bateaux sur une ligne de départ. Passion de la voile ฀Contre vents & marées 125


Saint-Barth Maxi-séries dans la houle de Saint-Barth, où, tous les ans se retrouvent les propriétaires américains des plus belles machines de course.

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Armen Race (Double-page suivante) Ligne de départ de l’Armen Race devant La Trinité. Rarement autant de yeux lors d’une régate se sont fixés sur moi. À cet instant, on se dit : « Ce n’est pas le moment que mon moteur m’abandonne. ».

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Pen Duick - Une histoire d’amitié On est au printemps 1990, coup de fil d’Éric Tabarly. Il m’annonce que Thalassa vient tourner plusieurs jours un film sur Pen Duick. Eric connaît l’amour que je porte à son bateau. Il me demande alors si je peux venir le retrouver deux ou trois jours pour faire du cinéma… Il n’a pas besoin de me poser deux fois la question. Je lâche tout, j’arrive ! Les conditions météo sont exceptionnelles : Tempête de ciel bleu, vent solaire avec thermique 15 nœuds dans une belle lumière. Pendant deux jours, nous nous prêtons aux objectifs de Thalassa, sur l’Odet au pied de chez Éric dans l’archipel des Glénan. Cette photo, c’est le soir où nous rentrions d’un beau mouillage aux Glénan. Avec Éric, on n’a pas besoin de parler pour se comprendre. Nous savons l’un comme l’autre que ce bateau offre une authentique relation avec la mer à celui qui sait l’écouter et le regarder avec le cœur. Je n’ai jamais fait partie du cercle très privilégié des équipiers au long cours d’Éric. Mais sur Pen Duick, en régate, j’ai eu le bonheur d’occuper les postes de navigateur, de tacticien ou de régleur. Mon amie Jacqueline passait les sandwichs, voire discrètement un appareil photo quand elle estimait que l’instant était insolite. Cette image sera la photo la plus publiée dans la presse la dernière semaine de juin 1998. Du bonheur au malheur, il n’y a qu’un battement de cils…

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Pen Duick II - Une seconde naissance C’est avec Pen Duick II qu’ Éric Tabarly bâtit sa notoriété en remportant la transat anglaise de 1964 devant Sir Francis Chichester. Ce ketch, dessiné et construit à La Trinité-sur-Mer chez les frères Costantini, est considéré comme le bateau de plaisance le plus illustre de la flotte française. Après avoir passé 20 ans sur le parking de

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l’École Nationale de Voile à Quiberon, une association organise sa reconstruction au chantier Pichavant de Pont-Labbé. En septembre 1995, il est remis à l’eau à Quiberon et tire un premier bord avec Éric, seul à la barre. On se croirait 30 ans en arrière quand Jacqueline, à bord de mon Pêcheur d’Images salue son homme du pouce.

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Bernard Moitessier & Flo à Papeete sur Josua

Florence Arthaud, la fiancée de l’Atlantique Pointe-à-Pitre, 18 heures, le 18 novembre 1990, Florence remporte la 4e édition de la Route du Rhum. Son dernier bord, sous l’alizé et dans une lumière de grains, est resté dans tous les esprits. La fiancée de l’Atlantique allait marquer de son empreinte l’histoire de la course au large. Avec Florence, nous avions de beaux souvenirs de notre aventure et de notre complicité dans : «Cinq filles sur un bateau» pour le FigaroMagazine en 1984. Deux mois de navigation dans les îles Sous-le-Vent et les Tuamotu. Durant cette aventure, grâce à Florence, j’ai rencontré l’homme qui a marqué toute mon adolescence par la lecture de ses aventures. Bernard Moitessier m’a accueilli à son bord, m’a fait partager ses repas et, chose incroyable, m’a confié un soir, le manuscrit de l’ouvrage qu’il venait de terminer avant de l’envoyer à Jacques Arthaud, son éditeur. Mes 30 ans d’amitié, d’admiration, de respect pour Florence, ce sont aussi des confidences sur la famille, sa passion du livre et l’amour de l’écriture.Comme le dit mon ami Yann Queffelec : « Florence a baigné autant dans le monde maritime que dans le monde du livre. C’est quelqu’un qui serait certainement devenu écrivain plus tôt si elle n’avait pas étincelé sur les mers. »

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Vainqueur du Figaro 1988, le plus jeune skipper

Laurent Bourgnon, le surdoué Je viens d’essuyer les larmes qui coulaient sur mon visage au fur et à mesure que je lisais le texte d’Yvan rendant un hommage poignant à son grand frère Laurent Bourgnon, disparu en mer le 24 juin 2015. J’ai toujours eu des difficultés à trouver les mots pour faire partager ma douleur quand un être cher disparaît, une forme de pudeur ou plus simplement un manque de culture pour enchaîner les mots qui tombent juste. Laurent et Florence font partie des quelques grands marins avec qui, durant 30 ans, au-delà de la photo, j’ai partagé le plus d’émotions. Demain, en mer, la nuit, la tête dans les étoiles nous continuerons à nous raconter des histoires.

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Sir Peter Blake - Plus qu’une légende En septembre 1982, la ville de Vannes fête les participants de la Whitbread 1981/1982. Tout le monde est là. Tabarly, Poupon, Gabay, André Viant, Loizeau etc… Peter Blake, le Kiwi, qui a couru à bord de Ceramco est l’invité d’honneur. Vannes a affrété un bateau pour transporter tout ce petit monde de La Trinité à Vannes. Peter est en retard, je propose de l’attendre et de l’embarquer sur mon bateau. C’est ainsi que j’ai pu faire découvrir notre golfe du Morbihan à ce grand marin. À chacune de nos rencontres, il me rappelait cette navigation et cette découverte, si proche des archipels de la NouvelleZélande. Peter, c’est le plus beau palmarès de l’histoire de la voile moderne : 1990 : Vainqueur de la course autour du monde sur Steinlager. 1994 : Record du Trophée Jules Verne en 74 jours sur le catamaran Enza. 1995 : Vainqueur de la Louis Vuitton Cup et de l’America’s Cup à San Diego. 1999 : Une nouvelle fois, il gagne l’America’s Cup et garde l’aiguière d’argent en Nouvelle-Zélande. Le 5 décembre 2001, il est assassiné par des pirates à bord de Tara au mouillage dans l’estuaire de l’Amazone.

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Mike Birch

Oman Air - La nouvelle génération (Double-page précédente) Le trimaran Oman Air du très discret mais très compétent Sydney Gavignet nous montre les dessous des machines modernes qui battent tous les records de vitesse. Ces nouveaux funambules sont en permanence border line. Le Virbac de Jean-Pierre Dick en a fait l’expérience après un chavirage spectaculaire.

Deux générations sur trois océans (Ci-contre) Loïc Peyron a tout juste 20 ans quand Mike Birch, sur son trimaran Olympus, remporte la première route du Rhum. Plus tard, on retrouvera ces deux hommes sur les mêmes bateaux, Lada Poch et Fuji Color. Loïc est certainement le navigateur français qui a le plus beau palmarès de la course au large moderne, avec le record du Trophée Jules Verne, la Route du Rhum, la Barcelona, la Transat Jacques Vabre, The Race, le Tour de l’Europe, la Transat anglaise, Québec/Saint-Malo, La Baule Dakar, et seulement… 2e du premier Vendée Globe. Sans oublier sa participation dans le team Alinghi à Valence en 2010 où, à la barre du catamaran géant, sa prestation a marqué les esprits. J’ai l’impression que depuis la planche à voile dans les années 1970, j’ai toujours été aux cotés de Lolo, le seul marin à m’appeler Phiphi.

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De Québec à la Trinité (Double-page précédente) Gerry Roufs a quitté son Québec natal avec femme, enfant et chien pour s’installer à La Trinité-sur-Mer comme son ami Mike Birch dont il est le second depuis 1984 à bord de Tag Heuer dans la course Québec/SaintMalo. Nous avons beaucoup partagé avec Gerry. En novembre 1996, il participe à la 3e édition du Vendée Globe. Le 7 janvier 1997, alors qu’il contourne l’Antarctique, il est pris dans une monstrueuse tempête. Son ultime message sera : « Les vagues ne sont plus des vagues, elles sont hautes comme les Alpes…». On ne retrouvera jamais Gerry ni son bateau.

(Ci-contre et double page suivante) France - La France m’a laissé tomber C’est ainsi que nous aurions pu continuer à parler de France, le premier 12m JI, lancé en juin 1970 à La Trinitésur-Mer. Le Baron Bich avait, après Hyères, choisi La Trinité pour se préparer au Challenge Séries de 1970. Une bande de copains, anciens de la Coupe, animée par Bruno Bich et Bruno Troublé, (le barreur des défis du Baron en 1977 et 1980) vont, avec la complicité du vice-amiral d’Escadre Marc de Briançon, commandant l’Ecole Navale, récupérer France abandonné depuis 20 ans sur le tarmac de la Bail (L’École Navale). La nouvelle vie de France aujourd’hui fait naviguer des jeunes et les amis de l’association AFCA sous l’autorité de Ben Le Saout et Thierry Verneuil. Il ne nous reste plus qu’à espérer que d’autres amateurs fassent revivre un des nombreux 12m JI des années 1970/1980 pour organiser en baie de Quiberon une mini Coupe America made in Breizh. En attendant, France, dans la brise ou sous un grain est pour moi le plus beau sujet photographique de la baie.

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French Kiss - Fremantle 1987 (Double-page suivante) Tout auréolé de ses victoires en course au large et en voile olympique, certainement le plus beau palmarès à nos jours, Marc Pajot se lance en 1985 dans la Coupe America. Chef de projet et barreur, Marc Pajot s’entoure de deux complices : son ami et tacticien de talent Marc Bouet et l’architecte Philippe Briand dit Mozart, c’est ainsi que l’on surnomme Philippe, considéré comme l’architecte le plus talentueux de sa génération. Pour participer à la Coupe de l’America, il faut d’abord gagner la Coupe Louis-Vuitton. En 1987, le trio sera demi-finaliste avec French Kiss à Fremantle en Australie. En 1992, ils seront à nouveau demifinalistes avec Ville de Paris à San Diego, en Californie. Avec Marc, nous nous sommes fréquentés durant 20 ans. Il a deux points, entre autres, qui nous ont rapprochés : Nous avons couru l’un contre l’autre dans La Rochelle/La Nouvelle-Orléans où il nous a doublés dans la nuit à 1 heure de la ligne d’arrivée. Comme Marc, j’ai pratiqué avec passion le 505, un merveilleux dériveur. La grande différence, c’est que Marc, avec son frère Yves, a été champion du monde de la série en 1974, un an avant leur médaille d’argent aux jeux de Munich.

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Dennis Conner Dennis Conner a participé à neuf reprises, à la Coupe de l’America. Durant 151 ans, le New-York Yacht Club gardera, exposé, le plus vieux trophée sportif du monde. Dennis restera dans l’histoire comme le premier barreur à perdre la Cup et l’Australien John Bertrand sur Australia II à la prendre. On n’a pas coupé la tête de Dennis comme l’avait envisagé les membres du NYYC. En 1987, Dennis reprend la Cup en Australie sur le merveilleux plan d’eau de Fremantle avec Stars & Stripes. Tout jeune patron de la Coupe Louis Vuitton, Bruno Troublé médiatise comme jamais la Coupe de l’America. L’état de la mer et le « Docteur Fremantle » (Le vent), aideront à la réalisation des images spectaculaires que nous n’avons jamais revues. Bruno a été, durant 30 ans, le patron des Challenges series avec la complicité de notre ami Yves Carcelle, Président de la Coupe Louis Vuitton. Je dois à Bruno de m’avoir mis le pied à l’étrier et accompagné toujours dans mon aventure photographique. Nous sommes inséparables dit Mélanie, son épouse.

(Double-page suivante) Ville de Paris & Il Moro di Venezia Coupe de l’America 1991

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Raul Gardini

Le Class America - San Diego 1992 De retour aux USA, les Américains, comme l’autorise le règlement du Deed of gift change le bateau. Après les J Class et le 12m JI depuis 1954, nous allons passer au Class America. Pour la Coupe 1992, le San Diego Yacht Club impose ce nouveau One Design. C’est en France et en Italie que seront mis à l’eau les deux premiers AC I-1 et AC F-1. Il Moro di Venezia et Ville de Paris se rencontreront pour la première fois sur le plan d’eau de Sète à la base du Défi français de Marc Pajot. Paul Cayard a été choisi par Raul Gardini pour barrer Il Moro di Venezia. Raul Gardini est un capitaine d’industrie à la tête, entre autres, de la Montedison à Venise. Amateur de voile, au sens noble du mot, il a animé pendant des années les Maxi Series. C’est à Raul Gardini que l’on doit la présence à bord du 17e homme, l’invité du jour. Le baptême d’ Il Moro di Venezia en mars 1990, est encore dans tous les esprits. Un spectacle mis en scène et orchestré par Franco Zeffirelli en personne sur une musique originale d’Ennio Morricone. J’ai eu le privilège de partager avec cet homme sa passion de la voile car il deviendra aussi le partenaire d’Olivier de Kersauson pour le trophée Jules Verne en 1993.

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Marseille - Un rendez-vous manqué Marseille et la Coupe de l’America, un rendez-vous raté ! Les Suisses ont rapporté d’Auckland en 2003 l’aiguière d’argent en Europe. Mais le règlement l’exige, la Coupe ne peut être courue que sur un plan d’eau salé. Les Suisses vont faire le tour de tous les plans d’eau susceptibles d’accueillir en 2007 la Coupe de l’America en organisant des régates en flotte ouverte à tous les Class America. En septembre 2004, la flotte se retrouve à Marseille pour courir l’acte 1 de la Coupe Louis Vuitton. 158 Contre vents & marées

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Les Suisses sont séduits par le plan d’eau. Malheureusement, la CGT ne voit pas d’un bon œil la présence d’une manifestation sportive « de riches ». Le defender, la Société Nautique de Genève, doit prendre sa décision pour le choix du plan d’eau alors que la CGT lance une série de grèves et de manifestations sur Marseille. Par sécurité, les Suisses se retournent vers Valence qui a le soutien inconditionnel d’un grand marin, Juan Carlos. Passion de la voile ฀Contre vents & marées 159


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(Double-page précédente) L’avenir de la voile se joue dans les airs Grâce à une qualité d’images jamais réalisée et une médiatisation sans précédent, la 35e Coupe de l’America fait découvrir au monde entier le bateau qui vole. La voile du xxie siècle est née. La 36e Coupe de l’America sera courue en 2017 sur des catamarans foilers de 20 mètres, les AC 62. En France, Franck Cammas s’entraîne déjà sur tout ce qui vole. Il sera le barreur du Team France.

(Ci-contre et au-dessus) La pointe de la Torche Classé « site naturel » par décret en 1989, elle est devenue, depuis les années 1980 le spot de tous les amateurs de glisse : surf, planche à voile, kite surf, wave ski ou char à voile pouvant s’exprimer toute l’année. En pleine tempête Petra, un kite surfer particulièrement entraîné profitait du train de houle déferlant dans la baie de Pors Can.

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Wally Power

Les deux extrêmes Naviguer sur ces deux unités extrêmes est une expérience inoubliable. D’un coté, l’énergie solaire et ses 38 000 cellules photovoltaïques sur 537 m2 pour une vitesse maximum de 14 nœuds, de l’autre, l’énergie fossile avec 3 turbines à gaz produisant 16 800 chevaux, avec une consommation à l’heure de 4 tonnes de kérosène à 60 nœuds… D’un côté, il faut apprendre à naviguer avec l’ensoleillement, de l’autre, il faut trouver la station service pour faire le plein. Le « MS Turanor Planet Solar » a entamé son tour du monde Monaco/Monaco soit 33 000 milles en 585 jours. Le bombardier furtif Wally Power, dessiné par Philippe Starck et créé par mon ami Luca Bassani, patron des Chantiers Wally, est destiné à un riche commanditaire.

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R ENCONTR ES EN MER S INCONNUES Si l a te r re s é p a re l e s h o m m e s , l a m e r l e s ra p p ro ch e

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Madagascar (Double-page précédente) Pour réaliser mon livre sur Madagascar, j’ai fait trois séjours, toujours trop courts. Aujourd’hui, je n’aspire qu’à y retourner, surtout dans le sud, autour du peuple Vezo. Pêcheurs nomades, ils se déplacent en famille sur le trait de côte, au rythme des saisons et des déplacements de bancs de poissons. J’ai été invité pour illustrer la Malagasy Cup, une grande fête de la voile avec, pour participants, les familles de pêcheurs sur leurs pirogues à balancier et les équipages de boutres. 170 Contre vents & marées

Rencontres en mers inconnues

Entre Anakao et Tuléar - Madagascar Image unique dans l’histoire de Madagascar : Cette descente au portant de 20 boutres entre Anakao et Tuléar par 35 nœuds de vent.

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Enfant vezo à Ifaty

Les malgaches aiment toujours la France Dans les villages de pêcheurs les plus retirés, on est toujours surpris de trouver des hommes et des femmes avec qui nous pouvons converser en français. Un jour, au village d’Ifaty, une enfant est venue au devant de moi avec, sous le bras, son livre de français qu’elle voulait me faire partager. Les Malgaches attendent les Français et les Français ne seront pas déçus par Madagascar, une destination encore authentique, mon expérience se limitant au trait de côte !

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Rencontres en mers inconnues


Nosy Be - Madagascar (Ci-dessus et pages 176-177) Comme partout sur la planète mer, il faut se lever avant le jour pour profiter du spectacle des pêcheurs qui viennent de passer la nuit en mer et font route sur leur village. Comme au Brésil, ici aussi, si on ne pêche pas, on ne mange pas.

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L’Inde des backwaters (Pages 178 à 183) Une fin d’après midi, alors que nous assistons au spectacle des Chinese nets sur la place principale de Cochin, nous sommes abordés par un chauffeur de touk-touk impressionné par mon téléobjectif. Il nous affirme qu’il connaît une place à une heure de Cochin où, au petit matin, les pêcheurs des Backwaters sont particulièrement photogéniques. Touché par ses arguments, nous lui donnons rendez-vous le lendemain à quatre heures devant notre hôtel. L’homme est ponctuel, nous embarquons de nuit pour une chevauchée du type « shaker ». Après trois quarts d’heure sur une route dite praticable, l’homme tourne à gauche et nous stoppe au-dessus d’un pont. Le soleil n’est pas encore levé mais le spectacle est au rendez-vous. Des pêcheurs debout en équilibre dans leurs pirogues jettent leurs éperviers dans une lumière de rêve. Je n’en demandais pas tant ! Le Kérala est une étroite bande de terre constituée d’un vaste réseau de lagunes de 450 km de voie navigable communiquant avec la mer. La pêche en mer dans les Backwaters est, avec l’industrie de transformation, la principale activité économique de la région. Je rêvais de ce voyage depuis longtemps, je savais que l’Inde est un cadeau unique pour la photographie. Ici, la tête vous tourne, des sujets se composent en permanence devant vos yeux. J’y retournerai, c’est sûr !

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La revanche des liners Le développement du trafic aérien s’est fait au détriment du trafic maritime entre l’Amérique et l’Europe. Ce 22 avril 2004, avec Marie, nous venons de participer à la traversée inaugurale Southampton/New York du tout nouveau Queen Mary2. Alors que les remorqueurs nous alignent sur le peer de la Cunard, nous apercevons, au même instant, une barge sur laquelle se trouve un bel oiseau blanc, le Concorde de la British Airways qui rejoint sa dernière demeure, le musée de l’aviation 184 Contre vents & marées

Rencontres en mers inconnues

du porte-avion Intrépide. Le Queen Elisabeth II est aussi à quai. On peut remarquer l’évolution de l’architecture navale en 35 ans. Ces deux liners ont des longueurs hors-tout à peu près identiques, alors que le déplacement passe de 48 900 tonnes pour le QE2 à 76 000 tonnes pour le QM2, soit une augmentation de 54 %.

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Le Bosphore (Ci-contre) Dans le détroit d’Istanbul ou Bosphore, un ballet permanent de plus de 200 navires à passagers, assure le transport quotidien d’un million de Turques entre les continents asiatique et européen. Ce goulet d’étranglement de moins de 500 mètres entre la mer Noire et la mer Méditerranée est emprunté chaque année par plus de 50 000 pétroliers, porte-conteneurs et cargos en tous genres. C’est quatre fois plus que Panama et trois fois plus que Suez. Un trafic de tous les dangers dans un minuscule détroit libre et reconnu comme « eaux internationales ».

(Double-page suivante) Compagnie du Ponant Le Boréal appareille après une escale à Ilulissat au Groenland. J’ai choisi cette image qui illustre parfaitement l’aventure de la Compagnie du Ponant créée en 1988 par de jeunes officiers de Marine marchande en manque d’embarquement. Par le travers bâbord, remarquez deux Zodiac qui poussent un iceberg pour ouvrir la route. Ces garçons ont poussé bien des icebergs et remué bien des montagnes pour faire de cette belle compagnie de 5 paquebots de luxe, l’armateur de référence à la française.

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La Nouvelle-Angleterre J’aime particulièrement les six États que forment la Nouvelle-Angleterre mais j’ai surtout un faible pour les côtes du Maine. Ses phares, ses lobsters, ses goélettes, ses petits ports où les quais comme les maisons et les bateaux sont encore en bois. Dans le Maine, « il n’y a rien à jeter », disait un de mes amis. Pour le photographe, sur le trait de côte, tout est resté authentique. Ces Américains de la côte est ont l’art de préserver leur patrimoine architectural et maritime. Si les hivers sont rigoureux, l’été est une merveilleuse saison pour naviguer autour des centaines d’îles. Attention quand même aux « pots » (prononcer : potte), ces bouées, marquées aux couleurs des pêcheurs qui envahissent toutes les baies. En France, nos caseyeurs larguent une vingtaine de casiers marqués par un flotteur. Dans le Maine, chaque cage (casier) a son « pot ». Il faut au moins quatre yeux sur le pont pour naviguer autour des îles afin d’éviter de prendre une ligne dans la quille ou dans l’hélice.

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Enfant de pêcheur du Cearà - Brésil

Dakar Alors que sa santé déclinait, mon ami Jean-François Deniau me demande, en juin 1989, d’embarquer avec Bertrand Poirot-Delpech pour une navigation entre Ténériffe et les îles du Cap-Vert. Je ne pouvais pas refuser à Jean-François ce qui lui semblait être à l’époque une de ses dernières navigations. En compagnie de mes deux illustres Académiciens, j’ai pu débarquer et découvrir le Sahara occidental, la Mauritanie avec des escales à Nouadhibou et Nouakchott pour finir à Dakar où notre croisière s’est arrêtée plus tôt que prévu. Jean-François, très fatigué, a dû nous quitter pour être rapatrié en France, hospitalisé à l’Hôpital du Val-de-Grâce. Dès mon retour, il tenait beaucoup à voir toutes les images que j’avais réalisées durant ce périple. Avec Marie, nous lui avons apporté, dans sa chambre, une petite table lumineuse avec plus d’une centaine de planches de diapositives pour qu’il puisse revivre notre expédition. À mon plus grand regret et au sien, je n’ai jamais récupéré ces diapositives. Nous n’avons jamais su qui avait dérobé ce reportage. Aujourd’hui, il me reste seulement quatre diapositives de cette aventure dont ce retour de pêche sur la plage de Dakar auxquelles je tiens particulièrement.

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Le port d’Al-burj sur le lac Burullus

Le Delta du Nil (Pages 194 à 197) À 150 kms de la côte méditerranéenne, le Nil se divise en une multitude de bras sur une superficie de 24 000 km2. Depuis l’antiquité, l’agriculture, comme la pêche, y est très intensive. Dans mon travail sur l’Égypte vue du ciel, c’est dans ce delta que je me suis particulièrement « éclaté » sur 1 500 km. C’est probablement la région d’Égypte la moins touristique, une autre Égypte que celle des cartes postales, mais pour moi, la plus fascinante. Une occasion de découvrir des ambiances insolites comme ces boutres de pêche au mouillage sur le lac Burullus. Situé à 2 mètres au-dessus de la mer, le delta est particulièrement vulnérable. Dans le delta, on se déplace sur l’eau pour passer d’un village à l’autre comme ici entre Port Saïd et El Matariya.

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L’hiver en mer en Botnie Invité à couvrir le championnat du monde des 8m JI à Helsinki en plein cagnard, je découvre à quai d’étonnants brise-glace. C’est sûr, je dois embarquer un jour sur ces monstres. Ce rêve se réalise en février 2005 à bord du « Otso » dans le golfe de Botnie. Il est difficile de décrire le bruit et l’ambiance qui règnent à bord lorsque, lancé à 20 nœuds, nous chevauchons la glace pour ouvrir une voie au cargo qui est dans notre sillage. Lorsque le thermomètre descend en pleine nuit, le brise-glace stoppe pour engager l’étrave du bateau suiveur dans sa poupe et le solidariser avec des câbles. C’est une sécurité au cas où le brise-glace serait stoppé net par la glace car le bateau suiveur, sur son air, viendrait le percuter.

Péninsule Antarctique (Double-page suivante) « Deception Island » dans l’océan austral est situé à 120 km au nord de la Péninsule Antarctique. Sa baie, Port Foster, est un ancien cratère effondré dans lequel on rentre par un étroit passage, un refuge très connu des marins depuis le xixe siècle où ils venaient attendre la fin des tempêtes. En 1906, les chasseurs de baleines installent une usine afin d’extraire dans de grandes chaudières, l’huile de baleine qui était ensuite stockée dans d’énormes citernes en fer. L’entreprise est abandonnée en 1931 en raison de la chute des prix. Aujourd’hui, les vestiges de l’usine et de la base scientifique sont classés Monuments historiques de l’Antarctique. Les baleinières, à moitié ensevelies dans la poussière volcanique, servaient à transporter l’huile entre l’usine et les bateaux au mouillage dans la baie. Ce volcan est toujours actif, le sable noir sur lequel nous marchons dépasse les 50 °C et des fumées émanant du sol créent par moment une atmosphère particulièrement mystique.

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Idebis sit et odiat dolore Explatiam delitat hit, corentenis asperor rovit, utetur solo officil inus eum quiaept ataquibus sa quiant officip idiore sum quias cone coruptatur moluptate parum am, volecto odipsa cus aut es dolluptatur sanihilique optio odit res nimolo et, sit idunt. Danto volorec totatur? Axim res persperum, qui dis aborpor simus. Orrum accuptation reptia inciatur.

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Idebis sit et odiat dolore Explatiam delitat hit, corentenis asperor rovit, utetur solo officil inus eum quiaept ataquibus sa quiant officip idiore sum quias cone coruptatur moluptate parum am, volecto odipsa cus aut es dolluptatur sanihilique optio odit res nimolo et, sit idunt. Danto volorec totatur? Axim res persperum, qui dis aborpor simus. Orrum accuptation reptia inciatur.

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Les îles Vestmann (Double-page précédente) Les 18 îles de cet archipel sont situées à 10 km de la grande terre, l’Islande. Les dernières éruptions sur la plus grande île, Heimaey, se sont produites en 1973. La totalité de la population avait été évacuée. L’île de Bjarnarey, quant à elle inhabitée, est un volcan qui s’est effondré. La seule maison construite au cœur de l’ancien volcan est un abri saisonnier pour les chasseurs de macareux moines, une chasse ouverte de l’été à l’automne. L’été, 10 millions d’oiseauxs nichent en Islande. 206 Contre vents & marées

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Greenland - Fjord glacé d’Ilulissat Classé au Patrimoine Mondial, ce fjord est l’embouchure où se déversent chaque année les 35 km3 de glace du Sermeq Kujalleq, le glacier le plus rapide de l’hémisphère nord qui avance de 20 mètres par jour. J’ai pu survoler ces sites grandioses pour illustrer l’accélération de la fonte avec des icebergs de près de 1 000 mètres de haut.

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Baie de Ha Long - Vietnam (Pages 206-207) Cette baie, membre des plus belles baies du monde, est depuis 1994 un archipel inscrit au patrimoine mondial. Ici, généralement, les familles se déplacent, avec une inconscience tranquille, à bord de coques de noix ou bateaux paniers. Une expérience inoubliable que nous avons testée pour vous : embarquer sur une petite jonque traditionnelle pour la nuit du premier de l’an chinois.

Mogador, Essaouira - Maroc (Double-page précédente) L’ancienne capitale diplomatique du Maroc est aujourd’hui le troisième port de pêche du pays, spécialisé dans la sardine. Le soir, les canots qui servent sur chaque sardinier à mouiller la senne, sont regroupés pour être écopés et lavés. Ils seront récupérés par leur propriétaire dans la nuit avant d’appareiller pour une nouvelle marée. Ces canots sont peints en bleu, c’est la couleur bleu qui effraie le moins la sardine, c’est prouvé !

Jangaderos, Céara - Brésil (Ci-contre et double-page suivante) Au nord du Brésil, sur les côtes du Cearà, la pêche se pratique toujours à la voile. La jangada est l’ancêtre de la planche à voile et les jangaderos qui la chevauchent sont des héros au quotidien. À deux reprises, j’ai passé plusieurs semaines avec ces pêcheurs. On estime que 20 000 familles vivent encore de cette pêche particulièrement dangereuse sur les 800 kilomètres de côte. La jangada est le symbole d’une culture maritime toujours vivante. Très tôt, le matin, les jangaderos appareillent en flotte pour aller chercher le poisson parfois jusqu’à 100 milles au large.

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Sir Bunair Race - Dubaï La plus grande course de boutres porte le nom de l’île où est donné le départ tous les ans à 120 équipages de 25 personnes. Sur 54 milles, c’est la plus belle régate de l’année pour les grands boutres de 60 pieds. Invité du Royal Yacht Club de Dubaï, j’ai aussi participé, sur l’île, aux fêtes qui précèdent le départ. Tout cela, seulement entre hommes. La régate est dotée d’un prix à la hauteur de l’événement : 1 500 000 euros.

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L’Anse Robert

La Martinique que j’aime tant J’ai découvert ce département français seulement en 1985 à l’occasion d’un grand prix de multicoques où j’étais embarqué par Yves Pajot sur son maxi cata de l’époque. Un grand souvenir et un choc quand on m’a remis le prix des médias : mon poids en citrons verts… Pendant des années, avant notre sinistre, nous nous étions organisés avec Marie pour vivre à la Martinique durant trois à quatre semaines où je préparais, entre autres, mon livre : La Martinique entre ciel et mer. Ma plus belle rencontre a été Albert Falco qui m’a invité à l’accompagner dans plusieurs plongées entre Saint-Pierre et Le Prêcheur.

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(Ci-contre et double page suivante) Tsunami 2005, Banda Aceh - Indonésie Qui n’a pas été touché, le 26 décembre 2004, par cette catastrophe qui a fait environ 230 000 morts dont près de 170 000 dans la seule région d’Aceh, après la vague meurtrière du tsunami. Huit jours après, je rejoignais la Jeanne d’Arc en compagnie de mon ami Jean-François Deniau. La France avait répondu très vite « présente » en détournant la Jeanne de sa campagne de l’École Navale. J’ai ainsi pu survoler la région de Banda Aceh avant que nous ayons l’autorisation de nous poser pour distribuer eau et nourriture aux survivants. Nous avons très vite découvert qu’il ne restait plus que des rescapés ou des disparus, pas de blessés et très peu de corps. Un exemple parmi tant d’autres, cette mosquée restée seule au milieu d’un village entièrement avalé par la vague. Cette jeune orpheline m’a fait monter les larmes aux yeux quand j’ai pris conscience qu’elle ne pouvait pas porter le pack d’eau et la ration alimentaire que je lui avais donnés. Je l’ai accompagnée pour rejoindre un petit groupe de survivants dans un bâtiment aux trois quarts détruit.

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Venise (Pages 222 à 229) Voici la ville, qui à tous, inspire la stupeur… Qui ne l’a vue ne croit point ce qu’on lui en dit et qui la voit croit à peine ce qu’il voit… Qui entend sa gloire n’a de cesse de la voir et qui ne la voit n’a de cesse de la revoir. De ce désir d’y retourner qui pèse sur tous ceux qui la quittèrent, elle prit le nom de Venetia, comme pour dire à ceux qui la quittent, dans une douce prière : Venetiam, reviens encore. Le Doge Luigi Mocenigo 1570

Venise, je la caresse des yeux en prenant le temps de réaliser un rêve qui me poursuit depuis longtemps : naviguer sur les canaux aux mille et une légendes de la cité des Doges. Alors que je réalisais un reportage pour le Figaro Magazine en 1985, j’ai souvent marché de jour comme de nuit. Je me suis perdu et me suis surpris dans ce double labyrinthe de terre et d’eau, d’ombre et de lumière où s’agitent des silhouettes. Aujourd’hui, sans mettre les pieds à terre, je propose une balade sur les rii pour explorer des lieux souvent secrets où Venise garde la mémoire de ses hôtes prestigieux. Canaletto, le grand maître incontestable de la beauté marine de Venise au xviiie siècle, avec sa touche quasi photographique, n’a jamais travaillé depuis une embarcation. Canaletto n’a réalisé aucune œuvre d’une Venise vue de la lagune ou du grand Canal.

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Venise, la Sérénissime Jean d’Ormesson dit de Venise : Si belle, si étrange, si audacieuse, riche de son passé et mélancolique, Venise est pour chacun d’entre nous une légende et un rêve. Notre académicien traduit parfaitement ce que je ressens quand, de jour comme de nuit, j’ai le grand privilège de naviguer avec ma petite Ombrine dans l’enchevêtrement des canaux de la Sérénissime. Depuis 3 ans, je travaille avec mes deux bateaux à toutes les saisons pour illustrer les traditions, la vie quotidienne, les évolutions, les changements fondamentaux, le transport maritime et la gestion de l’Acqua Alta. Aujourd’hui, je suis résident vénitien dans l’île de la Certosa. Je reprendrai une très belle phrase de mon amie Arièle Butaux, musicienne et romancière qui vit à Venise : On peut mourir à Venise, on peut surtout choisir d’y renaître…

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UN M A R IN - PHOTO GR A PHE « C ’ e s t p a s l ’ h o m m e q ui p re n d l a m e r , c ’ e s t l a m e r q ui p re n d l ’ h o m m e » ;O b`S RS aO b`ORcQbW]\ R¸c\ W\abO\b [OWa OcaaW Rc

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Contre-Amiral François Bellec De l’Académie de Marine - Juin 1991

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Une belle détermination pour vivre la mer (Pages 232 à 237) Ce sont les voiliers qui ont découvert le monde et ils charrient dans leur sillage bien des légendes. Olivier de Kersauson

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Au moment où nos politiques se posent la question du service militaire, la Marine a pris, elle, une très belle initiative en rouvrant l’École des Mousses. Autre belle initiative : faire découvrir la mer à ses jeunes, à bord de notre dernier grand voilier le Belem. Malheureusement, la volonté de l’État Major sera certainement freinée dans son élan, Bercy exigeant de la Marine qu’elle fasse un appel d’offre afin de sélectionner parmi les navires Écoles, le moins disant. Voilà comment on sabote ce qui nous reste de tradition sous pavillon français. Peintre de la Marine ฀Contre vents & marées 237


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La frégate « Hermione », Rochefort-en-Mer (Ci-contre) La frégate Hermione ou 25 ans d’aventure. J’ai illustré, durant des années et comme le veut la tradition, l’avancement des travaux d’un navire de sa majesté. Mon travail du xxie siècle est en phase avec l’esprit du corps des Peintres de la Marine. Ces artistes illustraient entre autres, l’avancement des grands chantiers maritimes du littoral et la construction des navires de la flotte de sa majesté. Les toiles, les croquis, les aquarelles étaient montés à la Cour pour que le Roi et son ministre de la Marine puissent juger de la réalisation des travaux en cours. Le chantier de reconstruction à l’identique de la frégate de Monsieur de Lafayette a animé, durant 17 ans, le bassin de radoub Louis XV avec 3 200 000 visiteurs.

Patrimoine maritime morbihannais (Double-page suivante) Une flotte de forbans et de sinagots s’est regroupée en attendant le vent.

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La photographie est le grand art expressionniste de notre temps. À chaque époque, son moyen d’expression. Les forces romantiques d’une épreuve photographique sont celles qui ne se mesurent point avec des mots. Pierre Mac Orlan

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La naissance d’une légende C’est en apprenant que le plus grand paquebot jamais construit verrait le jour à Saint-Nazaire, que l’idée m’est venue de m’inspirer du travail de notre Maître Albert Brenet sur le France et de renouer ainsi avec la tradition des Peintres de la Marine qui avaient, entre autres, la charge d’illustrer l’évolution de la construction des navires de Sa Majesté. Cette aventure personnelle s’est concrétisée lorsque Patrick Boissier, président d’Alstom Chantiers de l’Atlantique, séduit par le projet, me donna son accord pour vivre au cœur de l’entreprise durant 23 mois et dans les meilleures conditions de travail. C’est ainsi que notre camping-car, de jour comme de nuit, s’est intégré dans ce paysage industriel pour suivre les grandes étapes de la construction de ce colossal puzzle de plus de cent blocs atteignant pour certains 700 tonnes. J’ai ainsi pu suivre la naissance d’une légende, le Queen Mary2. De jour comme de nuit, j’ai mémorisé les séquences les plus marquantes jusque sous les tours de Manhattan pour sa première traversée où il a essuyé, sa première tempête remarquablement gérée par le Commodore Ron Warwick, premier capitaine du QM2.

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Alain Thébault & Éric Tabarly

Éric Tabarly en a rêvé, Alain Thébault l’a fait Éric, comme Alain, était en avance sur son temps. La voile du xxie siècle est et sera aérienne. Déjà, en juin 1995, j’ai été témoin organisateur d’un duel entre la toute nouvelle frégate Surcouf, en essai à Lorient, et l’Hydroptère. À l’époque, Alain n’avait pas encore flirté avec les 55 nœuds soit 100 km/h en suspension sur trois foils.

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Michel Malgorn, patron du canot tous temps Ouessant

Les sauveteurs bénévoles (Pages 248 à 251) C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain n’écoute pas. Victor Hugo Malgré l’organisation des Cross tout au long de notre littoral et leurs messages répétés d’« Avis de coup de vent », d’« Avis de grand frais », d’« Avis de tempête », de plus en plus souvent, les nouveaux plaisanciers n’entendent rien à ces mises en garde. Plus de 90 % des interventions des bénévoles de la Société Nationale de Sauvetage sont dues à une plaisance irresponsable, et pire, ces nouveaux navigateurs n’hésitent pas à envoyer au tribunal les responsables de stations quand leur bateau a été endommagé au cours du sauvetage. J’ai été personnellement témoin de ce comportement en baie de Quiberon sur mon bateau alors que je portais secours à deux adolescents, en hypothermie, chavirés avec leur dériveur au milieu de la baie. Les hommes et les femmes de la SNSM sont d’abord là pour sauver des vies et non des bateaux. Rappelons-le.

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Canot 2ème classe SNS 207, La Grande-Motte.

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Dernier vol mais quel vol ! Cette image, qui a fait le tour du monde est, une fois de plus, à l’origine, une belle histoire d’hommes. Nous sommes le 30 décembre 2006. Dans l’après-midi, mon ami Daniel Manoury, mon pilote d’hélicoptère depuis 17 ans, vient me rendre visite à la maison. Nous parlons de notre passé, de nos aventures, de notre complicité car demain, 31 décembre, c’est le dernier jour où Daniel pourra piloter sa machine. Il est à la retraite obligatoire le 1er janvier 2007. À la maison, la télévision est allumée sur la chaîne météo car un avis de grand frais est annoncé. Je suis donc l’évolution de cette dépression. Vers 17 heures, les conditions se précisent. J’appelle Toulouse, le service des prévisionnistes marine avec qui j’entretiens des rapports réguliers et exceptionnels. J’ai alors la confirmation d’un avis de coup de vent de 8 à 9 Beaufort. J’appelle ensuite mon ami Carlos, le commandant de l’Abeille Bourbon qui me confirme que les prévisions sont musclées et qu’il est déjà sur zone au mouillage sous le Stiff à Ouessant. Je lui pose directement la question : « Si je viens demain matin au plus fort de la dépression, pourras-tu naviguer pour faire des images ? ». Il me confirme que mon autorisation préfectorale est toujours valable et qu’il ne voit aucun inconvénient à ce que nous nous retrouvions autour de 10 heures dans le nord-est de Ouessant, près du « Trou de l’enfer ». 31 décembre 2006. Pour mon ami Daniel, c’est son dernier jour de vol après une très longue et belle carrière de pilote, d’abord dans l’armée de l’air puis dans le civil chez Héli Bretagne. Il enregistre plus de 15 000 heures de vol à son compteur… Il décolle de Vannes et passe me prendre à La Trinité. Mon assistant est en congé alors j’embarque mon gendre et ami Younick dans l’aventure. Pour me faire plaisir une dernière fois, Daniel a installé les doubles commandes. Depuis des années, Daniel m’a donné le goût du pilotage de l’hélicoptère. C’est devenu une passion. Je prends les baguettes, direction Ouessant. Arrivé sur zone, nous nous posons sur le terrain pour couper et mettre la machine en configuration photo. J’enfile mon harnais pour travailler dehors, debout sur le patin. Younick prépare le matériel photo, prêt à répondre à mes demandes. Nous nous comprenons très bien car il a été mon assistant pendant un an en 1992. Daniel reprend les commandes, direction l’Abeille Bourbon qui fait déjà route. La suite se passe de commentaires. L’addition des conditions de mer, du plus beau remorqueur de haute mer et le talent du pilote ont écrit la suite de l’histoire. La qualité spectaculaire des images est à mettre au crédit du commandant et de l’équipage de l’Abeille qui ont fait passer ce bateau dans la zone la plus perturbée, autour de Ouessant, un jour de gros temps. À la fin des prises de vues, le commandant Carlos, me demande par radio de me mettre au-dessus de l’étrave de l’Abeille. Pratiquement en stationnaire au-dessus de la plage avant, nous avons vu sortir tout l’équipage avec en tête, Carlos. Ils ont alors déroulé une banderole qu’ils avaient préparée sur laquelle on pouvait lire :

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(Suite double-page précédente) « Merci Daniel ! » Oui, ce jour-là, tous les marins, tous les hommes et toutes les femmes d’images pouvaient dire un grand merci à notre cher Daniel qui, par tous les temps, nous avait si bien placé au cœur de notre sujet : la mer. Si la terre sépare les hommes, la mer les rapproche. La preuve, une fois de plus. Pour finir la journée et fêter ce dernier vol, nous sommes passés par l’île de Sein où mon amie Brigitte nous avait préparé un ragoût de homard, 31 décembre oblige. Enfin, après avoir refioulé à Quimper, j’ai piloté pour rentrer sur Vannes. C’était pourtant la dernière heure de vol de mon ami « Manou ».

Les aéronefs de la Royale (Ci-contre et double-page suivante) Dans la maison « Marine nationale », je suis connu pour avoir un certain faible pour les aéronefs. Pour moi, vivre à bord d’un portehélicoptère comme la Jeanne, le Mistral ou le porte-avion Charles de Gaulle, c’est l’assurance de réaliser des images musclées. Ainsi, j’ai pu survoler le retour d’un sous-marin nucléaire lanceur d’engins, après une mission de 70 jours, pendant lesquels il disparaît totalement des écrans. À son retour, il est survolé par un aéronef de la flottille 32F, pour hélitreuiller un plongeur qui se chargera de la sécurité des transferts de matériel et de personnel. J’ai aussi fait les premiers vols du nouvel hélicoptère, le Caïman NH 90, pour des entraînements en mer avec la frégate Aquitaine. Mes souvenirs les plus virils sont à bord des porteavions Clémenceau et Charles de Gaulle. Sur le pont, comme dans les cockpits, j’ai beaucoup de respect pour ces hommes qui assurent des missions particulièrement dangereuses de jour comme de nuit. J’ai eu la chance de vivre, grâce à l’amiral Patrick Hébrard, dernier commandant du Clémenceau, un appontage de nuit.

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La fin du TK Bremen à Erdeven, Morbihan. Le 15 décembre 2011, je suis avec Thierry Leygnac, notre pilote, et mon assistant, en mer d’Iroise, alors que souffle un méchant coup de vent. La météo annonce que le 16, la dépression se situera plus au sud. Nous décidons de nous mettre à l’abri des installations de l’aéroport de Quimper et de dormir sur place. Sur mon téléphone, j’ai des applications avec des alertes pour m’annoncer les dépressions et les flashs info sur le trait de côte. À deux heures du matin, je suis réveillé par une alerte m’annonçant qu’un cargo, sous le vent de Groix après avoir dérapé sur son mouillage, est à la dérive. À 5 heures, c’est confirmé, le TK Bremen s’est échoué sur la plage d’Erdeven. À 7 heures, nous sommes à l’aéroport et nous décollons de nuit sous la pluie. Nous arrivons sur zone en même temps que le tout nouveau NH 90 de la Marine nationale. Aux commandes, le patron de la 32F, le capitaine de Corvette Olivier Hasting. Après une courte liaison radio, on se comprend entre marins car mon pilote Thierry a formé un grand nombre de pilotes d’hélico de l’aéronavale, dont Olivier. Dans un premier temps, un plongeur est hélitreuillé pour une visite de coque. Au même moment, alors que le jour s’est levé, l’hélicoptère de la protection civile piloté aussi par un marin, dépose du personnel pour évaluer l’état de la coque du bateau et savoir si, à la marée, le TK Bremen pourrait être remorqué par l’Abeille Bourbon, déjà sur place. La suite est connue, il sera découpé en petits morceaux en seulement un mois, par une société de travaux maritimes néerlandaise. Les images sur mon blog seront vues par plus d’1 200 000 internautes.

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Au bon endroit au bon moment Si ma photographie réside d’abord dans la patience, il peut aussi y avoir des accidents photographiques dans le parcours d’un auteur. Être au bon endroit au bon moment. Ce 15 janvier 2009 à 15 heures, je photographie Manhattan depuis Hoboken sur le balcon d’amis trinitains en poste à New York. Le ciel, une traîne peu active, est magnifique. Je suis au grand angle pour donner plus de présence aux nuages. Soudain, inimaginable, rentre en silence dans mon champ de vision, un objet 262 Contre vents & marées

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flottant non identifié ! Il me faudra quelques secondes pour réaliser que vient d’amerrir un A320 sur l’Hudson River. À l’ouverture des portes, je vois les passagers se jeter sur les toboggans, aidés par l’équipage. Perturbé, tremblant, je change d’objectif pour passer au 500 mm. À 16 heures, j’appelle Olivier Royan, patron de Paris-Match et à 16 heures 30 les images sont transmises à la rédaction. C’est ce qu’on appelle en bon français un « scoop ». Peintre de la Marine ฀Contre vents & marées 263


Point n’est besoin d’être marin ou d’avoir fait trois fois le tour du monde pour être un poète de la mer. À coup sûr, un Victor Segalen ou un Tristan Corbière surclasseront toujours les lyriques de la côte, parce qu’ils furent parmi les rares en qui coexistèrent le poète et le marin. Mais il est aussi des prédestinés qui ont la mer dans le sang et qui dès leur premier contact avec l’océan, ont en eux la révélation d’affinités impérieuses. Chez cela, qu’ils soient enfants de la mer ou pèlerins fervents qui meurent de nostalgie dans les étouffoirs des cités et que chaque année ramène, pendant les vacances, sur les mêmes rivages, la mer présente ou non sera la base sur laquelle s’inscriront les modulations essentielles de leur œuvre et de leur vie. Théophile Briant

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l’Étang du Puits - Sologne

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La Trinité-sur-Mer, sans le pont, comme je l’ai connu dès 1951

Achevé d’imprimer en septembre à Luçon. Dépôt légal : octobre 2015 Imprimé en France


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