Mémoire M1 " Posture architecturale matériaux naturels & architecture spécifique des milieux "

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DIRECTEUR DE MEMOIRE Guillaud Hubert MEMBRES DU JURY BARDAGOT Anne-Monique GUILLAUD Hubert SADOUX Stéphane -

POSTURE ARCHITECTURALE MATERIAUX NATURELS & ARCHITECTURE SPECIFIQUE DES MILIEUX BODOIN Charlie Mai 2015



REMERCIEMENTS Je remercie chaleureusement les cinq enseignants en charge du suivi de mémoire, BARDAGOT Anne Monique, DUBUS Nicolas, GUILLAUD Hubert, MAZEL Ivan et SADOUX Stéphane pour le suivi, l’écoute et les conseils qu’ils ont su me donner durant l’écriture de celui-ci. Tout particulièrement merci à BOUCHET Boris et LOIRET Paul-Emmanuel, de m’avoir reçu et donné de leur temps précieux, pour avoir pris le temps de me parler respectivement de leur démarche architecturale et présenter plus précisément leurs projets. Deux belles rencontres enrichissantes. Merci à tous les professionnels et mes camarades de master pour leurs conseils et leurs encouragements. Enfin, merci à tous mes proches, ma famille et mes amis pour leur soutien remarquable tout au long de la rédaction de ce mémoire.

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AVANT PROPOS Le sujet du présent mémoire trouve son inspiration dans des constats et des questionnements face à un changement du cadre de vie en milieu rural, dans un premier temps à l’échelle locale, et dans un deuxième temps à l’échelle du territoire. Ces changements engendrent des préoccupations personnelles. Effectivement, vivant depuis 17 ans en milieu rural, dans la commune de St Péray, un village de moins de 10 000 habitants en Ardèche (à 10 minutes de valence). J’ai pu voir sortir de terre 9 lotissements de grande et moyenne ampleur, en l’espace de 15 ans, changeant totalement le paysage rural de cette petite commune. Mais la manière de penser la planification de ces nouvelles constructions, me semble des plus déconcertante : leur implantation et aménagement dénués de sens, la posture architecturale choisie qui les rend bien souvent étrangères à leur contexte architectural et paysager. Partant de ces constats, je choisis d’écrire ce mémoire dans le but de parcourir et de comprendre quel serait le moyen de pallier à l’uniformisation de nos architectures et paysages ruraux, de construire une pensée et une éthique architecturale que j’envisage de suivre dans un futur professionnel.

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SOMMAIRE INTRODUCTION + DEFINITION IDENTITE ARCHITECTURALE OU CARACTERES SPECIFIQUES D’UNE ARCHITECTURE LOCALE ? ARCHITECTURE DES MILIEUX & NOTION DE TRANSMILIEU(X) PARTIE I _ POSITIONNEMENT & ROLE DE L’ARCHITECTE DANS LA REVALORISATION SPECIFIQUE ARCHITECTURALE PARTIE II _ ENTRE NEO-REGIONALISME FOLKLORIQUE & PASTICHE CONTEMPORAIN PARTIE III _ UN PROJET CONTEMPORAIN REPRESENTATIF DE SON MILIEU CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE

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INTRODUCTION



L’objet de mon mémoire traite d’un problème que traverse notre société industrialisée du XXIème siècle en architecture, et se répercute directement sur nos systèmes sociaux économiques et culturels locaux. Ce fléau dû à un processus industriel et donc à une standardisation de l’architecture en terme général, inhibe toute forme de caractère architectural local, spécifique à un territoire qui lui est propre. Ce problème est entretenu par des acteurs de la construction qui au nom de leur intérêt financier et d’un désintérêt à maintenir une culture, une économie locale, donc une spécificité locale, répandent sur le territoire un modèle de construction standardisé pour chaque type de construction : le logement, le secteur industriel et commercial. Le paysage architectural des différents territoires se voit modifié et changé par un type de construction se répandant uniformément et détruisant le charme des esthétiques propres à leurs milieux, qui font la richesse d’un territoire donné à grande échelle : les maisons à colombages dans le nord EST, en pierre sèche dans le SUD, les chalets de bois dans les montagnes savoyardes et autres constructions représentatives des cultures constructives et sociales de ces milieux. Dans notre contexte occidental européen, la fabrication d’une ville, d’un village, est un processus qui se construit sur des temps longs. Il change au gré de l’évolution des époques, de la société et des cultures qui les transforment constamment, gardant les traces du passé. Ce procédé humain fabrique une stratification lisible, marquant ce que nous appelons métaphoriquement le palimpseste.

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Or l’architecture élaborée selon un processus de standardisation et d’industrialisation des moyens, se décline ainsi à une échelle industrielle, sous forme de lotissement. Ce qui agit comme une « greffe » au caractère très étrange face à son contexte. Celle-ci vient en générale se créer maladroitement sans prendre à partie les logiques de bon fonctionnement que fabrique le corps urbain déjà présent (réseau de transport en commun, circulation automobile et piétonne adaptées, rapport habitations/commerces équilibré, espaces publiques permettant de faire vivre le village, comme la place du marché, le jardin municipal etc). Le problème récurent engendré par ces constructions vient de leur manque d’attache au lieu dans lequel elles se situent, provocant une décontextualisation de l’architecture par rapport à ses milieux (environnementaux, socio-culturels et socioéconomiques). En effet le processus de standardisation entamé par ces concepteurs d’architecture niant leur environnement, ne permet pas de faire face à la complexité de réponse aux enjeux d’un milieu rural. « Il n’existe pas de types différents d’architecture, il existe uniquement des situations différentes qui, pour satisfaire aux exigences physiques et psychiques de l’homme, amènent des solutions différentes.»1 En définitif, une prise en compte dans la conception de tous ces paramètres préexistant dans le site et que l’architecture dévoile et conçoit par la suite, cherche à rassurer et guider l’homme dans sa quête de « prise en compte existentielle » et élucide le rapport qu’il entretient avec le monde. Cette démarche va dans le sens Heideggerien de produire des architectures permettant à l’humain d’habiter pleinement le monde dans lequel il a été projeté. 12

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Référence : Christian Norberg-Schulz, Genius Loci, paysage, ambiance, architecture, p.5.


De ce fait, l’architecture dépasse l’acte simpliste d’être au monde un objet posé sur le sol du terrain qui l’accueille, mais serait la résultante d’une compréhension et une considération des multiples phénomènes que composent les milieux d’un territoire. Respecter et maintenir la cohérence architecturale d’un milieu serait pour moi une condition première, pour que l’homme puisse se sentir en équilibre dans le milieu où il évolue. L’ancrage dans une culture claire, fait ressentir le sentiment « d’habiter ». Pour cet écrit, nous nous pencherons plus en détails sur les milieux ruraux, qui sont les premiers à êtres touchés par le manque de réglementations claires et pertinentes sur les zones à urbaniser et bien des fois déjouées. La réflexion à propos des milieux ruraux est d’autant plus intéressante dans notre cadre contemporain que plusieurs questionnements se font sur leur avenir. Les problèmes d’étalement urbain qui les touchent de plein fouet sont complexes. Ils engendrent des projets ne maitrisant pas la délicatesse multidisciplinaire à adopter et à administrer, pour générer des constructions de qualité. Nous pouvons alors nous demander, en quoi les enseignements des architectures vernaculaires peuvent apporter une amorce de réponse au processus d’architecture standardisé insufflé par l’étalement urbain et périurbain, inhibant nos milieux architecturaux spécifiques et les développements locaux ruraux ?

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Avant de nous questionner directement sur les possibilités de nos moyens constructifs actuels, nous devons nous demander quels étaient les procédés vernaculaires, et quelles étaient leurs qualités de construction par rapport à leur contexte. Leur étude permet d’en tirer une leçon, un apprentissage, et de réinjecter dans le processus de projet, les logiques et le génie d’autrefois. Ils peuvent être pertinents s’ils sont adaptés à nos attentes sociales, culturelles, économiques, spécifiques de nos milieux ruraux contemporains. En effet l’architecture vernaculaire a beaucoup à nous apprendre tant dans la prise en compte de l’humain d’un point de vue social et culturel que dans la prise en compte de son environnement et de l’économie des ressources naturelles. Un travail remarquable dans cette lignée a été mené par le laboratoire de recherche Craterre, avec le projet « VERSUS lessons from vernacular heritage to sustainable architecture ». Un travail d’analyse qui a pour objectif « d’enrichir les savoirs à partir de leçons et des principes fondamentaux du patrimoine vernaculaire »2 afin d’intégrer ces principes fondateurs dans la conception pour parvenir à une véritable architecture éco-responsable et un plus large échange interculturel parmi l’union Européenne. Les résultats attendus sont la reconnaissance de l’architecture vernaculaire en particulier dans l’habitat, pour favoriser une diffusion de ces savoirs dans toute l’Europe. Le groupe fonde son analyse sur trois critères, trois piliers d’une architecture plus éco-responsable et durable tirant son enseignement du modèle vernaculaire. Ces trois piliers, environnemental, socio-culturel et socio-économique possèdent chacun 5 nuances qualifiant leurs catégories et permettant une analyse simple à prendre en compte. 14

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Référence : CORREIA Mariana, VERSUS, lessons from vernacular heritage to sustainable architecture, p.5.


Je tire de ce travail d’analyse d’architecture vernaculaire, les attraits qui pourraient venir en réponse au problème de standardisation de l’architecture pour pouvoir développer des solutions face à la perte de spécificité architecturale qui affecte les milieux ruraux. Pour ce faire, je porte mon intérêt sur les matériaux qu’elle emploie et qui sont souvent révélateurs d’une culture sociale, des savoir-faire constructifs et donc d’une esthétique caractéristique d’un milieu donné. Le travail de cet écrit tournera donc autour de l’hypothèse suivante : Une architecture utilisant des matériaux naturels locaux et portant une attention aux caractères des milieux, contribue à une revalorisation de la spécificité architecturale propre des villages et bourgs, et à un développement local des milieux ruraux. Afin de vérifier la véracité de cette hypothèse, je propose un développement structuré en trois parties. La première évoquera des exemples de positionnement architecturaux et de rôles d’architectes qui peuvent prétendre participer à une revalorisation de la spécificité d’un milieu architectural. La deuxième présentera les risques d’une architecture au registre folklorique et la déviance que peut apporter le pastiche contemporain. La troisième et dernière partie concernera dans un premier temps un milieu rural choisi, qui est le bourg de Marsac-en-Livradois et ensuite un projet qui me semble être l’exemple emblématique de revalorisation d’une architecture rurale.

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DEFINITIONS


Deux définitions préalables semblent pertinentes et utiles pour la suite de la réflexion. IDENTITE ARCHITECTURALE OU CARACTERES SPECIFIQUES D’UNE ARCHITECTURE LOCALE ? Identité, nom féminin. L’identité dans le sens d’une interrogation : suis-je semblable, identique à quelque chose/quelqu’un d’autre ? Le processus en jeu est une sorte de «réflexion en l’autre», une identification à l’autre.3 Spécificité, nom féminin. Qualité de ce qui est spécifique, propre à quelque chose : La spécificité d’une coutume.4 Bien souvent assimilée au patrimoine, l’identité architecturale a valeur de style, or l’identité d’un projet n’est pas seulement la résultante d’une manière de construire un édifice historique emblématique d’une ville et d’une époque donnée. Une cathédrale ou un bâtiment à caractère patrimonial, d’un style particulier possédera une identité romaine, baroque ou gothique. L’identité architecturale est de manière générale la capacité d’un bâtiment à communiquer la culture du contexte dans lequel il s’implante, selon des techniques constructives perpétuées ou non, d’une époque bien précise par rapport à une économie donnée. Mais le thème de ce mémoire m’a tout d’abord fait chercher s’il pouvait exister une identité architecturale, et si elle existait, quelles seraient ses caractéristiques, sa représentation concrète ? Or, parler d’identité architecturale soulève beaucoup de débats. Le terme peut être interprété de manière négative et soulever des théories manichéennes 18

3 & 4

Référence : dictionnaire Larousse en ligne.


valorisant une idéologie qui mène a des dérives racistes et hostiles à un caractère identitaire autre. Dans ce cas l’architecture ou l’espace construit crée des espaces où des communautés identitaires se forment et rejettent catégoriquement le fait de partager « leur » espace avec un individu extérieur. Afin de fonder les idées du mémoire, il est préférable de prendre en compte la définition de l’identité dans son sens dialectique de ce qui est semblable et différent de manière constructive et ouverte. Sera exclue, par conséquent, sa façon de confronter et de mettre en opposition, qui crée une ségrégation de logique territoriale et spatiale relative à des milieux donnés. Le principe serait donc, de prendre en compte nécessairement l’identité dans son sens d’interrogation sur ce qui peut être semblable ou identique. Une réflexion sur l’autre, une identification par rapport à l’autre, permet d’identifier des milieux spécifiques au sein desquels l’architecture émanerait des cultures, du paysage environnemental et de l’économie locale. En ramenant ce fondement caractéristique anthropologique à l’architecture, il serait plus juste de parler de spécificité architecturale. C’est la manière dont un projet ou une réalisation fait ressortir le caractère du lieu, en faisant d’une part le rapprochement à « l’esprit du lieu », à la manière du « Genius Loci » de Christian Norberg Schulz. Pour compléter la démarche, l’architecture se caractérise et se différencie d’une autre dans sa manière d’être cohérente et intégrée à la culture dans laquelle elle est inscrite. Deux sortes de cultures se dessinent : la première est la culture sociale propre aux usagers qui habitent les espaces et le territoire. La deuxième est la culture constructive, elle caractérise la construction par le procédé et la technique 19


employés, étroitement liés à son milieu et son cadre anthropologique. Enfin, le dernier critère qui permet d’identifier un caractère spécifique d’une architecture est le cadre socio-économique. Il cherche à déterminer si, par les usages et le programme, le bâtiment propose une activité humaine qui favorise les productions et les échanges au niveau local permettant ainsi de maintenir une activité économique locale. D’autre part l’analyse de l’approche socio-économique cherche à évaluer la capacité du projet à impliquer des entreprises et artisans locaux, menant à bien la volonté d’inscrire le projet physiquement et conceptuellement dans son milieu. L’élément qui est en quelque sorte le plus manifeste des traits caractéristiques d’un bâtiment traditionnel ancien, est en général le matériau qu’il met en scène. En effet celui-ci est la première chose visible, et de ce fait, nous parle de manière générale du lieu où il est implanté, car la plus part du temps il provient de l’environnement local à la construction. Une caractéristique qui découle directement de l’accessibilité à un matériau plus qu’à un autre, et à des savoir-faire liés à son utilisation, qui est par conséquent caractéristique de ce lieu. Cette spécificité d’un matériau s’assimile à une économie locale animée par l’exploitation et l’utilisation de cette ressource. L’autre caractéristique est esthétique. Un rapport entre le matériau naturel local et sa mise en oeuvre dans une construction. L’effet obtenu est une double lecture harmonieuse qui implique la ressource naturelle dans son milieu et cette même ressource travaillée et édifiée par l’homme, ce qui crée le langage du paysage culturel rural.

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Par conséquent la définition d’un caractère spécifique architecturale local, contemporain, doit aujourd’hui se calquer sur la définition vernaculaire, en y ajoutant à bon escient nos savoirs et avancées technologiques. Il faut aussi en compte le contexte actuel social, culturel et économique en cherchant à trouver un équilibre entre la mondialisation des échanges et une reterritorialisation des activités économiques à échelle locale. De ce fait, la spécificité architecturale locale contemporaine n’est pas seulement relative à l’appartenance physique, esthétique ou symbolique d’un bâtiment à un environnement. De manière plus fondée, mais moins perceptible au premier abord, elle intègre la totalité d’un processus d’appartenance. C’est à dire, tout ce qui est produit, valorisé par le projet architectural et sa réalisation, tout ce qui en découle, par exemple, l’activité économique engendrée et dont elle fait bénéficier à son entourage local. L’idée fonctionne aussi pour les acteurs employés dans la réalisation du projet qui en tirent des bénéfices culturels, techniques et d’apprentissage. Ceux-ci, depuis l’extraction de la matière à sa mise en œuvre sur chantier. Cette démarche va donc toucher toutes les filières et entreprises qui participent au développement du bâtiment. ARCHITECTURE DES MILIEUX & NOTION DE TRANSMILIEU(X) Milieu, nom masculin. Cadre, environnement dans lequel vit quelqu’un, considéré comme conditionnant son comportement : Savoir s’adapter selon le milieu. 5

Référence : dictionnaire Larousse en ligne.

La notion des « milieux » renvoie à ce qui compose notre monde humain et son environnement. 5 21


Cette notion ne doit pas se restreindre à la compréhension simpliste du cadre naturel où vivent les humains. L’idée des milieux est faite de manière fractale, comme quelque chose qui existerait de manière singulière grâce à une multitude de chose qui la composent. Ceci se répétant à plusieurs échelles et niveaux. On peut métaphoriquement prendre le corps humain pour en expliquer le concept. En effet chaque corps humain manifeste des qualités intrinsèques et singulières. Mais cette singularité en est composée d’une multitude, interagissant entre elles directement ou indirectement à chaque échelle de composition. Nous pouvons donc considérer que le premier « milieu » organique du corps humain est la molécule, et qui par sa répétition, ses interactions crée un autre milieu qui est l’ADN. Ce processus se mécanise et compose comme cela une gradation d’échelle continue : molécule / ADN / cellule / tissus vivant / corps humain. Le plus important est de bien comprendre que c’est la multitude de milieux à différentes échelles, et surtout leur interaction qui crée la spécificité et la complexité de la notion des milieux et de l’architecture des milieux. L’architecture des milieux prendrait donc en compte les milieux dans lesquel elle s’implante et intégrerait par conséquent elle aussi des milieux dans sa composition spatiale et constructive. Pour les milieux qui forment donc son contexte, on peut considérer trois grandes familles : le milieu environnemental (caractéristiques physiques et bioclimatiques du territoire à plusieurs échelles) ; le milieu socio-culturel (culture sociale et anthropologique : existence de groupes sociaux particulier spécifiques au territoire ; culture constructive : l’utilisation spécifique d’un 22


matériau / système remarquable d’assemblage ou autre dans l’architecture) ; et le milieu socio-économique (existence d’un réel développement local d’artisans et d’entreprises ou organisation d’activités qui rythment un milieu). Mais l’architecture des milieux ne se limite pas à cela, en effet, comme il a été dit précédemment, c’est une architecture qui se compose elle même de milieux pour s’intégrer parfaitement à son contexte. Cette idée se retrouve souvent dans une forme spatiale qui résulte d’une culture de l’habité propre aux usagers locaux. Pour ainsi dire, une cour centrale, une construction à étage ou de plein pied peut être significative d’une activité ou d’une manière d’habiter locale. Ainsi le matériau, sa mise en place et sa composition forment les milieux qui composent une forme spatiale. Mais afin de mesurer et maitriser ce qui compose la complexité de notre monde (phénomènes et milieux) dans la conception architecturale, Chris Younès, Frédéric Bonnet et Stéphane Bonzani à l’initiative des théories précedemment mentionnés décident d’instaurer la notion de transmilieu(x). Celle-ci illustre le passage d’un milieu à un autre dont le but serait, à partir de ce constat, réfléchir à ce que pourrait être la nouvelle esthétique architecturale contemporaine. En terme générale, cette dernière prend le contre-pieds des modernes qui créaient une architecture objet, détachée de ses milieux environnementaux, culturels et sociaux. L’instauration d’une pensée architecturale partant de cette notion va plus loin en pensant les milieux singulièrement mais interagissant et répercutant leur logique en un tout, suivant quatre pistes : La première piste se base sur la recontextualisation de 23


l’objet architecturé par rapport à son site : « Le sol n’est plus ce qui porte l’architecture, une condition préalable, dont les dimensions différentes, emboîtées comme des échelles gigognes, en constitueraient successivement l’environnement : l’assise, la parcelle, le voisinage, la région » 6. Elle cherche à questionner les différentes échelles qui interagissent et composent l’architecture des milieux et le transmilieu(x) : « L’architecture des milieux - et le concept de transmilieu(x) - remettent en cause la figure singulière de l’architecture sur « son » site. Ils interrogent le « zoom » et la séparation des savoirs qui lui est associée –séparant architecture, urbanisme et géographie »7. La seconde piste s’attarde sur « l’importance de la fabrication, le lien des variations formelles, des mesures et des écritures avec les modes opératoires »8, car le choix d’adapter un matériaux par rapport à une manière de le mettre en scène, dans un contexte donné, va permettre de le lier avec ses « conditions historiques, sociales et économiques »9. Le troisième point soulève la question de l’esthétique par rapport aux difficultés apportées par tous les nouveaux procédés et techniques de conception du projet : « Comment penser l’œuvre esthétique à l’aune de la participation citoyenne, du débat contradictoire, de l’instabilité programmatique, et de sa reconversion prochaine, toujours plus ou moins sous-jacentes, qu’il s’agisse des transformations induites par l’usage ou par l’économie ou de son recyclage ? »10 . Puisque la conception se complexifie, elle engendre des projets plus flexibles et adaptés à l’évolution des usages, laissant place à de plus grandes marges de liberté. « De manière analogue, quelle qu’en soit l’écriture, l’architecture pensée comme système ouvert, peut, sans être indéterminé, ‘‘ offrir des possibilités, devenir espace d’émancipation, de transgression même. »11 24

6

Référence : YOUNES Chris, BONZANI Stéphane et BONNET Frederic, Ville-nature et architectures des milieux,p.188.

7, 8 & 9

p.188.

Référence : Ibid.

10

Référence : Ibid. p.189.

11

Référence: p.191.

Ibid.


12, 13, 14 & 15

Id. p.191.

16 & 17

p.188.

Référence :

Référence : Id.

La dernière piste s’attache à la notion de « mobile comme représentation dynamique des équilibres d’une économie générale des milieux et des interdépendances entre leurs parties » 12. En effet, cette piste se centre sur le déplacement des matières qui implique des changements physiques des milieux, impactant l’équilibre et la finitude des ressources. Ils y associent la dimension politique et esthétique. « Ce qui advient ici intervient sur un ailleurs »13. Mais ces quatre pistes ne constituent pas de véritables réponses elle « constituent des hypothèses pour transformer l’univers esthétique architectural »14. Les auteurs résument le concept en affirmant que, « plutôt que la figure, repérable par contraste, selon un mode de composition cadré dans l’espace et dans le temps, c’est le motif, plus indéterminé, soumis à de multiples variations, qui correspond le mieux à cette nouvelle condition. Ce qui est construit et transformé émerge, en quelque sorte, d’un fond dont on ne peut complètement le dissocier, qui le porte et qu’il constitue à la fois »15. Dans le domaine de l’art, nous pouvons constater que ce renouvellement trouve ses sources dans le monde de l’art moderne, au début du XXème siècle. Notamment Matisse qui interprète l’énergie Vitaliste des fauves en faisant en sorte que le contenu de l’oeuvre impacte le hors cadre, par un lien, une mise en rapport avec le lieu dans lequel la peinture s’inscrit, afin de créer un réel décor où l’espace environnant de l’oeuvre et celle-ci ne font plus qu’un « dans lequel la vie même a lieu au quotidien »16. Matisse désignait la forme qu’il peignait comme étant « le dessin d’un mouvement »17

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‘‘ Dans un figuier aucune feuille n’est pareille à une autre; elles sont toutes différentes de forme; cependant chacune crie: figuier. ’’ Henri Matisse Feuilles de figuier, ca. 1941. Extrait de l’ouvrage La pensée-Matisse



DEVELOPPEMENT



Un projet architectural participant à la revalorisation de son milieu rural, provient avant tout de la posture qu’adopte l’architecte à proposer un projet qui soit en accord avec son contexte et qui s’y intégre. En effet, il existe différentes manières de participer à la revalorisation spécifique d’un milieu, dépassant le simple fait de s’intégrer physiquement dans le site où il se trouve. Les architectures présentées dans cette première partie en démontrent trois postures architecturales.

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PARTIE I _ POSITIONNEMENT & ROLE DE L’ARCHITECTE DANS LA REVALORISATION SPECIFIQUE ARCHITECTURALE



PROJET D’ARCHITECTURE ET DE PAYSAGE SUR UNE EXPLOITATION AGRICOLE / FERME D’ÉLEVAGE LIEU : Vernand (42) CALENDRIER : en cour depuis 2007 MAITRISE D’OUVRAGE : EARL Vernand MAITRISE D’OEUVRE : FABRIQUES Architecture Paysage SURFACE AU SOL : Intervention sur plusieurs lieux du domaine de l’exploitation de plus de 110 hectares


1. Architecture comme discipline répondant à un enjeu emblématique du monde rural, un besoin agricole. « La question des territoires ruraux s’accompagne trop systématiquement d’une posture simpliste de « réparation » : comme s’il suffisait de replanter des haies bocagères pour faire projet »18 Les frères Pierre & Rémi Janin respectivement Architecte DPLG, spécialisation en philosophie et Ingénieur Paysagiste, spécialisation en architecture développent au travers de leur agence FABRIQUES Architecture Paysage, des projets dans le but de revitaliser ou de construire des projets d’exploitations agricoles, afin de proposer une nouvelle vision contemporaine en terme de confort usuel, paysager et une meilleur rentabilité des exploitations agricoles. Ils se consacrent en quelque sorte à trouver une cohérence entre les besoins d’une activité agricole et son territoire, afin de moderniser le système d’exploitation, tout en respectant le paysage rural sur lequel ils se trouvent, et la culture marquante du milieu rural. L’engagement est remarquable dans le sens où, le milieu agricole est une des premières spécificité du pays. Une démarche qu’ils développent dans un premier temps dans un cadre familial. Sitôt passé leur diplôme ils décident d’ouvrir leur agence dans la ferme de leurs parents de Vernand, afin d’entamer une analyse prospective sur le domaine agricole, dans le but d’entrecroiser l’univers du travail et les espaces agricoles avec celui de l’action culturelle. Il leur paraît donc évident de faire un projet architectural et paysager sur ce site. L’exploitation est une ferme d’élevage comptant 45 vaches et 85 brebis pour la production de viande. 36

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Référence : GUILLOT, XAVIER, Espace rural et projet spatial : réflexions introductives, stratégies pédagogiques


Les exploitants vendent en directe depuis 1989 et en agriculture biologique depuis 1992. Quatre sites différents composent l’exploitation qui représente une surface totale de 110 hectares, répartissant un site de 56 hectares à Vernand comprenant habitations, bâtiments d’élevage, de stockage etc... Le second site est à louer, d’une trentaine d’hectares vouée aux pâturages ; le troisième, dans le Rhône, est composé de pâturages pour vaches et enfin le quatrième, est un site d’Estive pour génisses dans les Monts du Forez de 13 hectares, culminant à 1200 m.

19

Référence : site internet : http://www. vernand.fr

Dans un premier temps l’analyse permit de se saisir du projet d’espace agricole pour comprendre les dynamiques et les processus de ses constructions. Le projet tend à restructurer l’exploitation pour qu’une meilleur rotation des cultures végétales puissent dans un souci écologique ne pas épuiser les sols et être dans ce cas plus rentable, et ainsi proposer une meilleur gestion des stocks de fourrage. Il leur paraissaient logique après l’analyse de modifier le corps bâti et de réutiliser les bâtiments délaissés par l’évolution agricole (anciennes granges, étables etc..). Dans un but de lier les bâtiments d’élevages et de stockages de foin avec les espaces extérieurs avec lesquelles ils fonctionnent. Ils envisagent donc, de créer un réseaux de petits stockages de foin directement sur les espaces où il est produit l’été, et où il est donné l’hiver aux bêtes. Ils parlent de « fabriques agricoles »19. Ensuite, les deux frères retravaillent le terrain en remodelant fortement le paysage. En effet un champs de cinq hectares qui était alterné tous les 3 ans entre des cultures de seigles et de prairie a été redessiné en neuf bandes fines, parallèles aux courbes de niveau dans le but de limiter l’érosion par le ravinement des 37


Photographie du haut : chemin dans les « bandes cultivées ».

Photographie du bas : système de récupération d’eau.


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Référence : site internet : http://www. vernand.fr

21 & 22

Référence : EHRET, GABRIEL, Paysage agricole, p.18.

eaux dans les champs et proposent l’alternance des cultures par cycle de 6 ans alternant et décalant dans les bandes de terre les différentes cultures de céréales, légumineuses et graminées pour varier la nourriture des troupeaux, les luzernes et les trèfles apportent leur fleurissement, le seigle n’appauvrit pas la terre et les légumineuses régénèrent le sol en azote. Entre les bandes ils choisissent d’intercaler des bandes de prairie pour éviter l’eau de raviner. Un travail donc sur l’organisation rationalisé des cultures et sur la typologie des terrains est réalisé dans une logique économique des allers et retours impliquant une réduction de la consommation d’énergie des moteurs des machines et des organismes vivants qui travaillent sur ces terres, rebaptisées « les bandes cultivées »20. De plus, le réseau de circulation est repensé « de la nécessité d’exploiter efficacement leurs terres – comme un désir de laisser passer les promeneurs »21. Ils mettent en place une réseau de chemin qui impacte fortement le paysage graphiquement, en référence au jardin à la Française du XVIIème ; Ils jouent sur une temporalité dans les tracés qui induisent des cheminements, ne se créant qu’à une certaine période de l’année : « certains sont tracés au printemps par des gyrobroyage à travers la prairies. D’autres ne s’effacent que lors des épisodes neigeux »22. Une attention supplémentaire est portée au réseau d’eau, se répartissant sur le terrain sous forme des marres protégées pour éviter de souiller l’eau par les déjections animales. Celles-ci traversent le paysage grâce à des paliers créés dans le terrain et grâce à de gros tuyaux en béton la déversant dans des bacs rectangulaires pour que les animaux puissent s’y abreuver. Les réseaux de flux de circulation et d’eau forment un 39


Photographie en haut et en bas : changement d’usage de l’ancienne grange, stockage / festival


langage contemporain du milieu agricole, dans une logique poétique d’accord au paysage lié à une fonction de travail, cherchant la rentabilité et l’économie d’énergie humaine par la simplicité de procédé et d’organisation spatiale. Afin d’ouvrir la culture de la campagne et du milieu agricole à au monde urbain, ils organisent aux beaux jours un festival d’art contemporain, installé dans une ancienne grange, dans laquelle ils ont supprimé le plancher intermédiaire de manière à gagner de la hauteur sous plafond pour pouvoir accueillir machines et bottes de foin en hivers, et le festival en été. Celui-ci attire des gens venant de tous milieux, par cela il veulent redonner une vision jeune et active de la campagne dans un souci de revaloriser le travail agricole et la culture rurale. Ainsi ils inscrivent le projet dans une logique de temporalité par l’alternance d’usage et d’activité économique agricole, et une activité culturelle. La communauté de commune de Haute Maurienne Vanoise apprécie la démarche d’architecture agricole des Frères Janin, et fait appel à leur talent pour réaliser un projet d’exploitation, dans le but de répondre à des problèmes que parcours la commune de Bonnevalsur-Arc, dans le domaine agricole. En effet leurs exploitations agricoles actuelles, proches du coeur du village, provoquent beaucoup de nuisances sonores aux riverains et ne répondent plus aux attentes agricoles contemporaines en terme de confort de travail et de rentabilité. En 2012 l’agence livre le projet. Les deux frères appliquent leur démarche pour un noueau projet, sur un terrain vierge du village de la vallée de Maurienne. 41



ZONE AGRICOLE POUR 9 BATIMENTS D’ELEVAGE LIEU : Bonneval-sur-Arc (73) CALENDRIER : 2012 MAITRISE D’OUVRAGE : Communauté de Communes de Haute-Maurienne (CCHMV) MAITRISE D’OEUVRE : FABRIQUES Architecture Paysage BUDGET : 4 200 000 euros HT SURFACE AU SOL : 7 000 m2


Vue lointaine du projet

Vue du projet depuis le merlon et la toiture pâturable

Coupe du projet


Celui-ci est contraint par une typographie créant des risques d’avalanche en hiver. L’enjeu était de créer un projet répondant aux attentes de production de lait et d’élevage des bêtes, en ajoutant une posture de protection de l’édifice face aux risques d’avalanche, tout en respectant le cadre environnemental et paysager. Le projet se compose de 9 bâtiments d’élevages (bovins lait, bovins allaitant, ovins et caprins), répartis le long d’un merlon de 9m de haut et de 150 m de long, adossé à la montagne afin de se protéger des éventuelles avalanches. Le projet qui vient donc contre le merlon adopte une structure stratifiée de l’espace. De manière générale on retrouve au rez-de-chaussée, les espaces dédiés aux animaux et aux professionnels et à la production de lait, composés de bergeries, de fumières, de laiteries et bureaux qui sont des espaces fermés et isolés. En R+1 ce sont les espaces dédiés aux stocks d’équipements et réserves de bottes de foin et paille qui sont entreposées. Du bardage bois recouvre la facade de l’étage, reprennant un langage vernaculaire des fermes. La toiture a été pensée comme la continuité du merlon et du paysage montagneux de la vallée de la Maurienne. Elle est naturellement pâturable par les animaux et fauchable. Cette logique de stratification des usages par étage et de restituer une nature artificielle en rendant la toiture utilisable et productive pour l’activité agricole, ce qui permet une consommation du sol optimisé, tout en ne détruisant pas le paysage caractéristique de cette région montagneuse, dans un principe de développement durable. Cette attention est d’autant plus ingénieuse dans un site où les espaces de fauches sont naturellement limités.

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Le projet qui se dessine tout en longueur, rentre dans une logique de distribution de tous les bâtiments de manière simple, et organise les circulations par un axe central parallèle à la vallée, ce qui permet aux usagers de rejoindre les autres lieux agricoles en lien avec la coopérative (espace de pâturages, de fauches proches et d’Estive). Nous pouvons voir que dans les deux cas, que ce soit pour une rénovation d’exploitation ou une conception nouvelle, les frères Janin conçoivent leurs projets de manière paysager afin de s’intégrer parfaitement avec le milieu environnemental dans lequel ils interviennent, mais avec une forte volonté de lier l’espace à son usage, dans une dynamique de rentabilité et de développement durable. Pour leur cas, on peut dire qu’ils participent à une revalorisation spécifique d’un milieu rural en s’intéressant à une caractéristique propre a ces milieux, le travail de la terre et l’élevage de bêtes. Leur projets cherchent à revaloriser d’une manière globale et réfléchie un milieu en réponse aux actes d’autres concepteurs qui réinterprètent trop souvent le projet rural de manière partiel et « urbano-centriste »23. C’est à dire que le projet rural est de manière générale pensé comme une réserve foncière vouée à l’agrandissement de la ville, qui se concrétise par un étalement urbain, guère contrôlé et adapté à son milieu. Ici l’idée est de penser le projet rural comme une entité portant son image mais ne venant pas en rupture avec la ville, ils cherchent à penser la ville et la campagne comme deux entités respectives mais qui échangent et se lient de manière à ce que l’une marche avec l’autre sans qu’il existe de positionnement hégémonique de l’une par rapport à l’autre. 46

23

Référence : GUILLOT, XAVIER, Espace rural et projet spatial : réflexions introductives, stratégies pédagogiques, p.18.




LE GRAND STADE, REQUALIFICATION DU STADE ÉQUESTRE DU GRAND PARQUET À FONTAINEBLEAU LIEU : Forêt de Fontainebleau (77) CALENDRIER : 2012 MAITRISE D’OUVRAGE : Ville de Fontainebleau MAITRISE D’OEUVRE : Joly&Loiret BUDGET : 9 300 000 euros HT (Tribunes et paysage inclus) SURFACE AU SOL : 2000 m2 + 25 ha de paysage


2. Architecture comme attitude cohérente de la continuité de son paysage. « Faire une architecture quelque part c’est effectivement la faire avec les gens de cet endroit, c’est de refléter cet endroit, sa culture, son milieu physique etc... Et la première des choses à faire c’est de savoir l’observer. Tout commence par l’observation, l’observation à la fois des cultures, et l’observation des phénomènes sociaux, naturels, les phénomènes de relation et les phénomènes physiques de climat etc... » 24 A la manière des premières constructions vernaculaires qui s’implantaient sur leur territoire de manière respectueuse et douce, l’architecture de l’agence Joly&Loiret s’inspire des caractéristiques physiques du site pour créer leur architecture. On pourrait dire qu’ils adoptent la même intelligence de se morfondre dans le paysage grâce à des logiques formelles et d’utilisation de matériaux découlant du site, se retrouvant dans la sagesse vernaculaire avec une attitude contemporaine. L’architecture crée par elle même, une caractéristique architecturale qui s’inspire directement de la résonance de son milieu environnemental physique et caractéristique. Leur démarche de réellement faire corps avec leur environnement cherche à créer ce qu’ils appellent des « bâtiments-paysages »25. Cette approche est clairement visible, dans leur projet « le grand stade » qui est une requalification du stade équestre du grand parquet à Fontainebleau. Le bâtiment étant dans un environnement fortement marqué par un paysage arboré s’intègre au site dans un premier temps par l’utilisation du matériaux bois, choisi pour la construction, et dans un deuxième temps par son attitude morphologique qu’il adopte pour jouer avec les courbes de niveaux existantes et ainsi 50

24

Référence : extrait de l’interview de LOIRET Paul-Emanuel, le 25/03/2015.

25

Référence : Ibid. interview.


se confondre de manière inhérente à la typographie spécifique du lieu.

26

Référence : Ibid. interview.

Avant le projet, deux choses marquantes du site préexistaient, la forêt de Fontainebleau encerclant le terrain Hippique, et un merlon de terre engazonnée qui marquait une séparation entre le paysage forestier et la zone d’activité équestre. Les deux architectes se sont inspirés de la façon dont les usagers se déplaçaient dans le territoire pour guider et rythmer la logique nouvelle de circulation et l’utilisation du bâtiment à adopter, dans le but de lier le projet, le programme, le stade hippique avec le paysage qui les entoure. Le site étant classé pour sa faune et sa flore, il était donc logique de venir s’inscrire dans ce milieu sans l’altérer. L’acte de créer un « bâtiment-paysage » est un choix pour adopter une attitude architecturale respectueuse de celui-ci. Le nouveau bâtiment vient se placer dans le prolongement du merlon qui venait s’interrompre brutalement face à nous, alors qu’à son autre extrémité, les courbes de niveau allaient mourir doucement dans le paysage végétal. Le projet vient proposer une continuité de l’élément physique caractéristique du projet, ne cassant pas sa dynamique formelle. Les spectateurs peuvent se déplacer dans une dynamique circulaire dans le site et toujours avoir un lien visuel avec le terrain équestre et profiter du cadre paysager, « on a mêlé les promenades, les aménagements paysagers au bâtiment, en faisant traverser les gens par dessus et par dessous l’édifice »26. Le « bâtiment-paysage » adopte un posture graphique dans le territoire ayant des perméabilités visuelles et traversantes au niveau des espaces bâtis, toujours dans le souci de lier les différents milieux architecturaux entre eux, se traduisant par de large ouverture cadrant le paysage et l’activité. 51


Photographie du haut : vue du projet depuit le merlon

Photographie du bas : dispositif de treille mÊtallique recouvert de plante locale en façade SUD


Le choix du matériau est celui du bois, pour dans un premier temps rappeler le lien à la foret proche. Pour le bois en intérieur l’essence choisi est de l’épicéa, et pour la confection des aménagement extérieur une essence de robinier non traitée est mise en place, qui est une essence très appréciée pour ses qualités de durabilité naturelle et qui provient localement du projet (le robinier est une essence d’arbre importé d’Amérique à Paris en 1601). En intérieur le bois est choisi d’être légèrement peint pour gagner en luminosité dans les espaces tout en gardant le caractère brute de l’essence d’épicéa. Dehors comme dedans la structure est visible, et le matériau se décline selon trois enveloppes jouant des rôles importants dans l’attitude du projet à fusionner visuellement et physiquement avec le merlon, puis le paysage. En effet, dans un premier temps, l’enveloppe vient se décliner côté NORD sous forme de gradins qui se poursuit dans la longueur du merlon sur lequel il viennent s’adosser doucement, et donc se poursuivre pour enfin disparaître gradin par gradin. Sur le dessus du bâtiment, un évolution de gradine vient marquer la circulation évoluant dans l’entre-deux paysage/bâtiment. Ce jeu de dessin et de fusion par les gradins et gradines entre nature et bâtiment casse le langage classique de la limite entre un édifice et son environnement, donnant l’impression que le paysage devient bâtiment et inversement. Côté SUD on retrouve le même langage de fusion du bâtiment dans son environnement, mis en scène par un procédé et un matériau différent. La façade est complété d’un dispositif de treille métallique recouvert de plantes locales, venant confondre cette façade végétale à la pente du merlon engazonnée. Ce dispositif se décolle de la façade pour venir créer un espace de circulation couverte longeant le bâtiment, créant un 53


1

2

Plan et coupe :

3

1 Espace hippique 2 Commissariat 3 Restaurant

4

4 Merlon

5

5 Grand parquet 6 Circulation couverte d’un dispositif de treille métallique recouvert de plantes locales façade SUD 7 Circulation en continuité avec le merlon composé de gradines 8 Gradins

7 8 6

Vue sur les gradins et les perméabilités visuelles

44


27

Référence : op. cit. interview.

entre-deux dont l’ambiance renforce le lien intérieur extérieur de ce « bâtiment-paysage », « une relation plus filtrée avec l’environnement extérieur, à travers se filtre végétal qui imprime (…) avec la lumière qui est en contre jour la végétation dans le bâtiment. »27 Le bâtiment de 120 mètres de long et 10 de large (hors gradins) qui compose le prolongement du merlon naturel se compose de trois espaces autonomes, leurs démarcations se font par les différents tunnels qui permettent des échappées visuelles et des possibilités de passage de l’allée piétonne bordant la foret ainsi que la coursive couverte au sud, vers le stade hippique et les tribunes du public. Le premier espace du bâtiment se compose d’un restaurant jouissant d’une vue panoramique sur les terrains de compétition. Le deuxième espace est un commissariat générale et enfin le dernier espace est dédié à l’activité hippique par un centre des affaires équestres.

55



LES GANIVELLES, FEDERATION FRANCAISE DE SURF ET RESTAURANT LIEU : Hossegor (40) CALENDRIER : 2010 MAITRISE D’OUVRAGE : C.G. Des Landes / Mairie d’Hossegor MAITRISE D’OEUVRE: JOLY&LOIRET Agence d’architecture BUDGET : 2 000 000 SURFACE AU SOL : 712 m2 + paysage


Photographie du haut : facçade côté plage se confandant dans le paysage

46

Photographie du bas : espace de terrasse et circulation généré par le dispositif en bois


Le deuxième projet qui révèle un tel positionnement architectural est celui de la fédération française de surf (FFS) et du restaurant gastronomique du chef Jean Cousseau. Ce qui guide l’agence dans la conception du projet était déjà présent sur le site avant son arrivée. En effet le littoral océanique se caractérise par un territoire composé d’horizon, côté terre la plage de sable fin file en longueur sur des kilomètres et de manière frontale, l’immensité de la mer fuit à perte de vue. Mais afin d’ancrer le projet plus fortement dans son milieu, les architectes se sont inspirés des longues lignées de ganivelles qui dessinent le paysage de la côte atlantique landaise. Ces barrières composées de petits piquets de châtaigner et de fil de fer, sont un équipement typique du milieu du littoral océanique, car en plus de rythmer le paysage, elles apportent une utilité topographique et écologique. Leur but est de protéger et maintenir les dunes de sable en bord de littoral contre l’érosion naturelle du vent et de l’eau, et permet d’enserrer de petites plantes fragiles tel que du chèvrefeuille, des clématites et autres plantes de ce type qui fabriquent un paysage écosystémique remarquable. Afin de confondre l’édifice dans son paysage, les ganivelles sont réinterpréter en façade décollée du corps du bâtiment par des lignées de madrier de châtaigner brut (6cm / 17cm), proposant des espaces de transitions entre intérieur et extérieur et venant abriter et mettre en scène des espaces de terrasses et de circulations. Un écartement calculé de sorte à reproduire l’effet visuel des ganivelles et à laisser un écart suffisant pour profiter pleinement de la vue sur l’océan et la plage depuis les espaces intérieurs et les terrasses. Les architectes choisissent de réutiliser la même essence de bois que les ganivelles, afin de pousser 59


Espace central distributeur

Circulations extérieures latérales

Circulations intérieures centrales

De bas en haut : plan, coupe et vue de l’espace central qui marque une transition entre Hossegor, le bâtiment et la plage


le concept au bout mais surtout parce que c’est une essence naturellement durable et qui par conséquent ne demande pas de traitement particulier pour résister plus longtemps aux intempéries et au vieillissement que peut accélérer le sel marin, présent dans l’atmosphère. L’essence de bois provient du Périgord, à 200 km du site. Les espaces intérieurs eux se répartissent en quatre petits bâtiments en RDC formant un ensemble camouflé derrière sa barrière de châtaignier. Ils se répartissent en longueur, pris entre la route qui donne accès à la plage et au programme et les dunes de sable retenues par les ganivelles. Un couloir central organise leur distribution les liant tout en dissociant les programmes différents qui s’identifient clairement et conserve une continuité spatiale voulue entre espace public, privé et paysage. Pour les bâtiments le choix du matériau naturel n’a pas été envisagé, dans le sens où les architectes voulaient garder un langage massif et utiliser un matériau pérenne dans le temps. Cette question ne pose pas de problème si le bois utilisé par les madriers n’est pas une structure porteuse du bâtiment. Mais utilisé en structure dans un contexte particulier, le bois, la pierre ou encore la terre n’est pas la bonne réponse si l’on considère de plus, leur accessibilité possible et proche au site. Le choix ici était de faire recours à un béton massif teinté dans la masse avec une tonalité de couleur rappelant le sable présent, pour retrouver la matérialité du site, toujours dans la recherche d’une démarche de créer un véritable « bâtiment paysage » qui se confond dans son environnement.« Quand tu es en face de l’océan atlantique, tu n’as pas intérêt à construire en bois car au bout de dix ans tu n’as plus de bâtiment, et il s’agissait de construire un bâtiment qui 61


était particulièrement résistant aux intempéries, et donc d’éviter la peinture, d’éviter le bois, et d’intégrer aussi dans le bâtiment sa logique de vieillissement. On l’a sablé avec du sable à haute pression qu’on a teinté, afin qu’il ait déjà la couleur et la texture du sable. Et avec le vent, le sable, le sel qui vont frotter sur le bâtiment, son vieillissement va se fusionner avec sa texture actuelle (...) c’est dans une logique de pérennité... Après il y a du béton, on essaie d’en mettre le moins possible, à l’époque c’est ce qui marchait le mieux pour nous. »28 Ce choix démontre le positionnement de l’agence face aux inquiétudes de l’économie des matières et la sauvegarde des ressources, à l’échelle globale de la pensée de la construction. Elle traduit le fait d’employer un type de matériau, au moment où son emploi est justifié pour être adapté aux conditions présentes, et de ce fait préférer l’utilisation du béton comme recours à un territoire particulier, ou d’autres matériaux n’auraient pas de sens d’un point de vue caractéristique et accessibilité. « Et nous notre positionnement c’est justement, de considérer le monde limité, ce n’est pas nouveau mais on essaie de faire en sorte qu’il y ait moins d’énergie grise dans nos bâtiments, qu’il y ait le moins de matière tout court... Et ce la veut dire travailler avec le local. »29

62

28

Référence : op. cit. interview.

29

Référence : Ibid interview.




CENTRE D’INTERPRETATION DU PATRIMOINE ARCHEOLOGIQUE & RESTRUCTURATION DE LA MAISON KOEPPEL (XVII EME S.) LIEU : Dehligen (67) CALENDRIER : 2014 MAITRISE D’OUVRAGE : communauté de communes d’Alsace Bossue MAITRISE D’OEUVRE : NUNC Architecture BUDGET : 1 949 000 euros HT SURFACE AU SOL : 780 m2


Photographie du haut : vue sur la faille de verre

Photographie du bas : vue intĂŠrieure, finition reprenant le langage constructif Alsacien


3. L’intention architecturale comme dimension culturelle de son milieu. Les projets qui suivent montrent aussi des attitudes de bien s’implanter dans leur milieu rural, mais marquent plus fortement l’intérêt d’utiliser un matériau et un formalisme architectural dans le but de revaloriser une culture constructive en la faisant parler d’elle même et en y intégrant parfaitement les acteurs locaux dans un but de maintient de développement durable local au niveau économique et des savoirs-faire et techniques.

30

Référence : site internet : http://www. nunc.fr/centre-d-interpretation-du-patrimoine-archeologique-de-Dehlingen-67-169.html

Dans le projet de musée archéologique de l’agence NUNC Architectes, le choix des matériaux vient aussi d’un choix de vouloir s’intégrer au contexte rural existant. En effet le projet vient dans la continuité d’une construction alsacienne d’origine, la Maison Koeppel, datant du XVIIe siècle, entièrement rénovée dans son esprit d’origine, le musée se décolle légèrement du logement existant pour créer une faille de verre lumineuse, visible en façade et en toiture par l’ajournement de la couverture en toiture. La structure de la toiture est en forme de « coque de navire inversée »30, à double pans fortement inclinés, pour reprendre la forme traditionnelle de la maison, sur laquelle le projet vient s’accoler. La toiture est continue afin d’unifier et regrouper les deux entités distinctes. En intérieur sous la toiture nous pouvons retrouver un parement en pan de bois, qui est typique du langage constructif de finition intérieur Alsacien. Pour les murs les architectes ont choisi d’utiliser la terre, non pas pour rappeler un matériau anciennement utilisé et oublié, mais afin de reprendre le langage tectonique de la maison vernaculaire Alsacienne. Effet ces maisons traditionnelles sont caractérisées par une toiture à la pente fortement marquée, reposant sur des 67


Mur en pisé monolithique porteur Mur en pisé préfabriqué

Photographie du haut : intégration du projet dans son contexte Photographie du bas : vue du chantier, mur préfabriqué


31

Référence : Id. site internet.

murs de fortes épaisseur, maçonnés en moellons. Le choix de la terre est donc de rappeler ce langage et d’en créer un deuxième marquant un dialogue poétique entre matériaux et usage. Ce qui les intéressait était de retrouver l’image des couches de terre que les archéologues travaillent pour faire leurs fouilles, dans le langage constructif de la manière de monter un mur en pisé. Celui-ci se lit en façade par l’empilement de couches successives. « Le mur est compacté couche par couche dans une continuité horizontale. Cela nous permet d’évoquer les chantiers de fouilles qui mettent à nu les différentes strates des sols et de l’histoire. »31 Enfin l’utilisation de la terre rentre en cohérence avec son contexte rural car nous pouvons voir une multiplicité de matériaux de construction présents dans les constructions anciennes, qui crée un univers particulier, une sorte d’univers créé de patchwork de matériaux. L’utilisation d’un autre matériau tel que le pisé ne vient donc, pas en inadéquation avec le reste. De plus, la couleur, la teinte de la terre se rapproche de celle de la pierre et des briques, on peut noter aussi une similitude dans la manière d’accrocher la lumière. Ce qui crée au final un ensemble matériel cohérent et harmonieux. Le dernier point intéressant dans ce projet est la double technique mise en place pour ériger les murs périphériques du projet. Ils sont composés de deux murs de terre, un premier structurel assurant la décente des charges de la toiture et un deuxième mur autoporteur en extérieur avec une isolation de 20cm de granules de lièges, prise entre les deux murs. Le mur porteur utilise la technique traditionnelle de construction d’un mur en terre, utilisant les techniques de banchage anciennes et faisant évoluer le mur couche par couche. Le mur extérieur soumis aux intempéries 69


est lui préfabriqué de blocs de pisés de 1,25 x 0,60 x 0,30m. On peut signaler l’intelligence des concepteurs qui ont associé le deux techniques constructives pour répondre à des demandes différentes et précises, venant en cohérence avec leur concept énoncé.

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PROJET RURAL DE PROXIMITE LIEU : Marsac-en-Livradois (63) CALENDRIER : 2013 MAITRISE D’OUVRAGE : Commune de Marsac-en-Livradois MAITRISE D’OEUVRE : Boris Bouchet Architectes BUDGET : 700 000 euros HT SURFACE AU SOL : 405 m2 AUTRES : Projet lauréat du prix national des architectures en terre crue 2013 & Prix de la Première œuvre 2013, décerné par le Groupe Moniteur


Le deuxième cas d’intention architecturale dans le but de valoriser une culture de son milieu est un projet du jeune architecte Boris Bouchet. Il révèle une pertinence de construire en terre dans son projet d’espace rural de proximité à Marsac-en-Livradois, afin de revaloriser un matériau anciennement utilisé dans le village et ses alentours, bien souvent décrit comme inesthétique et non noble aux yeux des habitants qui le recouvraient d’enduis. Le pisé était donc considéré comme un matériau de construction à proprement dit, sans valeur esthétique. Dans se projet, Boris a pour volonté de lui donner un nouveau regard contemporain afin de le faire accepter comme qualité d’une culture constructive locale mais aussi nationale qui relève du savoir de nos pères et de la technique de nos maitres. Il énonce par cela un questionnement profond sur son acte de bâtir un mur en pisé, porteur de cultures constructives anciennes issues de deux références. La culture et technique vernaculaire des savoirs des bancheurs de terre qui ont permis à la technique du béton armé de nos maitres (les architectes modernes) de se développer et créer une culture nationale en France. Boris cite Kenneth Frampton, « Le béton s’est développé particulièrement en France et en Allemagne parce qu’il y avait une tradition de pisé, c’est à dire qu’il y avait des maçons qui savaient faire des banches, et du coup le béton armé s’est beaucoup développé en France (…) grâce à la technique des bancheurs »32 Par ce questionnement il demande quelle serait l’écriture contemporaine de nos architectures : « Existe-t-il une culture associée à ces lieux ? Sur vos écrans, pour ceux qui la cherchent, une culture globale existe. Sur les murs de vos églises et châteaux, pour ceux qui la protègent, une culture passée existe. Mais, aujourd’hui, quel espoir avez-vous de voir une culture contemporaine naître 74

32

Référence : BOUCHET Boris, Article : Pères et Maîtres, p.1.


33

Référence : Id, p.1.

de ces lieux ? Sans culture, quel espoir avez-vous de construire une architecture contemporaine ? »33 La construction d’un mur en pisé calquée sur le savoir de nos pères et en lien avec les techniques de nos maitres, participe à l’écriture d’un patrimoine architectural contemporain, qui induit l’harmonie du projet inscrit dans son milieu environnemental à la manière du Genius Loci, mais aussi son existant bâti qui constitue le paysage rural et donc l’esthétique logique que montre notre ère contemporaine. On peut y voir une forme de réflexion qui poserait les bases d’une architecture durable, tant pour l’institution humaine qui voit la continuité logique d’une culture intrinsèque, propre à sa manière d’évoluer dans le monde ; et le fait est que l’architecture instaure un langage proche de son environnement, par l’utilisation de matériaux naturels venant d’un lieu proche, crée la durabilité environnementale et la pérennité du bâtiment. L’utilisation de la terre dans ces deux projets se montre comme l’expression logique de contemporanéité d’hier et d’aujourd’hui. Venant en accord avec deux volontés de faire corps avec son existant matériel et formel, revalorisant sa spécificité. L’un reconsidère un langage formel propre à un milieu rural Alsacien traduit par les matériaux choisis, et le deuxième reconsidère un matériau présent dans la culture architecturale mais oublié et déploré.



La partie qui suit se consacre à une réflexion portée sur deux types de conceptions. L’une ayant pour volonté d’inscrire son projet dans un style caractéristique d’une région, tombe dans l’impertinence du folklorisme qui relève du néo-régionalisme. L’autre dans un but de marquer l’originalité d’une construction très « moderne », fabrique une architecture faussement contemporaine.

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PARTIE II _ ENTRE NEOREGIONALISME FOLKLORIQUE & PASTICHE CONTEMPORAIN


Une architecture au concept folklorique, illustre une sorte de nostalgie d’un genre ancien. La poussant en gage de qualité et de reconnaissance qualitative, à créer des constructions faussement représentatives d’un style assimilé à un territoire. L’architecture doit être construite en rapport avec son contexte, mais surtout par rapport à son époque. Le langage vernaculaire ou devrais-je dire le « style vernaculaire » bêtement recopié, pose des problèmes dans le sens où il ne répond pas aux attentes contemporaines. La construction étant détachée de son contexte économique, culturel et social historique à donc valeur de copie, elle relève donc de l’illusion. Or une illusion nous montre ce que nous voulons voir, une vision bien erronée du monde. Selon le philosophe Marc Anglaret, il en existe deux types : la première affecte l’illusion des sens, représentative du mirage, du trompe l’oeil ou l’illusion d’optique. Elle « pose le problème de la confiance que nous pouvons faire en nos sens »34 ; la deuxième est l’illusion de l’esprit, celle-ci nous renvoie à être le jouet de l’illusion qui nous donne une croyance issue d’un désir. « Il se fait des illusions »35 autrement dit, la personne « prend ses désirs pour des réalités »36. Une fausse réalité qui soulève une question beaucoup plus profonde, que nous pose Marc Anglaret dans son écrit sur l’illusion : « A partir de ces remarques se pose une question philosophique : jusqu’à quel point l’homme peut-il être la “victime” de ses illusions ? On pourrait répondre : jusqu’à la folie, si l’on veut admettre que le fou se définit comme vivant justement dans un monde illusoire et non dans ce qu’on appelle la réalité. »37 Dans un certain cas, on peut considérer l’architecture folklorique ou néo-régionaliste comme étant un moyen 80

34, 35, 36 & 37

Référence : ANGLARET Marc, L’illusion, p.1.


38

Référence : BIASE Alessia, ROSSI Cristina, Chez nous, territoires et identités dans les mondes contemporains, p.164.

39

Référence : Ibid. p.166-167.

commercial des différentes régions pour vendre au touristes, une image rustique, kitch de la vie locale, « le terme de folklorisation provient du mot folklore (science du peuple) (…) il faudra retenir la folklorisation comme étant non seulement la manifestation d’un pittoresque superficiel, mais aussi comme le moyen d’orienter la perception d’un territoire. C’est à dire mettre en exergue, de façon exogène et endogène, une composante de l’un des trois sous-concepts de la société locale (identité culturelle, identité sociale, identité territoriale). »38 l’architecture agit comme un packaging vendant une culture illusionniste dépourvue de ses réelles caractéristiques fondamentales. Le fait de chercher à folkloriser des villages, ramène à considérer une identité architecturale qui nous repositionne dans la dialectique ambigue d’appartenance identitaire. Puisqu’elle cherche à faire paraitre une identité et non une spécificité. Celleci peut mener à certaines dérives et comportements racistes des populations occupant ces architectures. En effet on remarque pour les populations que, « c’est quand l’identité est mal affirmée, pas assez ferme, qu’elle cherche à se conforter par l’hostilité aux autres. Un peu d’identité rend sauvage et raciste, beaucoup d’identité ouvre à l’altruisme. »39

81


1. Le développement du néo-régionalisme folklorique dans le milieu montagnard. Il est intéressant de regarder les programmes de logement constituant un but touristique. En effet, ce type d’opération cherchant à retranscrire un style local néo régionaliste, créent des architectures folkloriques faussement représentatives du territoire. L’idée qui amène à créer une architecture qui esquisse fièrement une ressemblance à l’architecture typique d’une région, n’est ni plus, ni moins une étiquette commerciale. Intéressons-nous à l’évolution des aménagements de montagne où du fait d’une demande touristique grandissante, une forme de folklorisme commercial s’est clairement ancrée dans le paysage rural de ce milieu bien spécifique. En effet, le problème qui touche les milieux ruraux des montagnes, est de voir leur cadre de vie originel disparaître petit à petit, par des constructions de nouvelles petites villas imitant le style vernaculaire local. Pour comprendre la modification qui touche ces milieux ruraux de montagne, il faut en revenir aux années 60 qui marquent le début d’intérêt pour les villages d’altitude par les touristes. Ainsi l’activité du ski déjà présente, commence à se développer de manière plus large comme un sport de loisir, chez les populations aisées pouvant se permettre de partir en vacances. De plus en plus, les villages de haute montagne s’équipent de remontées mécaniques. Par conséquent, ces aménagements attirent de plus en plus de personnes. Au début des années 60, comprenant le potentiel touristique et économique de ces territoires. L’état lance 82


40 & 41

Référence : LY O N - C A E N Jean-François, 1975/2007, Des trente glorieuses aux trente calamiteuses ou le triomphe de la diversité … de l’architecture raisonnée à l’architecture commerciale ?, p.1.

42

Référence : Ibid. p.1, terme désignant un concepts qui met en place un point de convergence des pistes.

43

Référence : Ibid. p.2.

« le plan neige »40 qui développe le concept de « station intégrée conçue comme un prototype de développement urbain calibré par l’importance du domaine skiable »41. Afin de mener à bien ce plan d’aménagement de montagne, une stratégie met en place un croisement disciplinaire entre un promoteur, un maître d’oeuvre unique, une collectivité locale d’où le projet voit le jour et enfin l’état qui se charge d’animer et de contrôler le projet. Ces projets mettent au jour un urbanisme fortement radical, de manière à gérer au mieux les flux de personnes. L’immeuble collectif est la typologie choisi, afin d’optimiser l’espace avec le plus de logements possible, tout en les faisants tous profiter de la vue sur le paysage montagneux. Les bâtiments sont concentrés en un point de façon à les relier entre eux autour des « grenouillères »42. Les concepteurs mettent au point des constructions de très grandes tailles qui se basent plus sur leur forme et leur apparence que sur leur rapport d’intégration au site. Plusieurs séries de construction montrant des qualités différentes et variés dans les formes utilisées. Par exemple, l’architecte Jacques Labro propose à Avoriaz, pour le quartier des Dromonts en 1966, « d’accorder l’architecture avec la nature, avec des constructions sculptures, pyramides fragmentées, bâties sur des plans en éventails, couvertes de façades inclinées, proposant une volumétrie en relief couverte d’une peau de bois, sans cesse différente selon le modèle du terrain. »43 Mais dans les années 70 la vision de la société sur les stations de ski change, notamment avec l’évènement marquant de Mai 68 et le choc pétrolier de 1974. Les concepteurs sont alors accusés de ne pas tenir compte de l’environnement dans les projets qu’ils réalisent. L’évènement marquant ce changement de pensée, est la 83


Photographie de la construction sculpture, pyramide fragmentée, bâtie sur des plans en éventail, par Jacques Labro et son associé ORZONNI Jean-Jacques, à Avoriaz, quartier Dromont

Photographie lointaine du nouveau quartier de Valmorel, avec des constructions néo-régionalistes


44

Référence : Id. p.2.

45

Référence : Id. p.3.

déclaration du Président Valéry Giscard d’Estaing en 1977, à Vallouise « Le citadin vient en montagne pour fréquenter des paysages façonnés par des millénaires de persévérance paysanne et des modes de vie différents de la ville »44, cette déclaration s’accompagne d’une réelle envie des habitants de montagne de bénéficier d’un développement touristique différent. Ils souhaitent un maintien et une pluralité d’activités de loisirs, une meilleure gestion des flux touristiques afin de trouver un équilibre entre développement économique et préservation du cadre de vie en milieu montagnard. L’état change la lignée des modes de conception des aménagements en montagne, et les concepteurs pensent les nouvelles constructions comme des hameaux, complétant la continuité du tissu bâti d’origine, « Pour ranimer un vieux village, on préfère greffer des infrastructures nouvelles sur la structure existante, délaissant des projets de station satellite en haute altitude imaginés auparavant. » « Les gens partent en vacances, il leur faut un vrai dépaysement, un grain de folie... Formaliser par une architecture de décor. »45 Par cette déclaration, le ton à adopter en matière de mode de conception est donné. Et c’est par cette pensée de l’architecte Michel Bezançon que se développe une architecture néo-régionaliste conduisant à des constructions folkloriques. Elles semblent être physiquement ancrées dans leur contexte bâti, or les logiques de cultures constructives locales, de développement économique du lieu créées par ces constructions ne rentrent plus dans les logiques de concevoir par rapport au spécificités locales. Un système qui lance les promoteurs à préférer une exploitation locative directe par leurs filiales de gestion, « Ils développent le concept de produits séjours, commercialisés dans des espaces imitant l’image des 85


Photographie du haut : « immeubles chalets » à Valmorel

Photographie du bas : décoration en trompe l’oeil dans le centre de Valmorel


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Référence : Id. p.4.

vieux villages. En réalisant ces ensembles immobiliers conçus comme de faux vieux villages. »46 Dans la station de Valmorel par exemple, un petit village de montagne qui se trouve sur un domaine s’étendant sur 3 600 hectares et une altitude de 1 400 à 2 832 mètres. Ce village met en scène une vraie architecture néo-régionale. Les constructions sont des combinaisons de couvertures de lauzes à deux versants reprenant la forme traditionnelle, de la pierre en parement pour reprendre les soubassements anciens, une quantité de bois déployé et hautement ornementé. Cerise sur le gâteau, les décors en façades sont réalisés par des trompes l’oeil. Le problème qu’engendre ce type d’architecture est la banalisation de l’architecture néo-régionale qui se répand sur ces territoires, et par conséquent l’effacement de l’architecture vernaculaire spécifique à ce milieu montagnard. Comment peut on prétendre faire de l’architecture, en proposant aux usagers de vivre à l’intérieur d’un « décor ». Cette vision et totalement contradictoire à celles précédemment analysées. Dans ce cas là, les concepteurs ne recherchent pas à intégrer et révéler la spécificité locale par une attache à l’environnement et la culture locale, dans le but de créer un paysage culturel montagnard cohérent avec son existant, sans lui faire défaut. Le but est donc, purement commercial, c’est en quelque sorte réduire l’architecture à un produit de consommation pour lequel on prend soin de l’image qu’elle renvoie, uniquement pour que le produit se vende à l’instar du travail de packaging que pourrait faire un designer.

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Photographies : deux types de maisons contemporaines présentées sur le site de Maison Phénix, dans la rubrique « Tendance »


2. Le « pastiche contemporain ». Mais aujourd’hui l’architecture folklorique n’est pas l’une des seules déviances de domaine, l’autre type est de manière beaucoup plus générique, qui se répand sur la totalité du territoire, l’uniformisant du Nord au Sud et faisant totalement fi des spécificités locales, c’est le « pastiche contemporain ». Pour beaucoup de personnes le terme contemporain renvoie à un style, donnant naissance à un effet de mode. Beaucoup de descriptifs publicitaires de promoteur, utilisent le mot contemporain comme un terme qualifiant une architecture de qualité actuel, en terme de confort et de distinction architecturale. Ce faux langage contemporain se lie ensuite physiquement en façade et dans la décoration intérieure qui est mise en place. Les agences de promoteurs utilisent un type de construction qu’ils déclinent sous différents styles suivant l’envie du client. Il suffit d’aller sur le site de « maison phénix » par exemple pour voir un choix de trois maisons types. (classique, tendance et concept) La maison tendance qui s’apparente à la maison contemporaine est donc identique à celle proposée dans la rubrique « classique » (style traditionnel) mais à la seule différence qu’un jeu de bandeau gris sur la façade blanche, vient lier géométriquement deux fenêtres. Pour aller plus loin dans le concept « contemporain » , bien souvent le garage se rattache à la construction, en mettant en scène un cube d’une autre couleur dans le but est de contraster avec la volumétrie et la couleur de la partie habitable. Le cube est pour ces vendeurs, la forme géométrique représentative de l’architecture contemporaine. Cette conception se base sur des clichés du mouvement 89


contemporain, or définir l’architecture contemporaine aujourd’hui assez précisément reste difficile. Il n’y a plus de traits ou concepts caractéristiques tels que pour l’architecture classique, baroque ou moderne qui portent la trace et la représentation caractéristiques de leur époque. L’architecture contemporaine n’a pas une image, un style qui se décline de manière répertoriable. Elle se compose de la créativité et la vision qu’a l’architecte face au monde, et surtout des propositions qu’il met en avant pour répondre au enjeux que pose notre société contemporaine en terme d’attente des usages et des contraintes écologiques qui caractérisent notre époque, illustrant un positionnement architectural cohérent. Or ces constructions ne peuvent répondre aux attentes actuelles, leur conception ne sont qu’un coup de peinture sur un modèle générique, étant donné que la maison est pensée comme un modèle, un objet qui doit être répété facilement, rapidement et à moindre coût, elle ne prend pas en compte son existant pour réaliser une intégration de qualité dans le paysage et d’ancrage sur le terrain qu’elle occupe. Pour ce cas on peut aussi parler d’effet de packaging, le concepteur essaie de toucher et attirer sa clientèle sur la possibilité d’acquérir un produit neuf, suivant les tendances actuelles, leur donnant l’impression d’obtenir un logement à la pointe de la temporalité, qui les inscrit dans un cadre architectural représentatif des normes de la société et technologiques contemporaines.

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3. Analyse de cas : un centre commercial étrangement kitch. Dans cette deuxième sous partie, je choisi d’analyser un équipement public fortement représentatif d’un « pastiche architectural » brouillant les limites entre architecture et décors. Cette équipement présente certaines qualités d’usages malgré un traitement folklorique d’une fabrication d’architecture totalement fausse. L’équipement choisi est un centre commercial et notamment sa galerie marchande qui est pensée comme une rue en continuité avec l’extérieur. Le bâtiment de très grande dimension se compose d’une galerie marchande de 11 085 m2 et d’une surface de vente de 15 913 m2 soit au total 26 998 m2 de surface commerciale. L’entrée dans le bâtiment est possible par quatre grands hall (deux en façade NORD EST, une en façade SUD-EST et la dernière en façade NORDOUEST). Ces quatre grandes entrées permettent de répartir les flux entrant et sortant d’usagers, qui sont directement guidés dans la galerie commerciale. La circulation se fait principalement par un grand axe NORD-OUEST SUD-EST, permettant de connecter les boutiques de la galerie marchande, les deux entrées dans la zone de vente de l’enseigne et gère les clients sortant des caisses. La galerie marchande est donc construite et rythmée par la présence d’un « front bâti », une façade continue composée de plusieurs styles de maison de village provençal. Tout est fait de manière à reprendre les composants d’une rue d’un petit village. En effet la façade qui dessine un « front bâti » accueille donc les commerces en rez-de-chaussée tels que pharmacie, pressing, boulangerie boutique de prêt à porter et 91


restaurants. Les magasins se prolongeant en R+1 ou R+2 accueillent que très rarement une extension pour des bureaux, et sont de manière quasi générale, présents qu’en tant que décor. Deux espaces aux qualités de place publique sont facilement repérables, le premier est une place à l’entrée NORD-OUEST où trois restaurants la cerne, ainsi que deux commerces tel qu’un fleuriste et un bureau de tabac. Le moindre détails pouvant rappeler un élément d’un village y est soigné. Effectivement une fontaine vient marquer le centre de la place et articuler la circulation, accentuant le déplacement circulaire qui borde les terrasses animées des cafés et restaurants. Accrochés aux murs, on peut retrouver les plaques en acier bleu avec les inscriptions du nom de la rue ou de la place en blanc à la manière d’une rue réelle. On peut y retrouver des statues encastrées dans les murs, des lampadaires dans les espaces de circulation, des bancs, de la végétation, des bouches d’égouts et les enseignes des commerces affichées en façade (losange rouge du tabac ou croix verte de la pharmacie) qui participent ainsi à créer l’atmosphère d’une ruelle de village. Sur la deuxième place distincte, on retrouve les mêmes détails de signalétique et mobilier urbain, mais l’élément marquant n’est pas une fontaine mais un carrousel ou la sirène de départ et les cris de joie ou de déception des enfants s’en font retentir. L’effet extérieur-intérieur est accentué par de grandes ouvertures en toiture, créant un apport de lumière zénithale naturel, créant un ciel artificiel. L’illusion se fabrique tellement bien qu’il est intéressant de voir comme ces espaces fonctionnent qualitativement de la même manière qu’un vrai espace public urbain, tellement bien, que des groupes de jeunes s’y donnent rendez-vous pour passer un 92


moment ensemble assis sur un bancs, le rebord de la fontaine de la place des restaurants ou en terrasse avant de faire leur emplettes. L’espace de la galerie devient une réelle continuité de l’espace public extérieur grâce aux activités commerciales de la galerie et de la grande surface qui l’animent. L’autre effet qui permet l’animation est directement induit par l’espace accordé à la circulation et l’appropriation que génère le mobilier, le carrousel et les terrasses qui permettent le regroupement. Bien que cette architecture entre décors et réalité participe à un usage des espaces agréable, elle reste quelque peu étrange et très vite la fausseté s’en fait ressentir, la sensation d’évoluer dans un lieu fabriqué de toutes pièces par des subterfuges peut avoir un ressenti gênant. En plus d’être faux, le décor représente une architecture qui n’est pas représentative de son milieu. Les constructions représentées s’apparentent plus à un style provençal, caractérisé par différents enduits de couleur chaudes, protégés par plusieurs rangées de génoises au sommet de la façade, des rambardes imitation fer forgé devant les fenêtres et balcons. L’espace de la galerie est donc un endroit ou certaines personnes peuvent s’arrêter, s’y donner rendez vous, mais pas de manière spontanée et exclusivement pour les qualités du lieu. De manière générale l’espace de la galerie est utilisé, car c’est un confort qui se rattache à l’activité commerciale. On ne s’y rend pas comme on se rend dans un parc ou un vrai espace public pour profiter du lieu. La plus part des personnes n’y prêtent pas attention et l’utilisent vraiment comme un espace de circulation. Car ce qui est appréciable quand on se rend dans cette grande surface, est la facilité de s’y rendre et de s’y garer. Tout y est à portée de main et on y trouve un grand choix de magasins. 93


Commerces de la galerie marchande

Circulation de la galerie marchande

Surface de vente de l’enseigne

Deux zones assimilables Ă des places publiques


Photographie du haut : vue sur la place des restaurants

Photographie du bas : vue sur la place du carrousel


La galerie qui montre quelques qualités d’usages induit essentiellement par l’attraction commerciale et quelques dispositifs spatiaux ne suffisent pas à créer un réel lieu qualitatif, représentatif d’un milieu et d’une architecture spécifique de ses milieux, le style ne représente pas l’architecture vernaculaire locale donc ne correspond pas à son environnement et par conséquent ne rentre pas dans une logique d’appartenance culturelle architecturale qui met en place un matériau et une culture constructive locale. On crée un style d’enduit de pierre avec un autre matériau issu du commerce, du contreplacage cherchant à faire un effet de vrai.

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Dans cette troisième partie nous verrons une démarche architecturale et toutes ses caractéristiques des choix entrepris dans un projet rural, qui me permet de le prendre comme l’exemple de démarche, qui est pour moi la plus manifeste d’une revalorisation de la spécificité architecturale d’un village Français. Le projet prend partie des cultures sans tomber dans le folklorisme local et réintègre une vraie sollicitation d’entreprises et artisans locaux adoptant une attitude de développement locale.

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PARTIE III _ UN PROJET CONTEMPORAIN REPRESENTATIF DE SON MILIEU


1. Marsac-en-Livradois, un petit village spécifique à la vallée du Livradois forez Le village de Marsac-en-Livradois est une commune du Puy de Dôme en Auvergne, comprenant 1450 habitants pour une superficie de 48,46 km2, soit une densité de 30 habitants au kilomètre carré. Ce petit village profite d’un cadre paysager fortement marqué par la campagne, de grandes étendues de champs cultivés, de forêts et de montagnes lointaines. La commune est un fort axe de circulation NORDSUD, la nationale D906 qui relie le Puy-en-Velay, Tiers et Vichy. Le village se trouve par cet axe à 7 km au Nord d’Arlanc et à 9 km au sud d’Ambert. Dans ce petit village il est difficile de distinguer un centre, où bien de qualifier avec justesse chaque espace public, tel qu’une place marchande, un axe, une rue commerciale. Rien ne bouge, et l’atmosphère dans les rues se fait calme. Le village est donc une composition de constructions sorties pêle-mêle tout au long tu temps. Les rues, les places ne font pas l’objet d’une composition tramée où organisée selon le paysage, des tracés constructeurs etc... A la traversée de ce village, on peut vite y sentir l’aspect tectonique des constructions au caractère fortement minéral. En effet les constructions vernaculaires présentes sont constituées pour la plus part d’un soubassement en pierre de taille de plus d’un mètre de hauteur et d’une partie en pisé qui constitue le reste du mur, où repose une charpente traditionnelle en bois. On retrouve donc le langage classique de la construction en pisé où le soubassement en pierre constitue une protection pour le pisé contre les remontées d’eau par capillarité. Mais le pisé dans ce 102


village se présente sous d’autres formes et pour des fonctions différentes. Beaucoup de maisons sont bâties en pierre initialement sur un niveau, et le pisé constitue une technique de surélévation qui démontre un besoin d’agrandissement du logement au fil du temps et des besoins usuels. Enfin le pisé constitue aussi une technique d’époque, économique et rapide car il est utilisé pour construire des murs d’enceinte délimitant les propriétés des habitants. L’utilisation de la terre dans la vallée du Livradois forez vient de l’accessibilité facile de cette ressource et de sa qualité à répondre à la technique du pisé grâce à ses propriétés de composition physique. Nous pouvons remarquer comme le souligne l’architecte du projet Boris Bouchet, les habitants construisaient beaucoup en pisé dans la vallée et dès les premiers coteaux des montagnes du Livradois Forez, les populations construisaient en pierre, du fait de la raréfaction de la qualité de la terre bonne à piser et de l’abondance de pierre composant les sols des collines. La technique constructive du pisé dans ce village et dans la région est donc une technique marquante de la culture spécifique à ce milieu, mais on peut voir qu’avec le temps les savoirs se sont perdus, les deux traces les plus significatives de cette perte de savoirfaire viennent d’une part de l’abondance de son utilisation au profit d’autres techniques tel que le béton et tous ses dérivés du commerce de la construction ; et deuxièmement l’acte contradictoire de recouvrir un mur en pisé d’un enduit en ciment provoquant de fortes dégradations de la matière, du à une accumulation d’eau entre le mur et son enduit qui change l’état de la matière du mur de solide à plastique voire liquide, le mur finit par s’effriter ou tout simplement tomber. 103







Comme nous l’avons vu précédemment, c’est ce contexte culturel social et constructif, qui amène Boris Bouchet à utiliser le matériau et la technique du pisé pour réaliser son projet d’équipement rural de proximité. Le fait que ce projet est pour moi celui qui remplit le mieux les critères d’une revalorisation spécifique de son milieu, autrement dit qui porte une attention à son implantation dans le lieu, utilise des matériaux qui sont présents sur site et qui font partie d’une culture constructive issue de savoir-faire locaux. Et pour aller plus loin, en plus de tous ces critères visibles, le projet entreprend un processus de développement local du fait de l’implication d’entreprises et d’artisans dans la réalisation du projet qui est du à l’attention éthique que porte l’architecte dans ses choix de conception, qui pour cet exemple, fait que les matériaux rentrent dans une logique locale, de l’extraction sur site jusqu’à la pose sur chantier. Toutes ces procédures posent les bases solides d’un maintien d’appartenance à un territoire donné, tant dans l’image que le bâtiment reflète, que dans l’économie et les savoirs qu’il génère et maintient.

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2. Un projet représentatif des spécificités rurales de Marsac-en-Livradois, prenant en compte ses milieux environnementaux, socio-culturels & socioéconomiques. Afin de proposer une analyse plus complète sur le projet, que celle émise précédemment. L’analyse tournera autour de trois points issus de la grille du projet Versus. Cette étude permettra donc de voir les points importants, et les détails qui servent à revaloriser une spécificité architecturale rurale locale. L’analyse parcourra l’approche socio-culturelle qui a participé à le construire et qu’il reflète, l’approche environnementale que le projet adopte et enfin son approche socio-économique. Le projet d’équipement de proximité de Marsacen-Livradois est à l’initiative de la Communauté de Commune qui a choisi de créer un équipement afin de maintenir un confort de commodité à ses habitants. Le programme se compose de locaux médicaux à l’étage et d’une supérette en rez-de-chaussée. Les locaux médicaux accueillent donc aujourd’hui, trois infirmiers associés, un nouveau médecin, qui constituent le groupe de travail sur le projet. Puis une sage-femme et une jeune médecin ont rejoint les locaux peu de temps après grâce à deux locaux qui avaient été rajoutés au programme pour prévoir une probable évolution. Pour l’architecte, le projet marque un élément majeur d’activité commerciale et de services. De plus par l’attraction des flux qu’il génère, il devait garder un langage classique de la construction locale, c’est à dire du pisé en rez-de-chaussée et du bois à l’étage (langage constructif de la ferme) mais devait avoir tout de même une posture formelle et constructive marquante à l’échelle du village, de manière à être facilement 110


repérable, s’inscrivant dans une symbolique de repère et de signal rural.

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Référence : BOUCHET Boris, interviewé le 17/04/2015.

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Référence : BOUCHET Boris, Milieux ?

A l’échelle du village, le bâtiment s’insère en dent creuse, de manière à redessiner le front bâti de l’axe routier traversant le village, et par son dessin dans le tissu bâti, adopte une posture soulignant un lien par le prolongement d’un axe piéton, liant bout à bout l’axe routier, la place de l’église et l’édifice religieux, se trouvant au centre du croisement entre cette orthogonale et l’axe routier. Cette gestion de restructuration spatiale à l’échelle du village et la recherche d’une attitude valorisante face à son existant, le projet se montre, se démarque conceptuellement parlant, pour en faire un équipement majeur de Marsac, mais ne vient pas à l’encontre du paysage culturel rural, comme le souligne l’architecte « en terme d’expression ce bâtiment ne pouvait pas ressembler à une ferme pour nous et pour les élus, c’est à dire que ce bâtiment devait être symbolique, une sorte de ‘‘ landmark ’’, alors on ne voulait pas faire un ‘‘ zigouigoui ’’ rose, évidement. Malgré tout il fallait qu’il soit marquant. »47 Comme il était évident de réutiliser des matériaux locaux et présents dans son entourage, le bâtiment ne devait pas être plus haut que les constructions environnantes afin de respecter le cadre bâti et ne pas créer une domination de ce nouveau projet face à son paysage culturel. Mais comme explique Boris Bouchet « on ne peut plus construire comme avant tout de plain pied »48, ce sont donc deux logiques qui régissent le gabarit du projet, une logique culturelle et une logique contemporaine de densification. C’est pourquoi le bâtiment regroupe deux programmes différents plutôt que de construire un bâtiment différent, comme il était prévu de faire avant ce projet. Cette logique vient d’une réflexion du changement 111


Photographie du haut : vue de la façade OUEST depuis la départementale D906

Photographie du bas : vue de la façade EST depuis le parking arrière, côté centre du village


spatial des milieux environnants dans le sens où, pour l’architecte le bâtiment allait attirer des populations de différents milieux créant des flux et des échanges variés. L’équipement devait donc avoir une esthétique particulière révélatrice d’un point de rencontre et de convergence entre les différents milieux territoriaux. Ce choix de vouloir lier le projet au paysage culturel et à la fois de le démarquer pour qu’on puisse le distinguer, se retrouve dans le choix des façades qui bordent les deux espaces différents à rattacher au projet. Un concept de double lecture des façades OUEST & EST se dessine. A l’OUEST face à la départementale, la façade est plus ouverte et présente des lignes et des surfaces de murs épurées venant contraster avec les compositions classiques des habitats vernaculaires environnants, dans le but justement de marquer le décalage esthétique et donc créer le signal et l’étonnement. Le traitement de l’élévation est naturellement soigné avec une subtilité de composition géométrique et de matériaux, la rendant d’un genre autre mais ne choquant pas. Ce traitement là le fait tout de même rentrer en harmonie avec son environnement. De l’autre côté, où les vues depuis le bâtiment tendent vers le village, à l’EST, la façade est une composition radicale de cadres de bois, apportant une lecture visible des usages et de l’espace dédié à l’étage. En effet, un cadre correspond à un espace et un usage médical, le plan du bâtiment peut facilement s’imaginer par la lecture de la façade. Cette attention à une architecture nettement composée, provient de la démarche qu’adopte Boris Bouchet à faire de l’architecture, une discipline qui met en valeur l’importance d’un plan bien dessiné, régit par des proportions et des compositions harmonieuses.

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Du fait de son positionnement le long de l’axe routier le plus emprunté, sa connexion réfléchit par rapport au reste du village et son positionnement proche d’un bar restaurant et d’autres commerces n’existant qu’à cet endroit du village, le projet contribue à une cohésion et un échange social entre les habitants de Marsac et des habitants des villages alentours. Ce flux de population est aussi du au programme que regroupe le projet, en effet la supérette « leader price » apporte les besoins en nourriture du village, et j’ai pu constater lors de la visite du village et du projets que l’entente entre commerçant était positive autant dans les relations humaines que commerciales, la supérette ne vend pas certains produits qu’il est possible de retrouver dans d’autres commerces tel que le pain. Cette entente est contradictoire aux systèmes de commerces en ville où règne là loi de la libre concurrence. Cette cohésion sociale et commerciale est provoquée aussi par l’envie des habitants de garder des commodités de vie par la proximité des services, pour pouvoir se nourrir, se soigner et se distraire sans avoir à faire plusieurs kilomètres à chaque besoin ou envie. Pour ce projet il est donc évident pour le concepteur d’utiliser la terre afin de revaloriser un matériau issu d’une culture constructive vernaculaire nettement repérable dans le contexte du village qui est oubliée et presque perdue. L’intérêt du choix de ce matériau réside dans le fait que l’architecte fait appel pour la construction des murs en terre, à une entreprise de maçonnerie local de Mr Grenier (trois salariés) épaulé d’un Piseur de la Loire, Nicolas Meunier réputé pour ses rénovations de tout type en pisé. Le Piseur transmet ses savoirs à l’architecte pour le guider dans ses choix de construction et pour vérifier la faisabilité du projet, de même manière il guide et transmet ses savoirs à 114


l’entreprise de maçonnerie. Mais dans un même temps, lui même apprend par le chantier à réaliser un bâtiment en entier, chose qu’il n’avait encore jamais fait jusque là. On peut voir que la coopération de ces acteurs de la construction met en place un processus de transfert des savoirs pour la technique du pisé, qui participe à la transmission de culture constructive ancienne. Le choix de maintenir une culture locale constructive et sociale est important pour Boris Bouchet afin de respecter le paysage culturel du village et surtout de créer un réel développement durable de l’architecture en terme de cohésion sociale et du maintien du confort d’habiter dans ce milieu rural. Créant une esthétique et un langage architecturale qui sort de ce qu’il appelle les architectures catalogues. Une pensée proche de celle du régionalisme critique de Kenneth Frampton, qui adopte de façon critique les qualités progressistes de l’architecture moderne tout en prenant attention au contexte dans lequel l’architecture se situe. Il assoie ses arguments par le recours à la phénoménologie, nous parlant de climat, lumière, topographie etc... Pour Boris le travail est similaire mais il y ajoute la notion des milieux afin de réellement ancrer le projet dans les différents milieux dans lequel il évolue, tout en prenant en compte les enjeux et les variations que peuvent apporter les variations d’échelles de ceux là. L’utilisation de matériaux naturels est donc un bon moyen d’ancrage du bâtiment à sa culture sociale et constructive. L’utilisation de ces matériaux montre d’autres qualités et possibilités à répondre à l’approche environnementale qu’ils prennent en compte. Par l’utilisation de la terre et du bois le projet adopte une démarche respectueuse du lieu dans lequel il s’implante, du fait d’un accord de matière avec les 115


Photographies : chantier du bâtiment, vue de l’angle SUD-OUEST du bâtiment pendant la construction et après.


bâtiments existants dans un premier temps et dans un second, accorde un respect environnemental en utilisant des ressources disponibles localement. L’essence de bois provient des exploitations forestières du Livradois Forez, exploitées par une entreprise qui se charge à la fois d’extraire la matière première, de la transformer et la poser sur le chantier. La terre provient du village étant donné qu’elle est issue des anciennes constructions et murs délabrés du village auxquels on ne pouvait pas apporter de réparation ou rénovation. Ce choix de réemploi du matériau terre des constructions délabrées, vient du manque de connaissance de l’artisan qui a réalisé la construction du projet. En effet Nicolas Meunier est le seul piseur de la région travaillant la terre, pour des rénovations de murs, jusque là n’ayant jamais réalisé une construction entièrement. Ses connaissances sur le matériau lui permettaient de savoir construire le projet, mais il n’avait pas de connaissances dans le choix qualitatif de la terre, il préférait bâtir avec une terre avec laquelle on avait déjà construit plutôt que d’en extraire une nouvelle, pour la construction. Cette démarche qui vient d’un manque de connaissance du piseur peut soulever un questionnement sur le fait d’une revalorisation spécifique d’un milieu et notamment sur le réemploi du matériau des anciennes constructions. En effet faut il nécessairement chercher à restaurer les constructions en terre quand celles-ci demandent un entretien plus fréquent et une dépense d’argent accrue, plutôt que de réutiliser ce matériau qui possède cette capacité extraordinaire de réemploi infini. Cette possibilité de réemploi raisonne en moi comme une qualité de développement durable de la matière en terme de pérennité et recyclage de la matière, comme Gilles Perraudin le fait avec la Pierre massive où il affirme que « la pierre offre cette vertu 117


extraordinaire, c’est que, en démontant un bâtiment en pierre, on peut en reconstruire un autre à côté avec la même pierre. C’est à dire que la pierre ne perd jamais sa qualité initiale. C’est pour ça que je dis souvent d’ailleurs, quand je fais une construction en pierre, j’ai fait une carrière pour le suivant »49. En somme dans ce projet Boris Bouchet et Nicolas Meunier adoptent la même posture qui démontre la pérennité et la flexibilité de la terre, à être travaillée et retravaillée. D’autre part, l’utilisation de ces matériaux naturels et la mise en place de dispositifs architecturaux, la construction travaille à créer des espaces et des ambiances saines. Sur l’aile Nord, une grande ouverture en hauteur permet un apport zénithale de lumière dans les espaces de circulation. Combiné avec le mur trombe en terre ils permettent une régulation thermique. En hiver les rayons du soleil aillant une incidence de 30° leur permet de pénétrer dans le bâtiment et viennent taper contre le mur trombe intérieur toute hauteur en pisé, chargeant la matière en chaleur, qui permet grâce à sa forte inertie de restituer la chaleur toute la journée. Le bâtiment demande moins d’énergie issue d’un système de chauffage thermique classique le rendant plus économique et moins polluant. A l’inverse au solstice d’été, les rayons du soleil ayant une incidence de 67,7° * ne peuvent pas pénétrer par l’ouverture car une casquette solaire filant le long de l’ouverture en toiture la protège, le pisé s’étant rafraichit la nuit restitue la fraicheur pendant la journée maintenant une température supportable et agréable à vivre en période estivale de grosse chaleur, le concept évite d’équiper le bâtiment en climatisation, induisant un surcoût dans le prix global du bâtiment, une économie d’énergie sur le long terme, et une réduction de la pollution du 118

* valeur prise sur le site http://www.ac-nice.fr/clea/lunap/html/Saisons/SaisonsEnBref.html = site d’information sur l’incidence du solei, basé pour cet exemple sur les valeurs de Lyon, casis similaires à celles de Marsac-en-Livradois.

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Référence : PERRAUDIN Gilles, La pierre selon Gilles Perraudin, conférence, 2’04’’.


bâtiment engendré par de l’équipement électrique. De plus, les matériaux naturels procurent une occupation et un usage sain des espaces, à l’échelle du bâtiment. En effet le pisé est un matériau qui est un très bon régulateur hygrométrique maintenant un air sain à l’intérieur du bâtiment. Cette régulation hygrométrique est primordiale pour éviter le développement de moisissure dans les espaces sujets à être exposés à de l’humidité tel que toilettes, lavabos etc... Par conséquent ce système associé à une bonne ventilation qui peut être facilement mise en place naturellement dans le bâtiment du fait d’un grand couloir de desserte des cabinets médicaux et d’ouvertures zénithales dans l’aile NORD qui peuvent servir de puits à vent, contribuent à la longévité et la pérennité du bâtiment. Enfin l’impression qu’il en ressort à l’intérieur de ce bâtiment, est le sentiment d’évoluer dans une ambiance apaisante où la température semble être stable et y est agréable. La massivité du mur intérieur toute hauteur donne un sentiment de réconfort, la lumière du soleil venant taper dessus, joue avec la matière, lui donnant une texture et une vibration qui procure immédiatement une envie incontrôlable de toucher ce pan de mur. Pour résumer, ce choix architectural d’utiliser dans le projet, des matériaux naturels locaux qui contribuent dans un premier but à la revalorisation d’un paysage culturel associé à une culture constructive ancienne, engendre des ambiances intérieures primaires brutes mais est hautement plus qualitatives dans leur expression et leur caractère sensible qu’une paroi de placoplâtre recouverte de peinture. Enfin cette spécificité de construction montre beaucoup de points positifs autres que des atouts socio-culturels 119


Photographie du dispositif architectural du mur trombe, système de chauffage passif.


Incidence des rayons du soleil en été Incidence des rayons du soleil en hivers Coupe technique & plan

Espace du dispositif architectural du mur trombe, système de chauffage passif.



et environnementaux, nous pouvons voir dans une dernière partie qu’elle apporte beaucoup au paramètre socio-économique local dans lequel s’inscrit le projet. Ce qui nous intéresse par l’analyse de l’approche socio-économique que le projet engendre, est de voir si l’on peut l’inscrire comme étant une activité représentative du village, qui produit des avantages autant pour les habitants potentiellement clients que pour les commerçants mais aussi d’autres personnes où entreprises hors village, à une échelle plus large que celui-ci. Economiquement parlant le projet raisonne localement selon deux paramètres. Comme nous avons pu le voir le projet vient redonner un local neuf, plus facile d’accès et nettement plus visible pour la seule petite supérette du village qui souhaitait changer d’emplacement. Lui permettant d’ouvrir sa clientèle à d’autres types de personnes que celle des résidents du village. En effet la proximité avec la départementale D906 permet aux villages alentours de venir s’y approvisionner et aux touristes de la région prenant la route, de s’arrêter pour faire une pause et prendre ce dont ils ont besoin pour leur trajet. La requalification de l’espace rural, la prise en compte des axes de circulations et l’ajout de la supérette au programme initial de cabinet de médecin à l’étage permet de créer un lien commercial et économique car les deux activités permettent d’animer l’activité marchande du secteur, qu’ils en bénéficient mutuellement, mais en font aussi bénéficier les commerces proches tels qu’une pharmacie, un bar, deux boulangeries et autres commerces, ce qui maintient comme une sorte de micro économie de commerce à l’échelle ultra locale, garantissant le maintien de leurs activités. 123


La deuxième résonance économique que le projet révèle, est le maintien du développement économique local de deux entreprises et filières de la construction. En effet comme nous l’avons vu précédemment, Boris Bouchet choisi de faire appel à une entreprise de maçonnerie locale et à un Piseur de la Loire, reconnu pour son travail avec le pisé. Pour le bois il fait appel à l’entreprise Verrière, comme pour nombreux de ses projets réalisés en bois, qui possède une grande scierie dans le Livradois Forez ainsi qu’une petite équipe de construction bois. Dans un premier temps le but est donc de maintenir une économie locale, mais très vite les avantages de faire travailler des artisans et entreprises locales montrent des intérêts financiers en terme d’économie d’argent pour le projet et présentent une efficacité en terme d’énergie grise. En effet la scierie Verrière grâce à ses vastes exploitations de ressource première et à leur atelier de montage et de pose, leur permet de gérer la construction bois de l’extraction de la matière première, de sa transformation, de l’assemblage et préfabrication en atelier à la pose sur chantier. Ce système d’être présent à chaque étape de la construction bois permet de supprimer les surcoûts des intermédiaires représentant les agents économiques qui sont intervenus dans le processus. Par exemple dans le cas classique qui implique des surcoûts à chaque passage entre agent économique, la scierie exploite l’essence de bois, l’extrait et la transforme et vend la matière première transformée à une usine qui va créer utiliser le bois transformé pour faire des produits de construction ou autre par exemple du bardage, de l’équipement, du mobilier etc. Ce passage entre les deux agents économiques induit un surcoût du à une valeur ajoutée du produit, plus la marge que va prendre l’entreprise qui vend à la suivante. Ce 124


processus se poursuit en ajoutant encore un surplus car l’usine de fabrication va vendre le produit directement à une entreprise de pose ou vendra ses produits à une filière de grande distribution, qui engendrera encore un surcoût cumulé à l’acheteur en bout de chaine. Il est important de rappeler qu’en plus d’un surcoût économique qu’implique ce processus commercial, il induit aussi un produit posé sur chantier avec un fort indice d’énergie grise à l’inverse du produit posé par l’entreprise Verrière, car entre chaque agent économique, il y a le transport du bois qui rentre en jeu, que ce soit pour la matière première ou le produit fini, et qui peut parfois faire le tour du monde si les différents agents qui interviennent ne sont pas localisés sur le même territoire. Ne promouvant pas dans ce cas là une économie locale au territoire où le projet s’implante. Le gain économique fait sur le bois permet de compenser le surcoût engendré par l’utilisation du pisé par rapport à une construction basique, utilisant du parpaing et de l’enduit issu du commerce. Le surcoût était alors de 30 000 euros. Ce surcoût était dans un premier temps mal accepté, car les gens ne comprenaient pas l’intérêt de faire un effort de 30 000 euros de plus juste pour de la terre, il leur était plus évident de construire avec des matériaux plus « technologiques »50 tels que du verre, de l’acier ou du béton, « dans l’esprit des finasseurs, les élus du parc, du village, les habitants où d’autres architectes, c’était difficile d’accepter qu’on allait faire un effort sur cette matière qui est en effet un effort financier, parce que par exemple la façade en bois coûte effectivement moins cher. Donc il y a un effort financier à cet endroit là, en quelque sorte on met l’accent là dessus, et bien c’était compliqué pour la plus part des gens de comprendre qu’on allait mettre de 125


l’argent en plus sur une technique, qui est une technique qui finalement on retrouvait partout dans le village, quelque chose de courant traditionnel... Et en plus fragile pour eux. »51 Mais une fois que l’acte de bâtir en terre fut compris par tout le monde, il changea la vision des personnes sur ce sujet. Le surcoût engendré par l’utilisation de la terre fut couvert par des subventions accordé par le Parc du Livradois Forez. Dans tous les cas le projet aurait été construit, car aux yeux de la mairie, cette équipement était plus qu’attendu. En effet le maire prévoyait de financer l’entièreté du chantier s’il n’était pas possible d’avoir des aides financières. Ce projet représente quelque chose d’important pour tout le monde en terme d’autonomie, au sens médicale et marchand. Au final l’utilisation de la terre a créé un fort engouement enthousiaste de la population, des élus et des finasseurs car on investissait dans un objet culturel, en fin de compte on représentait une culture locale et d’un point de vue financier même si l’effort pouvait gêner au début, les 30 000 euros étaient injectés dans l’économie locale, « c’est à dire qu’ il n’y a pas eu un centime de ces 30 000 euros qui va chez le gros cimentiers ou chez les gros industriels. C’est à 99% vrai, on va dire qu’il y a un 1% d’essence pour aller chercher la terre. »52 « En tant qu’architecte, notre métier c’est de comprendre le monde dans lequel on vit pour répondre aux enjeux de notre société »53, afin de le comprendre Boris Bouchet s’attache à la culture rurale dans laquelle il intervient pour fonder les bases de son projet. Il y ajoute la notion des milieux à plusieurs échelles ainsi qu’à leur relation qui agissent sur le projet et son contexte. Il pense donc l’architecture comme une construction hybride, entre utilisation de matériaux et savoir-faire locaux et 126

50 & 51

Référence : Référence : BOUCHET Boris, interviewé le 17/04/2015.

52

Ibid. interview.

53

Ibid. interview.


54

Référence : Id. interview.

55

Référence : RICOEUR Paul, Histoire et Vérité.

56

Référence :MADEC Philippe, conférence : « Oser. L’altérité, le spécifique, la bienveillance, les cultures ».

inévitablement des produits issus du marché que la mondialisation met en jeu, « aujourd’hui dire que l’on va construire dans un lieu qu’avec ce que l’on trouve sur place (un milieu restreint) c’est impossible. Par exemple construire un bâtiment sans béton c’est impossible, car déjà pour respecter le moindre DTU il faut des fondations en béton, et donc le béton utilisera nécessairement du ciment qui est produit dans des grosses usines de France et sera donc nécessairement pas un produit local. »54 Pour l’équipement de proximité de Marsac-enLivradois l’utilisation de la terre comme révélatrice d’une culture constructive cohérente et l’utilisation du bois afin de maintenir une économie et un savoirfaire local montre bien un souci de constituer un projet qui répond aux attentes contemporaines de ce village, de cette région à tout point de vue de développement durable. Nous pouvons rapprocher cette notion de culture à celle que fait Philippe Madec au travers des pensées de Paul Ricoeur. Le paramètre de culture est inévitable si l’on veut prétendre construire un monde proposant un réel développement durable. La culture doit être mise plus en avant comme une « figure cohérente historique »55 qui amènera les populations à vivre et cohabiter dans de meilleurs conditions et dans une démarche durable, « la culture est la clé, le liant, le trait d’union oublié en chemin. A la fois présente dans l’environnement, le social et l’économique, elle permet d’envisager le projet politique manquant, qui unirait les divers aspects du projet d’établissement humain dans leur interdépendance indéfectible, soudant cultureenvironnement-société-économie. Elle garantit la prise en compte du pilier social et contrebalance le traitement technique qui a pris le pas sur les autres aspects du développement durable. »56 127



CONCLUSION


Pour conclure, nous constatons que les trois positionnements exposés dans la première partie, utilisent majoritairement des matériaux naturels provenant plus ou moins localement du milieu où les projets s’implantent. Mais dans les trois cas c’est l’intelligence de conception et la compréhension de l’esprit du lieu (Genius Loci) qui permet une qualité remarquable de ces projets. Pour le premier, celui des frères Janin à Bonneval-sur-Arc, la ferme s’intègre parfaitement à son environnement par l’attitude d’adossement à un merlon, et un recouvrement d’une prairie en toiture. Le bois utilisé sert à la manière des architectures vernaculaires, à créer un dispositif de séchage pour le foin. Dans le deuxième cas, avec le projet des « ganivelles », l’utilisation du bois sert à reprendre un dispositif caractéristique du paysage des plages de sable fin landaises, des ganivelles (barrière de bois). Le projet se confond dans le contexte paysager. Les architectes parlent alors de « bâtiment-paysage ». Enfin, le dernier positionnement analysé, est la revalorisation d’une culture spécifique au lieu, par la matière. Par exemple le projet de Marsac-en-Livradois de Boris Bouchet, emploie la technique vernaculaire oubliée du pisé, fortement présente dans le village. Il est donc juste d’affirmer que l’utilisation des matériaux naturels locaux est un bon moyen de revaloriser une spécificité rurale locale, à condition qu’il soit accompagné d’un réel positionnement architectural qui justifie son emploi et sa mis en œuvre, dans un cas précis. Donc l’analyse et la compréhension des architectures vernaculaires d’un milieu, avant de s’y implanter, est plus que primordiale. La raison de leur existence doit être assimilée, ce qui peut nous guider dans la manière de comprendre un territoire et de s’inspirer 130


de leur démarche, en prenant en compte les attentes de notre société contemporaine et les enjeux écologiques et économiques actuels. Cette compréhension est obligatoire pour pouvoir prétendre à un réel développement durable. Dans le cas contraire, si le concepteur ne prend pas en compte la subtilité à adopter face à une compréhension des architectures vernaculaires, il peut tomber dans la copie, le menant sur le chemin du « pastiche folklorique ». C’est à dire, que l’utilisation d’un matériau sera faite dans le but de donner une représentation d’un « style vernaculaire », faussement copié où les matériaux seront utilisés en parement (bien souvent avec des matériaux dérivés issus du commerce). L’architecture est décontextualisée et perd alors tout son sens de revalorisation spécifique locale. Elle ne correspond plus au concept de respect des logiques environnementales, socio-culturelles et économiques qui constituent les milieux d’un territoire. Cette compréhension des architectures vernaculaires apporte une amorce de réponse à un enjeu de reterritorialisation de nos projets contemporains, face à un modèle architectural actuel qui s’étend uniformément sur le territoire. Mais le problème est bien souvent financier, car la perte de culture constructive d’un milieu accompagne la perte d’exploitation d’un matériau local qui laisse sa place à la panoplie de matériaux issus du commerce, produits en grande quantité, présentant une disponibilité accrue, rapide et à bas coût. Ce positionnement de l’architecte a vouloir revaloriser une technique issue d’une culture constructive, demande souvent aux plus engagés, de faire comprendre aux artisans et exploitants l’intérêt de relancer une filière pratiquement disparue. C’est le cas de Gilles Perraudin et Elisabeth Polzela qui ont 131


réussi à relancer la production d’une carrière de pierre (Vers-Pont-du-Gard) dans le but d’extraire la pierre et de la façonner en matériau de construction. Un acte qui demande la plupart du temps, la conception et réalisation d’un ou plusieurs projets manifestes, dans le but de montrer les capacités d’un matériau ancien oublié, à répondre à nos enjeux contemporains. Mais le mémoire ne m’a pas seulement conforté et éclairé par rapport à un positionnement architectural et éthique, il m’a permis de mener une réflexion sur le thème de l’identité architecturale. En effet, cette notion m’intéressait dès le début. Je cherchais si l’on pouvait parler d’identité en architecture et s’il en existait réellement une ou plusieurs possibles de distinguer, répertorier et comparer. Il m’a fallu beaucoup de temps pour constater qu’on ne pouvait pas en parler en architecture, mais qu’on parle alors de spécificités et de caractères architecturaux. Le travail de lecture et de recherche qui s’en est suivi m’a amené à comprendre que l’on pouvait analyser les spécificités d’une architecture suivant la grille d’analyse Versus, qui met en avant, pour moi, les trois piliers ou critères d’une architecture intégrant les caractéristiques de ses milieux. Vient alors la notion des milieux, qui m’a demandé aussi un travail de recherche assez conséquent sur la compréhension de manière globale. Cette notion complique alors la compréhension des spécificités architecturales locales. En effet, elle apporte une vision des trois critères d’analyse de versus (approche environnementale, approche socio-culturelle et socioéconomique) par rapport à plusieurs échelles, en comprenant que ces critères se mêlent et interagissent entres eux, apportant une complexité supplémentaire à intégrer dans la conception pour qu’un projet puisse prétendre participer à une revalorisation des 132


spécificités de ses milieux. Même si le questionnement provient d’un constat sur les architectures industrialisées touchant essentiellement les logements et habitats pavillonnaires en milieu rural, le choix d’analyser l’architecture d’équipement public ou privé dans ce milieu, permet de répondre clairement aux attentes qui sont posées et de voir les différents positionnements architecturaux mis en place par les architectes. Les projets ont été choisi par leur force expressive permettant de révéler les bases de réponses qui peuvent prétendre à favoriser une revalorisation de la spécificité architecturale de leur milieu. Ainsi ayant des éléments de réponse, nous pouvons nous dire qu’il suffit d’entretenir les mêmes procédés de conception et de positionnement architecturaux, en apportant une attention particulière aux matériaux utilisés pour leur sens culturel social, constructif et paysager. De plus, ces architectures montrent de grandes capacités à mettre en place des processus de reterritorialisation des projets, tout en mettant en avant une démarche environnementale basée sur le souci d’économie de matière. Une réflexion qui met en place la justification de l’utilité d’un matériau dans le projet, par rapport à son accessibilité proche, et sa capacité à générer une économie locale, crée une activité économique et des échanges sur des savoirs constructifs locaux, entre acteurs de la construction. Le problème qui peut faire obstacle à un projet utilisant ce processus de conception pour le secteur de l’habitat se situe au niveau des communes. Il vient en partie de choix politiques, et de gestion. Bien que les élus s’intéressent à chercher comment garder l’image de leur commune en faisant attention 133


au patrimoine et au parc immobilier déjà existant qui compose la spécificité architecturale, ils sont confrontés bien souvent à une demande croissante de nouveaux logements sur le territoire de la commune. Pour y répondre les maires ont généralement recours à la facilité de faire appel à une agence immobilière ou un constructeur proposant la solution du lotissement. C’est une solution pour proposer une action directe sur la construction, fixant les nouveaux venus dans leur territoire. La réponse proposée par les promoteurs, de produire des « habitats pavillonnaires » correspond à l’image que les gens se font de la vie en milieu rural. Il est donc facile de regrouper des pavillons et de créer un lotissement afin de réduire les problèmes de gestion de viabilisation de ces nouveaux lieux. De plus, les agences faisant appel à un processus de construction industrialisé, avec des matériaux issus du commerce et possédant quelques fois comme « Maison Phénix » leurs propres usines de production. Elles réduisent les coûts de construction en répandant le système de manière généralisée au territoire. Elles proposent ainsi des prix attractifs, défiant toute concurrence. L’utilisation de matériaux naturels est donc vite écartée et les choix de conception ne s’attardent pas à une réflexion de revalorisation spécifique locale mais à une nécessité de rentabiliser le foncier débloqué par la commune. Ce travail est en quelque sorte un début de réflexion théorique. Il met en avant mon intérêt pour la matière depuis plusieurs années et apporte un but à atteindre et une posture architecturale à développer pour le futur. Plus largement, le mémoire soulève une nouvelle question. En effet, ayant compris l’enjeu de chercher 134


à maintenir une spécificité rurale par rapport au patrimoine vernaculaire en place, avec une posture architecturale tenant compte de ses milieux et utilisant des matériaux naturel locaux, comment devons nous tenir compte des lotissements de maisons pavillonnaires présents, résultant d’un système industrialisé et qui font partie intégrante du paysage culturel rural actuel ? Ne pouvant pas les nier, quelle posture adopter face à ces constructions se répandant uniformément sur le territoire lors de la conception d’un nouveau projet ? Peut t-on considérer qu’ils font irrévocablement partie des spécificités rurales par leur seule présence ? Pour ma part un travail approfondi sur le rattachement physique et conceptuel de ces architectures, doit être apporté par les propositions des nouveaux projets. Pour garantir de manière durable, la qualité du cadre de vie des humains dans leur environnement, il faut maintenir un équilibre social, culturel et environnemental. Il s’agira de concilier l’existant vernaculaire, les opérations immobilières décontextualisées et les nouveaux projets dans une réelle logique de maintenir un équilibre de leurs milieux. Ce choix de recomposer une cohérence des spécificités architecturales des milieux, fait que l’humain pourra prétendre réellement habiter les espaces qu’il côtoie, permettant à tous de vivre également et durablement dans des lieux qualitativement suaves..

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mardi 10 décembre 2013 à 19h00 au Palais de Chaillot – Visité le 10 mars 2015 → http://www.citechaillot.fr/fr/

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CORPUS DE PROJETS BOUCHET Boris : → Equipement rural de proximité à Marsac-enLivradois. FABRIQUES - Architecture Paysage / Frères Pierre & Rémi JANIN : → PROJET D’ARCHITECTURE DE PAYSAGE SUR UNE EXPLOITATION AGRICOLE / FERME D’ELEVAGE. → ZONE AGRICOLE POUR 9 BÂTIMENTS D’ÉLEVAGE. JOLY & LOIRET : → LES GANIVELLES – FÉDÉRATION FRANÇAISE DE SURF ET RESTAURANT GASTRONOMIQUE À HOSSEGOR. → LE GRAND STADE, REQUALIFICATION DU STADE ÉQUESTRE DU GRAND PARQUET À FONTAINEBLEAU. NUNC Architectes : CENTRE D’INTERPRÉTATION DU PATRIMOINE ARCHÉOLOGIQUE DE DEHLINGEN – 67 INTERVIEWS BOUCHET Boris, interviewé le 17/04/2015. LOIRET Paul-Emanuel, interviewé le 25/03/2015.

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DOCUMENTS PHOTOGRAPHIQUES - Couverture et quatrième de couverture : 8 photographies personnelles. - Avant propos : photographie personnelle , p.4. - Introduction : photographie personnelle, p.10. - Définition : document iconographique, p.26, Henri Matisse, Feuilles de figuier. Portrait de l’artiste en hyperfauve, Eric Allier et Jean Claude Bonne, Paris, le passage, 2005. Publié dans YOUNES Chris, BONZANI Stéphane et BONNET Frederic, Villenature et architectures des milieux, article publié dans Les cahiers de la recherche architecturale et urbaine, trajectoires doctorales, éditions du patrimoine centre des documents nationaux, paru en novembre 2012, pp.182-191, document iconographique p.189. - Développement : Document fiche technique, p.34, PROJET D’ARCHITECTURE DE PAYSAGE SUR UNE EXPLOITATION AGRICOLE / FERME D’ELEVAGE, montages photographique photoshop = carte de france + plan masse (plein/vide); vue Google Earth et une photographie transmise par l’agence FABRIQUESArchitecture Paysage. Photographies, p.38, transmises par FABRIQUES - Architecture Paysage, p.34.

l’agence

Photographies, p.40, transmises par FABRIQUES - Architecture Paysage, p.34.

l’agence

Document fiche technique, p.42, ZONE AGRICOLE 142


POUR 9 BÂTIMENTS D’ÉLEVAGE, montages photographique photoshop = carte de france + plan masse (plein/vide); vue Google Earth et une photographie transmise par l’agence FABRIQUES Architecture Paysage. Photgraphies, p.44, transmises par par l’agence FABRIQUES - Architecture Paysage; coupe (retouchée) et photographie du bas publiées dans, NIVET Soline, Inside men - Rémi et Pierre Janin, agence fabrique, publié dans D’Architecture n°211, paru en 31/08/2012. Document fiche technique, p.48, LE GRAND STADE, REQUALIFICATION DU STADE EQUESTRE DU GRAND PARQUET A FONTAINEBLEAU, montages photographique photoshop = carte de france + plan masse (plein/vide); vue Google Earth et une photographie transmise par l’agence JOLY&LOIRET. Disponible sur le site web de l’agence http://jolyloiret. com/agence/ → Visité le 08/03/2015. Photographies, p.52, JOLY&LOIRET.

transmises

par

l’agence

Photographies et documents iconographiques, p.54, transmis par l’agence JOLY&LOIRET. Document fiche technique, p.56, LES GANIVELLES – FÉDÉRATION FRANÇAISE DE SURF ET RESTAURANT GASTRONOMIQUE À HOSSEGOR, montages photographique photoshop = carte de france + plan masse (plein/vide); vue Google Earth et une photographie transmise par l’agence JOLY&LOIRET. Disponible sur le site web de l’agence http://jolyloiret. com/agence/ → Visité le 08/03/2015. Photographies, p.58, transmises par l’agence 143


JOLY&LOIRET. Photographies et documents iconographiques, p.60, transmis par l’agence JOLY&LOIRET. Document fiche technique, p.64, CENTRE D’INTERPRÉTATION DU PATRIMOINE ARCHÉOLOGIQUE DE DEHLINGEN – 67, montages photographique photoshop = carte de france + plan masse (plein/vide); vue Google Earth et une photographie transmise par l’agence NUNC Architectes, photographies disponibles sur le site web : http://www.nunc.fr/centre-d-interpretationdu-patrimoine-archeologique-de-Dehlingen-67-169. html→ Visité le 08/03/2015. Photographies, p.66, transmises par l’agence NUNC Architectes, photographies disponibles sur le site web : http://www.nunc.fr/centre-d-interpretationdu-patrimoine-archeologique-de-Dehlingen-67-169. html→ Visité le 08/03/2015. Photographies et documents iconographiques, p.68, transmis par l’agence NUNC Architectes, photographies disponibles sur le site web : http:// www.nunc.fr/centre-d-interpretation-du-patrimoinearcheologique-de-Dehlingen-67-169.html→ Visité le 08/03/2015. Document fiche technique, p.72, PROJET RURAL DE PROXIMITE, MARSAC-EN-LIVRADOIS, montages photographique photoshop = carte de france + plan masse (plein/vide); vue Google Earth et une photographie transmise par l’agence Boris BOUCHET, photographies disponibles sur le site web : http:// borisbouchet.com → Visité le 07/02/2015. 144


Photographies, p.84, photographie du haut disponible sur le site web http://www.e-magdeco.com/2015/03/ hotel-des-dromonts.html Photographies, p.86, photographie du haut dispotnible sur le site web http://nicolerepel.free.fr ; photographie du bas dispotnible sur le site web : http://www. tripadvisor.fr/Hotel_Review-g562749-d500723Reviews-Hotel_du_Bourg-Valmorel_Savoie_Rhone_ Alpes.html Documents iconographiques, p.88, disponible sur le site web : http://www.maisons-phenix.com → Visité le 08/03/2015. Documents iconographiques, p.94, Plan déssinés et retouchés sur Photoshop. Photographies personnelles, p.95 / 104 / 105 / 106 / 107 / 108 / 112 Photographies personnelle, photographie, p.116, photographie du haut disponible sur le site web : http:// borisbouchet.com → Visité le 07/02/2015. Photographies personnelle, p.120. Document iconographiques, p.121, disponibles sur le site web : http://borisbouchet.com → Visité le 07/02/2015, retouché Photoshop. Photographies personnelle, p.122.

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BODOIN Charlie Lundi 27 Avril 2015




‘‘Il n’existe pas de types différents d’architecture, il existe uniquement des situations différentes qui, pour satisfaire aux exigences physiques et psychiques de l’homme, amènent des solutions différentes.’’ Christian Norberg-Schulz dans Genius Loci, paysage, ambiance, architecture


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