Paris-Turf : Prix d'Amérique Opodo 2015

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MAGAZINE VISITE GUIDÉE

Grosbois le paradis des trotteurs

RENCONTRE

Guillaume Macaire, Joël Hallais et Thierry Jarnet

JEUX/PARIS

En course avec un spécialiste

RETRO

Souvenirs d'Amérique

Les artistes

d'Amérique ne peut être vendu séparément du quotidien Paris Turf daté samedi 24 janvier 2015


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Edito Société Editrice TURF EDITIONS SA Président directeur général, directeur de la publication

Viens,

Philippe ABREU

Rédacteur en chef Guillaume DALIFARD Frédéric GUIGNARD (adjoint)

je t'emmène

Rédacteur en Chef Technique Mathieu RIGOARD

AGENCE TIP SAS Président Antoine ROUSTEAU

Rédacteur en chef Christophe UGNON−FLEURY Vincent BÉGUIN (adjoint)

Direction éditoriale Alec BAGDASSARIAN

P

Service Client

rêt pour le décollage ? Bienvenue à bord de ce numéro spécial Prix d’Amé− rique Opodo. On le sait, rien n’arrête les pilotes Raffin, Verbeeck, Bazire, Vercruysse, Nivard, Bonne, Kihlström ou Goop, ni les photographes de Scoop Dyga et du Trot. Pas même le mâchefer… Première destination : le centre international de Grosbois, ce lieu magique où le trotteur est roi. Votre guide : Franck Goerlinger. Cap ensuite sur Vincennes, avec Sylvain Copier, qui joue les dé− tectives privés. Un jour, il marque à la culotte Kévin Baudon pour détailler l’emploi du temps de son confrère et dévoiler ses méthodes de travail (comment déniche−t−il les futurs gagnants ?). Le lendemain, il part à la rencontre des commissaires des courses (qui sont−ils ?). Toujours sur le plateau de Gravelle, François−Charles Truffe vous invite pour sa part à passer un moment privilégié avec Joël Hallais, Guillaume Macaire et Thierry Jarnet, réunis autour d’une même table. Comme si vous étiez à leurs côtés ! L’occasion de rappeler que Vincennes proposait un programme mixte (trot−obstacle) par le passé. Sans dévoiler dans le détail le contenu de ce supplé− ment, Michel Burgio vous propose également de partager certains souvenirs de Prix d’Amérique avec Luis Fernandez, Brahim Asloum, Pierrette Brès, Dominique Bœuf, Hervé Morin et Bernard Cavignaux, lequel dit au sujet d’Ourasi : “Ce n’était pas le bon Dieu, mais pas loin.” Enfin, nous vous proposons un atterrissage en douceur avec un quizz pour tester vos connaissances, à l’heure où tout le monde se pose la même question : dimanche, qui va succéder à Maharajah ? VINCENT BÉGUIN RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT

01.48.11.50.58 (de 10h à 18h) contact@paris−turf.com

Publicité 01.48.11.50.66

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Imprimerie RotoGaronne

Siège Social Parc Archimède − ZAC la Duranne 145 Avenu Archimède − CS80571 13594 Aix−en−Provence cedex 3 Tel : 04.42.93.86.75 Commission paritaire : 0219K84159 ISSN : 07506333 NE PEUT ÊTRE VENDU SÉPARÉMENT DU QUOTIDIEN PARIS TURF DATÉ SAMEDI 24 janvier 2015

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Sommaire Portraits Découverte Visite guidée

Jeux / Paris Rencontre

6 En terrain connu 14 Relooking extrême 18 Le paradis des trotteurs

24 En course avec un spécialiste 30 L'avis d'artistes

Évolution

41 Le Trotteur Français

Phénomène

44 Les maîtres du temps

Enquête Rétrospective

52 Le monde des commissaires 60 Les souvenirs d'Amérique

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questions

réponses

à Éric Raffin Qu'évoque pour vous le Prix d'Amérique ? Le rêve ! Je me souviens de ce que m'a dit un jourJules Lepennetier, après sa victoi− re avec Général du Pom− meau en 2000 : “Que peut-il m'arriver de mieux ?” Quelle édition vous a le plus marqué ? 1990 ! Pussy Cat finissait troisième d'Ourasi et Poroto. J'avais huit ans et c'était la première fois que j'assistais à un Prix d'Amérique. J'étais venu avec mon frère et il y avait un monde fou. Quand mon père a pris la tête dans la descente, on était déjà en train de pleurer. Et votre meilleure souvenir dans cette épreuve en tant que driver ? En 2012, quand j'ai fini deuxième de Ready Cash avec Roxane Griff.

Quizz

65 Les jeux

G RECUEILLI PAR VINCENT BÉGUIN | 5


En terrain connu L’hippodrome est leur arène. Qu’il vente, pleuve ou neige, les drivers y descendent chaque jour en quête de gloire, de succès. À l'occasion de cette 94e édition du Prix d'Amérique, “Paris−Turf” vous propose de découvrir sous un autre angle sept gladiateurs des temps modernes, qui répondent au nom de Jos Verbeeck, Jean− Michel Bazire, Pierre Vercruysse, Franck Nivard, Damien Bonne, Örjan Kihlström et Björn Goop.


JOS VERBEECK, 57 ans. Le “diable belge”, titulaire de quatre Sulky d'Or dans les années 90, a déjà inscrit son nom au palmarès du Prix d'Amérique à quatre reprises, au sulky de Sea Cove , Abo Volo , Dryade des Bois et Abano As. Photo : Jean-Luc Lamaère (Le Trot)


JEAN−MICHEL BAZIRE, 43 ans. Professionnel le plus capé dans le monde des courses hippiques avec pas moins de seize Sulkys d'Or à son palmarès, “Jean−Mi” compte également à son actif deux victoires dans le Prix d'Amérique, grâce à la jument américaine Moni Maker et Késaco Phédo , dont il était également l'entraîneur. Photo : Scoop Dyga


PIERRE VERCRUYSSE, 52 ans. Le Prix d'Amérique, il connaît, mais la victoire lui a jusqu'ici toujours échappé... Deuxième à deux reprises de cet événement au sulky d'Echo et Quaker Jet, ce groupe I mériterait de figurer enfin au palmarès de notre champion du monde des drivers 2013. Photo : Scoop Dyga


FRANCK NIVARD, 35 ans. Fidèle partenaire de Ready Cash, “Francky la main froide”, comme on le surnomme, a connu la consécration dans le Prix d'Amérique à deux reprises à son sulky. Des victoires qui faisaient suite à son premier sacre dans ce groupe I aux commandes de Meaulnes du Corta, pour l'entraînement de Pierre Levesque. Photo : Jean-Luc Lamaère (Le Trot)


DAMIEN BONNE, 28 ans. Révélation de ces dernières saisons chez les entraîneurs, ce jeune professionnel s'apprête à disputer, dimanche, son deuxième Prix d'Amérique. Une participation qui s'annonce riche en émotions puisqu'il portera la casaque de son frère, David, au sulky de Sévérino . Photo : Scoop Dyga


ÖRJAN KIHLSTRÖM, 52 ans. Le tenant du titre. Surnommé “Iceman”, en raison de son sang froid en course, il nous a offert un souvenir inoubliable au sulky du champion suédois Maharajah lors de sa lutte avec Ready Cash dans l'édition 2011 du Prix d'Amérique. Photo : Scoop Dyga


BJÖRN GOOP, 38 ans. Auteur d'un exercice 2014 en tout point remarquable avec, en point d'orgue, un sacre dans l'Elitloppet au sulky de Timoko , le célèbre professionnel suédois a pris goût aux courses dans l'Hexagone. Au sommet de son art, il prend part à son cinquième Prix d'Amérique avec une réelle chance de figurer à l'arrivée. Photo : Scoop Dyga


Découverte

Relooking Le Trotteur Français… Aucune race équine n’a connu, surtout depuis les trente dernières années, une évolution aussi rapide, une transformation aussi radicale. Par nécessité, pour et par la compétition, sa morphologie s’est adaptée, avantageusement, à l’allure artificielle du trot, laissant entrevoir des dispositions naturelles. Et même si d’aucuns ne jurent que par le cœur, la tête et les poumons, on ne peut rester insensible devant ce miracle de la biomécanique…

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Par Sophie Dham - Photos A.P.R.H.

extrême T

Jamin, un champion hors norme dont la grand-mère maternelle, Gladys, avait gagné à... Saint-Cloud !

out s’est franchement décanté avec l’introduc− tion des courants de sang américain. On passera sur les tout premiers apports inté− grés à la race pendant la période de l’entre−deux− guerres, avec les étalons comme Net Worth, The Great Mac Kinney, Sam Williams… Distillés, ils n’ont pas eu de véritable incidence sur la morphologie, à quelques excep− tions près. Le second apport de sang américain, en revanche, a vrai− ment commencé à modifier le modèle avec toute la réussi− te que l’on sait. C’est celui issu de la rencontre de Star’s Pride avec Roquépine, qui a donné Florestan (né en 1971), puis vînt Granit, l’année suivante, quand la cham− pionne d’Henri Levesque a été présentée à Ayres (Star’s Pride). À la même époque, Kimberland (par Nevele Pride, fils de Star’s Pride) fructifiait, pour sa part, l’élevage Olry− Roederer. Enfin, en 1986, un protocole signé pour cinq ans entre la France et les États−Unis allait permettre l’entre ouverture du stud−book. Certains, parmi les plus audacieux de nos éleveurs, eurent l’autorisation de traverser l’Atlantique pour présenter leurs plantureuses « petites françaises » aux avions de chasse américains (Royal Prestige, Speedy Somolli, Armbro Goal, Baltic Speed…). Inversement, Workaholic et Mickey Viking furent ensuite achetés par les Haras Nationaux. | 15


LA MÉTAMORPHOSE Le « demi−sang normand » présen− tait, encore dans les années 50 (voir Fandango né en 1949), un modèle bien charpenté, avec beaucoup d’os (des articulations larges), mais man− quant cruellement d’élégance. Son dos solide au rein bien attaché était porteur et favorable à la monte à l’an− cienne de jockeys bien assis dans leur selle. Mais sa tête lourde, au chanfrein souvent busqué, n’avait vraiment rien de flatteur comparée à celle du trot− teur made in USA, plus petite et racée, voire même arabisée pour certains, aux naseaux bien ouverts typiques des « buveurs d'air ». Il faut donc bien reconnaître que l’ap− port de sang américain a incontesta− blement allégé et affiné notre carros− sier indigène, en plus de toutes les autres qualités proposées dans le package : précocité, vitesse, facilité d’utilisation… Trotteur−né, le standarbred « va tout seul, avec rien » en fin de compte, si ce n’est avec son énergie et son tonus. A contrario, il aurait apporté un peu de fragilité, dans les jambes, comme souvent les races précoces, et peut− être aussi des pieds un peu serrés, bien que solides, mais ayant parfois tendance à l’encastelure (N.D.L.R. : af− fection du pied qui donne une forme cylindrique à la paroi du sabot), sans pour autant que ne soit altérée la qua−

lité de la corne, loin de là. On a aussi perdu un peu de taille, mais pas autant que l’on croit car, si la moyenne a tout de même baissé, avoi− sinant une homogénéité qui tourne autour de 1 mètre 60/65, on conti− nue de préférer un physique qui pour− ra « encaisser » le travail, et ce pas seulement à 2 ans. Préserver le modèle français, c’est la philosophie de la SECF et ce qui in− fluence les juges qui privilégient enco− re les juments ayant du cadre lors des concours de modèles et allures. Malgré les croisements, on trouve toujours une ligne du dessus bien ten− due, avec une croupe un peu moins forte cependant. Mais, plébiscités par les Américains et aussi les Scandina− ves, les dos plutôt longs ne sont plus « péché mortel », à l’encontre de tout ce que préconisent les manuels d’hippo− logie qui veulent que « l’idéal−cheval » entre dans un carré. Car, au trot, il faut favoriser le passa− ge des postérieurs. Peu importe si l’animal est plus long que haut. Plus court, il faut qu’il écarte suffisamment derrière, naturellement… ou pas. Et que l’ouverture de l’avant−main le permette. Mais il en faut pour tous les goûts : large passage de sangles ou cage thoracique développée, pourvu que les poumons y soient à l’aise et puissent respirer tout leur soûl. Enfin, et surtout, ce qui a changé, c’est l’épaule jadis droite du cheval de car− riole qui tractait, avec un lourd collier,

Il faut donc bien reconnaître que l’apport de sang américain a incontestablement allégé et affiné notre carrossier indigène.

Le “demi−sang normand” présentait, encore dans les années 50 (voir Fandango ci−contre), un modèle bien charpenté, avec beaucoup d’os (des articulations larges), mais manquant cruellement d’élégance. Photo : A.P.R.H.

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Jamin, vainqueur du Prix de Paris en 1960. Photo : A.P.R.H.

plus qu’il ne se propulsait. Son geste étriqué, qui retroussait fort, piochait même, parfois, pour grimper la mon− tée de Vincennes. Désormais, l’épaule, de plus en plus oblique pour répondre à la vitesse, donne de l’amplitude aux antérieurs, davantage de rayon, des allures plus rasantes. RÉOUVERTURE EN VUE Pourtant, on commence à tourner en rond. Force est de constater les pré− mices d’une dégénérescence, ce qui inquiète l’œil averti des plus connais− seurs. On sent les limites de l’espèce : il est peut−être déjà temps de faire quelque chose. Plusieurs possibilités s’offrent afin de redonner du souffle au Trotteur Fran− çais. S’ouvrir à d’autres courants de sang US, non explorés, mais qui, de nos jours, n’auront peut−être pas échappé au lasix. À moins que la solu− tion ne vienne de Suède, où la législa− tion est très rigoureuse, avec un trot− teur aux ¾ US et une petite touche de sang français. Mais la grande idée qui plane n’est−el− le pas d’importer du sang pur ? Après tout, c’est ce que l’on fait chaque fois que l’on veut améliorer une race. Contre toute attente, avec de préfé− rence des sujets aux origines d’obsta− cle, cela ramènerait de la solidité : aucun organisme trotteur ne pourrait

subir un parcours de 4.000 mètres en steeple ! La polémique viendrait sans doute de la crainte de perdre une génération, voire deux… en détériorant qui plus est l’aptitude à trotter. Cela rebuterait−il les metteurs au point hors pair que l’on compte parmi nos professionnels et qui en ont vu d’autres en matière de réglages ? Trotter, ça s’apprend. Et puis, surtout, cela a déjà été fait en 1953, avec l’époustouflant Jamin,

dont la grand−mère maternelle, Gla− dys, avait gagné à Saint−Cloud. Outre son influx nerveux, qui le rendait si combatif, il avait ce jeu de jambes bien à lui qui ne relevait pas et donc beau− coup d’envergure ; « rasant le tapis », il gagnait du temps, à chaque battue, et se fatiguait moins. Il marchait déjà 1’13''… il y a soixante ans ! Cette apti− tude lui venait des angles obliques de ses articulations – épaules et croupe − hérités du pur−sang.

Lauréate de trois Prix d'Amérique (1926, 1927 et 1928), Uranie est entrée au haras en 1930. Elle eut six poulains, dont les frères Kairos et Ogaden par The Great Mc Kinney, qui marqueront l'élevage du trotteur français. Photo : D.R.

Remerciements pour leur collaboration précieuse : François Gorioux (Haras du Lion−d’Angers), Pascal Garry (Arqana Trot), Colonel Loïc de la Porte du Theil (SECF), Ulf Nordin, Jean−Pierre Dubois. | 17


Visite guidée

par Franck Goerlinger

Grosbois,

le paradis des trotteurs Le centre international d’entraînement de Grosbois est considéré, à juste titre, comme le plus grand du monde. Focus sur ce qui fait de Grosbois une réussite depuis des années.

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L’ÉCOLE DES COURSES HIPPIQUES DE GROSBOIS

D

e grands noms sont déjà sortis de l’école des courses hippiques de Grosbois, tels Christophe Gallier (mentor du champion Jag de Bellouet), les frères Raffin (Éric et Olivier) ou encore plus récemment Alexandre Abrivard. Florence Pierret, direc− trice de l’école depuis trois ans, nous parle de son établis− sement : “L’école propose deux formations. Un Bac PRO

conduite et gestion de l’entreprise hippique en trois années et/ou un BTS analyse et conduite de stratégie de l’entreprise agricole en deux années. Actuellement, il y a 90 élèves répartis dans quatre classes. Trois classes de Bac PRO et une classe de BTS. À noter que le BTS est une nouveauté, puisque c’est la première année qu’il est proposé aux élèves. L’AFASEC a deux rôles. D’une part, un rôle de formation et, d’autre part, un rôle d’action sociale. En effet, les élèves formés dans notre établissement sont suivis tout au long de leur vie. Nous leur proposons des logements sur le domaine et sommes toujours présents pour eux. L’AFASEC propose aussi un service de restauration 365 jours par an pour tous les professionnels présents sur le domaine de Grosbois.” La directrice revient aussi sur le cadre dans lequel ses élèves évoluent : “Bien évidemment, les jeunes ont de la chance d’être à Grosbois. Ils travaillent sur de très bonnes pistes et côtoient les meilleurs professionnels du monde des courses.”

“Une mission de formation et d'action sociale”

Florence Pierret dirige l'école AFASEC de Grosbois depuis 2012. Photos : Scoop Dyga

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UNE MARÉCHALERIE ET UNE SELLERIE Dans les courses hippiques et plus particulièrement dans les courses de trot, avoir une bonne ferrure et donc avoir un bon maréchal−ferrant est in− dispensable. En tout, ils sont une di− zaine de maréchaux sur le site de Grosbois, mais Geoffrey Geiss est le seul à disposer de sa propre marécha− lerie. “Cela fait dix

des pensionnaires de Christian Bigeon et donc du champion Tiégo d’Etang. J'ai aussi comme clients Pierre Levesque, Franck Nivard et bien d'autres.” Le rôle du maréchal

est essentiel dans la réussite d’un cheval. Un trotteur, aussi bon soit−il, ne peut pas être performant s’il a une ferrure qui le fait souffrir. Le maré− chal doit en trou− ver une idéale pour chaque cheval. Autre service pro− posé aux profes− sionnels présents sur le domaine de Grosbois, une sel− lerie, où l’on peut se procurer tout ce dont on peut avoir besoin aux courses. Que ce soit pour le cheval ou pour l’homme.

“Des champions passent entre les mains des maréchaux”

ans que je suis à Grosbois. On est bien ici ; on s'occupe des meilleurs chevaux. Environ 150 sujets passent entre nos mains tous les jours. Je me déplace aussi, mais l’essentiel se fait à Grosbois et je ferre uniquement des trotteurs. Je m’occupe

Geoffrey Geiss est l'un des dix maréchaux en exercice sur le site de Grosbois. Parmi ses clients figure Christian Bigeon et donc Tiégo d'Etang... Photos : Scoop Dyga

CHRISTOPHE WALAZYC ET SES ÉQUIPES SUR LE FRONT 365 JOURS PAR AN Christophe Walazyc, régisseur du domaine de Grosbois depuis 2001, a 37 personnes sous sa responsabilité. Il a une équipe qui s’occupe des pistes, une autre des espaces verts et une dernière spécialisée dans le bâtiment. L’an− cien directeur d’une usine dans l’alimentaire nous parle de son action de tous les jours : “Notre rôle est de permettre

aux professionnels d’entraîner leurs chevaux dans les meilleures conditions. Qu’il fasse 30 degrés ou qu’il gèle, nos pistes doivent être parfaites tous les jours de l’année. Autant dire qu’en hiver, nous avons tout le temps un œil sur la météo. Quand il gèle ou qu’il neige, nous avons des équipes qui travaillent la nuit, pour que tout soit opérationnel à 7 heures du matin, l’heure de l’ouverture des pistes.”

Avec ses 420 hectares, le cen− tre d’entraînement est vaste :

“En hiver, il y a environ 1.500 chevaux à Grosbois, indique Christophe Walazyc, mais les professionnels ne se marchent pas dessus. Il y a tout de même 10 hectares de pistes et tout le monde a de la place pour s'entraîner ou juste faire des promenades. Il y a un “turn-over” qui permet à tout le monde de pouvoir travailler comme il le souhaite.” Considéré comme le plus grand centre d’en−

traînement au monde, Grosbois n’a pas d’équivalent. Cet− te renommée n’est pas le fruit du hasard : Christophe Wa− lazyc et ses équipes se démènent toute l’année pour of− frir les meilleures conditions de travail aux chevaux et aux entraîneurs.


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1. Le Château de Grosbois,

implanté en plein cœur du centre d'entraînement.

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2. Une classe de l'école AFASEC. 3. Un examen locomoteur

effectué par l'équipe vétérinaire installée sur place.

4. La magnifique statue de

bronze, qui trône au centre de la cour du musée consacrée au Trot.

5. Une des nombreuses allées de Grobsois.

Photos : Scoop Dyga et Christophe Lepetit

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PIERRE VERCRUYSSE ENTRAÎNE À GROSBOIS DEPUIS PLUS DE 25 ANS Installé sur le centre d’entraînement de Grosbois depuis 1988, Pierre Vercruysse s’occupe d’une dizaine de che− vaux et réside ici à l’année, au contraire de beaucoup d’en− traîneurs, qui posent leurs vali− ses uniquement lors du mee− ting d’hiver. Le champion du monde des drivers 2013, qui partira en Australie au mois de février pendant trois semaines, a déjà beaucoup voyagé dans sa carrière et a donc pu voir différents centres d’entraînement. Le professionnel n’y va pas par quatre chemins : “Grosbois est tout simplement

ce qu'il y a de mieux dans le monde. Au niveau des installations, on ne peut rêver mieux. Les pistes sont hyper bien entretenues. En ce qui concerne la localisation, on est très bien situé par rapport à Vincennes. Cela nous évite de faire de longs trajets pour aller aux courses. Le domaine est magnifique et fonctionnel. Que demander de plus ? On a beau être très nombreux, il y a de la place pour tout le monde. Avant de m'installer ici, j'ai été pendant cinq années aux États-Unis. Grosbois reste de loin le meilleur centre d'entraînement au monde.”

« Ce qui se fait de mieux dans le monde ! »

HUIT VÉTÉRINAIRES SUR LE CENTRE DE GROSBOIS La clinique vétérinaire de Grosbois compte huit vétérinaires. Les doc− teurs Richard Corde, Fabrice Rossi− gnol et Aude−Gaëlle Heitzmann sont associés et travaillent avec cinq colla− borateurs. Le docteur Corde, présent sur le do− maine de Grosbois depuis trente ans, nous parle de l’activité de la clinique :

“Nous nous occupons essentiellement

de trotteurs durant l'hiver, mais sur toute l'année, on peut dire que l'on a un tiers de chevaux qui sont des trotteurs, un tiers de chevaux de concours et un tiers qu'on peut qualifier “d'autres”. Nous avons des vétérinaires avec des spécialités. Par exemple, le docteur Rossignol est spécialisé dans la chirurgie.” Le rôle des vétéri−

naires est bien évidemment aussi très important sur le domaine de Gros− bois. La clinique dispose de très bon− nes installations et de grands noms font appel au service de la clinique.

“En effet, nous sommes très bien équipés, surtout en ce qui concerne la chirurgie osseuse ou digestive. Comme principaux clients, nous avons JeanMichel Bazire ou encore Franck Leblanc.” De très bons chevaux passent

Fabrice Rossignol (ci−dessus), Richard Corde (ci− contre) et Aude−Gaëlle Heitzmann travaillent avec cinq collaborateurs au sein de la clinique du centre de Grosbois. Photos : Scoop Dyga

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donc entre les mains des vétérinaires, surtout durant l’hiver.


Grosbois en chiffres

4 420

1.000

pistes extérieures

hectares

• une piste de 1.500 mètres (sur laquelle se déroulent les qualifications)

• une piste de 1.0OO mètres

40 Km d’allées cavalières, essen− tiellement utilisées pour les promenades.

nombre de personnes qui vivent sur le domaine durant l’hiver

(piste à l'intérieur de celle de 1.500 mètres)

• une piste de 1.000 mètres (piste du Château) • une ligne droite de 1.200 mètres (l'allée Royale)

1 piste couverte de

400 mètres

37

personnes travaillent pour l’entretien du domaine

365 les pistes sont ouvertes tous les jours de l’année

(entretien pistes, espaces verts et bâtiment)

1.500 1962 nombre de boxes occupés en hiver

date à laquelle le centre d’entraînement a été acheté par le Cheval Français

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Jeux / Paris

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Par Sylvain Copier Photos : Scoop Dyga

En course avec un spécialiste Un après−midi durant, nous avons suivi à la trace l’un des journalistes de “Paris−Turf”, Kévin Baudon. Histoire de voir comment il travaille en vue de livrer les informations clés en main aux turfistes pendant le meeting d’hiver de Vincennes…

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L’AVANT−COURSE

L

e rendez−vous est fixé à midi. Au côté du rédacteur en chef adjoint (trot), Vincent Béguin, Kévin Baudon est l’un des maî− tres du temps et du chronométrage de “Paris−Turf”. Alors qu’il a déjà une ou deux heures d’étude du papier derrière lui, il s’apprête à pousser la porte de son nouveau bureau : la salle de presse de Vincennes. Bien des tur− fistes aimeraient y bosser… Kévin n’est pas là pour jouer mais pour in− former. Il déploie la panoplie indis− pensable du parfait journaliste hippi− que : jumelles, ordinateur et… pas− sion. Portable branché, l’heure est venue de scruter une première fois la cendrée de Vincennes. On ne sait ja− mais. “De bons chevaux peuvent faire des heats, indique notre interlocu− teur. Une semaine avant qu'il fasse sa

rentrée, un certain Ready Cash s'est entraîné.” Le départ de la première

est dans une heure, les “tours de chauffe” commencent à s’intensifier sur la piste… Blouson vite renfilé, di− rection les écuries pour celui qui sera en charge de rédiger les fameuses “italiques”. Avec, peut−être, une info à la clé. Si tel est le cas, une ou deux Hot News seront tapées. Ce sont des informations de premières mains dont vous pouvez bénéficier en télé− chargeant l’application ”Paris−Turf Live” après vous être abonné. “Je

n'aime pas aller interroger les pros sans avoir fait le papier au préalable. C'est bien de dégoter des chevaux entre 5/1 et 10/1 pouvant servir de points d'appui. Sur une longue durée, le rapport risque/cote sur un favori n'est pas rentable. Malheureusement, en pratique, c'est très compliqué. Il ne faut pas oublier que le

Installée en hauteur, la salle de presse de l'hippodrome de Paris− Vincennes offre aux journalistes une vue imprenable sur la piste.

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Avant comme après la course, le contact avec les professionnels est essentiel pour un journaliste hippique.

cheval a des réactions ou un comportement imprévisible parfois”, pour−

suit notre journaliste de terrain. Une Hot News de qualité peut également être le fruit d’une réflexion personnel− le ou d’un canter “tape à l’œil”. Com− me une certaine Victoria du Jouan (Bruno Jolivet), lauréate d’un Quin− té+ à 40/1 fin décembre. Retour dans une salle de presse qui commence à s’animer. Normal, un super dimanche s’annonce en ce 28 décembre, avec en point d’orgue le Prix de Bourgo− gne. Le moment est venu de présen− ter la réunion du jour sur “paris− turf.com”. Une vidéo de quelques mi− nutes qui fixe le tempo de chaque réunion Premium : météo, état du ter− rain, éventuels non−partants, bruits d’écurie, moments forts du program− me… La profusion des informations sur internet et les réseaux sociaux est telle qu’il faut les cibler. “Tout en sa-

chant que le facteur chance interviendra toujours, insiste Kévin. Tout pronostiqueur est tributaire d'éléments

Le programme de courses, un support idéal pour noter le déroulement d'une épreuve, les chevaux repérés, malheureux...

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Chronomètre et jumelles en mains, Kévin Baudon a l'équipement clé du journaliste hippique pour suivre une course.

extérieurs qu'il ne maîtrise pas.” Parfois également, les journalistes tournent ce qu’on appelle une “minute ter− rain” pour alimenter l’émission quotidienne de pronostics sur le site de paris de “Paris−Turf”, Leturf.fr. TOP DÉPART DES COURSES Nous sommes dans le money time, Kévin regarde le pro− gramme, jette un œil sur les casaques qu’il connaît sur le bout des doigts. Il est prêt à signer les appréciations des 2e, 4e, 6e et 9e épreuves du programme. Mais pas que. Le bruit des clics du chronomètre retentira : “C'est vraiment

un plus que “Paris-Turf” propose aux parieurs. Vincent Béguin ou moi-même prenons des fractionnés de toutes les épreuves disputées à Vincennes, Enghien, Chartres ou La Capelle. Exemple : pour le parcours classique du Prix d'Amérique, on prend cinq temps partiels de l'animateur. Des 2.475 aux 2.000 mètres, des 2.000 aux 1.500, des 1.500 aux 1.000, des 1.000 au 500 et des 500 à l'arrivée. Il nous arrive aussi de chronométrer de bons éléments pendant la course, afin de mieux apprécier leurs performances. Un temps partiel très rapide peut parfois expliquer la contre-performance d'un cheval et faire relativiser une défaite. Ou au contraire faire penser qu'un compétiteur va doubler la mise lors de sa prochaine sortie.” Essayez,

cela nécessite une certai− ne dextérité. Ce qui diffé− rencie le journaliste hippi− que du turfiste, c’est que le premier construit une ap− préciation sur chaque con− current alors que, généra− lement, le parieur a les 28 |

yeux rivés sur le ou les chevaux qu’il a joué(s). Kévin note des positions et garde ses jumelles bien braquées sur le peloton. “Quand on fait des italiques, on travaille pour

l'avenir. C'est passionnant. Même si les interviews d'avant-course de professionnels sont très importantes pour établir des jeux, les appréciations objectives données sur chaque cheval qui accompagnent les résultats sont essentielles et enrichissent une base de données pour aider aux pronostics futurs. En ayant pratiqué dans les deux disciplines, on peut dire qu'il est plus délicat de faire les italiques au trot qu'au galop, car il y a plus de mouvements, d'accrochages, de chevaux gênés, et surtout il faut surveiller les allures. Mais la justesse de retranscription de la course est la même, c'est là que réside la difficulté. À Vincennes, il y a aussi plus de relais et d'attaques qu'en province où les positions demeurent relativement figées.” L’arrivée est provisoire, direction maintenant le magné− toscope ou la borne de replay installée par LeTrot. “Si

vous ne voulez rien manquer, vous êtes obligés de revoir la course. Je la regarde deux fois entièrement et quatre à cinq fois la ligne droite. Le plus important est de bien cerner le comportement et la réaction des trotteurs dans la phase finale, car c'est à ce moment-là que l'effort maximum leur est demandé. Sans perdre de vue les chevaux en retrait, ni ceux qui ont été disqualifiés. Vous pouvez repérer de bons finisseurs qui n'ont pas été sollicités outre mesure ou ceux qui ne déméritent pas après avoir fait des épaisseurs. Nous devons ensuite nous montrer le plus juste possible en soignant les termes employés lors de la rédaction.” Il

“Si vous ne voulez rien manquer, vous êtes obligés de revoir la course. Je la regarde deux fois entièrement et quatre à cinq fois la ligne droite...”

existe une graduation pour


qualifier les efforts. Exemple : a terminé correctement, honorablement, plaisamment, très bien, remarquable− ment. Après quinze minutes de replay, le journaliste a tout en tête et sait ce qu’il va rapporter sur chaque cheval.

“Bien que les vidéos se soient considérablement développées, on replace toujours chaque compétiteur dans le peloton. Il faut partir du principe que le lecteur n'a pas vu la course.” Les turfistes sont passés à l’étude de la prochai− ne épreuve, Kévin, lui, décortique et analyse la course qui vient de se dérouler. “À Vincennes, en salle de presse,

nous avons vraiment une vue privilégiée, car on peut regarder les heats des chevaux tout en travaillant. Il faut garder un œil sur la piste…” La prochaine sera le Prix de Bourgogne, où Ready Cash était tant attendu. “Je n'ai pas plus de pression que pour une autre course”, déclare−

t−il. L’habitude sûrement, pour celui qui a rédigé ses pre− mières italiques parisiennes il y a sept ans, un jour de “Bourgogne”…

“Il faut partir du principe que le lecteur n’a pas vu la course.”

DES ITALIQUES PRÊTES À ÊTRE LIVRÉES… Reste à cocher une petite case magique, celle des “meilleures impressions”. Elles ressortiront sous la forme “MI” lorsque les chevaux se représenteront dans une course Premium. “Le but est de ne choisir que deux ou

trois chevaux par réunion. Il s'agit de concurrents remarqués. On est très vigilants, car on sait que les turfistes sont, à juste raison, très attachés à cette information.” S’il

n’a pas la chance d’être “MI”, un cheval pourra toutefois être retenu pour intégrer la rubrique “Dans les jumelles de nos spécialistes”, que vous retrouvez dans “Paris−Turf” chaque samedi. “Là encore, tout l'intérêt est de se montrer

sélectif. Moi j'aime bien choisir des chevaux que j'avais repérés au papier au préalable et qui se sont bien défendus. Exemple, aujourd'hui (N.D.L.R. : le 28 décembre), j'ai choisi Bahamas, car j'estime que, pour sa rentrée, le poulain a bien tenu sa partie en terminant quatrième et sera en mesure de s'imposer lors de sa prochaine sortie. Et si ce n'est pas dès sa sortie suivante, il ne faut pas abandonner immédiatement un cheval repéré.” Après avoir répertorié les chevaux qui se sont entraînés et photographié les communiqués des Commissaires en vue de les glisser sur “paris−turf.com”, la rédaction de ces ju− melles est l’ultime boulot de la journée. Voilà, la boucle est bouclée. Demain sera un autre jour, fait de nouvelles tâches pour Kévin, comme la rédaction d’arti− cles ou la réalisation de pronostics.

La borne de replay, disponible en salle de presse, permet au journaliste de revoir la course autant de fois qu'il est nécessaire afin de bien cerner le comportement des chevaux dans la phase finale.

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Rencontre

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Thierry Jarnet, Joël Hallais et Guillaume Macaire, trois grands noms des courses réunis le temps d'un après-midi à Vincennes...


Par François-Charles Truffe - Photos :Scoop Dyga

L'avis d'artistes... Guillaume Macaire, Joël Hallais et Thierry Jarnet... Les réunir tous les trois n'aura pas été facile. La présence d'Un Gars du Large en décembre à Vincennes nous en a donné le prétexte. Un pur moment de bonheur que nous sommes fiers de vous offrir. Conversation à bâtons rompus entre trois grandes figures de la profession, alliées par une même passion, et sans doute un peu fous pour y consacrer presque toute leur vie.

Paris-Turf : Qui n'a pas lu le livre de Guillaume ? Joël Hallais : Je l’ai lu avec plaisir. Et cette histoire un peu rocambolesque de cheval kidnappé m’a rappelé l’enlè− vement d’Hurgo à la fin des années 70. Thierry Jarnet : J’avoue. Je ne l’ai pas lu. PT : Eh bien en voilà un exemplaire, vous avez deux heures pour le lire. Après, je ramasse les copies. Thierry Jarnet : OK. Je vais le faire dédicacer par Guillaume.

T.J. : Non. Le matin, je me contente d’un café et d’un morceau de brioche, sans éprouver la sensation de priva− tion. Au contraire, quand je mange trop, je ne suis pas bien. Pour moi, ce n’est pas une contrainte. Seulement une habitude que mon corps accepte parfaitement. En plus, je ne suis pas gourmand. Seulement gourmet. G.M. : Très souvent, on est les deux à la fois… T.J. : Au trot, la notion de poids a−t−elle autant d’importance qu’en plat ? Dans la première épreuve, il y a douze kilos d’écart entre certains concurrents. Ce− la me paraît énorme.

Guillaume Macaire : Bien volontiers. Joël Hallais : Suis−tu toujours un régi− me, Thierry ? T.J. : En principe, je m’accorde un re− pas par jour, le soir. Je mange un petit peu le midi quand je n’ai pas de com− pétition comme aujourd’hui. Je peux monter à 52 kilos, sans aucun problè− me. Je pourrais même aller en des− sous, avec régime draconien et séan− ces de sauna. Mais je n’en vois guère l’intérêt.

J.H. : Oui, cela joue un rôle très impor− tant. À plus forte raison avec la monte en avant. Au galop, je crois que l’on part du principe qu’un kilo vaut une longueur. Au trot, c’est sans doute moins mais un apprenti qui bénéficie de dix kilos de décharge part effective− ment avec un avantage considérable. G.M. : Un cheval qui fait cent kilos de plus qu’un autre portera mieux le poids. La notion du poids par rapport à des valeurs reste donc un peu sub− jective.

J.H. (admiratif) : 52 kilos. Un seul re− pas le soir. Et tu en souffres ? | 31


Entraîner un trotteur et un galopeur : deux métiers si différents ? Un sujet passionnant qui n'a pas manqué d'animer cette conversation...

PT : Il existe tout de même beaucoup de similitudes entre le métier d'entraîneur d'obstacle et celui d'entraîneur de trotteurs. D'un côté comme de l'autre, on façonne les chevaux. D'ailleurs, vous-même Guillaume, vous aviez un jour utilisé l'expression “formater” dans nos colonnes. G.M. : C’est bien pour cela que l’on parle de sport illégitime, contraire− ment au plat, considéré comme le sport légitime. La classe pure, ce que les anglais appellent le “turn of foot” représente cette faculté à changer de vitesse, à un moment donné, quel que soit la distance de la course ou le ryth− me imposé. Pour que cette qualité in− trinsèque s'exprime, il n’y a pas telle− ment à interférer. En revanche, l’obs− tacle est une discipline avec une technique, comme le ski, le tennis ou le piano. Il y a une gestuelle qu’il faut entretenir. La valeur ajoutée du tra− vail de l’homme est très importante, exactement comme au trot. Le façon− nement du cheval dès son jeune âge joue un rôle décisif. Et quand on a un ou deux coups d’avance, on peut par− fois les garder avec des chevaux qui ne sont pas forcément des cham− pions, mais de très bons ouvriers, très efficaces dans ce qu’ils font. La gran− de différence entre le plat et l’obsta− cle, c’est que le gagnant d’une course d’obstacle n’est pas forcément le meilleur, mais c’est toujours le moins fatigué. En plat, si cela se déroule de manière sélective, de manière équita− 32 |

ble, ce sera le meilleur qui gagnera. Le cheval de grande classe sera toujours au−dessus des autres. J.H. : Le trot, c’est effectivement de la mécanique de précision. Les heats, par exemple, nous permettent d’ef− fectuer les derniers petits réglages, souvent déterminants. Aujourd’hui, Un Gars du Large me donne l’impres− sion de pousser un peu à droite. Mais je ne vais rien changer. G.M. : J’ai appris que tout ce que l’on voulait rectifier par la contrainte ag− gravait les choses. Il y a toujours des chevaux qui sont droitiers ou gau− chers. Avant, quand je dressais les poulains, je voulais redresser, en do− minant le sujet. Cela ne servait à rien. Désormais, dans chaque lot, j’alterne un droitier et un gaucher, avec un che− val droit devant. Par instinct grégaire, les chevaux se corrigent d’eux−mê− mes. Les sauts sont plus fluides. Les chevaux font moins d’efforts. Comme je le disais tout à l’heure, c’est tou− jours le moins fatigué qui gagne. Il y a un truc amusant, que je conseille quel− quefois à mes propriétaires : observer les toques le matin à l’entraînement. Celle qui monte moins haut que les autres indique souvent le sauteur le plus efficace. En descendant de che− val, les jockeys anglais disent souvent après une prestation décevante : “He

was never happy. Il n'était jamais heureux.” En France, on dirait plutôt, “Je n'ai jamais eu de gaz ou je n'avais rien dans les mains.” Pour moi, même

“La grande différence entre le plat et l'obstacle, c'est que le gagnant d'une course d'obstacle n'est pas forcément le meilleur, mais c'est toujours le moins fatigué” Guillaume Macaire


“Il n'y a pas de chevaux qui ne veulent pas faire, il n'y a que des gens qui leur expliquent mal” Guillaume Macaire si les cavaliers français n’ont rien à en− vier à leurs homologues britanniques, bien au contraire, je trouve que cette expression a du sens. Dans notre mé− tier, on a souvent beaucoup moins à gagner à corriger les défauts d’un cheval, plutôt que de cultiver ses qua− lités. Le cheval est un animal extrême− ment généreux, capable de tout don− ner, mais on n’obtiendra rien de lui par la brutalité. Joël Hallais s'adressant à Thierry Jarnet : Je suppose que certains pur− sang ont également tendance à cher− cher un appui d’un côté ou de l’autre. T.J. : Cela arrive effectivement. Mais nous n’avons pas beaucoup d’artifi− ces pour les éduquer. On peut utiliser une brosse (N.D.L.R. : rattachée au mors et qui pique plus ou moins), mais le résultat n’est pas toujours satisfai− sant. J.H. : Les artifices, je ne les utilise pra− tiquement plus jamais en course. Mais il faut évidemment consacrer pas mal de temps le matin au travail avec son cheval pour qu’il puisse s’en passer l’après−midi.

col. C’est la meilleure façon d’avoir vraiment le contact quand on monte court. G.M. : Il faut que la soumission vienne du cheval lui−même, et que le rôle de l’homme soit salvateur. Comme tou− jours, les champions gomment les er− reurs de l’homme. Les mauvais, en re− vanche, les soulignent en rouge. Quand un cheval a tendance à bran− cher, je préfère modifier son pro− gramme, et le laisser tranquillement au marcheur. Au bout de deux jours, c’est lui−même qui demandera à sor− tir. Inutile de se bagarrer. J’ai des che− vaux difficiles qui se sont beaucoup améliorés en procédant de cette ma− nière. Vous ne verrez d’ailleurs jamais deux chevaux s’affronter de face dans un pré. Le dominant prend vite l’as− cendant et c’est fini. Il faut travailler dans l’instinct grégaire. Moi, je dis tou− jours à mon personnel, il n’y a pas de chevaux qui ne veulent pas faire, il n’y a que des gens qui leur expliquent mal. J.H. : Comment procèdes−tu Thierry, quand tu te retrouves mal embarqué durant le parcours avec un cheval qui devient incontrôlable ?

T.J. : On essaie de le contrer un peu, mais il n’y a pas beaucoup de possibili− tés. Cela m’est déjà arrivé. En descen− dant de cheval, je peux suggérer à son entraîneur de changer de cavalier. Il y a des chevaux qui ne s’entendent pas avec certains jockeys. Mais la plupart du temps, cela provient d’un souci d’ordre physique. Quand un cheval se comporte de cette manière, c’est sou− vent qu’il souffre de quelque chose. À moins qu’il s’agisse d’un problème de dressage. G.M. : Un cheval peut se détruire à pe− tit feu quand le dressage est réalisé en dépit du bon sens. T.J. : Je m’aperçois que beaucoup de chevaux s’appuient plus d’un côté que de l’autre. Et très souvent, c’est le cavalier qui lui donne cette mauvaise habitude qui limite ensuite les possi− bilités et le rend plus vulnérable en compétition. Le cheval idéal, c’est ce− lui qui réagit à la demande, peut se glisser dans un trou de souris, baisse immédiatement en régime quand on lui demande de se reprendre, ne fait jamais d’efforts inutiles comme le dit Guillaume.

G.M. : Il y a quand même une différen− ce majeure : avec un galopeur parfai− tement détendu, tu as cinq grammes dans chaque main. Avec un trotteur, tu auras toujours de l’appui. J.H. : Oui, c’est vrai, mais j’essaie jus− tement d’avoir mes chevaux avec un contact qui soit le plus léger possible. Ton cheval, Un Gars du Large, en est justement l’illustration. Tiens, tout à l’heure quand nous descendrons aux écuries, tu demanderas à son cava− lier pourquoi il monte avec deux rê− nes. G.M. : S’il a son idée, je la respecterai. J.H. : On place la rêne sur un petit li−

Que ce soit au trot ou au galop, “régler” un cheval est tout un art. Et comme le souligne justement Guillaume Macaire : “Les champions gomment les erreurs de l’homme. Les mauvais, en revanche, les soulignent en rouge”.

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Si la présence d'Un Gars du Large à Vincennes à aider à l'organisation de cette rencontre entre Guillaume Macaire, Joël Hallais et Thierry Jarnet, sa victoire ce jour−là lui aura également permis de participer à cette “fête”.

J.H. : Je crois que nous sommes d’ac− cord pour affirmer qu’il en est de mê− me dans les trois disciplines.

“Parfois, j'aime dire que notre métier s'apparente à celui du cirque” Joël Hallais

G.M. : C’est le point commun d’un équitant. Toutes les subtilités du dres− sage servent les trois disciplines. La recherche de l’équilibre est une no− tion fondamentale. Un trotteur mon− té, comme un galopeur, fluidifie sa foulée quand il monte son garrot. J.H. : Quand je parviens à régler un trotteur à la perfection, que je l’ai vrai− ment bien, j’ai justement le sentiment d’avoir sous mes yeux un cheval de dressage. Je l’ai au bout des doigts. Je sais que son partenaire s’entendra à merveille avec lui. Une grande satis− faction professionnelle. T.J. : Il n’en demeurera pas moins que certains pilotes s’entendront mieux avec lui que d’autres. J.H. : Si ton cheval est vraiment bien mis, tu dois pouvoir mettre n’importe qui. Au trot, dans les courses d’ama− teurs, on peut confier son cheval à l’épicier du coin.

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T.J. : À mon avis, il ne faut pas renou− veler l’expérience trop souvent. À moins que l’épicier soit rudement doué, on prend tout de même le risque que tout le travail réalisé soit mis à mal… J.H. : Même si je n’aime pas trop cette image, le cheval parfait est un peu ro− botisé. G.M. : D’ailleurs, les chevaux adorent cela. Ils aiment répéter ce qu’ils font. Une fois qu’ils maîtrisent ce qu’on leur demande, cela se passe très bien. J.H. : Parfois, j’aime dire que notre métier s’apparente à celui du cirque. Parce que nous apprenons à nos che− vaux un numéro. On travaille le physi− que, mais avec les règles du dressage. T.J. : Mais, contrairement à ce que l’on pourrait penser, notre métier n’est pas répétitif. G.M. : On apprend de nouveaux trucs tous les jours. On n’aura jamais fini d’apprendre. Heureusement d’ailleurs.


“François Boutin comparait la qualité d'un cheval de plat à une perle enfermée dans son écrin, qui perdrait de son éclat à chaque fois que l'on serait tenté de l'ouvrir pour vérifier qu'elle est toujours là.” Guillaume Macaire J.H. : Surtout avec les jeunes. Après, le cheval connaît son numéro sur le bout des sabots. G.M. : Il peut tout de même déraper un peu... T.J. : Ou se lasser. G.M. : Cela me fait penser à cette phrase de Churchill : “Tout le monde

savait que c'était impossible à faire. Puis, un jour, quelqu'un est venu qui ne le savait pas, et il l'a fait.” Souvent,

on entend des gens dire que cela n’ira pas avec tel cheval. Mais le bon pro− fessionnel, c’est celui qui ne s’enfer− me pas dans un carcan d’idées. C’est comme l’histoire des deux rênes. J.H. : Ah je te vois venir… G.M. : Je te taquine. T.J. : Un cheval compliqué, quand il est régulièrement monté par un cava− lier qui le comprend bien, se gère par− faitement. En revanche, si vous con− fiez un cheval gentil à un mauvais ca− valier, vous allez vous créer des problèmes. Je l’ai souvent constaté, notamment à l’entraînement, en se− condant ma compagne, Sandrine Tar− rou. G.M. : Il faut lire le livre du grand cava− lier et dresseur Monty Roberts. C’est très instructif. Avant, on nous disait : “Ton cheval ne veut pas céder, mets

deux points de plus à la gourmette (N.D.L.R. : une chaîne rattachée au mors afin de tenir le cheval en res− pect)”. En gros, c’était cela. J.H. : La méthode de l’armée !

G.M. : Qui a perduré longtemps. En fait, pour donner à un cheval les moyens de s’exprimer, il faut d’abord le comprendre et s’accorder avec lui. C’est ce qui rend notre métier pas− sionnant. Le même cheval, dans une maison qui ne l’aura pas compris, prendra 20.000 euros en course. Dans une autre, le double ou le triple. On peut toujours sublimer un cheval mais, au départ, l’élite ne représente− ra que 5 % de la population totale des naissances. Des chevaux très bien nés peuvent se révéler mauvais. L’inverse se vérifie rarement. Au trot, les con− tes de fées existent encore, mais de moins en moins. La race s’est délimi− tée. J.H. : Au trot, il est encore possible de rêver. C’est aussi ce qui fait la beauté des courses de trotteurs. Idéal du Ga− zeau ou plus récemment Général du Pommeau en sont de beaux exem− ples. Personnellement, j’ai eu la chan− ce d’acheter Ursulo de Crouay aux ventes de Caen pour un prix dérisoire. PT : Le monde du trot a également subi d'énormes mutations au cours des deux dernières décennies. Il y a la monte en avant, le déferrage, l'entraînement fractionné… J.H. : L’entraînement fractionné exis− te depuis la nuit des temps. En ce qui me concerne, j’ai toujours travaillé de cette manière. T. J. : Un pur−sang risque de monter trop vite en pression avec le travail fractionné. G. M. : François Boutin comparait la qualité d’un cheval de plat à une perle enfermée dans son écrin, qui perdrait | 35


de son éclat à chaque fois que l’on se− rait tenté de l’ouvrir pour vérifier qu’elle est toujours là. Cette qualité est innée. Il faut la préserver. Avec le cheval d’obstacle, c’est différent. On travaille le fond. On fait du cardio. Avec les chevaux tendus que je ne peux pas beaucoup sauter parce qu’ils se négligent, je demande qu’ils galo− pent sur le plat, par intervalles sur une côte.

“C'est frappant quand on visionne des courses des années 80. Les trotteurs ressemblaient à des chars d'assaut. Aujourd’hui, ils sont assez petits, profilés, très véloces” Thierry Jarnet

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J.H. : Nous, au trot, si on travaille un cheval en fractionnés à bonne vitesse, il peut très vite se tendre. G.M. : Moi, cela ne les tend pas du tout. J.H. : C’est justement ce qui m’éton− ne. G.M. : Précision importante, je prati− que sur les pistes en montée. Même les plus ardents ne tirent plus du tout. J’ai des chevaux que je ne peux pas entraîner dans ma première cour. Ils tomberaient cinglés. Mais sur les ins− tallations que j’ai depuis aménagées avec une piste en bois de 950 mètres d’un dénivelé d’environ 5 %, on peut faire ce que l’on veut. Les chevaux ne s’énervent pas. Comme avec les trot− teurs, on fait une récupération active et cela se passe très bien. Le cheval est un animal par nature stressé, et notre boulot consiste justement à le “zénifier”. J.H. : Ce qui m’a toujours surpris, c’est

la rapidité avec laquelle un galopeur se prépare. C’est beaucoup plus long avec un trotteur, même bien mécani− sé. Je prends l’exemple d’Un Gars du Large que j’ai arrêté un an, car je trou− vais ses gains un peu élevés. Pour le remettre en route, il m’a fallu six mois. Les organismes ne réagissent pas de la même manière. G.M. : Certes, mais il ne faut pas sous− estimer l’influence des saisons sur le métabolisme. Dès qu’il y a de la photo− synthèse, les chevaux progressent très vite. J.H. : Tu veux dire que la lumière joue un rôle important dans la préparation physique des chevaux. G.M. : Un rôle énorme. Des chevaux qui passaient une partie de l’hiver de− hors ont gagné avec seulement une quinzaine de jours de travail. J.H. : Inimaginable au trot. Quand je passais le meeting d’hiver à Grosbois, je savais que, si je n’amenais pas des chevaux au top à la mi−novembre, les résultats ne seraient pas à la hauteur de mes espérances. T.J. : Les conditions atmosphériques ne facilitent pas la tâche. Le corps lut− te contre le froid ou les virus. C’est for− cément plus compliqué. G.M. : Avec les 2 ans, je dis souvent à mes clients que l’on essaie de les met−

Guillaume Macaire croit fermement au destin. Un destin qui l'a amené à s'associer avec Joël Hallais sur Un Gars du Large , un jour de ventes à Deauville...


tre au boulot avant le solstice d’été, quand ils ont encore le poil ras. On peut les couvrir de bonne heure, et ces poulains ne font pas de poil. Si on les prend seulement quinze jours après cette date, c’est foutu, la nature a déclenché la pousse du poil. Il faudra les tondre, ce qui n’est pas forcément souhaitable. PT : Parlons un peu de la monte en avant qui a révolutionné le monde du trot. J.H. : Philippe Masschaele en a été le grand instigateur. Un cavalier extra− ordinaire. C’est également en voyant à l’œuvre Jeanny Leclet que j’ai été définitivement convaincu. Il n’était pas profilé à cheval et, pourtant, mê− me en se tenant debout, son partenai− re réalisait de meilleures performan− ces qu’avec un cavalier montant long. Là, effectivement, je me suis dit que nous avions été à côté de la plaque. G.M. : Cent ans de retard avec le ga− lop ! La monte traditionnelle et empe− sée, qui se pratiquait en Europe, a été révolutionnée par la venue des Améri− cains au début du XXe siècle, et notam− ment par Tod Sloan qui s’est offert le luxe de signer une quarantaine de vic− toires durant la seconde moitié d’une saison, avec seulement quatre−vingts montes. C’est ce que je raconte dans mon prochain livre. T.J. : En plat, la position à cheval a en− core évolué assez récemment. Désor− mais, tous les cavaliers prennent ap− pui sur l’étrier avec la pointe du pied, alors que l’usage était de mettre le pied à fond dans l’étrier. C’est Cash Asmussen qui a été le principal artisan de cette nouvelle façon de monter que j’ai moi−même adoptée dès mon retour après un séjour aux États−Unis. Quand la monte en avant est apparue à Vincennes, j’ai tout de suite compris que cette évolution était irrémédia− ble. En voyant cette harmonie, la posi− tion sur l'encolure devenait une évi− dence. G.M. : Le mimétisme explique pour− quoi les évolutions se font par palier. Il y a des phénomènes de mode. On n’ose pas sortir des sentiers battus. Et puis, brusquement, quelqu'un teste

avec succès une nouvelle méthode, que tout le monde ensuite adoptera. Churchill l'a dit... PT : Il y a deux cents mètres d'écart entre Kaiser Trot et le dernier vainqueur du “Cornulier” ! J.H. : Kaiser Trot, aujourd’hui, n’aurait pas été ridicule dans le “Cor− nulier”... G.M. : Oui, parce qu’il serait entraîné et monté selon les nouvelles métho− des. On ne peut pas comparer les champions d’époques différentes. Ce− la étant dit, la race de trotteur a forte− ment évolué. T.J. : Sur le plan morphologique. C’est frappant quand on visionne des cour− ses des années 80. Les trotteurs res− semblaient à des chars d’assaut. Aujourd’hui, ils sont assez petits, pro− filés, très véloces. G.M. : Influence du sang américain. Remington Crown, présenté en main, vous ne pourriez pas dire qu’il s’agit d’un trotteur. JH : Là, tu as choisi l'exemple parfait. Remington Crown était un cheval magnifique. Rappelons également que Jamin, cheval splendide, magnifi− que dans ses allures, d’une classe ex− ceptionnelle, était un arrière−petit−fils de pur−sang... PT : Croiser le meilleur avec le meilleur, est-ce une vérité d'évidence en matière d'élevage ? G.M. : Si c’était aussi simple, seuls les gens riches auraient des champions. J.H. : Les critères que je privilégie dans mes croisements sont l’aptitude à trotter, le modèle et le caractère. Quand j’ai commencé à faire de l’éle− vage, j’avais tendance à choisir en priorité les juments ayant des origi− nes. Mon vétérinaire m’a alors fait re− marquer que cette règle n’avait rien donné de bon chez Marcel Boussac, où il avait longtemps travaillé. J’en ai pris bonne note. Depuis, les études que nous avons entreprises avec la commission de l’élevage confirment largement ce jugement. Chez les ju− | 37


te avait été transmis par la génétique. C’est troublant tout de même. J’aurais dû garder les preuves de tout cela. G.M. : Pour moi, les gènes transmet− tent l’aptitude, mais pas la qualité. Ce− la explique, peut−être, pourquoi une poulinière produit bien un coup et pas bien la fois suivante. T.J. : Il existe des poulinières qui pro− duisent un bon cheval quel que soit l’étalon.

ments de sixième catégorie, non qua− lifiées mais repêchées car issues de juments de première et deuxième ca− tégories, le taux de réussite s’élève à 27 %. Chez les juments de première catégorie, qui elles ont brillé en com− pétition, le taux de réussite selon les mêmes données atteint 70 %. Les statistiques sont éloquentes. G.M. : On ne maîtrise pas l’élevage comme l’entraînement. Au bout de trois mois, on peut savoir si un cheval est bon. Par contre, avant de réaliser qu’une jument produit bien ou mal, des années peuvent se passer. En tout cas, les juments qui ont beaucoup donné sur la piste ne reproduisent pas toujours très bien au début, même si cela ne se vérifie pas à chaque fois. J.H. : Écoutez cela, j’ai remarqué une fois ou deux à la maison que la marque d’une blessure d’une poulinière se re− trouvait sur son poulain exactement au même endroit.Comme si ce stigma−

G.M. : Alors, j’ai une théorie là−dessus. Les juments qui ne peuvent produire qu’un produit par an offrent une bien plus grande diversité que les étalons très sélectionnés. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle on a coutume de dire que la mère joue un rôle plus im− portant. J.H. : Je pense que nous serons tous d’accord pour dire que le bon cheval est généralement un beau cheval. G.M. : Alors que l’inverse ne se vérifie pas toujours… PT : Est-ce que vous croyez au destin ? G.M. : Moi, je crois que le destin nous envoie de temps à autre des signes, et il nous importe alors de les saisir ou les interpréter. L’aventure que nous me− nons ensemble, Joël Hallais et moi, peut d’ailleurs en être l’illustration. Un jour à Deauville, j’achète un beau pou− lain, qui valait un peu de sous. Séduit lui aussi par ce cheval, Christophe Ger− man, qui était juste à côté de moi, vou− lait que je lui vende une part. Et c’est lui qui m’a proposé de nous associer avec

Joël Hallais, puisqu’ils étaient très liés. Voilà comment tout cela a commencé. Il faut croire que les choses avaient une logique et une raison d’être. J.H. : Christophe German est le petit− fils d’Alfred Lefèvre pour lequel j’ai travaillé douze ans, avant de m’instal− ler à mon compte. G.M. : Le plus grand marchand de che− vaux que la France ait connu. J.H. : Quand j’étais à son service, il me demandait souvent de l’emmener aux courses. Mais, comme il avait toujours une ou deux affaires à traiter sur le trajet, nous arrivions parfois sur l’hip− podrome en retard, même après la course. “Ce n'est pas grave, me disait−il. Tu as été remplacé et voilà tout.” Ce jour− là, j’avais donc servi de chauffeur. Mais c’était un homme exceptionnel. Quand il nous a quittés à l’âge de 83 ans, il possédait encore mille chevaux. PT : Quel conseil donneriez-vous à un jeune souhaitant se lancer dans le métier ? J.H. : Avoir un sacré moral. T.J. : Cela devient tellement difficile… Être motivé, très motivé. G.M. : Avoir la passion chevillée au corps. N.D.L.R. : Un Gars du Largea gagné ce dimanche-là à Vincennes.

“C'est la passion qui fait venir l’argent, et non l'inverse. Et comme je l'ai déjà dit, celui qui perd sa passion, perd beaucoup plus que celui qui se perd dans sa passion” Guillaume Macaire 38 |


Revenir aux fondamentaux J.H. : Il y avait beaucoup de monde à Deauville pour le mouvement de mé− contentement ? T.J. : Une centaine de personnes. Beaucoup se sont “déballonnés” au dernier moment. G.M. : Il n’y a pas d’union, pas de soli− darité. C’est pour cela que l’on ne peut pas être crédible. Si cela ne vient pas d’en haut, cela ne marchera pas. Au trot, vous ne connaissez pas cela. J.H. : On communique plutôt bien en− tre nous. Ici, on est tous éleveur, en− traîneur, propriétaire, driver. On fait tout en même temps. À partir de ce moment−là, cela nous permet d’être bien représentés. De participer com− plètement à la gouvernance. L’aug− mentation de 1 % de l’enveloppe des allocations est à cet égard un signal fort. G.M. : Que l’on me pardonne par avan− ce, mais je vais devoir être extrême− ment franc. Beaucoup de mes confrè− res pensent d’abord à leurs intérêts particuliers pour les six mois qui vien− nent, plutôt que l’intérêt général dans un avenir plus lointain. Voilà com− ment se bâtissent les programmes. Au trot, il existe une vraie solidarité. Au galop, elle n’existe pas. J’en ai mê− me fait l’amère expérience dans ma

région de Royan où, par exemple, il n’a pas été possible de trouver un consensus pour organiser les dépla− cements. Cette grande différence s’explique sans doute par l’histoire, la culture. Au trot, c’est directement du producteur au consommateur. La ge− nèse des courses au galop est totale− ment différente. En France, il n’y a plus de grands propriétaires français, exception faite d’Augustin−Normand. En Angleterre, la troisième ou qua− trième chose que va acheter la per− sonne qui a réussi dans la vie est un cheval de course. Cela fait partie d’une culture. En France, c’était com− me cela avant. Les grands gens fai− saient naître pour courir, et non pour gagner de l’argent. Autrefois, un che− val comme Frankel aurait couru une année de plus. T.J. : Il aurait également participé à “l’Arc”, et gagné. J.H. : Cela, c’est la grande différence avec vous. Nos chevaux courent long− temps. Le cas de Trêve est rarissime. Tenter un troisième “Arc”, c’est ex− traordinaire. Chapeau à l’entourage. G.M. : Mais c’est une femelle. C’est dif− férent. J.H. : C’est effectivement l’aspect fi− nancier qui a fragilisé le système.

Guillaume Macaire, Joël Hallais, Thierry Jarnet ont embrassé leur métier par passion et non pour l'argent. Tous les trois s'accordent à dire que le sport, le spectacle ou encore l'amour du cheval, doit primer sur le business, et redevenir ainsi le socle de notre système.

G.M. : Nous tous, nous avons embras− sé cette profession pas pour l’argent, mais par passion, ou par plaisir. Il faut être amateur dans son cœur, profes− sionnel dans ses actes. C’est l’une de mes devises. J.H. : Il faut effectivement revenir aux fondamentaux. Le spectacle. La pas− sion des courses, l’amour du cheval. Le sport. Et non le business. Depuis une quinzaine d’années, on s’est éloi− gné progressivement de ces principes de base qui représentaient le socle du système. Les courses sont un specta− cle, un sport, un jeu. Ces dernières an− nées, on a privilégié le jeu. Le specta− cle est devenu secondaire. À trop vou− loir développer l’offre, on a dévalorisé le produit. On a banalisé le spectacle. G.M. : C’est la passion qui fait venir l’argent, et non l’inverse. Et comme je l’ai déjà dit, celui qui perd sa passion, perd beaucoup plus que celui qui se perd dans sa passion. Aujourd’hui, on a bâti un système industriel, voire “in− dustrieux”, et on a maintenant le re− tour du bâton. J.H. : J’ai eu l’occasion d’aller aux courses aux États−Unis, à Yonkers. Au bout de trois ou quatre épreuves, la lassitude s’est installée. Toujours le même parcours. Toujours le même scénario : des chevaux rangés deux | 39


“Beaucoup de professionnels, et moi le premier, ne regardent plus les courses avec autant d'assiduité qu'avant” Thierry Jarnet par deux sur 1.600 mètres. Et j’ai pris alors conscience du danger de la ba− nalisation du spectacle. T.J. : Beaucoup de professionnels, et moi le premier, ne regardent plus les courses avec autant d’assiduité qu’avant. Je comprends que les tur− fistes peuvent se lasser et perdre la passion. G.M. : En Angleterre, Thierry, les crack−jockeys sont traités de la même manière que s’ils étaient des rock stars. Quand je pense que la Reine d’Angleterre m’a fait appeler dans sa loge le jour d’une victoire à Chelten− ham, j’en reste encore émerveillé.

40 |

J.H. : La notion de spectacle est es− sentielle. Si nous l’oublions, nous cou− rons un grave danger. Le jeu ne suivra pas sans le spectacle. Et je ne parle pas des contraintes que nous subis− sons avec les nouveaux horaires. Au trot, on fait tout. On ne peut donc plus exercer son travail comme on le sou− haiterait. Il faut tout faire à la va−vite. G.M. : Quelle tristesse de voir des courses se disputer devant des tribu− nes vides ! Si les gens perdent l’habi− tude de se déplacer sur les hippodro− mes, ils ne viendront plus. J.H. : Un exemple parmi tant d’autres. La belle réunion de fin d’année à Ar−

gentan, qui s’adresse à des chevaux de classe, débute désormais en fin de matinée. À 11 heures, lors du départ de la première, il n’y avait pas un chat. Vers 12 h 30 heures, en me rendant sur le parking, j’ai croisé des gens qui se rendaient sur l’hippodrome, sans savoir que nous entamions la secon− de moitié du programme. Ils étaient dépités. Si nous ne protégeons pas ces réunions de qualité, nous courons à la catastrophe. T.J. : Sans compter le fait que l’ac− cueil ne suit pas. Lors d’une semi−noc− turne à Saint−Cloud, il était impossible de prendre une collation, même un café, une demi−heure avant le début des opérations. Je n’ose me mettre à la place du propriétaire arrivant un peu en avance de l’étranger. J.H. : S'il faut maintenant emmener sa thermos sur l’hippodrome…


Évolution

Par Sylvain Copier et Vincent Béguin

Le Trotteur Français à l'échelle mondiale Des États−Unis à la Russie, en passant par l’Afrique du Sud, l’Allemagne ou l’Espagne, dorénavant 28 pays ont signé la Convention du Trotteur Français (“TF”) avec la SECF. Gros plan sur le développement de cette race à l’international…

L

e 28 novembre à Vincennes, la SECF fêtait comme il se doit le « Trotteur français » (TF). Et ce devant de très nombreux éleveurs et représentants de dif− férents pays liés depuis peu ou non avec elle en ayant signé la convention de production du Trotteur fran− çais. En 2013, tandis que 11.322 « TF » ont été immatri− culés en France, 228 l’ont été dans l’un de ces pays. « De-

puis le début des années 2000, nous avons engagé de nombreuses actions à l'international. Elles répondent à une ambition forte : celle de partager avec ceux qui le souhaitent la passion de l'élevage du Trotteur Français. Je dirais même le pur-sang français trotteur », prononçait lors

de cette soirée le président du Trot, Dominique de Bel− laigue. Avant de poursuivre : « Le Trotteur Français n’a jamais été aussi international ! » En effet, cette race du « TF » que les turfistes apprécient tant s’exporte de plus en plus. Désormais, 28 pays ont signé la convention du Trot− teur Français (sept en 2014). Et d’autres devraient en fai− re de même en 2015. Au niveau des ambitions, l’Irlande est un pays très actif, et l’objectif est d’exporter plus de 100 chevaux « TF », tandis que l’Australie souhaite égale− ment développer un élevage « TF ». Depuis 2012, plus d’un trotteur sur deux né dans un pays membre de l’UET est un Trotteur Français. Toutefois, le président de l’UET, Jean−Pierre Kratzer insiste sur le fait que les accords n’ont de sens que si cela s’inscrit dans le cadre d’une stratégie à moyen et à long terme. Et ce d’autant plus lorsque le pari hippique est lié aux courses. Il faut dire que le made in France a de nombreux atouts, la race s’étant construite au fil de l’histoire jusqu’à être re− connue officiellement sous le nom de « Trotteur Français » en 1922. Elle a su évoluer et s’adapter, alliant vitesse

(grâce à un apport conséquent de sang américain) et te− nue. Les performances et la fulgurance des progrès du « TF » sont reconnues de tous. Robuste et puissant, le Trot− teur Français est également un spécialiste d’une discipline qui s’est imposée en France : le monté. Et n’oubliez jamais que, si la limite d’âge pour se produire en compétition en France est de 10 ans, des concurrents peuvent poursuivre leur carrière hors de nos frontières. Vous l’aurez compris, les débouchés concernant les « TF » tendent à se dévelop− per avec la mondialisation… n

QUE SONT−ILS DEVENUS ?

Vous avez certainement dû bien connaître un bon nombre des trotteurs suivants qui poursuivent une carrière d'étalon à l'étranger. En 2015, ils seront au nombre de 34 (contre 20 en 2014) : Allemagne (Roc de Montfort, Light Up de Vonnas, Number du Chesnel et Only Charm), Belgique (Jenko, Lutin Malin, Hulk de Godisson, Icare de Pouline, Lagon, Quentucky, Rachmaninov Seven, Mandarino Blue et Norginio), Espagne (Orateur, Onyx Jiel, Eros du Rocher, Spirit Beji et Kent Barbés), Lituanie (Next Kinney), Pologne (Orondo et Kleyton), République Tchèque (Aristote et Ekir de Leau), Russie (Ojipey Vinoir et Kitko), Serbie (Install et Jasmin d'Odyssée), Suisse (Ludwig du Martza et Rican Way) et Ukraine (Elio Josselyn, Paddy du Buisson, Kitcho d'Ecajeul, Ksar d'Algot et Intrépide d'Avril). | 41


Les 28 pays impliqués dans la production du Trotteur Français À ce jour, 28 pays ont signé la convention de production du Trotteur Français avec la SECF. Beaucoup sont européens, mais pas seulement, comme les Etats− Unis, la Russie ou encore l’Australie. Nombre de « Trotteurs Français » exportés dans le cadre de leur carrière de courses

2011

133

456

2013

526 130 522 147

2014

719

2012

Trotteurs Français exportés.

164

Trotteurs exportés à Malte

Source : Certificats d’exportation définitive édités par le Cheval Français

Évolution du nombre de « TF » nés à l’étranger PAYS

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

Allemagne Belgique

9 8

8

7

35

57

Espagne

7

88

99 104 120 139 172 156 138 148

5

7

11

11

7

7

11

16

14

7

11

20

29

21

3

3

7

8

6

8

8

4

Rép. Tchèque

2

2

2

4

Russie

3

2

6

Lituanie Pays-Bas Pologne

Suisse

5

16

14

16

18

Ukraine Autriche

TOTAL GÉNÉRAL 42 |

7

2

2

9

10

11

7

8

5

10

6

6

5

2

2

2

2

4

4

8

5

12

9 1

24

22

23

53

68 105 124 124 145 164 222 220 227 227

Un nombre grandissant de “TF” sont conçus hors de nos frontières. Ainsi, en 2013, il y a eu 227 naissances (contre 145 en 2009).


CHIFFRES CLÉS CONCERNANT L’ANNÉE 2014

17 rs

Trotteu français

172

Saillie s « TF » o

800 Soit le nombre de courses qui ont été réservée s aux “TF” (contre 615 en 2013), dont 5 épreuves de groupe II dont 110 en Belgique

− és à l’étran sont qualifi a g e Wolv ger (à Mons, es) h c n e ou Av

nt été e par 30 nregistrés statio étalons nnant de Fra hors nce

3.000.0o0s0 d’eur

s distribués d’allocation pour à l’étranger » les « TF

7

nouveaux pays

ont signé la co nven− tion du « TF » en 2014

| 43


Phénomène

Les maîtres du Sport de vitesse, les courses hippiques sont évidemment chronométrées. À l’instar de l’athlétisme ou de la natation, des méthodes “révolutionnaires” ont amélioré les performances des trotteurs, qui ne cessent de repousser leurs limites.

44 |


Par Kévin Baudon

temps L

e chronomètre. Très présent dans l’univers hippique, cet outil a de multi− ples fonctions. Aide pour un driver, afin d’avoir une idée assez précise de la vitesse à laquelle il foule la piste associé à son cheval lors des entraînements (il a depuis été supplanté par les GPS, capables de don− ner des valeurs instantanées), il est surtout la référence dans la qualité de la performance. L’examen de qualification, obligatoire avant de pouvoir s’aligner au départ d’une épreuve officielle, est d’ailleurs une lutte contre le temps imposé (plus ou moins élevé selon l’âge). Puis, pour les compétiteurs, il est un “label qualité” dans l’optique des carrières fu− tures de reproducteurs ou de poulinières. En course, les dix premiers à l’arrivée sont crédi− tés d’un temps (sauf dans les groupes I où tous les concurrents sont classés et titulaires d’un chrono officiel). Le milieu des années 90 aura marqué un tournant dans l’histoire des courses moder− nes, avec des changements de matériels, de méthodes d’entraînement et de pistes, ren− dues de plus en plus rapide (celle de Vincen− nes a été refaite en 1993). S’il était déjà utili− sé, l’interval training (ou entraînement frac− tionné), est devenu la référence dans la préparation d’un trotteur, et lui permet de soutenir un effort violent beaucoup plus long− temps. Mais d’autres facteurs sont à l’origine de ce bouleversement chronométrique. | 45


Les records attelés Il est très loin le temps où les premiers trotteurs chronométrés enregis− traient des records de l’ordre de 2’10’’ au kilomètre. C’était dans les années 1840. Ce qui représentait une vitesse de 28 km/h. Aujourd’hui, nos compétiteurs sont passés sous la bar− re des 1’10’’, soit près de 52 km/h ! Avec des sulkys en carbone devenus

ultralégers (ils étaient auparavant en bois ou acier), moins de 15 kilos, ils ont même réussi à grappiller quel− ques dixièmes supplémentaires. Les catch−drivers, qui se produisent plu− sieurs fois par jour en compétition, sont désormais des rouages essen− tiels dans la performance. Porté à 1’09’’8 par Kool du Caux, en

février 2007, sachant qu’un temps hivernal est pourtant moins propice à la vitesse que la chaleur estivale, ce record tient toujours. Mais on se sou− vient qu’en juin 2013, Texas Charm s’en est approché (1’09’’9), malgré un départ chaotique. C’est certain, ce jour−là, il avait le record dans les jam− bes…

Liste des meilleurs chronos Date 11/02/2007 11/02/2007 15/06/2013 15/06/2013 29/12/2013 19/06/2005 29/12/2013 15/06/2013 19/06/2005 15/06/2013

Course Prix de France Prix de France Prix René Ballière Prix René Ballière Prix de Bourgogne Prix René Ballière Prix de Bourgogne Prix René Ballière Prix René Ballière Prix René Ballière

Hippodrome Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes Vincennes

Spé. Dist. Piste T T T T T T T T T T

2 100 2 100 2 100 2 100 2 100 2 100 2 100 2 100 2 100 2 100

GP GP GP GP GP GP GP GP GP GP

Cheval Kool du Caux Késaco Phédo Texas Charm Timoko Texas Charm Jag de Bellouet Triode de Fellière The Best Madrik Love You Roxane Griff

Sexe Age Place Def. Durée Réduction Terrain M M M M M M F M M F

9 9 6 6 6 8 6 6 6 8

1 2 1 2 1 1 2 3 2 4

Q Q P Q P Q

22653C 22669C 22675C 22709C 22710C 22720C 22730C P 22730C Q 22740C Q 22747C

Kool du Caux et ses 1'09''8 réalisés dans le Prix de France 2007 tiennent toujours place dans le haut du tableau des records de la grande piste de Vincennes, à l'attelé. Photo : Scoop Dyga

46 |

1'09''8 1'09''9 1'09''9 1'10''0 1'10''0 1'10''1 1'10''1 1'10''1 1'10''2 1'10''2

B B B B B B B B B B


Grâce, notamment, à la monte en avant, Västerbo Daylight avait réussi l'exploit de trotter les 2.175 mètres de la grande piste sur le pied de 1'11''1. Un record en 2005 ! Photo : Scoop Dyga

Les records montés Contrairement aux courses attelées, la spécialité du trot monté est longtemps restée traditionnelle. Si elle trotte déjà dans la tête de Georges Dreux dans les années 70, et sera adoptée par son neveu Yves, dans la décennie suivan− te, la monte en avant, penché sur l’encolure du cheval, se− ra remise au goût du jour au début du nouveau millénaire, avec Philippe Masschaele. Le jockey belge raccourcit ses étriers et adopte une position vraiment aérodynamique, au plus proche de la selle, mais sans y rebondir. Une révolution qui va lui permettre de survoler ce sport pendant plusieurs années (ses homologues hésiteront longtemps avant de suivre son exemple), avec quatre Étriers d’Or (de 2002 à 2005) et un record de victoires en une année, avec 119 unités en 2004. Avec cette nouvelle monte, la suédoise Västerbo Dayli− ght abaisse le record général à 1’12’’5, avant de le pulvé− riser un mois plus en tard en 1’11’’1 ! Ce qui représente en réalité une distance de 40 mètres.

Avec son chrono de 1'10''8, le “hongre volant” de Sébastien Guarato, Rapide Lebel, est toujours le co−détenteur, avec Malakite, du record monté à Vincennes. Photo : Scoop Dyga

Liste des meilleurs chronos Date

Course

Hippodrome Spé. Dist. Piste

Cheval

Sexe Age Place Def. Durée RéductionTerrain

31/10/2012 Prix Reynolds

Vincennes

T

2 175 GP Rapide Lebel

H

7

1

Q 23392C

1'10''8

B

03/05/2008 Prix de Concarneau

Vincennes

T

2 175 GP Malakite

F

8

1

Q 23397C

1'10''8

B

06/02/2011 Prix de l'Ile-de-France

Vincennes

T

2 175 GP Picsou de Villabon

M

8

1

Q 23413C

1'10''9

B

15/06/2008 Prix Xavier de Saint-Palais Vincennes

T

2 175 GP Paola de Lou

F

5

1

23426C

1'10''9

B

15/06/2008 Prix Xavier de Saint-Palais Vincennes

T

2 175 GP Picsou de Villabon

M

5

2

Q 23436C

1'11''0

B

15/06/2008 Prix Xavier de Saint-Palais Vincennes

T

2 175 GP Prince de Montfort

M

5

3

Q 23468C

1'11''1

B

06/02/2005 Prix du Calvados

Vincennes

T

2 175 GP Västerbo Daylight

F

8

1

Q 23469C

1'11''1

B

03/05/2008 Prix de Concarneau

Vincennes

T

2 175 GP Malin de Fontaine

H

8

2

P 23472C

1'11''1

B

07/05/2011 Prix Jean Gauvreau

Vincennes

T

2 175 GP Singalo

M

5

1

23485C

1'11''2

B

15/05/2010 Prix de Viry-Châtillon

Vincennes

T

2 175 GP Quauvin

H

6

1

23492C

1'11''2

B | 47


Le déferrage S’il était déjà utilisé dans le monde des courses, le système du déferrage apparaît officiellement sur les programmes au mois de juillet 2000. Alors que les entraîneurs doivent au préalable déclarer une intention de déferrer, qui sera confirmée ou infirmée trente minutes avant la course, ce choix devient définitif “aux partants” en mai 2008, dans le but d’aider les turfistes. Encore assez anecdotique au début, il devient un phéno− mène de mode, d’autant que l’impact sur les performan− ces est assez impressionnant. Désormais, il n’est pas rare de voir des courses où tous les concurrents sont déferrés. “Au départ, on déferrait des postérieurs pour alléger l'avant-main, explique Pierre Vercruysse. Après, on s'est

aperçu que l'on pouvait enlever les quatre fers et que cela leur changeait les allures. On ne déferre pas pour le plaisir, il y a des aptitudes au départ. Il ne faut pas oublier de garder l'équilibre du cheval.” Mais pourquoi les chevaux sont−ils plus rapides lorsque l’on leur ôte leurs “baskets” ? “Ils deviennent en dissociation positive, affirmait Pierre−Désiré Allaire, l’un des maî− tre−entraîneurs de la profession. Le postérieur déferré ar-

rive très vite et provoque un coup de fouet sur l'antérieur avant qu'il ne touche le sol.” C’est−à−dire que l’on note une

jouté à cela, une réduction des accrochages entre les membres et des allures plus rasantes. C’est ainsi pour ça que les chevaux se sont améliorés en vitesse pure. D’autres études, plus médicales, ont montré que le pied du cheval est doté d'un système d'amortissement et réagit sous la forme de pompe sanguine. Plus l’impact sur le sol est violent, plus les globules rouges repassent dans les poumons pour une meilleure oxygénation du sang. La for− ce de frappe au sol dépend de la protection du pied. Sans fers, elle est évidemment plus importante. Avec des fers, l'amortissement est total, d'où une moindre oxygénation du sang. Depuis 2013, il n’est plus possible de déferrer un trotteur à l’âge de 2 et 3 ans. Cette mesure mise en place pour le bien−être du cheval allait−elle avoir une incidence sur les chronos ? Finalement, aucun recul n’a été noté au niveau des performances dans les épreuves classiques avec un record dans le Prix de Vincennes établi par Bird Parker, et des temps très proches de la meilleure marque dans les autres courses de sélection. Avec la résine, les fers collés, les plaques ou les aluminiums, les entraîneurs ont trouvé des techniques pour se rapprocher au maximum de l’effet déferré.

pose du postérieur plus rapide et une hyperextension de l’antérieur, donc des foulées plus importantes. Avec, ra−

Du côté des États-Unis Plus petit physiquement que son homologue français, sa taille ne dépassant que rarement les 1,65 m., le trotteur américain se distingue par sa vélocité et son aptitude au mile (1.609 mètres). Bâti pour la vitesse, il a atteint sa plé− nitude physique dès l’âge de 3 ans. Dans un univers où les chevaux de couleur bai ou bai foncé sont rois, c’est un gris qui a marqué l’histoire des courses américaines, dès les années 30. En 1938, le hongre Greyhound trotte le mile en 1’11’’6. Une performance hallucinante pour l’époque,

loin devant nos “tracteurs” hexagonaux, et qui tiendra jus− qu’en 1969 ! Éclectique, il établira également un record au trot monté, en 1940, à 8 ans, parcourant le mile en 1’15’’6. “Tous les chevaux ont un défaut, un point faible. Greyhound, lui, n'en avait aucun”, a−t−on dit de lui à l’épo− que. Abaissé progressivement par divers champions, tels que Prakas, Mack Lobell ou Pine Chip, le record atteint 1’08’’1 le 10 novembre 2008, par l’intermédiaire d’Enough Talk. Mais le 28 juin dernier, l’hippodrome de Pocono Downs va être le théâtre d’une performance incroyable. Fils de l’étalon français Korean, et entraî− né par le Suédois Ake Svanstedt, Sebas− tian K pulvérise le record du monde des trotteurs, en 1’07’’7 !

S'il a longtemps été l'apanage d'Enough Talk, le record du monde des trotteurs est tombé dans l'escarcelle d'un certain Sebastian K., le 28 juin 2014. Le fils de l'étalon français Korean a affiché, ce jour−là, sur l'hippodrome de Poccono Downs, l'incroyable réduction kilométrique de 1'07''7. Photo : Tarzan

48 |


Et l'avenir ? Usain Bolt (ci−contre) pourrait courir le 100 mètres en 9”40 ! C'est du moins “réalisable”, selon un des auteurs d'une étude publiée par une université des Pays−Bas. “Il a dit qu'il visait 9''40

et, selon nos résultats, c'est réalisable car le record du monde possible de manière ultime, en ce moment, est de 9''36”, avait−il déclaré. Alors que la

Photo : D.R.

meilleure performance de tous les temps, établie par le sprinter jamaïcain, en 2009, est de 9”58, cet objectif n’a toujours pas été atteint, signe que l’on est déjà proche de la limite humaine. Selon l’expression consacrée, les re− cords sont faits pour être battus, et chez nos trotteurs français, même si on se rapproche aussi de ce cap physique, la marge est sans doute plus sensible. On peut prendre, par exemple, le record du Prix d’Amérique (la plus prestigieuse épreuve du programme) comme objet d’étude. Contraire− ment à l’athlétisme, il est plus récent, datant de 2013, et fut fixé à 1’11’’9 par Royal Dream. En rappelant que le ter− rain n’était pas, ce jour−là, propice à la vitesse, on peut affir− mer que ce record sera battu dans un avenir plus ou moins proche, mais le seuil de 1’11’’5 ne semble pas, pour l’ins−

tant, franchissable. On attend les prochaines évolutions dans le domaine hippi− que. D’après les docteurs américains, Rose et Hodgson, en 1994, les facteurs de la performance sportive chez le che− val sont la capacité cardiaque, l’alimentation, les fibres musculaires, la capacité respiratoire, la locomotion et celui qui le place au même niveau que les joueurs… La volonté de gagner !

| 49


Tombeur de Ready Cash dans le Prix d'Amérique 2013, Royal Dream s'imposait, ce jour−là, en 1'11''9, soit le nouveau record de l'épreuve, Photo : Scoop Dyga

Chronologie du record de la grande piste de Vincennes au monté TEMPS

CHEVAL

1’15’’9 REINE DU CORTA Réfection de la piste 1'15''2 ALPHA BARBES 1'15''2 VIVE LUDOISE 1'14''9 COURLIS DU PONT 1'14''8 DREAM WITH ME 1'14''8 FAN QUICK GAGMAN DES ROUCHES et 1'14''7 GRANDE MAREE 1'13''9 GOLF DU POMMEAU 1'13''9 GLORIEUSE DU BOIS 1'13''6 IOUKY DU PRE 1'13''6 GLORIEUSE DU BOIS 1'13''4 JOYAU D'AMOUR et JENKO 1'12''8 JOMO DU RIB 1'12''5 VASTERBO DAYLIGHT 1'11''1 VASTERBO DAYLIGHT 1'10''8 MALAKITE 1'10''8 RAPIDE LEBEL

50 |

COURSE Prix du Calvados 1990 Prix de l'Ile-de-France 1994 Prix du Calvados 1994 Prix Edmond Henry 1995 Prix des Centaures 1997 Prix des Centaures 1999 Prix Xavier de Saint-Palais 1999 Prix des Elites 1999 Prix de Besançon 2001 Prix des Elites 2001 Prix du Calvados 2002 Prix Xavier de St-Palais 2002 Prix du Calvados 2004 Prix de l'Ile-de-France 2005 Prix du Calvados 2005 Prix de Concarneau 2008 Prix Reynolds 2012

Chronologie du record de la grande piste de Vincennes à l'attelé TEMPS

CHEVAL

1’13’' AVENIR DE SEE Réfection de la piste 1’12’’5 VOURASIE 1’12’’ SEA COVE 1’12’’ GOETMALS WOOD 1’11’’3 GENERAL DU POMMEAU 1’10’’8 VARENNE 1’10’’7 NAGLO 1’10’’1 JAG DE BELLOUET 1’09’’8 KOOL DU CAUX

COURSE Prix Roederer 1993 Prix de France 1994 Prix René Ballière 1994 Prix de l’Etoile 99 Prix René Ballière 2000 Coupe du Monde de Trot 2003 Prix de France 2004 Prix René Ballière 2005 Prix de France 2007

Chronologie du record du Prix d'Amérique TEMPS

CHEVAL

1'15''2 OURASI Réfection de la piste 1’15’’ SEA COVE 1’14’’7 INA SCOT 1’14’’6 ABO VOLO 1’14’’3 DRYADE DES BOIS 1’14’’3 MONI MAKER 1’12’’6 GENERAL DU POMMEAU 1’12’’3 KESACO PHEDO 1’12’’ OFFSHORE DREAM 1’12’’ READY CASH 1’11’’9 ROYAL DREAM

ANNEE 1990 1994 1995 1997 1998 1999 2000 2004 2007 2012 2013


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Enquête

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Par Sylvain Copier - Photos : Scoop Dyga

Le monde des Commissaires Le modèle des courses en France s’appuie sur plus de 6.000 bénévoles qui donnent de leur temps et de leur passion tout au long de l’année. Parmi eux, certains sont en charge de veiller au contrôle des épreuves : les Commissaires. Gros plan sur ces hommes et ces femmes qui endossent le costume d’arbitre des courses…

“I

l y a beaucoup d'argent en jeu en Premium. Nous sommes là aussi pour défendre l'intérêt des parieurs. On a un respect vis-à-vis d'eux, on doit être opérationnel et ne pas commettre

d'erreur”, déclare Jean Frère dans un reportage réalisé

sur l’hippodrome de La Capelle et diffusé au mois de sep− tembre sur France 3 Nord Pas−de−Calais. “Nous”, ce sont les Commissaires, les arbitres du monde des courses. Des personnes en charge de veiller à la régularité du sport hip− pique pour le bien des professionnels et des turfistes. Ces quelque 700 bénévoles au galop et 900 au trot (étant par− fois les mêmes) officient tout au long de l’année sur les champs de course de France et de Navarre. “On a tout in-

térêt à s'entourer des Commissaires les plus compétents possibles. L'Institution n'a aucun intérêt à créer des polémiques inutiles”, indique le directeur technique du Trot, Guillaume Maupas. Le ton est donné.

COMMENT DEVIENT−ON COMMISSAIRE ? Sous certaines conditions, tout passionné peut prétendre exercer cette fonction ô combien essentielle. Il est néces− saire, dans un premier temps, d’être âgé de moins de 75 ans, de ne pas être entraîneur, jockey ou de driver ou de n’avoir plus exercé ces fonctions depuis un an. Fort logi− quement, une enquête est diligentée par les services de la police judiciaire sur la moralité du candidat, comme c’est également le cas, par exemple, pour le recrutement du | 53


“Quand vous jugez sur l'hippodrome, vous avez la montre qui joue contre vous, il faut donner le résultat pour que les parieurs touchent leur argent. Et vous êtes parfois sur un fil...”, souligne Thierry Andrieu. Photo : Scoop Dyga

personnel d’un casino. Un agrément du Ministère de l’Agriculture est alors délivré. Au préalable, “l’apprenti Commissaire” doit effectuer dix sta− ges, dont cinq sur un hippodrome de première catégorie. Il assiste alors les Commissaires de courses présents dans l’exercice de leurs fonctions, sans bien entendu officier. Il doit en− suite se soumettre à un examen pour valider un stage de formation de 48 heures sur le code des courses spé− cialités Galop et/ou Trot. Lors de ce stage réalisé en région parisienne, les intervenants sont nombreux, comme le Docteur−vétérinaire Gadot pour évoquer la santé des chevaux, le Doc− teur Le Masson à propos de l’aptitude des jockeys, Henri Kiriel, du côté ga− lop, ou encore Alexis Renault, au trot, pour les aspects techniques. Ensuite, un examen spécifique attend les can− didats au galop (souvent un QCM avec des études de cas avec projections de films) et un au trot. 6 personnes sur 10 qui s’y présentent réussissent. Le 54 |

code des courses est balayé, mais sont surtout évoquées les disposi− tions applicables sur les hippodro− mes, avec des cas très concrets pour l’activité de Commissaire. Il n’existe pas d’école de Commissaires ni de ju− ge aux allures (pour le trot), au départ ou aux arrivées. “C'est l'expérience qui prime avant toute chose”, souli− gne Guillaume Maupas. Les futurs Commissaires sont très majoritaire− ment des personnes qui ont eu un contact un moment ou à un autre avec le monde hippique. “Cela présen-

te le gros avantage qu'ils connaissent quel peut être le comportement du cheval en course”. Reste à mettre en application tout cela sur le terrain.

IMPLIQUÉ À 100 % DANS LES DÉCISIONS… Comme la victoire d’un cheval est le fruit du travail d’une équipe, un ver− dict est rendu collégialement. Une no− tion essentielle. Un jugement rendu n’est pas le fait d’un seul homme, mais

“C’est l’expérience qui prime avant toute chose”


le fruit d’une concertation. Que ce soit au trot ou au galop, généralement quatre Commissaires (minimum trois) officient par réunion. Parfois, lorsqu’ils ne sont pas d’accord entre eux − ce qui n’est jamais bon signe −, chacun exprime sa position et le Pre− mier Commissaire de la réunion de courses en fait une synthèse et a une voix prépondérante en cas d’égalité. Les Commissaires au Trot sont six et un maximum de douze au galop. Les Commissaires de Courses fonction− nant sur les hippodromes de France Galop sont élus annuellement par le Comité et tous les quatre ans au trot (ils sont huit en région parisienne) et peuvent être élus ou choisis en de− hors du Comité. En plus de leur pou− voir de juger les courses, les Commis− saires des Sociétés Mères peuvent opérer sur l’ensemble du territoire national (et même en dehors de nos frontières au trot comme des com− missaires des courses. Au galop, il faut qu’ils soient agrées dans un autre pays), délivrer des agréments et sié− ger en appel au galop (cette notion n’existant pas au trot). “Au Trot, le rô-

le de Commissaire principal n'existe pas dans les statuts”, dixit Guillaume Maupas. “Au galop non plus, en revanche un Premier Commissaire de Société Mère est désigné par ses pairs parmi les douze Commissaires de France Galop”, renchérit Henri Pou−

Les Commissaires de Courses fonctionnant sur les hippodromes de France Galop sont élus annuellement par le Comité et tous les quatre ans au trot et peuvent être élus ou choisis en dehors du Comité. Photo : Scoop Dyga

ret, le directeur opérationnel des courses de France Galop. Les Com− missaires de sociétés épaulent les Commissaires de province lorsqu’il s’y dispute des réunions Premium. Sachez que l’agrément pour un Com− missaire des courses bénévole n’est valable que pour la société pour la− quelle il exerce. Cependant, un béné− vole peut être agréé dans d’autres So− ciétés de courses, avec un maximum de 6 mandats (et 80 réunions par an). En 2012, plus de 500 Commissaires

Depuis la tour des Commissaires, Alain Pagès scrute les allures des concurrents à l'arrivée d'une course sous la selle. Photo : Scoop Dyga

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Les juges aux allures en pleine action dans la voiture−suiveuse... Photo : Scoop Dyga

“J’ai un avis très personnel sur cette question. Lorsque l’on évoque le terme de Commissaire professionnel, je ne sais pas ce que cela signifie.”

ont suivi une formation continue. À l’image des lois, le Code évolue égale− ment, il est donc nécessaire de tenir informé les différents Commissaires de tous les changements. Malheureu− sement, à l’image de toutes les activi− tés bénévoles en ce moment, les can− didatures ne se bousculent pas au portillon… LA NOTION DE PROFESSIONNALISATION Être Commissaire, tout comme être arbitre, c’est être exposé constam− ment aux critiques. La part de la déci− sion humaine est bien réelle, et un ju− gement contestable (tout à fait, il y en a) peut évidemment nuire à l’institu− tion dans sa globalité. Certes, les moyens techniques pour juger se sont considérablement modernisés au fil du temps, reste que parfois, profes− sionnels, turfistes et journalistes n’y vont pas de main morte. “Je suis très

attentif aux commentaires qui sont faits sur les Commissaires, assure Guillaume Maupas. Après, on n'aura jamais le zéro défaut à partir du moment où ce sont des humains qui jugent. Non je ne pense pas que le Code des courses soit trop souple, car un déroulement de course n'est jamais identique.” Sur la notion à propre− ment parler de corps professionnel, il poursuit : “J'ai un avis très personnel

sur cette question. Lorsque l'on évo56 |

que le terme de Commissaire professionnel, je ne sais pas ce que cela signifie. Avec toutes les réunions disputées sur nos hippodromes de Vincennes, Enghien, Cabourg et Caen, je considère que nos Commissaires sont professionnels, compte tenu de la pratique qu'ils ont. Je ne vois pas l'intérêt qu'on aurait à désigner des personnes qui ne connaîtraient ni les chevaux ni les allures. Soit un Commissaire est compétent, soit il ne l'est pas. Ayez bien à l'esprit que, de toute façon, les décisions sont collégiales.” Derrière la notion de profes−

sionnel, il y a aussi la notion de coût. Imaginons qu’il faille 4 Commissaires sur les 242 hippodromes français, avec des rémunérations suffisam− ment importantes pour éviter toute forme de suspicion. Assurément, les allocations, voire même le Taux de re− tour joueur, en seraient fortement im− pactés. Henri Pouret déclare : “J'ai eu

l'opportunité de voir fonctionner des Commissaires professionnels à Hong Kong et en Australie. Sincèrement, nous n'avons rien à leur envier si ce n'est peut-être les moyens mis à leur disposition, notamment humains. En outre, il existe un système semiprofessionnel outre-Manche, je vous invite à interroger des jockeys y allant monter pour savoir s'ils considèrent que les courses y sont plus régulières…” Est−ce à dire que la solution


“idéale” se trouve, peut−être, dans la 67e proposition émise dans notre Li− vre Blanc, paru le samedi 3 janvier ? Peut−être. Selon nos interlocuteurs donc, il y a toujours des choses à amé− liorer, la situation française n’étant pas angélique, mais notre pays est plutôt bien loti… LES COMMISSAIRES CÔTÉ TRANSPARENCE Personne n’échappe au souffle de la transparence, qui emporte politi− ques, hommes du show−biz… Les courses ont progressé en la matière, on ose beaucoup plus ouvrir les por− tes. Comme en décembre 2011 où notre ancien collaborateur, Thierry Dequéant, embarquait dans la voitu− re des juges aux allures et s’installait dans la tour des Commissaires et, en février 2011, où Francis Fougeray passait à son tour une journée avec les Commissaires de France Galop (une première). Finalement, il n’y a rien à cacher, l’Institution a même tout intérêt à montrer ponctuelle− ment comment sont prises les déci− sions, tout en préservant le confine− ment des juges en règle générale. In− téressons−nous désormais à la

rémunération des Commissaires. Lorsqu’ils officient sur les hippodro− mes dont les enjeux nationaux sont les plus élevés, les Commissaires peu− vent toucher une vacation (de l’ordre de 120 €). En province, selon les cas, les déplacements peuvent être rem− boursés avec une franchise. Il faut sa− voir qu’à l’image de n’importe quelle association (les courses sont régies par la loi sur les associations de 1901 alors qu’elles brassent près de 10 mil− liards d’euros chaque année), un membre peut demander à être in− demnisé de ses frais kilométriques. Des progrès ont également été faits au niveau des conflits d’intérêt. Une thématique sur laquelle l’Institution est en alerte. “Vous évoquez les criti-

ques selon lesquelles les Commissaires sont juges et parties , indique Guillaume Maupas. Des mesures ont été prises pour contrer ces arguments. Lors de toutes les réunions Premium, lorsqu'un Commissaire a un intérêt direct (ascendant ou descendant) dans une course, il n'officie pas de la réunion. En effet, le nom des Commissaires est mentionné sur le programme et cela peut, effectivement, surprendre quelqu'un qui ne

connaît pas notre activité. Nous considérons que nos juridictions sont efficaces, car on a des gens de compétence, et il ne faudrait pas que des sujets comme ça remettent tout en cause. S'il faut aller plus loin dans les mesures, nous irons plus loin. Je profite de ce dossier pour souligner à quel point je trouve scandaleuse l'émission à charge “Spécial investi− gations”, qui a été diffusée sur les conflits d'intérêt touchant au monde des courses. Les caricatures n'apportent rien. Ce jour-là, j'ai accordé une interview de plus de 3 heures à une journaliste qui a volontairement retenu dix secondes de notre entretien pour orienter son reportage.”

VRAI OU FAUX

Les Commissaires ont-ils le droit de jouer aux courses ? Dans les faits, un Commissaire en exercice n’a pas le droit de parier, mais il n’y a pas de texte en place. En revanche, lorsqu’il n’est pas en exer− cice, rien ne s’oppose à ce qu’il pa− rie. n

Il n’existe pas d’école de Commissaires ni de juge aux allures (pour le trot), au départ ou aux arrivées. “C'est l'expérience qui prime avant toute chose”, souligne Guillaume Maupas, directeur technique du Trot. Photo : Scoop Dyga

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Parole de Commissaires… Qui sont-ils, d’où viennent-ils, quel regard portent-ils sur leur fonction. Des Commissaires de France Galop, du Trot et de province apportent leur éclairage… JEAN−PIERRE COLOMBU Pendant cinq ans, M. Colombu a été Premier Commissaire de France Galop. À 70 ans, il lui reste encore cinq ans de− vant lui au service des courses : “J'ai acheté mon premier

cheval en 1970 et ma première jument en 1975 pour l'élevage. En 1990, on m'a demandé, par le biais du Syndicat des Propriétaires, si j'étais intéressé pour faire un stage de Commissaire à la société d'Encouragement. J'ai accepté car j'avais un ami qui officiait à Aix-les-Bains. Je me suis dit, pourquoi pas ? J'ai appris la fonction petit à petit auprès du Dr Pouret, puis de Freddy Palmer, des gens intelligents, extrêmement humains que j'ai appris à apprécier. En 2000, je suis devenu Commissaire de France Galop puis, peu de temps après, je suis entré au Comité. La passion des courses, je l'ai eue tout gamin. À 15 ans, je ne manquais pas beaucoup de dimanches à Longchamp… Concernant les critiques, je suis serein. Dans toutes les décisions, les mécontents s'expriment plus que les contents. Quand vous jugez sur l'hippodrome, vous avez la montre qui joue contre vous, il faut donner le résultat pour que les parieurs touchent leur argent. Et vous êtes parfois sur un fil. En France, on a une doctrine de jugement qui est la meilleure au monde. Notre système, où on n'admet pas qu'un cheval soit gêné par un autre, est quand même le meilleur. Il a été façonné principalement grâce aux types de paris de combinaison en France (comme le Quinté+). Être Commissaire, cela m'a appris à juger mes chevaux avec une grande objectivité.”

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THIERRY ANDRIEU Il s’agit de l’un des hommes incontournables de Vincennes :

“Je suis rentré à la SECF par le biais des élections en 1983, à l'époque dans le collège national des éleveurs. Mon père a été Commissaire, moi-même à Cabourg et à Dozulé. Parallèlement, comme j'ai fait des études de droit, cette orientation m'a intéressé. Car on a un Code des courses à appliquer, comme il faut le faire avec le Code civil et le Code pénal. En 1987, lorsque de nouveaux Commissaires ont été élus, l'histoire s'est accélérée pour moi. Je suis rentré en même temps que Jean Riaud. J'ai été driver-amateur, entraîneur particulier de mon père pendant 4 ou 5 ans et éleveur étalonnier (je suis toujours éleveur avec 3 ou 4 chevaux). Les critiques paraissent parfois fort injustes, on s'aperçoit aussi que les gens ont parfois une perception autre et n'ont pas le cheminement par lequel on est arrivé à une décision. Il faut parvenir à évacuer cela et savoir positiver là-dessus. Forcément, on ne vit pas toujours très bien les critiques quand on a l'impression d'avoir bien fait le “boulot” mais, en même temps, cela nous permet aussi de nous remettre en question. On ne prend jamais une sanction par gaiété de cœur et ça fait encore plus mal quand une course représente l'épreuve de la vie d'un professionnel. Mais on ne peut pas faire de distinguo. Nous devons toujours œuvrer pour la régularité des courses pour le parieur et le propriétaire. Oui, en règle générale, j'estime que les courses sont bien jugées en France”.


JEAN TRIDEAU Mayennais d’origine, Jean Trideau, 75 ans, a toujours bai− gné dans le monde de l’élevage (bovins et chevaux) : “De-

puis ma plus tendre enfance, j'ai été attiré par les chevaux, ma famille étant dans la partie. Je suis le seul à avoir mal tourné, ayant fini ingénieur à Météo France (rires). Après mes études, je suis rentré dans un club hippique et j'ai drivé à cinq reprises, sans réussite, en amateurs. J'ai alors fréquenté le milieu du trot, faisant la connaissance de Messieurs Lechesne et Géliot, avant de rentrer peu à peu au service des courses. D'abord comme juge aux allures pendant 7 ans, puis Commissaire à Chartres. Les Commissaires bénévoles, comme moi, ont beaucoup progressé depuis le développement de la technique. À l'époque, les voitures suiveuses n'existaient pas, il n'y avait pas de film… C'est vraiment devenu de plus en plus facile pour juger et les Commissaires de la SECF nous ont également énormément permis de progresser. Pour avoir officié avec nombre d'entre eux, je peux vous assurer qu'ils sont extrêmement compétents. Il faut toujours qu'un Commissaire garde une certaine distance avec les socioprofessionnels. À propos des décisions, il faut savoir que, pour reprendre une image du football, on est parfois à la limite de la surface de réparation. Je me suis attaché à cette fonction (au passage, aucun Commissaire de Chartres ni de Rambouillet ne se fait rembourser de frais), et je la quitterai en fin d'année avec regret. Toutefois, 75 ans, c'est le bon âge.”

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Rétrospective / Souvenirs

Souvenirs d'Amérique 60 |


Par Michel Burgio - Photos : Scoop Dyga

Véritable “mémoire” de Vincennes, Bernard Cavignaux aime se souvenir de l'effervescence qui régnait autour d'Ourasi lors de ses quatre victoires dans le Prix d'Amérique.

Bernard CAVIGNAUX (PRIX D’AMÉRIQUE 1986, 1987, 1988, 1990) Il est une des mémoires de Vincennes. Durant quarante belles années, Ber− nard Cavignaux a officié avec passion dans le Temple du trot, avant de tirer sa révérence en avril dernier. De Belli− no II à Maharajah, en passant par Va− renne et Ready Cash, cet homme aux mille métiers (chef d’écurie, préposé au départ, aide starter, homme de pis− te…) a été un témoin privilégié des dif− férents champions qui ont marqué de leurs empreintes la cendrée. «Nanar», comme il est affectueusement sur− nommé, est unanimement connu et reconnu par l’ensemble des acteurs œuvrant dans l’antre du plateau de

Gravelle. Véritable personnage, ce grand gaillard évoque avec passion les Prix d'Amérique du « roi Ourasi ».

“Parmi les quatre Prix d'Amérique qu'Ourasi a remportés, il m'est difficile d'en dégager un plus qu'un autre, car tous ont été extraordinaires. (Après quelques secondes de réflexion)... Je prends les quatre ! Tout d'abord, je me rappelle de l'effervescence qui régnait aux écuries. | 61


Dès 9 heures du matin, les caméras du monde entier étaient postées devant son box, le numéro 28, qui n'existe plus aujourd'hui. Pour brouiller un peu les pistes, on effaçait son numéro. Contrairement aux autres champions, il avait ses gardes du corps. Ils étaient quatre ou cinq à l'accueillir après la course. Quant aux tribunes, elles étaient noires de monde. Les gens brandissaient des fanions. Ce n'était pas marqué “en grève”, mais “ Ourasi ” (rires) ! À son arrivée aux balances, il y avait une telle affluence que les gens tombaient. Il y avait quatre ou cinq cents personnes autour de lui. Heureusement, il restait très calme. Sur toute ma carrière, je n'ai jamais ressenti une telle ferveur de la part du public pour un trotteur. Pourtant, j'en ai côtoyé des champions ! Ourasi,

ce n'était pas le bon Dieu, mais pas loin. Le Prix d'Amérique, c'est un moment magique et il avait la capacité de faire rêver les gens. De son côté, il savait que c'était une star. Gagner quatre fois l'épreuve reine est la marque d'un trotteur hors norme.Et la manière dont il l'a fait est impressionnante, sachant qu'il ne se livrait pas à fond. Je me rappelle que son driver, Jean-René Gougeon (N.D.L.R. : il l'a mené en 86, 87, 88) l'appuyait avec sa cravache dans la montée, mais Ourasi ne voulait pas avancer. À l'intersection des pistes, “le roi fainéant” décidait de prendre son mors et il filait au poteau à la vitesse de la fusée Ariane.”

« Ourasi, ce n’était pas le bon Dieu, mais pas loin »

Pierrette Brès se souvient de son interview avec Jos Verbeeck, deux jours avant son sacre au sulky de Sea Cove . Un échange dans lequel le “Diable belge” lui avait confié avoir une tactique...

Pierrette BRÈS JOURNALISTE HIPPIQUE (PRIX D’AMÉRIQUE 1994, SEA COVE)

“De la victoire de Sea Cove, je retiens surtout le coup de bluff extraordinaire de mon Belge préféré, Jos Verbeeck, qui était son driver. Deux jours avant le grand rendez-vous, je l'interviewe pour savoir s'il a une chance réelle de gagner avec Sea Cove. Il me répond : « Non, mais j’ai une tacti− que... » Je lui demande laquelle, et il me rétorque : « Je ne peux rien te di− re, sinon les autres vont le savoir. Re− garde bien la course, tu compren− dras ». C'était le suspense… Les

chevaux partent et rapidement Sea Cove s'assure environ une centaine de mètres d'avance sur le peloton. Ses rivaux le laissent faire et vont à leur train, car ils pensent que le fuyard va s'arrêter ; qu'il est impossible d'aller au bout à ce rythme fou. À ce moment-là, les propos que Jos 62 |

“Il savait que c'était une star”, souligne Bernard Cavignaux. Plus qu'une star, Ourasi, qui prenait son mors quand il le décidait, était tout simplement hors norme.

« Le coup de bluff extraordinaire de Jos Verbeeck » m'avait confiés prennent tout leur sens. À dire vrai, je n'ai pas douté de l'issue de l'épreuve. J'avais confiance en Jos. Au final, il a tellement bien calculé son coup que son cheval conserve une petite avance, mais suffisante, au passage du poteau. Il a mené une course magistrale. Jos connaissait le chrono et l'allure à laquelle allait l'épreuve. À l'arrivée, je suis allée l'embrasser pour le féliciter. Il était fou de joie et il m'a dit : « Tu sais, j'ai pris de gros risques mais, quelque part, je savais que mon che− val était capable de le faire ». Pour

moi, ça reste un souvenir extraordinaire et spectaculaire, car c'est grâce au talent de Jos Verbeeck que Sea Co− ve a remporté son Prix d'Amérique.”


Dominique BŒUF Après Sea Cove , Abo Volo et Dryade des Bois , Abano As est “porté” à la victoire par Jos Verbeeck en 2003. Un sens tactique qui a notamment impressionné Dominique Bœuf ce jour−là.

« Jos Verbeeck, héros des conditions extrêmes »

ANCIEN JOCKEY (PRIX D'AMÉRIQUE 2003, ABANO AS)

“Ce Prix d'Amérique m'a marqué, car il s'est disputé dans des conditions climatiques dantesques. Il avait plu avant la course, il faisait froid, la piste était détrempée et la visibilité réduite. Chevaux et drivers étaient maculés de mâchefer. Par expérience, je sais qu'il est très difficile de mener son cheval dans de telles conditions. C'est compliqué de voir ce qui se passe autour et de garder sa lucidité pour mener au mieux son partenaire. Ce jour-là, la maestria de Jos Verbeeck m'a impressionné. Il a su faire preuve d'un incroyable sang-froid pour donner le meilleur des parcours à Abano

Sur le poteau ! Au nez et la barbe d'Insert Gédé et Gigant Neo, Abano As permet à Jos Verbeeck de remporter son quatrième Prix d'Amérique...

As, qui a pu patienter derrière les premiers avant de passer à l'attaque. Dans des conditions extrêmes, il a mené une course comme s'il faisait grand beau temps. Sans retirer la qualité aux autres drivers, on avait l'impression qu'il était le seul à voir et savoir où il voulait aller. Et encore aujourd'hui, quand je revois la course, j'ai toujours le même sentiment. Ce jour-là, Jos avait quelque chose en plus.”

Hervé MORIN ANCIEN MINISTRE DE LA DÉFENSE, PRÉSIDENT DU NOUVEAU CENTRE, PROPRIÉTAIRE ET ÉLEVEUR DE CHEVAUX DE COURSES (PRIX D'AMÉRIQUE 1972)

“Comme meilleur souvenir, je pourrais vous citer une victoire d'Ourasi, un trotteur qui est né tout près de chez moi, à Saint-Étienne-L'Allier (Eure). Mais je préfère vous évoquer le Prix d'Amérique qui m'a le plus marqué. Au niveau personnel, il ne rime pas avec succès. En 1972, j'avais une dizaine d'années et j'attendais de tout cœur une victoire d'Une de Mai. Lors des éditions précédentes, elle n'avait pas été chanceuse. Je me revois dans le salon de mes parents, devant la télévison, à Épaignes. À la maison, on suivait les courses, mais on était plus galop que trot. En revanche, mon père était turfiste et un passionné absolu des chevaux. Trois cent soixante-cinq jours par an, on avait le “Paris-Turf” à la maison. Ainsi, je pouvais suivre l'actualité de la championne. J'ai le souvenir d'une jument d'une élégance formidable. Physiquement, elle était fine, très esthétique. Son modèle contrastait avec les trotteurs de l'époque, qui étaient massifs.

Pour en revenir à la course, je me rappelle de la prédiction de mon père :

« C'est une crack, mais tu vas voir qu'elle va avoir la poisse comme les années précédentes. » Et c'est ce qui

s'est passé… Dans le dernier tournant, elle s'accroche avec un concurrent et il en était fini de ses chances. À ce moment-là, je me souviens de sa réaction : « Ohlala, catastrophe ! » Léon Zitrone, qui commentait la course, nous faisait vivre ce moment comme un drame national. J'avoue que j'ai ressenti une véritable injustice. Quand il y a de grands cracks, on a envie que le sport leur permette d'entrer dans l'histoire. C'est comme si Zarkava ou Sea The Stars n'avaient pas remporté l'Arc de Triomphe.”

« La défaite d’Une de Mai, une véritable injustice»

Hervé Morin, accompagné ici de sa fille Clémentine, a été marqué dans son enfance par la championne Une de Mai.

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Brahim ASLOUM CHAMPION OLYMPIQUE DE BOXE ET CONSULTANT HIPPIQUE POUR RMC (PRIX D'AMÉRIQUE 2011, READY CASH)

“Sans hésitation, mon plus beau souvenir est le premier Prix d'Amérique de Ready Cash. Si je le suivais depuis un certain temps, je suis vraiment tombé amoureux du cheval à ce moment-là. Comme certaines personnes qui sont de la génération d'Ourasi, moi je suis de la génération Ready Cash. Il est vrai que je connaissais déjà les courses, mais il m'a donné l'envie de découvrir encore plus l'univers hippique. Avant l'épreuve, je suis allé le voir aux

« Ready Cash, c’est ma génération » écuries. Le cheval dégageait une telle sérénité que j'avais l'impression qu'il allait partir à la promenade. Comme tout grand champion sportif, il donnait l'impression de savoir gérer son stress. En revanche, une fois arrivé sur la piste, il savait ce qu'il avait à faire. De mon côté, j'étais un peu stressé, car j'avais peur qu'il ne soit victime d'aléas de course. Mais, d'une manière générale, j'étais confiant. Et dans la ligne droite, j'ai un peu « gueulé » pour l'encourager (rires) ! Je me rappelle avoir dit : «Allezmonpetit,valechercher!». Beau moment de sport ce dimanche 29 janvier 2012, avec la poignée de mains entre Franck Nivard (Ready Cash ), vainqueur, et Éric Raffin (Roxane Griff ), son dauphin.

S'il s'intéressait déjà aux courses, Brahim Asloum ne cache pas avoir eu envie d'en savoir davantage sur cet univers en voyant Ready Cash s'illustrer

Luis FERNANDEZ ANCIEN FOOTBALLEUR PROFESSIONNEL ET CONSULTANT RMC (PRIX D'AMÉRIQUE 86, 87, 88, 90 ET 2011 ET 2012)

“Le Prix d'Amérique, c'est comme une finale de Coupe du Monde. Les meilleurs sont là. Le spectacle est aussi bien sur la piste que dans les tribunes. Au niveau ambiance, on a l'impression d'être dans un stade de foot. Les amoureux des chevaux viennent de toute la France pour voir le sacre d'un champion. Quand j'étais sur Paris, je me déplaçais souvent à Vincennes pour ne pas manquer le spectacle. Vous savez, il m'est difficile de sortir du lot un Prix d'Amérique plus qu'un autre. Je citerais les cracks Ourasi et Ready Cash. Entre ces deux champions, je ne fais pas de comparaison. C'est comme au football, on ne peut pas comparer les joueurs des années 80 et ceux des années 90. S'ils ont gagné l'épreuve reine, c'est qu'ils étaient les plus forts, tout simplement. Ils ont 64 |

la particularité de l'avoir remportée plusieurs fois et d'avoir durer dans le temps. Avoir réussi un tel exploit, c'est la marque d'un mental exceptionnel. Au-delà de leurs capacités physiques, ils avaient la capacité de se surpasser mentalement pour aller au combat. Ce sont deux trotteurs qui m'ont impressionné. Si je devais les comparer à des footballeurs, l'un et l'autre seraient aussi bien Platini ou Zidane, ou encore Cristiano Ronaldo ou Messi.”

Véritable passionné, Luis Fernandez établit un parallèle entre le monde des courses et celui du football en comparant notamment Ourasi et Ready Cash aux vedettes du ballon rond, Platini et Zidane.

« Ourasi et Ready Cash, les Platini et Zidane du trot »


Mots mêlés/Quizz K

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Par Kévin Baudon et Vincent Béguin

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Quizz 1. Une seule femme a inscrit son nom au palmarès du Prix de Cornulier : a/ Marie−Annick Dreux b/ Céline Leclercq c/ Nathalie Henry 2. Un seul trotteur a gagné le Prix de Cornulier à l'âge de 4 ans : a/ Venutar b/ Fandango c/ Gardon 3. Quel jockey détient le record du nombre de victoires au trot monté dans une année en France ? a/ Yves Dreux b/ Philippe Masschaele c/ Jean−Loïc Dersoir

4. Quelle est la circonférence de la grande piste de Vincennes ? a/ 1.950 mètres b/ 1.975 mètres c/ 2.000 mètres 5. Parmi ces trois pistes, quelle est celle qui possède la plus grande circonférence? a/ Laval b/ Cabourg c/ Les Sables−d’Olonne 6. Un seul trotteur a gagné le Prix du Bourbonnais à l’âge de 4 Ans : a/ Nicias Grandchamp b/ Arnaqueur c/ Dahir de Prélong

7. Quel jockey a remporté le Prix de Cornulier cinq années de suite ? a/ Maurice Riaud b/ Jean Mary c/ Michel−Marcel Gougeon 8. Une seule jument a réussi le doublé Critérium des 3 Ans-Critérium des 4 Ans a/ Roquépine b/ Une de Mai c/ Nikita du Rib 9. Qui est le dernier Président de la République à avoir assisté au Prix d'Amérique ? a/ Jacques Chirac b/ Valéry Giscard d’Estaing c/ François Mitterrand 10. Qui détient le record général de la piste de Vincennes ? a/ Ourasi b/ Kool du Caux c/ Jag de Bellouet

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Quizz 5. Quel est le nombre de partants maximum dans un Prix d'Amérique ? a/ 16 b/ 18 c/ 20 6. Quel driver en activité détient le record du nombre de victoires dans le Prix d'Amérique ? a/ Jean−Michel Bazire b/ Franck Nivard c/ Jos Verbeeck 7. En 2014, quelle est l'épreuve qui a généré le plus d'enjeux au PMU ? a/ Prix de l'Arc de Triomphe b/ Prix d’Amérique c/ Prix de Diane 8. Quel entraîneur de trot détient le record du nombre de victoires en France dans une année ? a/ Thierry Duvaldestin b/ Jean−Michel Bazire c/ Yannick−Alain Briand

9. En quelle année a eu lieu le premier Prix d'Amérique ? a/ 1919 b/ 1920 c/ 1921 10. Qui a remporté le premier Prix d'Amérique ? a/ Pro Patria b/ Reynolds V c/ Passeport

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1. Un seul cheval a remporté le Prix d‘Amérique quatre fois : a/ Roquépine b/ Bellino II c/ Ourasi 2. Quel âge avait Éric Raffin quand JeanMichel Bazire a remporté sa première course ? a/ 5 ans b/ 7 ans c/ 10 ans 3. Quelle cote Oyonnax a-t-il fait afficher lors de sa victoire dans le Prix d’Amérique ? a/ 156/1 b/ 172/1 c/ 191/1 4. Quel était le montant de la tirelire lors du Prix d'Amérique 2014 ? a/ 5 millions d’euros b/ 8 millions d’euros c/ 10 millions d’euros


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